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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Le Devoir, Montréal, les 20 et 21 décembre 1984, page 9 — idées

“LE NOUVEAU LIBÉRALISME”


Par Pierre Lemieux
Écrivain et économiste, l'auteur est conseiller économique à Montréal,
[Économiste, professeur associé, Université du Québec en Outaouais]
Email: PL@pierrelemieux.org
I. “La souveraineté de l'individu.” Le Devoir, Montréal, le 20 décembre 1984, page 9 — idées;
II. “Problématique de l’État libéral”, Le Devoir, Montréal, le 21 décembre 1984, page 9 — idées.

I. “La souveraineté de l'individu.”
Le Devoir, Montréal, le 20 décembre 1984, page 9 — idées;

Évidemment, je prends le terme “libéral” au sens français, et non au sens américain qu'ont assumé nos partis politiques soi-disant libéraux mais en réalité sociaux-démocrates. Le libéralisme couvre un vaste éventail philosophique qui va du libéralisme classique à l'anacho-capitalisme (voir mon Du libéralisme à I'anarcho-capitalisme, Paris, Presses universitaires de France, 1983). Aux antipodes du collectivisme et de l’étatisme, le libéralisme est un individualisme qui affirme la primauté de l’individu sur la société, la souveraineté de l’individu. 

L’inadmissible souveraineté de l’État 

Tout à l'opposé, Staline, Hitler, Mussolini et Olaf Palme partagent une croyance commune: l'effacement nécessaire de l'individu devant les exigences collectives, c'est-à-dire la souveraineté de l’État. 

Pour un libéral, la souveraineté de l’État, y compris de l’État démocratique, est inadmissible. De quel droit, grand Dieu!, un groupe d'hommes auraient-ils tous les droits à l’égard des autres ? Pour les protéger? Mais alors qui les protégera contre leur protecteur? Au lieu de permettre aux mieux intentionnés de faire tout le bien dont ils se croient capables, un régime libéral est conçu de manière à empêcher les pire de faire tout le mal que le pouvoir rend possible. 

La souveraineté de la majorité ne peut davantage se réclamer du consentement libre et unanime des gouvernés en vertu d'un contrat social à la Rousseau. En effet, un individu rationnel ne confierait pas un pouvoir illimité à une majorité de peur de se retrouver plus tard dans une minorité opprimée. 

Bref, un État libéral ne peut être souverain, c'est-à-dire détenir l'autorité suprême. Mais le libéralisme ne se contente pas de rejeter la souveraineté de l’État; il s'appuie sur trois grandes philosophies de l'individualisme. 

L’efficacité de l’individualisme 

L'efficacité de l’individua­lisme constitue l’un de ces piliers du libéralisme contemporain. La grande leçon, la seule leçon peut‑être, de l'économie est qu'une société fondée sur la souveraineté de l'individu non seulement fonctionne toute seule sans l'intervention constante de l'autorité, mais que l'ordre social ainsi créé est efficace. Le capitalisme en fournit la démonstration éclatante dans le domaine de l'économie. Chacun agissant dans son intérêt personnel sur le marché contribue automatiquement à l’intérêt de tous. 

Cette idée, déjà présente chez les libéraux classiques, a été raffinée par les économistes modernes (dont Milton Friedman), et globalement reformulée par Friedrich Hayek dans sa trilogie Droit, législation et liberté (traduite de l'anglais par Raoul Andouin, en trois volumes, Paris PUF, 1980-1983). Les institutions sociales, y compris le droit, se développent spontanément selon un processus automatique de sélection des plus efficaces. 

L’avant‑garde de la gauche contemporaine redécouvre ce génie d'une société autorégulatrice: “Il est dans l’intérêt général que tous travaillent contre l'intérêt général”, écrit Edgar Morin. 

Dans une perspective libérale, l'intérêt général n'est, en vérité, que l'intérêt commun de tous les individus dans l'existence d'une société où chacun peut poursuivre pacifiquement ses intérêts individuels sur le marché. Contrairement à ce que croient de soi-disant libéraux, l'intérêt général ne se définit pas comme la somme d’intérêts particuliers qui, quand ils s'expriment politiquement, débouchent sur des privilèges coercitifs accordés à certains par l’État (protections syndicales, corporatistes ou douanières, par exemple). 

Individualisme ne signifie pas nécessairement égoïsme, et l'altruisme spontané est une vertu constitutive d'une société libre. Et c'est, au contraire, à mesure que l'emprise de l'État armé empiète sur la société civile que s'effacent le sens personnel de la responsabilité civique ainsi que' les solidarités naturelles de la famille et des associations privées. 

Un contrat social unanime 

Le contractualisme représente la deuxième grande théorie individualiste. 

Par définition, le contrat exige l'unanimité des contractants, garantissant ainsi les avantages de chacun. La souveraineté de l'individu se justifie alors par l'axiome que personne ne sait mieux que l'individu ce qui est bon pour lui ou, à tout le moins, qu'on ne sait pas qui sait mieux ou dans quels cas. Une société contractualiste, où chaque individu compte réellement pour un, est indiscutablement supérieure à une société majoritariste, où certains individus imposent à d'autres des contraintes qui ne sont pas acceptées individuellement et librement. 

D’où l’idée d’étendre le contractualisme économique au niveau politique: que personne ne soit soumis à une obligation légale à laquelle il n'a pas lui‑même, individuellement, consenti. C'est ce problème, si mal résolu par Hobbes et Rousseau, que reprend la théorie du contrat social unanime de James Buchanan, père de l'école du public choice (voir Buchanan, The Limits of Liberty. Between Anarchy and Leviathan, Chicago, University of Chicago Press 1974). 

À partir d'une situation hypothétique d'anarchie, les droits de propriété naissent des incitations d'individus rationnels à réduire leurs dépenses mutuelles de pillage et de protection. Un contrat constitutionnel est signé à l'unanimité qui définit des droits de propriété et, en un deuxième temps, crée un État protecteur de ces droits, qui lui sont donc antérieurs et supérieurs. L’État protecteur est constitutionnel et non pas démocratique, puisque le seul État que des individus souverains accepteraient est un État limité. 

Le même contrat confie à l’État une mission d'un tout autre ordre: produire certains biens qui sont présumément désirés par tous mais dont le caractère public rend difficile leur financement libre sur le marché (voir le second article de cette série). Dans ce rôle, l'État producteur agit selon des procédures démocratiques requérant moins que l'unanimité afin de contourner le problème des passagers clandestins, c'est‑à‑dire de ceux qui voudraient jouir des biens publics sans en payer leur part. On ne peut justifier d'arrangements politiques majoritaristes que comme une approximation, d'unanimité. 

Les contractants hypothétiques ont le dos large: voilà bien le problème majeur de toute théorie politique contractualiste. Ainsi, Buchanan soutient que le contrat social peut justifier la redistribution: certains individus à qui leur habileté naturelle au pillage fait préférer l'anarchie hobbésienne exigeront des plus faibles une compensation redistributrice avant de consentir à déposer les armes. Autrement dit, redistribuons-leur une partie de nos revenus “de peur qu'ils ne viennent casser les vitres chez nous”. 

Les droits individuels 

Peut-on légitimer un contrat social conceptuellement unanime mais auquel certains individus n'adhèrent que sous la menace d’être autrement agressés et expropriés par les plus forts ou les plus nombreux? Un contrat fondé sur l'intimidation n'a aucune valeur. De plus, il s'agit d'un seul dissident ou même d'un seul anarchiste minoritaire entretenant envers l’État une sainte horreur morale pour rendre l'unanimité impossible. 

Ici intervient la longue, diverse et fructueuse tradition libérale des droits de l'homme, qui fournit une troisième justification à la souveraineté de l'individu. Les droits de l'homme sont des droits individuels inviolables, qui préexistent à tout contrat et qui protègent également chaque individu (fort ou faible, riche ou pauvre, homme ou femme) contre la coercition d'autrui. 

D'où viennent ces droits individuels.? Des stoïques grecs à Hugo Grotius, John Locke, Robert Nozick (Anarchy, State and Utopia, New York, Basic Books, 1974) et Murray Rothbard, la tradition rationaliste du droit naturel les conçoit comme dérivant de la nature de l'homme. Ainsi, pour Rothbard, c'est un fait naturel que chaque individu possède le contrôle inaliénable de son cerveau et de son corps, d'où il s'ensuit qu'il en est le propriétaire absolu, qu'il a le droit naturel de défendre cette propriété (contre l'esclavage ou. disons, la négligence criminelle d'une compagnie chimique qui déverserait des produits dangereux sur lui) et qu'il devient propriétaire de tout ce n'est pas déjà possédé et qu'il annexe à sa personne par son travail (Murray Rothbard, The Ethics of Liberty, New York, Atlantic Highlands, Humanities Press, 1982). 

Le problème philosophique qui se pose ici est bien connu: comment justifier ce qui doit être par ce qui est, dériver des valeurs à partir des faits, des énoncés normatifs à partir de constatations positives ? Si on ne peut nier la nature, ne peut-on pas, ne doit-on pas, en corriger certaines conséquences? 

Ultimement, comme la logique et les mathématiques, les droits individuels reposent peut-être sur des fondements axiomatiques. Certains libéraux, du reste, ont renoncé à leur trouver des fondements naturels immuables, se contentant comme Émile Faguet de les affirmer contre l'alternative inacceptable de la souveraineté de l'État (voir Le libéralisme, Paris, Société française d'imprimerie et de librairie, 1902). 

D'une manière ou d'une autre, la, théorie du droit naturel soutient que l’individu a des droits antérieurs et supérieurs aux lois positives, et que celles-ci doivent être jaugées en fonction de ceux-là. A Nuremberg, les officiers allemands ne pouvaient se disculper en montrant qu'ils obéissaient aux ordres d'un gouvernement légal. D'Alexis de Tocqueville à Charles Beudant et Georges Ripert, la tradition juridique libérale a toujours soutenu la primauté des droits individuels. 

Le commun dénominateur des grandes théories contemporaines de l'individualisme libéral se trouve dans la liberté de l'individu de poser, sur sa propriété ou avec le consentement du propriétaire, toute action non violente ou frauduleuse. L’individu est souverain. 

À SUIVRE

Quels sont les fondements théoriques du grand courant libéral actuel (parfois appelé “néolibéral”) ? Quel rôle s'ensuit pour un État respectueux de la liberté individuelle ? Ces deux courts articles visent à résumer l'apport de la problématique libérale contemporaine à la question de l'individu devant l'État. 


II. “Problématique de l’État libéral”,
Le Devoir, Montréal, le 21 décembre 1984, page 9 — idées.


L’idéal libéral est l'anarchie, cette “anarchie ordonnée” (Buchanan) que produit la liberté individuelle. Mais même si des services de protection privés ne sont pas inconcevables, l'anarchie pose plusieurs problèmes (voir mon Du libéralisme à l’anarcho-capitalisme, Paris, Presses universitaires de France, 1983). À regret, on recourt à un État minimal pour protéger la souveraineté de l'individu: c'est l’État libéral. 

Les principes de l’État libéral 

De notre revue des théories individualistes, se dégagent trois grands fondements de l'État libéral: 

1) Les droits individuels: l'individu est souverain, tout individu jouit de droits individuels égaux qui priment tout. Les individus ont l'obligation de contribuer à la protection de ces droits, ce qui définit la fonction essentielle de l’État. 

2) L'unanimité constitutionnelle: tout arrangement coercitif doit, au moins conceptuellement, recueillir l’assentiment unanime de tous les individus qui respectent le droit, ce qui exige un État constitutionnellement limité par une véritable charte des droits (à l'opposé des parodies qui nous en tiennent lieu). 

3) L'ordre social spontané: ces conditions satisfaites, l'État se gardera d’interférer avec l'ordre spontané que crée la liberté. L’État garantit les règles du jeu en assurant le respect des droits de propriété. 

De ces grands fondements théoriques, on peut, en retour, dériver quelques principes pratiques pour délimiter le domaine de l'État libéral:

 

Le principe des solutions privées: on favorisera toujours des solutions privées, même aux problèmes publics.
 
• Le principe de la décentralisation politique: quand des solutions purement privées sont impraticables, on visera ce que Gustave de Molinari appelait “la liberté de gouvernement“ en instituant une décentralisation maximale de l’État. La responsabilité des divers niveaux de gouvernement (par exemple: fédéral, provincial, municipal ou communal) dans l'organisation des services publics sera en raison inverse de leur extension territoriale, les gouvernements supérieurs servant essentiellement à protéger les individus contre la tyrannie du village. Les gouvernements “les plus près du peuple” offrent l'avantage principal d’être plus faciles à déserter, et leur concurrence profite aux individus.
 
• Le principe du fardeau de la preuve: on évitera de juger chaque demande d'intervention “à son mérite”, selon un pragmatisme que vantait Mussolini; au contraire, la constitution imposera une puissante présomption en faveur du laissez-faire, le fardeau de la preuve reposant toujours sur ceux qui veulent limiter la liberté individuelle.

 

L’État libéral est donc un État minimal, un État-veilleur-de-nuit, comme disaient les libéraux français. Plusieurs implications claires en découlent, dont l'illégitimité de tout monopole ou privilège accordé par l’État à une corporation, une compagnie (privée ou publique) ou un syndicat; et l’illégitimité du contrôle, de la réglementation et de la normalisation de l'économie. Les deux seuls problèmes réels qui interpellent la théorie libérale concernent les biens publics et la sécurité sociale. 

Le problème des biens publics 

Économiquement, un bien public se définit par deux caractéristiques particulières: 1• sa consommation par une personne ne limite pas la consommation d'autrui, et 2• l’exclusion de ceux qui ne paient pas leur part des coûts de production est difficile sur le marché. D'où le fameux problème des passagers clandestins: chaque individu a intérêt à cacher ses préférences véritables en espérant faire financer sa consommation par son voisin. La théorie économique orthodoxe conclut qu'un tel bien ne sera pas produit en quantité optimale sur le marché. 

Pourtant, cet argument des biens publics ne justifie pas aussi facilement qu'on le croit l'intervention de l'État. 

D'abord, les biens publics purs ne courent pas les rues. À part la dissuasion qu'offre la protection publique, on pense à certaines qualités de l'environnement (le civisme, la pureté de l'air, peut-être la stabilité politique et économique d'une société libre) ou à certains ouvrages publics comme les digues ou barrages pour le contrôle des crues. Mais la plupart des biens que l'habitude de l'État assimile à des biens publics peuvent être produits et consommés privément, de l'enlèvement des ordures ménagères (qui n'a rien d'un bien public) jusqu'à la signalisation maritime (l’exemple classique des phares a été déboulonné par Ronald Coase et Murray Rothbard). 

Quant aux biens publics impurs, ils sont innombrables: des relations civilisées en général jusqu’à la vue d'une belle femme (sexistement déshabillée des yeux, comme disent les nouveaux obscurantistes). Or l’existence d'un bien plus ou moins public ne justifie pas nécessairement que l’État intervienne pour le produire. 

En effet, l'évaluation d'un bien étant forcément individuelle, subjective et variable, l’État ne peut savoir dans quelle mesure un individu qui refuse de participer au financement d'un bien public ne juge pas sincèrement que, pour lui, les avantages n'en valent pas les coûts. 

De plus, l'action politique et l'intervention étatique comportent leurs propres coûts, souvent plus pénalisant que les failles de la coopération libre. Ces inconvénients de l'étatisme incluent l'institutionnalisation de la concurrence sauvage des groupes de pression organisés sur le marché politique, et la corporatisation de la société qui en résulte (voir, par exemple, Jean-Luc Migué, L’économiste et la chose publique, Québec, Presses de l'Université du Québec, 1982). 

Enfin; n'oublions pas le principe des solutions privées, puisque plusieurs existent au problème des biens publics: 1• les droits de propriété privés, à créer là où ils n’existent pas; 2• l'entrepreneurship, qui privatise l'environnement avec des moyens comme les clauses d'adhésion, véritable zonage privé; ou qui produit des biens publics à des fins publicitaires comme les feux d'artifice offerts tous les soirs aux habitants de Copenhague par le parc Tivoli; 3• les associations et clubs; 4• les pressions sociales; etc. 

Autant que possible, la responsabilité des quelques biens publics restants doit être confiée aux niveaux inférieurs de gouvernement. Ainsi, les individus insatisfaits n'auront qu’à changer de commune, la concurrence parmi les gouvernements locaux limitant la coercition tout en assurant la production des biens publics réellement demandés. 

Le problème de la sécurité sociale 

On ne peut admettre la redistribution délibérée ou “pure” (selon la terminologie de Bertrand de Jouvenel) du revenu par l’État. Dans une société libre, le revenu se produit et se répartit sans intervention autoritaire, comme le résultat de la constellation multiple des actions individuelles. Une égalisation où toute forme de redistribution pure du revenu par l’État viole les droits individuels et ne saurait être acceptée constitu­tionnellement à l'unanimité par des individus rationnels voulant limiter l’État (sinon comme résultat d'un chantage coercitif). 

Autre chose est la redistribution indirecte, par incidence, comme sous-produit d'un objectif différent — toute dépense étatique, même la protection publique, étant indirectement redistributive. On peut ainsi considérer comme redistribution indirecte du revenu deux fonctions étatiques regroupées sous le terme de “sécurité sociale”: 1• l’assistance minimale aux pauvres, à ces cas marginaux qui subsisteraient après la disparition de la pauvreté causée par les interventions actuelles de l’État et après l'apport de la charité privée; et 2• les assurances sociales contre des risques involontaires et non assurables privément (certains handicaps de naissance, par exemple). 

Pouvons-nous imaginer un contrat constitutionnellement unanime prévoyant des assurances sociales obligatoires ? C'est loin d'être évident, puisque les droits individuels supposent le droit de tout individu minoritaire de n’y pas participer. 

Le libéral rationalisera moins difficilement la fonction d'assistance minimale et sélective aux pauvres, dans la mesure où l'évitement du spectacle de la misère peut être considéré comme un bien public. Demeure quand même le double problème de l'évaluation des préférences réelles de chaque individu et des droits du dissident minoritaire. 

Aux frontières de la théorie individualiste, trois voies de sortie semblent s'offrir à l’État libéral. Premièrement, la protection des droits individuels peut justifier que l’État assure aux enfants pauvres certaines garanties minimales pour la jouissance future de leurs droits. Deuxièmement, si les programmes d'assurances sociales relevaient de la juridiction des administrations locales, chaque individu signerait presque son propre contrat social en choisissant la commune qui offre sa combinaison préférée d'impôts et d’assu­rances sociales. Enfin, on peut envisager d'autres formules d’opting-out individuel. 

L'individualisme civilisateur a amené les anciens barbares à admettre la diversité des opinions, puis des choix économiques individuels. Stoppé par la barbarie à visage humain de l'État-Providence au cours des dernières décennies, ce progrès renaissant permettrait à l'État libéral de continuer à réduire la coercition dans les affaires humaines. 

Pouvons-nous espérer un jour “éteindre l'État” (selon la malheureuse formule de Lénine) dans des domaines où un État minimal nous apparaît aujourd'hui inévitable ? Nul ne le sait et il faut se garder autant d'un millénarisme naïf que du pragmatique cynisme de nos politiciens actuels. Mais le libéral sait une chose: l'individu est l'avenir de l'homme.

FIN



Voir la réplique de M. Yves Vaillancourt, philosophe, professeur de philosophie au Collège Ahuntsic, Montréal: “
L’illusion libérale ou la bonne exploitation d’une philosophie bon marché”. Un article publié dans le journal Le Devoir, Montréal, le 9 janvier 1985, page 8 — idées.


Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le mercredi 10 septembre 2008 8:13
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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