RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les auteur(e)s classiques »

Une édition électronique réalisée à partir du livre sous la direction de Claude Savary, Les rapports culturels entre le Québec et les États-Unis. Québec: Institut québécois de recherche sur la culture (IQRC), 1984, 353 pp. [Livre diffusé en libre accès à tous dans Les Classiques des sciences sociales avec l'autorisation de l'auteur accordée le 25 mai 2021.]

[5]

Les rapports culturels entre le Québec
et les États-Unis.

Yves ROBY, “Un Québec émigré aux États-Unis : bilan historiographique.” [103]

Commentaire, par Pierre ANCTIL [131]
Commentaire, par Claire QUINTAL, « Ces autres vous-mêmes » [139]

[103]

Première partie.
Perspectives historiques, des origines
à la deuxième guerre mondiale

4

Un Québec émigré aux États-Unis:
bilan historiographique
.”

Par Yves ROBY

Historien, Institut d’histoire,
Université Laval

[104]

[105]

De 1840 à 1930, environ 900 000 personnes ont quitté le Québec pour gagner les États-Unis. La plupart s’établirent dans les principaux centres industriels des états du Nord-Est. Ce phénomène, central dans l’histoire du Québec et de la Nouvelle-Angleterre, n’attire que depuis peu l’attention des universitaires canadiens et américains. Un nombre sans cesse croissant de thèses et d’études spécialisées paraissent chaque année des deux côtés de la frontière. Ce serait pourtant une erreur grave de ne tenir compte que des travaux de ces chercheurs. Pour l’avoir fait dans le passé, les auteurs de manuels sur l’histoire de l’immigration aux États-Unis ont ignoré le fait franco-américain ou n’en ont fait mention que dans quelques références au bas de pages. Jacques Ducharme le déplorait déjà en 1943 [1]. Plus près de nous, Richard Sorrell [2] fait le même constat. Il faut donc ajouter à cette littérature scientifique récente les centaines, pour ne pas dire les milliers de commentaires, d’études et d’analyses que nous ont laissés les observateurs, les témoins et les acteurs de cette épopée. Dans un livre combien utile, « A Franco-American Bibliography. New England », Pierre Anctil a recensé plus de 800 des uns et des autres et encore il fait remarquer qu’une bibliographie exhaustive et méthodique en comprendrait peut-être cinq fois plus [3].

Dans les circonstances, la demande des organisateurs de ce colloque de « faire le point sur l’état des recherches » concernant le fait franco-américain a de quoi effrayer les plus téméraires. Car tracer un bilan suppose que l’on a lu ou s’est familiarisé avec les études les plus marquantes, que l’on a une connaissance satisfaisante de l’évolution du groupe étudié afin d’être en mesure d’en faire ressortir les points forts et les points faibles. Les travaux des spécialistes, invités en mars 1980, dans le cadre du Premier Colloque annuel de l’Institut français du Collège de l’Assomption de Worcester, Massachusetts, à faire le bilan de « La situation de la recherche sur la Franco-américanie » nous seront d’une grande utilité, bien qu’ils aient été préparés dans une perspective très différente de la nôtre [4]. Les conférenciers à ce colloque ont en effet choisi de ne discuter que de la production récente alors que notre intention est de considérer l’ensemble de la littérature sur le sujet. Notre but, pour être plus précis, est d’en expliquer la nature et la portée en la replaçant dans le contexte qui l’a produite.

Jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, la majorité des livres et articles consacrés aux Franco-américains de la Nouvelle-Angleterre ont été écrits par des prêtres, des religieux ou des journalistes impliqués dans la lutte pour la promotion et la survivance du fait français en Amérique du Nord. C’est une littérature élitiste, profondément engagée et essentiellement centrée sur le thème de la survivance. Cela est moins vrai après 1945 alors que de plus en plus de sociologues, d’anthropologues, d’économistes, de géographes, de linguistes, d’historiens, etc., utilisant de nouveaux matériaux et des méthodes d’analyse beaucoup plus sophistiquées, occupent progressivement le champ de la recherche. Les multiples facettes de la vie franco-américaine, de l’élite comme de la classe ouvrière, et non plus seulement les thèmes reliés à la survivance, accaparent l’attention des chercheurs.

[106]

Fixons clairement les limites de ce travail. Il n’y sera question que de la présence française en Nouvelle-Angleterre, exception faite des Acadiens, au nombre d’environ 50 000, qui y côtoient leurs compatriotes du Québec. L’émigration au XIXe siècle d’environ 150 000 Québécois d’expression française vers les états du Mid-West de même que les départs plus récents vers les cieux plus ensoleillés de la Floride et de la Californie seront ignorés.

Bilan critique

Des origines à 1945 :
une littérature engagée


À ses débuts, la littérature sur le fait français en Nouvelle-Angleterre est fortement influencée par les débats que suscitent au Québec le phénomène de l’émigration et aux États-Unis le processus d’intégration des immigrants à la société américaine. Les auteurs d’études, de monographies et de synthèses y puisent non seulement les thèmes de leurs ouvrages mais l’essentiel de leurs interprétations. Voyons les choses de plus près.

De 1840 à 1870, près de 200 000 Québécois [5], selon les observateurs les plus dignes de confiance, franchissent la frontière américaine. Même si alors ces mouvements migratoires ont souvent un caractère saisonnier et temporaire, il est facile de comprendre l’inquiétude et la panique qui s’emparent alors des élites et des classes dirigeantes. Près de 70 000 Québécois auraient émigré durant la seule décennie 1850 ; c’est près de 15 000 personnes de plus que n’en compte alors Montréal, la ville la plus populeuse du Québec.

Pour freiner cette hémorragie qui à long terme pouvait menacer la survie même du groupe canadien-français, les milieux dirigeants s’agitent. Les autorités multiplient les enquêtes [6], discutent, prônent la colonisation, tentent de supprimer les obstacles qui en freinent les progrès et luttent pour le rapatriement. Peine perdue ! C’est comme si les masses laborieuses québécoises, aux prises avec des difficultés économiques insurmontables, ne voyaient de solutions à leurs maux que dans l’appel des « facteries ». L’image d’une Amérique pavée d’or, d’une sorte de « Terre promise », gagne les coins les plus reculés de la Province.

Incapables de supprimer ce fléau, les élites s’efforcent de le discréditer. Elles attribuent l’émigration au goût du luxe, à l’ivrognerie, à la paresse, à l’imprévoyance, qui à les en croire seraient des vices répandus à l’échelle du Québec. Ces faiblesses expliqueraient les succès, dans les campagnes, de la propagande mensongère des agents embaucheurs, souvent d’anciens Québécois, à la solde des industriels américains et les vantardises des exilés de passage au pays. L’émigré est présenté comme un faible qui succombe au mirage américain, un lâche qu’effraient les durs travaux de la colonisation et un traître à la terre des aïeux. Et un naïf ! Car l’Amérique est riche, certes, mais grâce au travail de ces nouveaux esclaves qui peinent et ruinent leur santé dans les usines insalubres de la Nouvelle-Angleterre. [107] Quelle triste et pénible vie comparée aux avantages idylliques qu’offre la campagne québécoise ! L’Amérique c’est aussi la ville, le royaume des forces infernales, où, laissé à lui-même, l’exilé perd sa foi et trahit sa nationalité.

Dans un ouvrage d’une grande érudition L'image des États-Unis dans la littérature québécoise (1775-1930), Guildo Rousseau consacre de très belles pages à l’image on ne peut plus sombre que la littérature de l’époque donne de l’usine et de la ville américaines et des causes de l’émigration [7]. Un lecteur qui voudrait des vins du cru lira les textes de Hamon, Mgr Thomas Cooke, Provancher, Rouleau, Suite [8].

L’émigration prend des proportions si considérables que les élites, impuissantes à l’enrayer, traduisent et subliment leur désarroi dans le mythe de la vocation missionnaire et providentielle du Canada français. Ce mythe dont on peut sans doute attribuer l’inspiration à Rameau de Saint-Père ne manque pas de chantres éloquents aux XIXe et XXe siècles. « L’émigrant français aux États-Unis, déclare l’un d’eux, l’honorable J.-A. Chapleau, aux Noces d’or de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, comme le colon canadien dans l’Ontario, est un avant-garde, un éclaireur de la grande armée d’invasion dont M. Rameau nous a prédit la victoire pour le siècle qui va suivre [9] ». « Ne dirait-on pas, poursuit le sénateur F.-X.-A. Trudel, lors des mêmes cérémonies, qu’elles [ces migrations] ont été les corps expéditionnaires lancés par la Providence à la conquête de tout l’ancien territoire découvert par nos pères et arrosé par le sang de nos martyrs [10] ».

Pour encadrer ces pionniers de l’expansion française qui s’efforcent de recréer aux États-Unis l’image de la patrie canadienne avec ses églises, ses écoles, ses sociétés, ses journaux et ses traditions, l’Église du Québec, à compter de la Guerre civile, envoie des centaines de prêtres, de religieux et de religieuses. Ils seront, aux côtés des leaders franco-américains, de toutes les luttes, de tous les combats, contre les dangers qui menacent les jeunes communautés. Dans leur opposition constante à l’épiscopat irlandais à propos des paroisses, des écoles françaises et du clergé « national », ils auront l’appui de grands journalistes québécois, des évêques du Québec et de leurs experts canonistes qui porteront leur cause jusqu’à Rome [11]. Pour les élites québécoises, le Canada français est une réalité qui déborde les frontières du Québec. Dans la lutte pour la survivance contre les forces assimilatrices ambiantes et en particulier les visées de l’épiscopat irlandais, le Québec est le bastion et les groupes dispersés de la diaspora les avant-postes. Tous ont conscience que s’y livrent des batailles, s’y déroulent des événements vitaux pour l’avenir du Canada français. « Vous serez aux États-Unis les sentinelles avancées de la patrie commune, le paratonnerre destiné à détourner les orages qui pourraient fondre sur vos compatriotes du Canada », déclare Sir A. Chapleau, devant un auditoire de Salem en 1897 [12]. « Si, déclare avec force Henri Bourassa, en 1914, à un banquet en l’honneur d’Aram Pothier, nous laissons sacrifier une par une les minorités françaises qui sont nos avant-postes le jour viendra où la province de Québec elle-même subira l’assaut... [13] »

[108]

C’est une image fort complexe que renvoient aux Franco-américains les élites québécoises. L’attitude des Américains et de l’épiscopat irlandais ne fait que compliquer les choses. L’arrivée des Québécois s’inscrit dans une sorte de tourbillon qui, de 1860 à 1900, amène 14 millions d’étrangers aux États-Unis. Alors qu’au début, les Anglais, les Allemands, les Scandinaves et les Irlandais constituent l’essentiel des arrivants, ce sont les Italiens et les Européens de l’Est qui par la suite fournissent les plus forts contingents. Très pauvres, la majorité de ces derniers s’installent dans les villes où ils forment une partie impressionnante du nouveau prolétariat urbain.

Ces nouveaux venus, auxquels s’apparentent les Franco-américains, inquiètent et provoquent le ressentiment de nombreux Américains comme l’avaient fait auparavant leurs prédécesseurs irlandais. La chose n’étonne guère puisqu’ils sont majoritairement catholiques dans un pays protestant. Parce que d’autre part ils se satisfont de peu, les ouvriers les accusent de faire baisser les salaires et d’être les instruments dociles des patrons. Enfin, on craint que ceux qui ne se contentent pas d’être des oiseaux de passage ne puissent se fondre dans le creuset américain et ne menacent ainsi les valeurs traditionnelles et les institutions américaines. Le « nativisme » américain connaît des hauts et des bas, l’anticatholicisme de la fin du XIXe siècle et le « one hundred percent Americanism » de la période de la Grande Guerre et de l’après-guerre étant les points forts [14].

C’eût été étonnant que les Canadiens français qui constituent une partie fort importante des nouveaux arrivants échappent aux mouvements de xénophobie qui secouent la société américaine. Surtout au début, on les présentera comme des êtres vils, ignorants, pauvres, des marionnettes entre les mains d’un clergé contrôlé de l’étranger, comme des oiseaux de passage dont le comportement constitue une sérieuse menace au niveau de vie des ouvriers américains et aux institutions du pays. Certaines vantardises lors des célébrations de la Saint-Jean-Baptiste et affirmations sur la mission providentielle des Canadiens français alimentent ces courants d’opinion. L’incident des « Chinese of the Eastern States », au début des années 1880, est très révélateur à cet égard [15] de même que la propagande du Révérend Calvin E. Amaron [16] qui dans ses écrits présente les immigrants québécois, beaucoup plus nombreux que ne l’indiquent les statistiques officielles, comme des êtres superstitieux, ignorants, totalement sous la coupe des prêtres, ennemis acharnés du protestantisme. Il rappelle que leurs dirigeants évoquent le jour où une partie de la Nouvelle-Angleterre sera annexée au Québec. Ce groupe, souligne-t-il, est à créer une Nouvelle-France à même le territoire américain.

Ces courants de pensée sont-ils répandus en Nouvelle-Angleterre ou ne sont-ils le fait que d’une minorité ? En l’absence d’études sérieuses sur la question, personne ne peut l’affirmer avec certitude. Les observateurs constatent néanmoins qu’au tournant du siècle et jusqu’à l’explosion d’intolérance qui durant la guerre et l’après-guerre menacera l’enseignement des langues étrangères et l’existence des écoles confessionnelles aux États-Unis, l’Américain moyen a une image positive [109] des Franco-américains. On le perçoit comme frugal, industrieux et fiable. L’Italien, le Polonais, le Juif l’ont remplacé comme cibles favorites des nativistes américains [17].

Parce que catholiques, les Irlandais seront pendant longtemps la cible de prédilection des nativistes américains. Quoi d’étonnant dès lors à ce que l’épiscopat irlandais ait cru que l’assimilation des catholiques étrangers soit de nature à atténuer l’hostilité dont les groupes catholiques étaient régulièrement l’objet. Les divisions à ce sujet parmi les évêques irlandais sont plus apparentes que réelles. Certains préconisent une assimilation rapide et des actions énergiques alors que d’autres, craignant l’apostasie, acceptent l’établissement, sur une base temporaire, de paroisses nationales et l’enseignement d’une langue autre que l’anglais dans les écoles paroissiales. Ils sont en quelque sorte partisans d’une assimilation progressive et en douceur.

Les Franco-américains, tout comme leurs compatriotes d’origine allemande et polonaise, combattent farouchement les visées assimilatrices des évêques irlandais, majoritaires au sein du haut-clergé américain. Ils sont des adversaires acharnés de la théorie du « melting pot » et les promoteurs avant le temps du pluralisme culturel. Pour eux qui voient dans les paroisses nationales, l’enseignement du français dans les écoles paroissiales et un clergé « national », des conditions essentielles à leur survivance, la guerre est inévitable. Conseillés, dirigés et appuyés plus ou moins ouvertement par le clergé du Québec, ils livrent de nombreuses et spectaculaires batailles, Fall River, Danielson, North Brookfield, Portland et Woonsocket n’étant que les plus connues.

Les considérations qui précèdent nous serviront de grille pour lire et comprendre la littérature sur les Franco-américains qui s’inscrit d’emblée dans les débats que suscitent au Canada et aux États-Unis les phénomènes de l’émigration et de l’expansion française en Nouvelle-Angleterre. Pour ne pas noyer le lecteur sous une avalanche de titres, nous n’analyserons que les études les plus marquantes, à caractère historique, nous contentant à l’occasion de faire allusion à l’un ou l’autre des innombrables commentaires, discours, conférences et articles de journaux consacrés au sujet. Que trouve-t-on dans cette littérature ?

Une vigoureuse réfutation de l’interprétation que l’on donne en certains milieux québécois des causes de l’émigration. Non, les Canadiens émigrés ne sont pas des déserteurs, des lâches, des fainéants, des dévoyés. Voilà d’abord ce que disent Honoré Beaugrand, Thomas-Aimé Chandonnet, Hugo-A. Dubuque, Édouard Hamon, Edmond de Nevers, Télesphore Saint-Pierre, Jean-Frédéric Audet et bien d’autres [18]. C’est essentiellement la misère, la famine même, dira Honoré Beaugrand, et l’incapacité des autorités québécoises à résoudre leurs problèmes qui poussent les Canadiens français à l’exil. Que l’on cesse par ailleurs, écrivent-ils, de peindre les émigrés sous les jours les plus sombres, de les présenter comme des esclaves au service de maîtres impitoyables, et des catholiques en voie de perdre leur langue et leur religion. Certes, ils ne vivent pas dans le luxe mais leurs [110] conditions de vie sont meilleures que celles qu’avait à leur offrir le Québec. C’est essentiellement, ce qu'en grande pompe, des délégations d’émigrés viennent dire aux Québécois lors des grandes célébrations patriotiques de 1874, 1880 et 1884 [19], et ce qu’ils se disent entre eux lors de leurs conventions nationales aux États-Unis [20]. Ils sont 18 000 qui envahissent Montréal en 1874 à l’occasion des fêtes marquant le quarantième anniversaire de la Saint-Jean-Baptiste de Montréal. Ferdinand Gagnon, le « père » du journalisme franco-américain, veut que l’on voit en eux « les avant-gardes et non les fuyards ou les déserteurs » de la nationalité canadienne-française [21].

Ces auteurs n’en déplorent pas moins le départ de tant de Québécois, dans lequel ils voient un réel affaiblissement pour le Québec. Ils lutteront, certains avec moins de conviction que d’autres, en faveur du rapatriement que prêche officiellement le gouvernement du Québec depuis la loi de 1875.

Ces auteurs témoignent ensuite des efforts que font les communautés canadiennes-françaises pour recréer en Nouvelle-Angleterre des Petits Canadas avec leurs églises, écoles, sociétés, journaux et fête nationale. C’est l’élite, y lit-on, et notamment le clergé qui œuvre le plus à assurer la pérennité de la « patrie morale », l’expression est de Ferdinand Gagnon, à savoir le culte des souvenirs historiques, des traditions, de la foi et de la langue des aïeux. Les lecteurs, désireux de connaître la vie des premiers émigrés y trouveront des renseignements nombreux et précieux. Ceux qui aimeraient cerner davantage la nature et le rôle des grandes institutions comme la paroisse, l’école paroissiale, la presse et le clergé national, puiseront des renseignements supplémentaires dans les études de P.U. Vaillant, Charles Daoust, J. L. K. Laflamme, D.-M.-A. Magnan, Alexandre Belisle, Louis Lalande, Jos.-A. D’Amours, Félix Gatineau, Marie-Louise Bonier, Bruno Wilson et les travaux présentés au Premier Congrès de la langue française au Canada tenu à Québec en 1912 [22]. Ils y trouveront un très grand optimisme sur l’avenir du groupe français en Amérique du Nord, sur la force et le caractère inébranlable des institutions mises en place, en même temps qu’un regard insuffisamment critique sur les indices de réussite des Canadiens émigrés et de leurs descendants, sur les rigueurs de leur sort en terre américaine et sur la qualité de leur vie religieuse et nationale.

L’idée d’une patrie dilatée, très populeuse et aux destinées guidées par la Providence est défendue par quelques auteurs. Ici le rêve l’emporte très nettement sur la réalité. « Au commencement du siècle prochain, ... nous serons 25 000 000 d’âmes », affirme Télesphore Sainte-Pierre [23]. La bagatelle de 96 000 000 en 2059 renchérit D.-M.-A. Magnan [24]. « Les émigrés n’ont pas quitté la patrie, ils l’ont agrandie », écrit Edmond de Nevers [25]. Cela semble indiquer, pense Édouard Ha- mon, après bien d’autres, « une mission providentielle dont l’avenir seul nous révélera toute l’importance [26] ».

Des menaces sérieuses font craindre pour la réalisation de ce rêve. L’assimilation tout d’abord, dont quelques auteurs, en particulier Edmond de Nevers dans L’Ame américaine, font une analyse si pénétrante et dont les monographies paroissiales [111] décrivent les multiples pièges et attraits dans la vie quotidienne des émigrés. C’est une erreur tragique, soutient Edmond de Nevers, que commettent les États-Unis en tentant de fondre toutes les nationalités qui les composent en un melting pot qui fait fi des diverses personnalités nationales. Comme les leaders franco-américains, il prône le pluralisme culturel et soutient qu’on peut être un excellent Américain tout en conservant sa langue, sa religion et des traits essentiels de sa culture d’origine. Pour atténuer l’hostilité des Américains, les différents auteurs recommandent la naturalisation. « Étant naturalisés, ces bons Yankees ne pourraient plus nous cingler de cette fameuse épithète de « Chinois de l’Est », affirme le docteur Camille Côté, lors de la grande convention de Springfield en 1901 [27]. Enfin, durant et après la Première Grande Guerre, la Ligue du ralliement du français en Amérique publiera plusieurs brochures pour alimenter la lutte contre les visées assimilatrices des tenants du « one hundred percent Americanism. [28]

La littérature que nous avons recensée reflète enfin la lutte sans merci que mènent les Franco-américains contre les « persécutions » et l’hostilité de l’épiscopat d’origine irlandaise [29]. C’est toutefois dans la chaire, sur les tribunes des conventions nationales et surtout dans la presse que la bataille fait rage avec le plus d’acharnement. Les combattants sont appuyés par les travaux d’infatigables compilateurs et recenseurs préoccupés non seulement de décrire la croissance et les progrès de leur groupe, l’attachement à leur patrie d’adoption, mais souvent de persuader les autorités religieuses d’établir des paroisses nationales, dirigées par des prêtres de leur « race » et même de justifier le choix d’évêques d’origine canadienne-française [30].

Les leaders franco-américains qui dirigent la résistance se méritent non seulement l’appui mais l’admiration sans équivoque de Québécois influents. C’est que, affirme Adjutor Rivard en 1909, alors secrétaire de la Société du parler français au Canada, « j’estime seulement que vous êtes dans la fournaise, alors que nous avons encore à peine à lutter... [31] ». « Il fut un temps, déclare Henri Bourassa au grand plaisir des congressistes de l’Union Saint-Jean-Baptiste d’Amérique, réunis à Worcester en 1915, où nous allions porter aux exilés le réconfort du patriotisme canadien-français. Il serait plus utile pour nous, aujourd’hui, d’aller demander aux Franco-Américains des leçons de dignité et d'énergie nationales [32] ». « Québec a même cette noble certitude aujourd’hui, écrit Lionel Groulx dans la même veine, qu’en aidant ses frères d’Amérique, il leur prête moins qu’il ne reçoit [33] ». Les deux chefs de file canadiens-français, à l’instar de nombreux compatriotes, allaient s’affronter et soutenir des points de vue très différents lorsque, à l’occasion du conflit des Sentinellistes à Woonsocket, la lutte franco-américaine prit une tournure excessive. La division est de plus en plus manifeste aussi au sein de la communauté franco-américaine, comme l’attestent les travaux de Elphège-J. Daignault, J.-Albert Foisy et les 26 conférences prononcées à CKAC grâce à l’initiative conjointe de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal et de Daignault et que l’A.C.-A. publiera sous le titre « Les Franco-Américains peints par eux-mêmes [34] ».

[112]

Les incidents de Woonsocket laissent des cicatrices profondes. « C’est l’épisode le plus tragique, la page la plus sombre, le seul passage indigne des annales franco-américaines [35] ». Après, rien ne sera jamais plus pareil. Les militants les plus radicaux, ceux qui prônent la survivance de l’héritage canadien-français et refusent tout compromis, cèdent le pas aux éléments plus modérés. Les événements s’y prêtent. En raison de la récession économique, les États-Unis ont pratiquement fermé leurs frontières à l’immigration, privant ainsi les communautés franco-américaines de l’apport vivifiant de nouvelles recrues. La crise enlève aussi aux paroisses, aux écoles, aux journaux et aux sociétés nationales des revenus essentiels. Les indices d’assimilation n’en apparaissent que plus visibles. La belle assurance des années antérieures disparaît. Le discours officiel devient à la fois plus modéré et plus critique.

Les élites, où dominent de plus en plus les représentants des 2e et 3e générations plus intégrés au milieu américain, projettent un regard inquiet et parfois sévère sur la Franco-américanie. Des voix jusque-là étouffées par les éléments plus radicaux se font entendre. Ce sont celles qui depuis le début du siècle soulignent l’inadaptation des jeunes au milieu ambiant, proposent la création d’écoles supérieures aux États-Unis plutôt que l’envoi des jeunes vers les collèges du Québec, demandent des écoles paroissiales mieux adaptées à la réalité américaine, des enseignants plus au fait de ses exigences, souhaitent un apprentissage plus rapide de l’anglais et déplorent enfin une trop grande dépendance à l’égard du Québec. Ce sont encore celles qui, pour atténuer le « nativisme » des Yankees et l’hostilité des Irlando-américains, condamnent le nationalisme exagéré, suggèrent de mettre une sourdine aux élans de patriotisme et font appel à la modération. Elles soutiennent que les fanatiques « nationalistes » sont plus à craindre que les persécuteurs de l’extérieur [36].

Les leaders des années 1930 projettent un regard plus critique que ne l’ont fait leurs prédécesseurs sur la survivance et les institutions nationales. Ils insistent toujours sur le rôle essentiel de la paroisse, du clergé national, des écoles paroissiales et des sociétés mutuelles. La famille franco-américaine est par ailleurs invitée à jouer un rôle plus grand, à devenir la pierre angulaire de la survivance. Mais, et c’est essentiel, ils développent un thème nouveau. Le cadre institutionnel leur apparaît moins menacé de l’extérieur que de l’intérieur. Ils constatent son affaiblissement et l’érosion des valeurs traditionnelles. Le mal est partout : les mariages mixtes affaiblissent la famille, l’anglicisation fait des ravages inquiétants en raison du manque d’enthousiasme des enseignants, de l’apathie des professionnels et des sociétés qui adoptent l’anglais comme langue d’usage ; un grand nombre de paroisses nationales se transforment en paroisses mixtes et le clergé franco-américain n’épouse pas la cause nationale avec la même ardeur que ses devanciers du Québec. Un manque de conviction et d’unité d’action semble saper l’édifice encore solide de la survivance. « Nous n’avons pas à lutter contre l’assimilation franche et ouverte d’autrefois, constate Josaphat Benoît, nous avons surtout à lutter contre notre propre défaillance et une insouciante indifférence de la part de la jeunesse. Voilà notre problème [37] ».

[113]

Ce regard lucide, critique, on le retrouve dans le remarquable travail de Josaphat Benoît [38] et les nombreux travaux, plus de trente, présentés au Deuxième Congrès de la langue française tenu à Québec en 1937 et publiés par Mgr Adrien Verrette dans « La croisade franco-américaine [39] ». On y retrouve aussi beaucoup de foi dans l’avenir et la formulation d'un programme pour inculquer à la jeunesse le culte du souvenir, la fierté nationale et le militantisme des aînés. On retrouve les mêmes préoccupations, plutôt impressionnistes, dans les synthèses de Alexandre Goulet, de Jacques Ducharme, et dans les monographies de Maximilienne Tétrault, de Mary-Carmel Therriault et d’Ulysse Forget [40].

A côté de cette littérature d’expression française, il en existe une autre d’expression anglaise, qu’il convient de présenter pour que le tableau soit plus complet. Les travaux recensés, dus à des universitaires, s’adressent avant tout à un auditoire anglophone que n’atteignent pas les travaux des écrivains québécois et franco-américains, encore moins la presse d’expression française. C’est une situation que déplore le professeur Edward B. Ham et dont il fait reproche à ses amis franco-américains, dès 1937 : « ... la tâche de faire valoir votre survivance aux yeux des Anglo-américains (et des Franco-canadiens) vous incombe uniquement à vous [41] ». Il est toutefois difficile pour l’époque d’imaginer meilleurs interprètes et à l’occasion défenseurs que William Macdonald, A.R.M. Lower, Edward B. Ham, R.A. Foley, Granville T. Prior et Marcus Lee Hansen [42].

Tous, impressionnés par le phénomène de la survivance franco-américaine, tentent de l’expliquer, certains par une approche globale, d’autres par l’étude de facettes plus limitées. Les synthèses ambitieuses de Foley et de Prior ont beaucoup vieilli. C’est moins le cas des autres études. Beaucoup d’historiens d’aujourd’hui accepteraient volontiers de signer l’étude très fouillée et remarquablement construite de Marcus Lee Hansen sur les mouvements de population entre le Canada et les États-Unis. Dans l’étude des causes de l’émigration, il met, à bon droit, une emphase spéciale sur le pouvoir d’attraction des industries de la Nouvelle-Angleterre. C’est aussi ce que fait Macdonald qui, dans son article, brosse un portrait du groupe franco-américain tout à fait opposé à celui qu’en donnent les auteurs nativistes. Il soutient que le nombre en a été exagéré et qu’à long terme ces immigrants se fondront dans la société américaine. L’ouvrier franco-américain, économe, frugal, habile, peu revendicateur, encadré par un clergé influent, est décrit comme menant une existence ordonnée et paisible. Quant au professeur Ham, ardent promoteur du pluralisme culturel, il constate, à l’instar des écrivains franco-américains des années 1930, les dangers qui menacent la survie du groupe et s’inquiète de son avenir. Fait intéressant : il souligne, et il est un des rares à l’époque, que les institutions comme la presse et les sociétés, décrites comme des outils privilégiés de la survivance, constituent aussi des facteurs importants d’acculturation.

[114]

De 1945 à nos jours : une vision plus complète
et rigoureuse de l’expérience franco-américaine


Pour bien comprendre les caractéristiques de la littérature sur les Franco-américains qui connaît un essor sans précédent durant les années d’après-guerre, il faut, comme pour la période antérieure, la replacer dans le milieu qui l'a produite. Des transformations en profondeur affectent la communauté franco-américaine, la société américaine en général et le monde de la recherche. Contentons-nous d’en décrire les plus apparentes.

« Le « melting pot », cette mirifique marmite américaine, semble avoir fait un ragoût des Franco-américains avec les autres nationalités ». Voilà le constat brutal que propose Jacques Ducharme aux participants d’un colloque tenu en 1976 pour discuter de l’état de la Franco-américanie et des perspectives d'une renaissance [43]. Cette opinion indique bien le chemin parcouru depuis l'implantation des Petits Canadas en Nouvelle-Angleterre au XIXe siècle. Les déplacements massifs de populations causés par la guerre, les transformations économiques régionales et les programmes de rénovation urbaine ont affaibli les groupements franco-américains dont les membres subissent la séduction constante de « l'image américaine » que véhiculent la radio, la télévision, le cinéma et le milieu ambiant. Certes, la Franco-américanie n’est pas morte mais elle vit une profonde mutation. Les indices sont on ne peut plus clairs : de nombreuses écoles paroissiales ont fermé leurs portes, les paroisses nationales n’ont souvent de français que le nom, les sociétés mutuelles font une part croissante de leurs affaires en anglais et la presse d’expression française est moribonde. Le fossé qui sépare les jeunes de leurs aînés ne cesse de s’élargir [44]. Pendant que les aînés s’accrochent avec nostalgie à un passé glorieux qu’ils ont façonné au prix de tant de labeurs, les jeunes militants s’interrogent sur l’orientation à donner à leur avenir. Que conserver et transmettre de l'héritage ancestral [45] ?

Ces événements continueront d’influencer plusieurs des auteurs qui abordent encore l’expérience franco-américaine par le biais de la survivance. Ils ont peu à voir cependant avec l’intérêt sans cesse croissant que suscite le groupe franco-américain au sein de la communauté scientifique. Il faut chercher ailleurs des éléments d’explication.

Les États-Unis des années 1960 et 1970 vivent de profondes transformations sociales et culturelles. Le mouvement en faveur des droits civiques, « la révolte noire », en est sans doute la manifestation la plus spectaculaire. Cette lutte, alimentée par les lenteurs de la déségrégation, la misère des ghettos au sein de l’abondance, un climat politique plus propice au changement, se manifeste de multiples façons. Ainsi, les jeunes Noirs qui contestent l’image négative que leur renvoie une société raciste luttent pour un changement en profondeur dans les programmes d’études et de recherche universitaires. Grâce aux différentes sciences humaines et sociales, à l’histoire en particulier, sensibles aux forces du milieu, les Noirs retrouvent progressivement leur véritable place dans l’histoire américaine, pendant [115] que se transforme leur présent. La découverte d’un passé valorisant est source de fierté et de changement comme en témoigne l’impact de la télédiffusion de l’œuvre d’Alex Haley, Roots. Les autres groupes ethniques, dont les Franco-américains, et les « minorités » (les femmes, les travailleurs), jusque-là ignorés ou méconnus, réagissant aux mêmes forces de changement, réévaluent leur rôle dans l’histoire du pays en même temps qu’ils revendiquent une meilleure place au sein de la société. Tous ces efforts consacrent la disparition de la doctrine du « melting pot » et favorisent la promotion du pluralisme culturel.

Le chercheur en sciences humaines et sociales réagit aux forces qui transforment son milieu. Cela va de soi. Il interroge le passé à partir des inquiétudes, des problèmes et des aspirations des personnes de son temps. Il ne faut donc pas se surprendre si l’histoire des minorités et des groupes ethniques est devenue un domaine de recherche privilégié et si l’historien consacre désormais autant d’attention, sinon davantage, au « monde ordinaire » qu’à l’élite. Ces préoccupations nouvelles sont facilitées par les transformations majeures, certains parlent de révolution, que vit la discipline historique depuis deux décennies [46]. L’historien contemporain profite davantage de l’outillage théorique et conceptuel de son confrère des sciences sociales, crée de nouveaux matériaux (exemple : l’enquête orale), remet en question ses anciens postulats et avec la méthode quantitative, faut-il le souligner, a déjà pris le virage technologique.

Depuis 1945, la survivance demeure un thème largement exploité dans la littérature sur les Franco-américains. Robert Rumilly en a fait le point central d’un de ses meilleurs ouvrages [47]. « C’est un livre, écrit Adolphe Robert, qui sent la poudre : affaire de Fall River ; affaire de No. Brookfield ; affaire de Danielson ; affaire du Maine ; affaire du Rhode Island ; Bill Chamberlain ; Bill Peck, etc., etc. Ça laisse l’impression que les Fanco-américains se sont battus vingt-quatre heures par jour, 365 jours par année [48] ». On pourra critiquer Rumilly, mais on n’aura jamais fini de le consulter et de le citer.

Des chroniqueurs et des spécialistes continuent de scruter la nature et le rôle du cadre institutionnel. Mason Wade a consacré une brève mais pénétrante étude au rôle de la paroisse dans la survivance franco-américaine [49]. Il y traite avec beaucoup d’érudition et de nuances du rôle du clergé québécois et des conflits avec l’épiscopat irlandais. Dans ce dernier cas il a soin de présenter les deux côtés de la médaille, ce que peu ont fait avant lui. Sœur Florence Marie Chevalier a pour sa part soutenu une thèse en sociologie sur le rôle des sociétés nationales dans l’évolution du groupe franco-américain [50]. Tous ceux qu'intéresse le rôle des communautés religieuses dans la direction de paroisses consulteront avec profit et intérêt les documents compilés et présentés par Gaston Carrière et J.-Antonin Plourde [51] sur la présence des Oblats et des Dominicains en Nouvelle-Angleterre. Ils y trouveront de précieuses informations sur les missions et les dessertes des Oblats, l’organisation paroissiale, la vie religieuse et les écoles. J.-A. Plourde a lui-même utilisé cette documentation dans son bref historique des communautés de Fall River et de Lewiston [52].

[116]

La lutte que mènent les Fanco-américains contre les ennemis de l’extérieur, les nativistes Yankees et l’épiscopat irlandais, a retenu l’attention de quelques chercheurs, moins nombreux qu’on pourrait croire. Les résultats sont inégaux. Kenneth Woodbury relate une partie du conflit qui oppose Franco-américains et Irlandais à propos de la nomination d’un évêque dans le diocèse de Portland [53]. Son étude, basée à peu près uniquement sur le Messager, ne nous en dit guère plus que ce qu’en connaissaient les lecteurs du journal de Lewiston. La thèse de Dennis Garff mérite à peine une mention [54]. Peu fouillée, mal construite, elle n’a d’autre utilité que de fournir de brèves indications sur la lutte que mènent certains leaders comme Hugo Dubuque contre les attaques nativistes. Les travaux de Philip Silvia sur l’affaire de la Flint et de Richard Sorrell sur le mouvement sentinelliste [55] sont heureusement de qualité supérieure. La thèse de Ph.D. de Sorrell renouvelle en profondeur notre connaissance de la lutte menée par les Sentinelles d’Elphège-J. Daignault en faveur de l’autonomie des institutions franco-américaines menacée par les visées centralisatrices de l’évêque de Providence, Mgr William Hickey. Le conflit, loin d’être présenté comme un combat à finir entre bons et méchants, est vu comme le produit de forces très complexes qui agitent la communauté de Woonsocket et qui opposent les Franco-américains entre eux tout autant qu’à l’épiscopat irlandais. Les incidents de Woonsocket, le lecteur de Sorrell le perçoit très bien, ne sont que le signe le plus apparent de la profonde mutation que vit alors la Franco-américanie.

Les auteurs de monographies paroissiales dont nous avons déjà parlé croyaient en la survivance. Ils en décrivaient les points forts, reconnaissaient les faiblesses, dénonçaient les adversaires et souvent suggéraient des programmes de redressement. Tel n’est plus le cas des auteurs d’après-guerre pour qui la survivance est souvent un fait révolu. Cela leur donne suffisamment de recul pour ne voir dans la lutte pour la survivance qu’une facette, capitale cela va de soi, d’un long processus d’adaptation et d’intégration d’un groupe ethnique à la société américaine. George F. Thériault a fait œuvre de pionnier dans ce domaine [56]. Dans son étude de la communauté franco-américaine de Nashua, il identifie les quatre grandes étapes qui font des Canadiens français d’après la guerre civile et de leurs descendants des Américains d’origine canadienne-française. Peter Haebler [57] pour sa part invite les chercheurs à la prudence. Soulignant que les communautés franco-américaines sont nombreuses et différentes, il croit qu’il serait abusif de faire des généralisations sur l’expérience franco-américaine en Nouvelle-Angleterre à partir de l’étude d’un cas. Il suggère d’étudier différents types de regroupements avant de tirer des conclusions. Sa thèse sur Holyoke s’inscrit dans un tel programme. Après une étude très fouillée et dans laquelle il conteste nombre d’idées reçues sur les Franco-américains, il conclut que la résistance à l’américanisation est plus faible dans une communauté comme Holyoke où la population franco est minoritaire que là où elle est majoritaire. Les communautés de Biddeford, Suncook et Woonsocket ont aussi leur historien [58].

En dehors de la survivance, il n’existe plus de thème unificateur dans la littérature sur les Franco-américains. Le discours est de plus en plus morcelé. [117] Toutes les facettes de la vie du groupe retiennent l’attention des chercheurs. Regardons-y de plus près.

Plusieurs, surtout des Canadiens, mesurent le phénomène de l’émigration et tentent d’en cerner les causes et les principales caractéristiques. Combien de Canadiens français ont émigré vers la Nouvelle-Angleterre ? À quel moment et suivant quel rythme ? Pourquoi ? Où sont-ils allés ? Combien sont revenus ? Voilà autant de questions qui ont défié et qui continuent de défier les chercheurs et auxquelles Gilles Paquet, Yolande Lavoie et Ralph Vicero, parmi d’autres, se sont résolument attaqués [59]. Les trois auteurs identifient les sources disponibles, c’est-à-dire les recensements américains et canadiens, les enquêtes officielles (ex. 1849, 1857), les évaluations fournies par différents auteurs franco-américains et canadiens et en font une analyse critique remarquable [60]. Voilà une première et importante contribution que la critique n’a pas suffisamment soulignée. Les deux premiers auteurs fournissent un aperçu d’ensemble du phénomène migratoire, alors que le troisième concentre son attention sur l’émigration vers la seule Nouvelle-Angleterre et pour les six dernières décennies du XIXe siècle. Il y a divergence mais aussi une certaine cohérence entre les estimations de Ralph Vicero et celles de Yolande Lavoie. Cette dernière a rendu un hommage mérité à son confrère géographe. Soulignant qu’il est le seul à avoir utilisé les manuscrits des recensements fédéraux américains et de quelques états et reconnaissant que le « travail de Ralph Vicero [est] incontestablement la recherche la plus approfondie et la mieux documentée... sur le sujet [61] », elle souhaite une suite à cette recherche qui engloberait à la fois l’immigration de la période 1900-1930 [62] Et le rapatriement. Les travaux de Chaput et de Little [63] indiquent bien tout l’intérêt qu’il y a à connaître non seulement le nombre des émigrés qui reviennent au Québec mais leur localisation, la nature et l’explication de l’attitude du gouvernement québécois à leur égard, et l’impact de leur retour sur les sociétés québécoise et franco-américaine.

Il est assez surprenant de constater que, en dépit de l’ampleur du phénomène, si peu d’historiens se soient préoccupés d’expliquer en profondeur l’émigration de près d’un million de Québécois. Certes, tous les auteurs de synthèses et de monographies sur les XIXe et XXe siècles de l’histoire du Québec en ont parlé mais la plupart se contentent trop souvent de répéter leurs devanciers ou les observateurs de l’époque. Albert Faucher, à part Vicero, fait figure d’exception [64]. Il nous invite à replacer l’étude des mouvements migratoires dans leur contexte nord-américain, voire mondial. Ils apparaissent alors moins spectaculaires et l’on voit bien que le malaise qu'ils traduisent n’est pas limité au Canada, encore moins au Québec. « Expression régionale d’un rajustement à l’échelle de l’économie nord-atlantique », les mouvements de populations ont en Amérique du Nord « l’allure d’un cyclone provoqué par l’attraction des nouveaux espaces agricoles et industriels des États-Unis ». Pour ma part, je soutiens que l’intensité que prend souvent le phénomène s’explique par l’action conjuguée des transformations en profondeur que connaissent les économies du Québec et des États-Unis et des crises qu’elles vivent périodiquement [65].

[118]

De quelles régions du Québec viennent les immigrants ? Vers quelles régions de la Nouvelle-Angleterre se dirigent-ils ? Pourquoi ? Voilà d’autres questions que Ralph Vicero et James Allen [66] abordent de façon spécifique. Une constante : les Canadiens français qui habitent une localité en Nouvelle-Angleterre viennent souvent des mêmes lieux au Québec. Les concepts de « migration field » et de « chain migration » qu’ils utilisent, permettent une analyse beaucoup plus rigoureuse des caractéristiques des déplacements, jusque-là décrits par les seuls observateurs [67].

Quelle que soit leur destination, les émigrés ne coupent pas les ponts avec le Québec. Les prêtres qui fondent les paroisses, bâtissent les églises, luttent pour la survivance, les religieux et religieuses qui enseignent aux enfants, soignent les malades, vont et viennent des deux côtés de la frontière ; les conférenciers, les prédicateurs et les artistes québécois alimentent la vie culturelle des communautés franco-américaines et, comme les nouveaux arrivants, sont porteurs de nouvelles fraîches ; les jeunes les plus doués étudient dans les collèges et couvents du Québec, etc. On n’en finirait plus de dresser la liste des liens qui unissent les Québécois à leurs cousins franco-américains et qui jouent un rôle si important dans l’histoire des deux groupes. Comment ne pas s’étonner que si peu de chercheurs se soient penchés sur cette dimension du problème ! Seul Rumilly en fournit une description, partielle cela va sans dire, pour l’ensemble de la période. Heureusement, les choses commencent à changer !

Guildo Rousseau, dans une étude dont nous avons déjà parlé, étudie l’image que se font des États-Unis les écrivains québécois. Pierre Savard étudie les relations entre les catholiques canadiens-français et américains à la fin du XIXe siècle [68], Jean-Guy Lalande scrute le rôle des partisans et adversaires québécois du mouvement sentinelliste [69], Claude Galarneau aborde la présence des jeunes Franco-américains dans les collèges classiques du Québec [70] et l’Institut français du collège de l’Assomption a consacré son colloque de 1981 à l’étude des valeurs culturelles et religieuses de l’émigrant québécois [71]. C’est encore bien peu mais la voie est tracée.

Les biographies de leaders franco-américains illustreraient jusqu’à quel point le Québec demeurait présent dans leur univers mental. Mais la biographie est un genre négligé dans l’historiographie franco-américaine. À part les portraits-souvenirs, les notices nécrologiques et les centaines de portraits de Franco-américains rédigés par Rosaire Dion-Lévesque [72] pour La Patrie, de Montréal, rien ou à peu près. La biographie de Ferdinand Gagnon que j’ai publiée dans le Dictionnaire biographique du Canada fait figure d’exception [73].

C’est en histoire sociale que les progrès de la recherche sont les plus significatifs et l’avenir le plus prometteur. C’est sur les conditions de vie et de travail des masses laborieuses, leur adaptation à un environnement nouveau, leurs comportements, leurs valeurs et les institutions qui les encadrent que se concentrent les chercheurs. L’emploi de nouveaux matériaux [74] et le perfectionnement des techniques quantitatives permettent de remarquables percées dans notre connaissance [119] du monde ordinaire franco-américain. La description et l’analyse du cadre physique, des conditions de vie et de travail, des activités et de l’adaptation des premiers émigrés des Petits Canadas constituent l’essentiel des travaux novateurs et fouillés de Philip Silvia et de Frances Early [75]. Iris Saunders Podea, avec un article assez froidement accueilli par l’élite franco-américaine, avait tracé la voie avec beaucoup de talent [76]. Dans les travaux de Daniel Walkowitz, Tamara Hareven et Frances Early [77], les masses laborieuses n’apparaissent plus comme d’éternelles victimes de forces et de circonstances hors de leur contrôle, mais davantage comme des acteurs à part entière qui non seulement réagissent à leur milieu mais le façonnent et dans une certaine mesure le contrôlent. Le bagage culturel de l’immigrant est vu comme un outil d’adaptation très positif.

Les Fanco-américains ne font pas que travailler. Ils s’amusent, pratiquent des sports, lisent, vont au théâtre, etc. Richard Sorrell a démontré tout le profit qu’il y aurait à étudier les loisirs et les sports dans l’adaptation du monde ordinaire au milieu américain [78]. Dans sa thèse sur Holyoke, Ernest B. Guillet [79] nous donne une description détaillée de la vie littéraire d’une petite communauté, en particulier de ses nombreuses activités théâtrales. On y découvre un univers culturel fort peu connu. Car, même en tenant compte des minutieuses études de Paul-P. Chassé sur la poésie [80] et de Richard Santerre sur le roman [81], nous connaissons mal la littérature franco-américaine. Un inventaire s’impose. Armand B. Chartier, dans un article très dense, trace les contours du travail à faire [82]. Les chercheurs doivent s’empresser de recueillir, avant qu’elles ne disparaissent, les principales manifestations de la littérature orale : contes, légendes, chansons. Les journaux procureront aux collectionneurs avisés d’heureuses surprises : une littérature plus populaire y côtoie conférences et essais destinés à l’élite. L’on se prend à souhaiter que nos amis franco-américains disposent un jour d’un Dictionnaire des œuvres littéraires à l’image du DOLQ de Maurice Lemire, qui regrouperait l’ensemble des écrits des Canadiens français émigrés aux États-Unis et des Franco-américains, qu’ils se soient exprimés en français ou en anglais. À condition de savoir s’en servir, l’historien y trouvera un matériau d’une très grande richesse [83].

* * *

Quelles conclusions tirer d’un tel bilan ? Nous croyons :

- Que les Franco-américains méritent mieux qu’un silence méprisant ou encore quelques références au bas de pages de la part des auteurs de manuels d’histoire américaine.

- Qu’il existe un matériel en quantité et qualité suffisantes pour justifier une présence accrue du fait franco-américain dans les programmes d’études et de recherche universitaires, tant au Québec qu’en Nouvelle-Angleterre. La collection [120] « A Franco-American OverView » (en 6 volumes), publiée par le National Assessment and Dissemination Center for Bilingual/Bicultural Education, qui regroupe des dizaines d’articles parus depuis la fin du XIXe siècle dans les revues nord-américaines, constitue une source documentaire de première qualité.

- Que pour la période 1870 à 1930, la Franco-américanie fait presque partie intégrante de l’histoire du Canada français. D’abord, parce qu'elle alimente le discours idéologique des élites et qu’ensuite elle est pour le Québec une fenêtre grande ouverte sur la réalité américaine. Sait-on assez que Olivar Asselin, J. L. K. Laflamme et Honoré Beaugrand, pour ne nommer que ceux-là, ont appris leur métier de journaliste en Nouvelle-Angleterre, que des centaines de curés, religieux et religieuses, après un séjour aux États-Unis, ont servi dans les paroisses et enseigné à des générations de jeunes des collèges et couvents du Québec, que des dizaines de milliers de vacanciers franco-américains allaient et venaient des deux côtés de la frontière, etc. ? Peut-on affirmer qu’avec la radio, la télévision, le cinéma américain, les sports professionnels, le Québécois moyen d’aujourd’hui connaît mieux la réalité américaine que ses parents ? Pour ma part, j’en doute.

- Qu’il est peu utile d’identifier vers quels secteurs les chercheurs devraient orienter leurs efforts. La recherche en sciences humaines et sociales s’adapte davantage aux modes qu’elle ne les crée. Parce que les sociétés, comme les disciplines scientifiques, ont leur propre dynamique, bien malin qui pourrait prédire la façon dont nos successeurs choisiront d’interroger le passé. Le chercheur explore souvent les mêmes réalités que ses devanciers en n’y apportant qu’un éclairage nouveau. Rappelons-nous que la paroisse, le clergé et la presse franco-américaine, identifiés hier comme les agents par excellence de la survivance sont aussi perçus aujourd’hui comme de puissants facteurs d’acculturation.

- Que l’histoire du monde ordinaire ne doit pas nous détourner de celle des élites. Car, si nous connaissons bien le discours des élites franco-américaines, nous en savons peu sur elles-mêmes.

- Qu’il est essentiel de fournir aux chercheurs de meilleurs instruments de travail. A cette fin nous croyons qu’il faudrait :

a) identifier les principaux dépôts d’archives et faire l’inventaire analytique des principales collections qui s’y trouvent. La plupart des chercheurs connaissent mal la richesse documentaire que recèlent les collections Lambert de l’ACA, Mallet de l’USJBA, les fonds Nadeau de la Bibliothèque Nationale, Beaulieu de la Boston Public Library, Rosaire Dion-Lévesque, Alice Lemieux et Elphège Daignault des Archives Nationales du Québec, etc. ;

b) inventorier, localiser et analyser les centaines de journaux franco-américains de la Nouvelle-Angleterre ;

[121]

c) compléter le travail de Pierre Anctil sur la bibliographie franco-américaine et en rendre les données accessibles aux chercheurs ;

d) réfléchir au problème de la formation des chercheurs et à la nécessité d'un lieu de rencontre pour tous ceux qu'intéresse le fait franco-américain. Il convient de rappeler que le colloque annuel de l’Institut français du Collège de l’Assomption de Worcester est une réalité bien vivante.

Les études franco-américaines ont connu un développement considérable depuis quelques décennies. Il faut faire en sorte que cela continue. Notre connaissance du Québec et des États-Unis y gagnera.

[122]

NOTES du chapitre 4

[123]

[124]

[125]

[126]

[127]

[128]

[129]

[130]


[131]

COMMENTAIRE 1

Par Pierre ANCTIL

Institut québécois de recherche sur la culture

Plutôt que de commenter le texte soumis par Yves Roby à l’intention de ce colloque, et qui touche à tous les aspects essentiels de la recherche déjà entreprise sur les Franco-américains, je préférerais y aller de mes propres réflexions quant à certains volets de cette question qui demeure peu explorée et qui nous réclame par son urgence. Yves Roby vient de l’affirmer, nous connaissons maintenant mieux l’histoire des populations d’origine québécoise qui s’installèrent en Nouvelle-Angleterre au tournant du siècle dernier, surtout grâce à la masse de documents de toutes sortes que les classes instruites nous ont laissés. Après tout, le Québécois francophone d’aujourd’hui ne possède-t-il pas un atout de taille dans cette tâche qui consiste à tracer le portrait de l’immigrant franco-américain, à savoir qu’il était originaire d’un certain Québec ruralisant et catholique, d’un dix-neuvième siècle que nous étudions déjà depuis assez longtemps et qui nous semble familier. Les Franco-américains toutefois ne firent pas que quitter un pays d’origine. Très tôt, ils eurent le sentiment de s’engouffrer dans une nouvelle dynamique sociale qui devait transformer à terme jusqu’à leur perception d’eux-mêmes, par-delà les idéologies de « survivance » et les apparences rassurantes des Petits Canadas, véritables enclaves de québécitude au coeur des grands centres urbains de l’époque.

Les émigrants québécois en Nouvelle-Angleterre eurent une descendance nombreuse qui finit par n’avoir plus qu’un contact éloigné avec le Québec de leurs ancêtres. Bientôt, vers les années vingt ou trente, selon les localités, déjà une majorité de Franco-américains pouvait prétendre à la citoyenneté américaine depuis la naissance, fait qui devait se répercuter très rapidement sur leur identité « ethnique ». Aujourd’hui les Franco-américains en sont à la quatrième ou à la cinquième génération installée sur le sol de la république et, pour ces jeunes, la question de leurs racines historiques se pose avec une acuité nouvelle, surtout à la lumière de ce courant d'ethnie revival qui a pris de l’ampleur aux États-Unis depuis le milieu des années soixante. Malheureusement, les chercheurs n’ont pas su ou n’ont pas voulu se pencher sur cette question fondamentale de l’identité culturelle des moins de trente ans en Franco-américanie, comme s’ils espéraient sourdement qu'éventuellement cette génération nouvelle se rallierait en bloc à la solution imaginée par leurs aînés en Nouvelle-Angleterre, soit le maintien de l’équilibre difficile entre un comportement francophone à la maison et « américain » sur la place publique.

Au nombre de plusieurs centaines de milliers, les jeunes Franco-américains appartiennent de plein pied à la société américaine dans laquelle ils sont plongés, et s’y trouvent à l’aise. Conscients d’ignorer parfois jusqu’au premier mot de la [132] langue française et de n’avoir qu’une connaissance très superficielle d’un Québec qui leur apparaît le plus souvent bien lointain, ils mènent une existence en harmonie avec le milieu qui les entoure. Pourtant, autour d’eux, on continue de les désigner du nom de French people, et les jeunes Franco-américains eux-mêmes ne dédaignent pas s’affirmer comme des French-Canadians, tout comme les autres groupes ethniques de la région qui ne ressentent pas de gêne à passer pour des « Irlandais », pour des « Grecs », des « Italiens » ou des « Polonais ». L’économie des perceptions sociales est ainsi faite en Nouvelle-Angleterre que l’on reconnaît volontiers appartenir à un groupe ethnique quelconque, et qu’on y investit une part de la face extérieure de son identité.

Au-delà des étiquettes ethniques courantes et souvent folkloriques, les jeunes Franco-américains vivent quelquefois le traumatisme de découvrir le sens réel et profond de leur identité « nationale » aussi tardivement qu’à l’adolescence, à un âge où l’individu porte déjà en lui l’essentiel de sa perception du monde. Clark Biaise, un écrivain d’origine franco-américaine, décrivait dans une œuvre récente le choc ressenti par un jeune Américain qui constate, vers l’âge de quatorze ans, que toute l’idée qu’il s’était faite de son identité n’a aucun fondement concret. David Greenwood, le héros de Lunar Attractions, découvre en effet un jour à la lecture d’un texte légal que son père s’appelle en réalité Louis-Noël Boisvert et qu’il est né en Beauce, pays dont il ignore l’existence même. Désemparé, David Greenwood alias David Boisvert, faute de point de repère, verse sur le coup dans une crise de conscience existentielle :

There were many names, the most frequently appearing one being so foreign I could’nt pronounce it. It looked like the names I’d written on my maps. If the strange thing I’d uncovered in the ditch behind our house had a name, it might be this : Louis-Noël Boisvert. « S » and « V » together sounded Russian. I wanted to scream, but the reporter was still there, and I caught myself with an even more awful revelation. « Boisvert » was the right name ; he was my father. Those words he used in counting were Russian ; stories my mother told me about « Germany » were really the camps in Russia I’d read about in Reader’s Digest, place where their top agents were trained in replica American towns to learn American ways. The whole store was a front ; my parents were spies. (Blaise, 1980 : 67)

Tous les jeunes Franco-américains ne vivent pas un jour, à l’instar de David Greenwood, cette impression troublante de n’appartenir à aucun univers connu. La plupart doivent cependant faire face tôt ou tard dans leur conscience à ce fait d’une identité divergente qui a des racines toutes fraîches hors du pays, situation que les Franco-américains partagent d’ailleurs avec des dizaines de millions de leurs compatriotes américains. Il n’est pas trop tôt pour se pencher sur l’impact à long terme que ces phénomènes d’ethnicité perçue vont avoir sur l’allure générale de la Franco-américanie.

[133]

Un autre aspect de notre sujet que nous ne discutons pas assez reste le flot de l’émigration présente des Québécois vers les États-Unis, mouvement qui a donné naissance à de nouveaux foyers de peuplement diasporique en contraste flagrant avec ceux du siècle dernier [84]. Si on offrait aux Québécois d’aujourd’hui l’avantage d’une double citoyenneté, il n’y a aucun doute dans mon esprit que la très grande majorité opterait pour l’américaine. Nos concitoyens sont d’ailleurs des centaines chaque jour à jongler avec ce choix fondamental, devançant ainsi les palabres des officines gouvernementales. On peut avancer que près du dixième de la population actuelle du Québec se déplace chaque hiver vers la Floride pour y séjourner quelques jours ou plusieurs mois, sans compter ceux qui y sont déjà installés à vie [85]. Quant au nombre de Québécois résidant présentement en Californie, foyer d’attraction naturel pour ceux que tentent les nouvelles technologies et les modes de vie alternatifs, faisons l’hypothèse que leur nombre se situe entre 50 000 et 100 000 individus, sans mentionner ceux qui ont opté pour l’une des grandes métropoles américaines, attirés par la vitalité de la vie artistique que l’on y découvre. Que savons-nous de ces nouveaux émigrants et des motifs qui sont responsables de leur départ ?

Bien sûr aujourd’hui les avions et les automobiles ont remplacé les trains de voyageurs, et l’anonymat des grandes villes cosmopolites, l’intimité familiale des Petits Canadas d’autrefois ; mais le geste d’émigrer reste probablement pour ces nouveaux expatriés québécois tout aussi radical que pour leurs grands-parents, et ses conséquences pour l’individu toutes aussi durables. Nous apprendrions beaucoup sur notre sort de « Québécois minoritaires en Amérique du Nord » si nous avions la volonté d’évaluer en termes sociaux et économiques concrets l’effet de ces départs et de ces retours possibles, et si nous avions le goût de mesurer à cette aune notre adaptabilité aux choses et habitudes proprement américaines, autant chez nous que de l’autre côté de la frontière. Plusieurs outils éventuels de recherche existent déjà, dont le plus approprié peut-être serait une ethnographie de l’émigration vers les États-Unis. Nous ne pouvons pas remonter dans le temps et rencontrer les expatriés du siècle dernier, mais nous sommes toujours capables d’étudier ceux d’aujourd’hui dans leur vécu quotidien. Voilà qui serait un apport important à la compréhension de toute une facette de notre culture dite québécoise francophone, laquelle manifeste encore, aujourd’hui comme hier, une éminente versatilité aux environnements nord-américains, au point d’avoir déversé au cours de l’histoire, dans la république voisine, près de la moitié de ses forces vives. Il y aurait beaucoup à faire également avec des publications comme Le Journal de la Floride, le pendant contemporain de journaux franco-américains classiques comme Le Travailleur de Ferdinand Gagnon, et qui prétend être « le plus grand journal français des États-Unis [86] ».

De nouvelles recherches et études sur les Franco-américains contribueront également à clarifier le statut de la langue française au sein de la diaspora québécoise aux États-Unis. Les Franco-américains appartiennent en propre depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale au monde de l’ethnicité américaine, c’est-à-dire que leur identité nationale est liée aux conditions qui prévalent aux États-Unis [134] quant à la persistance de langues d’origine autres que l’anglais, et quant au poids politique des minorités ethniques. Or, partout et de façon décisive, les langues « étrangères » sont en régression au sein de la population immigrante américaine et, à première vue, aucune raison ne nous permet de croire que le français des expatriés québécois doive subir un sort contraire, même si le rythme de son assimilation à l’anglais peut apparaître différent à première vue [87]. Il nous faut donc cesser dès maintenant de mesurer la force et l’ampleur de la Franco-américanie à partir des seules données concernant la rétention de la langue d’origine. Du point de vue québécois on peut naïvement confondre, en Nouvelle-Angleterre, la question de la survie du français et celle du maintien de l’identité ethnique par la conscience d’une certaine tradition historique autonome. Les Franco-américains américanisés, tout comme les membres de d’autres groupes ethniques américains qui n’ont plus l’usage de leur langue d’origine, continuent souvent de participer aux réseaux de relations au sein de leur communauté ethno-culturelle et contribuent ainsi d’une manière différente à leur vitalité.

Si l’on peut d’ores et déjà affirmer que le français ne disparaîtra pas définitivement en Nouvelle-Angleterre, il reste assuré aussi que le nombre de francophones ne s’y maintiendra pas aux niveaux d’antan. Alors qu'il y a deux générations à peine, presque toute la Franco-américanie était bilingue, et ce souvent par inertie, du simple fait du poids sociologique de cette langue dans la communauté, aujourd’hui il faut faire un effort particulier pour demeurer francophone en Nouvelle-Angleterre ou pour le devenir. Ainsi, si les meilleurs romanciers de la condition franco-américaine ont écrit leurs œuvres en anglais [88], tels Jack Kerouac dans Visions of Gérard [89], Robert Cormier dans Take Me Where the Good Times Are, Gérard Robichaud dans Papa Martel [90] et enfin Clark Biaise cité plus haut. C’est qu’elles n’auraient probablement pas pu être construites autrement, tant l’anglais occupe aujourd’hui une place prépondérante au sein des populations d’émigrés ou de descendants d’émigrés. Dans le roman Take Me Where the Good Times Are, le héros, un retraité, se rappelle en des termes classiques du jour où son père changea son nom de famille pour le rendre plus conforme à la sonorité américaine :

I think my mother was relieved when he changed the name. In the first place, she hated arguments in those days although her tongue got sharper as she grew older. But when we were young, my mother wanted to turn her back on Canada and told my brothers and sisters that we were Americans first and French second, no matter what my father said. She wouldn’t let my father speak French at home and made us all read and write in English. She took special pains with me because I was the youngest and she started me in the habit of writing things down. When my mother and I were left alone after everyone else had died, she’d have me read aloud to her in English and it was only then that I realized she couldn’t read a word of English herself. (Cormier, 1981 : 78)

[135]

Avec un million de francophones appartenant pour la plupart aux couches d’âges supérieures, la Franco-américanie fournit encore l’occasion cependant d’étudier un certain français québécois archaïque, c’est-à-dire libre des influences urbaines et européennes qui ont pénétré en français le Québec depuis les années cinquante et même avant [91]. Il ne fait aucun doute toutefois que tout le domaine des langues d’usage est en voie de mutation rapide en Nouvelle-Angleterre, et qu’on assiste présentement dans cette région à un rééquilibrage du rôle et de la place du français au sein des populations franco-américaines.

Comment conclure, sinon que les chercheurs québécois qui appartiennent au secteur des sciences humaines n’ont toujours pas, pour la plupart, fait le pari d’oeuvrer à l’échelle du continent américain. Peut-on les blâmer vraiment quand le milieu universitaire francophone, quant à lui, n’offre toujours aucun point d’appui organisé pour ce qui est de ce vaste champ qui s’étend littéralement à nos portes. La Franco-américanie, et pas seulement celle d’il y a une génération ou deux, jette un éclairage cru et nouveau sur l’identité nord-américaine des francophones que nous sommes encore. Se rendre à la rencontre des Franco-américains, aujourd’hui encore plus qu’hier, c’est souvent prendre le risque d’être bouleversé profondément dans sa perception des phénomènes historiques, et c’est aussi tâter un certain vécu anthropologique propre aux migrants. Le destin des Québécois du XIXe siècle fut multiple et se joua sur de grandes étendues territoriales [92]. Il n’y a pas de raison que nous rejetions cet élan marquant et tout ce qu’il imprima à notre héritage culturel, sous le prétexte fallacieux que l’époque des grandes migrations est révolue et qu’il ne reste rien outre-frontière pour en témoigner. Tout récemment, la revue américaine Esquire consacrait un numéro anniversaire aux cinquante personnalités qui ont le plus marqué les États-Unis depuis l’élection de Franklin D. Roosevelt à la présidence [93]. Parmi elles, un jeune écrivain timide, fils d’émigrants québécois, pour qui l’américanité n’eut de sens que vécue sous l’angle de l’errance, du perpétuel déplacement d’un lieu à l’autre : « Is there any end to Kerouac Highway ? » Pourtant, Jack Kerouac n’est qu’un exemple de cette jonction encore inexplorée entre notre histoire et le mouvement toujours accéléré des mass médias et de la culture américaine, une lueur parmi d’autres pour nous aider à briser cet isolement néfaste qui étreint parfois nos perspectives quand nous abordons la question de notre propre identité.

[136]

Bibliographie

Blaise, Clark.

Lunar Attractions. Toronto, McClelland and Stewart-Bantam Limited, 1979. 264 p.

Cormier, Robert.

Take Me Where the Good Times Are. New York, Avon Books, 1965. 174 p.

[137]

NOTES
du commentaire 1 sur le chapitre 4

[138]



[139]

COMMENTAIRE 2

« Ces autres vous-mêmes »

Par Claire QUINTAL

Collège l’Assomption, Worcester

Je me félicite du fait que les Franco-américains ont la chance d’avoir, en la personne d’Yves Roby, un chercheur chevronné qui analyse de façon pondérée les péripéties de l’émigration du Québec vers la Nouvelle-Angleterre. La lecture de son texte rassure. Se penchant depuis longtemps déjà sur tout le panorama de la situation franco-américaine, pour en assimiler les données et en analyser les retombées, il ne perd pas de vue les êtres humains qui ont vécu cette diaspora.

Roby se sert à juste titre du mot « phénomène » pour décrire les départs massifs d’« environ 900 000 personnes... qui auraient quitté le Québec pour gagner les États-Unis ». Cette émigration, que Roby décrit comme étant un fait « central dans l’histoire du Québec et de la Nouvelle-Angleterre », après avoir fait couler beaucoup d’encre des deux côtés de la frontière, semble ne plus intéresser les chercheurs du Québec. Où sont de nos jours les Honoré Beaugrand, les Edmond de Nevers ?

Dans son analyse de la perception que pouvaient avoir les Yankees de ces émigrants canadiens-français, Roby, tout en admettant « le manque d’études poussées à ce sujet », conclut que « l’Américain moyen a une image positive du Franco-américain ». Ce en quoi il se montre plus optimiste que je ne le suis moi-même. Une étude systématique des périodiques qui publiaient des articles de dénigrement, et des lecteurs de ces mêmes publications, nous permettrait de mieux saisir la portée du nativism américain. Roby cite d’ailleurs lui-même un texte diffamatoire, puis il se pose la question suivante, « Ces courants de pensée sont-ils répandus en Nouvelle-Angleterre ou ne sont-ils le fait que d’une minorité ? » Il est vrai que cette littérature qui fait son apparition à la fin du XIXe siècle pour reprendre de la vigueur pendant et tout de suite après la Première Guerre mondiale, quoiqu’en dise Roby, n’est pas très abondante. Je crois néanmoins qu’elle vient à son heure, reflétant d’une part les sentiments de la population yankee et stimulant d’autre part la recrudescence des préventions à l’égard du Franco-américain.

Les Franco-américains ont tout de même eu des défenseurs parmi les anglophones américains. Roby en cite quelques-uns, dont Edward Billings Ham, R. A. Foley, et même ce William MacDonald qui a beaucoup fait dans son article de 1898 pour calmer les Yankees de la Nouvelle-Angleterre, inquiets d’être un jour [140] submergés par l’arrivée massive des habitants, secondée par la fécondité de la Canadienne française.

Ces Franco-américains, appelés « la canaille » par les chefs gouvernementaux du Québec, vilipendés comme des êtres sordides par les Yankees, ont aussi eu maille à partir avec le haut clergé américain d’origine irlandaise. Ces combats que Roby qualifie avec raison de « farouches » ont accaparé pendant longtemps les forces vives du peuple franco-américain. Combats sans issue, combats dans lesquels le haut clergé du Québec s’est largement impliqué. Des biographies sur les évêques de l’époque, tant du côté québécois que du côté américain, et des monographies détaillées sur certaines querelles religieuses nous permettraient de mieux cerner les ramifications de la question du « nationalisme » dans l’Église. L’histoire religieuse des Franco-Américains n’a pas encore été écrite. Les archives épiscopales, tant au Québec qu’en Nouvelle-Angleterre, livreront un jour toute la vérité sur cette question qui a fait souffrir moralement tant de Franco-américains, écartelés entre deux fidélités — celle de leur religion et celle de leur patrimoine culturel menacé.

Que penser de ces luttes à outrance en faveur de la survivance, « seul thème unificateur », selon Roby, « dans la littérature des Franco-américains » ? La dernière de ces luttes, celle de la Sentinelle des années 20, a dégénéré en guerre fratricide, détruisant à jamais l’unité des Franco-américains. C’est une querelle qui prouva aux ennemis des Franco-américains qu’ils étaient divisés et divisibles. Les archives du diocèse de Providence nous en apprendraient long sur tout le déroulement de l’affaire ainsi que sur l’attitude de l’ordinaire vis-à-vis du Bill Peck qui aurait effectivement empêché l’enseignement de toute langue autre que l’anglais dans les écoles paroissiales du Rhode Island. Des études psychologiques intéressantes pourraient aussi être entreprises sur le comportement du Canadien français dans des circonstances comme celles-ci, où les esprits sont chauffés à blanc et les émotions exacerbées par une situation aberrante.

Que dire du rôle de la famille dans cette question de survivance ? Selon Roby, à un certain moment « la famille franco-américaine est invitée... à jouer un rôle plus grand, à devenir la pierre angulaire de la survivance ». À cet égard, il est significatif de noter que la Fédération féminine franco-américaine adopta en 1951, date de sa fondation, la devise, « Protégera nos foyers ». Parrainée par le Comité d’orientation franco-américaine, lui-même issu du Comité permanent de la Survivance française en Amérique, fondé au lendemain du Deuxième Congrès de la langue française tenu à Québec en 1937, cette fédération à caractère régional est composée d’associations féminines déjà constituées. Mais en 1951 il était déjà trop tard. La Fédération féminine franco-américaine se trouve donc vouée à un combat d’arrière-garde. Elle tient tout de même haut le flambeau d’une survivance d’ordre culturel qui est tout à son honneur. Une étude sociologique sur les femmes de cette fédération se prépare actuellement par une sociologue travaillant à l’Université du Connecticut.

[141]

Les préparatifs pour le Troisième Congrès de la langue française, celui de 1952, ayant stimulé la fondation de la Fédération féminine franco-américaine, on dépensera beaucoup d’énergie en Nouvelle-Angleterre, après ce même congrès, pour fonder une association de la jeunesse franco-américaine. L’organisme a vivoté pendant quelques années seulement. Ses fondateurs étant encore disponibles, la technique de l’histoire orale pourrait servir d’outil utile pour tenter de comprendre le pourquoi de cet échec majeur.

Il reste aussi aux chercheurs à analyser en profondeur le comportement des deux dernières générations, en essayant de comprendre ce que le mot survivre sous-entend de sacrifices et d’acharnement quotidiens dans une Nouvelle-Angleterre différant du tout au tout du Québec. Dans cette optique, François Weil écrit au sujet de ces générations nées aux États-Unis. « Après la Seconde Guerre mondiale, l’individualisme prit le pas sur le sentiment communautaire [94] ».

Vers la fin de sa communication, Roby établit une liste de tous les liens qui ont uni pendant des générations Québécois et Franco-américains. Dans cet ordre d’idées, je fais mienne la suggestion de Roby d’étudier de plus près le rôle central joué par les communautés religieuses. Ce sont ces communautés qui ont maintenu les liens culturels les plus prometteurs d’avenir entre le Québec et ses émigrés. Ce sont elles qui ont assuré pendant des générations, et cela jusqu’à une époque encore très proche de la nôtre, la transmission des valeurs du Canada français traditionnel. Les archives de ces communautés religieuses recèlent des trésors qui ont été à peine effleurés.

Parmi les défenseurs des Franco-américains, cités plus haut, c’est E.B. Ham, professeur à l’Université Yale, qui a été l’observateur le plus sympathique du groupe. En étudiant les associations dont se sont dotés les Franco-américains, il a affirmé au sujet de l’Association canado-américaine, une société fraternelle d’assurances-vie dont 40% des membres se trouvent au Québec, « ses activités là-bas (au Québec) confirment effectivement le fait que la survivance franco-américaine doit être constamment nourrie par-delà la frontière [95] ». Une étude comparative de la fondation, du développement, des effectifs et de l’optique culturelle de chacune des deux sociétés de secours mutuel fondées en Nouvelle-Angleterre [96] pour les émigrés du Québec serait révélatrice.

Loin de vouloir limiter la recherche à l’élite franco-américaine, Roby, parlant plus loin de la faveur dont jouit la recherche dans les sciences humaines sur les groupes ethniques aux États-Unis, ajoute, « Rien de surprenant... à ce que l’historien consacre autant d’attention, sinon davantage, au <monde ordinaire> qu’à l’élite ». Dans ce contexte, il faudrait ajouter aux noms de Frances Early et de Philip Silvia, cités par Roby, celui de C. Stewart Doty qui prépare un livre sur les Franco-américains à partir d’interviews avec des chômeurs des années 30 et de Gérard Brault qui en écrit un basé sur l’expérience vécue des siens.

[142]

Je partage néanmoins l’avis de Roby qui affirme aussi, « l'histoire du monde ordinaire ne doit pas nous détourner de celle des élites ». Roby souhaite que des biographies soient écrites sur les personnalités les plus marquantes de la Nouvelle-Angleterre. Ces études montreraient, comme il le dit lui-même, « à quel point le Québec demeure présent dans leur univers mental ».

Au premier colloque de l’Institut français que je dirige au Collège de l’Assomption à Worcester, Massachusetts, Yolande Lavoie a émis le vœu, entériné par Roby, que son travail à elle sur l’émigration du Québec vers les États-Unis, ainsi que la magistrale étude de Ralph Vicero sur l’immigration des Canadiens français en Nouvelle-Angleterre de 1840 à 1900 soient poursuivis pour inclure les années qui ont suivi et pour étudier l’impact du rapatriement sur les sociétés québécoise et franco-américaine.

Le phénomène de « migration à la chaîne » mérite aussi d’être étudié. A ce sujet, Ralph Vicero, au Premier Colloque de l’Institut français (1980), cite l’exemple du village de Saint-Ours dont les émigrés se dirigent pour la plupart vers Worcester et les villages environnants.

Il reste aussi à localiser, à répertorier et à analyser les journaux franco-américains. C’est en suivant au jour le jour les colonnes du journal franco-américain de Biddeford, Maine, La Justice, que Michael Guignard a pu nous livrer, dans sa thèse de doctorat datant de 1976 [97], une étude exhaustive sur les Franco-américains de cette ville dont 56% de la population s’est déclarée de souche franco-américaine dans le recensement de 1980.

Madeleine Giguère, sociologue franco-américaine, analyse présentement les données du recensement de 1980 afin de constituer un profil socio-économique du Franco-américain d’aujourd’hui.

Il faudrait aussi étudier l’évolution, ou plutôt la régression, du français parlé et écrit par les Franco-américains, les avantages et les désavantages d'un bilinguisme mal assimilé, ce qui reste des coutumes et des traditions apportées du Québec, la femme comme ouvrière d'usine aussi bien que comme gardienne du foyer, et j’en passe.

C’est aux portes mêmes du Québec que se trouvent ces centaines de milliers d’individus de sang canadien-français. Dès le dernier quart du XIXe siècle, ces autres vous-mêmes se sont trouvés en situation d’affrontement massif avec la civilisation américaine. Il faut à tout prix que les chercheurs des deux côtés de la frontière se mettent à l’oeuvre pour continuer et ajouter aux travaux solides déjà menés à bien. Comme le souligne Roby, « il existe un matériel en quantité et qualité suffisantes pour justifier une présence accrue du fait franco-américain dans les programmes d’études et de recherche universitaires, tant au Québec qu’en Nouvelle-Angleterre ».

[143]

Comment les habitants et les villageois du Québec se sont-ils comportés comme ouvriers en milieu urbain ? Il faudra que soit scrutée chaque étape successive vécue par ces êtres humains sur la route qui va du Québec aux Petits Canadas et de l’ostracisme à l’assimilation.

Donnons-nous rendez-vous dans les Petits Canadas de la Nouvelle-Angleterre. Vous y entendrez votre langue maternelle avec des résonances de la fin du siècle dernier dans la bouche de ceux qui pourraient être vos grands-parents. Regardez de près ces Franco-américains. En plongeant votre regard dans le leur vous verrez un autre vous-même, influencé par des forces différentes de celles qui vous auront modelés. Sachez que dans le coeur de ces descendants d’émigrés du Québec bat le même coeur que le vôtre, « le coeur le plus humain de tous les cœurs humains : il n’a pas changé [98] ».

[144]

NOTES
du commentaire 2 sur le chapitre 4


[1] Jacques Ducharme, The Shadows of the Trees. The Story of French Canadians in New England (New York, Harper and Brothers, 1943) : 3.

[2] Richard S. Sorrell, The Sentinelle Affair (1924-1929) and Militant Survivance. The Franco-American Experience in Woonsocket, Rhode Island (thèse de Ph.D., N.Y.S.U. at Buffalo, 1975) : 400.

[3] Pierre Anctil, A Franco-American Bibliography. New England (Bedford, National Materials Development Center, 1979) : vi.

[4] Claire Quintal et André Vachon (sous la direction de). Situation de la recherche sur la Franco-américanie, Québec, Le Conseil de la Vie française en Amérique, 1980, 100 p.

[5] Pour éviter toute confusion au lecteur peu familier avec l’histoire constitutionnelle du Québec, nous utiliserons l’expression « le Québec » pour désigner l'entité géographique et politique connue sous le nom de Bas-Canada (1791-1941), Canada-Est (1841-1867) et province de Québec (1867-).

[6] À titre d’exemples : Rapport du Comité spécial de l'Assemblée législative nommé pour s'enquérir des causes et de l'importance de l'émigration qui a lieu tous les ans du Bas-Canada vers les États-Unis, Montréal, Louis Perreault, 1849, 96 p. ; Le Canadien émigrant, par douze missionnaires des Townships de l'Est, Québec, Côté, 1851,46 p. ; Rapport du Comité spécial nommé pour s’enquérir des causes de l’émigration du Canada aux États-Unis d'Amérique ou ailleurs, Toronto, John Lovell, 1857, 149 p.

[7] Guildo Rousseau, L’image des États-Unis dans la littérature québécoise (1775-1930), Sherbrooke, Éditions Naaman, [1981], en particulier le chapitre VI intitulé « L’abîme des facteries », p. 152-181.

[8] Mgr Thomas Cooke, Circulaire, 22 janvier 1864 (rédigée par J.-F. Laflèche) ; Édouard Hamon, Exil et Patrie. Drame en cinq actes, Montréal, Librairie Beauchemin, [1882], 77 p. ; Léon Provancher, « Études sur l’émigration des Canadiens français aux États-Unis », dans L’Écho du Cabinet de lecture paroissial de Montréal, 14 (1872) : 736-746 ; Charles-Edmond Rouleau, L’Émigration. Ses principales causes, Québec, Léger Brousseau, 1896, 149 p. ; Benjamin Suite, « Un besoin pressant », dans La Revue Canadienne, 6 (1869) : 807-814.

[9] Dans P. Ph. Charette (sous la direction de). Noces d’or de la Société Saint-Jean-Baptiste. Compte rendu officiel des fêtes de Montréal (Montréal, Typ. du journal Le Monde, 1884) : 177.

[10] Ibid., p. 335.

[11] Robert Rumilly, Histoire des Franco-américains, Montréal, édité par l’auteur, 1958, passim. Soulignons en particulier le Mémoire sur la situation des Canadiens français aux États-Unis de l’Amérique du Nord, Rome, Imprimerie A. Befani, 1896, que Mgr Antoine Racine, évêque de Sherbrooke, laisse en 1892 au préfet de la propagande, le cardinal Ledochowski et la lutte implacable que mène J.-L.-K. Laflamme dans La revue franco-américaine, de 1908 à 1912, contre les visées assimilatrices de Mgr Walsh, évêque de Portland et de l’épiscopat irlandais en Amérique du Nord. Voir aussi certains écrits de Mgr L.-A. Pâquet : L’Église et les survivances nationales, Brest, Presses Libérales, 1924, 24 p. ; « L’Église et les clergés nationaux ». Le Canada français, 14, 2 (oct. 1926) : 85-91.

[12] Georges Bellerive, Orateurs canadiens aux États-Unis. Conférences et discours (Québec, Imprimerie H. Chassé, 1908) : 155.

[13] Robert Rumilly, op. cit., p. 290. On lui rappellera cette déclaration après sa condamnation des Sentinellistes en 1929 : L'Affaire de Providence et la crise religieuse en Nouvelle-Angleterre, Montréal, 1929, 22 p.

[14] Voir John Higham, Strangers in the Land. Patterns of American Nativism, 1860-1925. New Jersey. Rutgers University Press, 1955 ; dans le cas de la Nouvelle-Angleterre, on lira aussi avec grand profit : Barbara M. Solomon, Ancestors and Immigrants. A Changing New England Tradition, Chicago, The University of Chicago Press, 1956.

[15] Pierre Anctil, « Chinese of the Eastern States, 1881 », Recherches Sociographiques, 22, 1 (janv.-av. 1981) : 125-131 ; Pierre Anctil, « L'identité de l'immigrant québécois en Nouvelle-Angleterre. Le rapport Wright de 1882 », Recherches sociographiques, 22, 3 (sept.-déc. 1981) :331-361.

[16] Calvin E. Amaron. The Evangelization of the French Canadians of New England, Lowell, Campbell and Hanscom, 1885 ; Calvin E. Amaron, Your Heritage or New England Threatened, Springfield (Mass.), French Protestant College, 1891.

[17] Sur la perception qu’ont les Américains du Franco-américain, il existe peu ou pas d’études spécialisées mais une abondante littérature. En plus des nombreux commentaires, discours, éditoriaux, le lecteur lira avec profit les travaux et articles suivants fournis à titre d’exemples : Albert L. Bartlett, « The Transformation of New England », Forum, New York, 7(août 1889) : 634-644 ; Robert Cloutman Dexter, The Habitant Transplanted : A Study of the French Canadian in New England, thèse de Ph.D., Clark University, 1923 ; Robert C. Dexter, « Fifty-fifty Americans », World’s Work, 47, 4 (août I924) : 336-371 ; Henry Loomis Nelson, « French Canadians in New England », Harper’s New Monthly Magazine, 87, 517 (juill. 1893) : 180-187 ; William Z. Ripley, « Race Factors in Labor Unions », Atlantic Monthly, 93, 557(mars 1904) : 299-308 ; John Talbot Smith, « The Truth about the French Canadians », New York, Catholic World, ( 1889) : 14 p. ; Egbert C. Smyth, « The French Canadians in New England », Proceedings of the American Antiquarian Society, 7 (1892) : 316-336.

[18] Honoré Beaugrand, Jeanne la fileuse, Fall River (Mass.), Société de publication de l’indépendant, 1878 ; Thomas-Aimé Chandonnet, Notre-Dame-des-Canadiens et les Canadiens aux États-Unis, Montréal, Georges-E. D. Desbarats, 1872 ; Hugo-A. Dubuque, Les Canadiens français de Fall River (Mass.), notes historiques, Fall River, Mass., Imprimerie du journal Le Castor, 1883 ; Édouard Hamon, Les Canadiens-Français de la Nouvelle-Angleterre, Québec, N.S. Hardy, 1891 ; Edmond de Nevers, L’Avenir du peuple canadien-français, Paris, Jouve et Boyer, 1896 et L’Ame américaine. Les origines, la vie historique. Paris, Jouve et Boyer, 1900, 2 vol. ; Télesphore Saint-Pierre, « La marche ascendante de notre race. Trois millions de Canadiens-français en Amérique », H.-J.-J.-B. Chouinard, Annales de la Société Saint-Jean-Baptiste de Québec, 4 (1902) :441-462 ; Jean-Frédéric Audet, Histoire de la congrégation canadienne de Winooski, au Vermont, Montréal, Imprimerie de l’Institution des Sourds-Muets, 1906.

[19] Pour les communications de leurs représentants, voir H.-J.-J.-B. Chouinard (sous la direction de). Fête nationale des Canadiens-français, célébrée à Québec en 1880, Québec, Imprimerie A. Côté et cie, 1881 ; P. Ph. Charette (sous la direction de). Noces d'or de la Saint-Jean-Baptiste. Compte rendu officiel des fêtes de 1884 à Montréal, Montréal, Typ. du journal Le Monde, 1884.

[20] Félix Gatineau. Historique des conventions générales des Canadiens-Français aux États-Unis, 1865-1901, Woonsocket (R.L), L’Union Saint-Jean-Baptiste d’Amérique, 1927. Ce volume est une véritable mine d’or pour l’étude de l’idéologie des leaders franco-américains.

[21] Voir Ferdinand Gagnon, sa vie et ses œuvres, Worcester (Mass.), C.F. Lawrence et Cie, 1886.

[22] P.U. Vaillant, « Notes biographiques sur messire P.J.B. Bédard », La Revue franco-américaine, 2, 2 (déc. 1908) : 126-134 ; 2, 3(janv. 1909) : 212-222 ; 2, 4(fév. 1909) : 286-308 ; Charles Daoust et Eugène Breault, Histoire des Canadiens-français du Rhode Island. Nos sociétés et nos bienfaiteurs, Woonsocket, 1895 ; J. L. K. Laflamme, 17 articles intitulés « Les Canadiens aux États-Unis », parus dans La Revue canadienne en 1901 et 1902 ; D.-M.-A. Magnan, Histoire de la race française aux États-Unis, Paris, Charles Amat, 1913 et Notice historique ; Notre-Dame de Lourdes de Fall River, Mass., Québec, Imprimerie Le Soleil, 1925 ; Alexandre Belisle, Histoire de la presse franco-américaine, Worcester (Mass.), L’Opinion publique, 1911 et Livre d'or des Franco-américains de Worcester, Massachusetts, Worcester, Compagnie de Publication Belisle, 1920 ; Louis Lalande, Saint-Antoine de New Bedford, Mass., Montréal, Imprimerie du Messager, 1913 ; Joseph-Arthur D’Amours, Saint-Mathieu de Central faits ; une paroisse de langue française aux États-Unis, Québec, l’Action Sociale, 1917 ; Félix Gatineau, Histoire des Franco-américains de Southbridge, Mass., Framingham (Mass.), Lakeview Press., 1919 ; Marie-Louise Bonier, Débuts de la colonie franco-américaine de Woonsocket, R.I., Framingham (Mass.), Lakeview Press, 1920 ; Bruno Wilson, L'Evolution de la race française en Amérique : Vermont, New Hampshire, Connecticut, Rhode Island, Montréal, Beauchemin, 1921 ; six études intéressantes sur la situation du français en Nouvelle-Angleterre dans Premier congrès de la langue française au Canada, Québec 1912, Mémoires, Québec, Imprimerie de l’Action Sociale Limitée, 1914.

[23] Saint-Pierre, « La marche ascendante... », p. 461.

[24] D.-M.-A. Magnan, Histoire de la race française aux États-Unis (Paris, Charles Amat, 1913) : 279.

[25] Edmond de Nevers, L’avenir du peuple canadien-français (Paris, Jouve et Boyer, 1896) : 326.

[26] Édouard Hamon, Les Canadiens-Français de la Nouvelle-Angleterre (Québec, N.S. Hardy, 1891) : 5.

[27] Dans Félix Gatineau (sous la direction de). Historique des conventions générales des Canadiens français aux États-Unis, 1865-1901 (Woonsocket (R.I.), 1927) : 406.

[28] À titre d’exemples : Henri d’Arles, Le français dans le New Hampshire, 1919, tract no 5 ; Georges-Albert Guertin, La langue française et le christianisme, 1919, tract no 3 ; D.-M.-A. Magnan, La paroisse franco-américaine, 1919, tract no 11.

[29] Voir en particulier les travaux de Hamon, de Nevers, Laflamme, Magnan, Jules-Paul Tardivel, La situation religieuse aux États-Unis. Illusions et réalités, Montréal, Librairie Saint-Joseph, Cadieux et Derôme, 1900 et J.B. Geniesse, Pour aider à la solution de questions qui s'agitent aux États-Unis et au Canada, Rome, 1912. On y trouvera une description et une interprétation des principaux épisodes de cette lutte. Les monographies paroissiales laissent entendre que, dans les débuts, la situation entre les deux groupes était moins tendue qu’elle ne le deviendra par la suite.

[30] À titre d’exemples seulement, parce que trop nombreux pour être recensés dans le cadre de ce travail : Almanach canadien-français religieux et statistique pour la Nouvelle-Angleterre pour l’année 1886, Woonsocket (R.I.), 1886 ; Albert Bélanger, Guide officiel des Franco-américains, Fall River (Mass.), 1922 à 1940 ; Arthur Baribault, Histoire et statistiques des Canadiens-Américains du Connecticut, 1885-1898, Worcester (Mass.), Imprimerie de l’Opinion publique, 1899 (essentiel pour les incidents de Danielson ; Odule Laplante, « Les Franco-américains du Maine » [recensement]. La Revue franco-américaine, 2, 3 (janv. 1909) : 206-209.

[31] Adjutor Rivard, « L’Action française par les Canadiens en Amérique », Les Quarante ans de la Société historique franco-américaine (Boston, 1940) : 172.

[32] Henri Bourassa, « Les Franco-américains », Le Bulletin de la Société historique franco-américaine (1956) : 167.

[33] Lionel Groulx, L'amitié française d’Amérique (Montréal, Bibliothèque de l’Action française, 1922) : 9.

[34] Elphège-J. Daignault, Le vrai mouvement sentinelliste en Nouvelle-Angleterre, 1923-1929, et l’affaire du Rhode Island, Montréal, Éditions du Zodiaque, 1935 ; J.-Albert Foisy, Histoire de l’agitation sentinelliste dans la Nouvelle-Angleterre, 1925-1928, Woonsocket, La Tribune Publishing Co., 1928 et l’Association canado-américaine. Les Franco-américains peints par eux-mêmes, Montréal, Éditions Albert Lévesque, 1936. Ces conférences, prononcées par des sympathisants de la cause sentinelliste, font le bilan de la situation des Franco-américains en Nouvelle-Angleterre, de leurs institutions nationales et de ce qui les menace. Pour comprendre la portée de ces conférences, il faut les replacer dans le contexte de l’agitation sentinelliste et des appuis que sollicitaient auprès du clergé et des nationalistes québécois les adversaires en présence.

[35] Josaphat Benoît, L'âme franco-américaine (Montréal, Éditions Albert Lévesque, 1935) : 226.

[36] Hormidas Hamelin, perçu par la majorité comme un tenant « extrémiste » de l’intégration au milieu américain, écrit : « ... ceux qui pour canadianiser les Franco-américains de la génération actuelle ignorent leurs besoins, ne font pas une meilleure besogne, [que les Irlandais plus tôt] nuisent également à la religion et travaillent contre les meilleurs intérêts de leurs frères ». Notre-Dame-des-Sept-Douleurs ou une paroisse franco-américaine (Copyright by the author, 1916) : 90. En plus de cette très intéressante monographie paroissiale, on peut lire du même auteur Lettres à un ami sur la patrie, la langue et la question franco-américaine, Montréal, Imprimerie des sourds-muets, 1930.

[37] Josaphat Benoît, L’âme franco-américaine (Montréal, Éditions Albert Lévesque, 1935) : 148. À notre avis, le meilleur exposé de l’idéologie de la survivance.

[38] En plus du travail cité ci-dessus, voir pour un résumé, Josaphat Benoît, « L’âme franco-américaine », Bulletin de la société historique franco-américaine (1935) : 3-10.

[39] Adrien Verrette, La Croisade franco-américaine, Manchester, L’Avenir national, 1938. Mgr Verrette est un infatigable chroniqueur et mémorialiste à qui nous devons un nombre considérable de monographies paroissiales, albums-souvenirs, articles et conférences. Cette perception du fait franco-américain a son écho au Québec. Voir : Alexandre Dugré, Notre survivance française. Comité régional du Rhode Island, 2e Congrès de la langue française à Québec, 27 juin-1er  juillet 1937, Montréal, Imprimerie du Messager, 1937 ; Paul-Émile Gosselin, « Nos frères des États-Unis », Le Canada français, 24, 8 (av. 1937) : 750-759 ; Cardinal Rodrigue Villeneuve, Le fait français en Amérique, Québec, Librairie de l’Action catholique, 1938.

[40] Alexandre Goulet, Une Nouvelle-France en Nouvelle-Angleterre, Paris, Édouard Duchemin, Librairie de jurisprudence ancienne et moderne, 1934 ; Jacques Ducharme, The Shadows of the Trees. The Story of the French Canadians in New England, New York, Harper and Brothers, 1943 ; Maximilienne Tétrault, Le rôle de la presse dans l’évolution du peuple franco-américain de la Nouvelle-Angleterre, Marseille, Imprimerie Ferran et Cie, 1935 ; Mary-Carmel Therriault, La littérature française de Nouvelle-Angleterre, Montréal, Fides, 1946 ; Ulysse Forget, La paroisse Saint-Jean-Baptiste de Warren, état du Rhode Island (1877-1952), Montréal, Imprimerie populaire, 1952.

[41] Edward B. Ham, « Programme de recherches franco-américaines ». Le Canada français, 25, 2 (oct. 1937) : 216.

[42] William Macdonald, « The French Canadians in New England », The Quarterly Journal of Economics, 12 (av. 1898) :245-279 ; A. R. Lower, « New France in New England », New England Quarterly, 2, 2(av. 1929) : 278-295 ; Edward B. Ham, « Joumalism and the French Survival in New England », New England Quarterly, 1 l (mars 1938) : 88-107 ; « French National Societies in New England », New England Quarterly, 12 (juin 1939) :315-322 ; « En marge de la survivance franco-américaine », Le Canada français, 27, 3(nov. 1939) : 261-280 ; Richard Allen Foley, From French-Canadian to Franco-American : A Study of the Immigration of the French Canadian into New England, 1650-1935, thèse de Ph.D., Harvard University, 1939 ; Granville T. Prior, The French Canadians in New England, thèse de M.A., Brown University, Providence, (R. I.), 1932 et Marcus Lee Hansen, Mingling of the Canadian and American Peoples, New Haven, Yale University Press, 1940.

[43] Jacques Ducharme, « Après trente ans ». Les Franco-américains. La promesse du passé, les réalités du présent. Colloque coordonné par le National Materials Development Center for French and Portuguese, 1976, Bedford (N.H.), 1976, p. 17. C’est l’ensemble des communications qu’il faut lire pour connaître la perception que les Franco-américains ont présentement d’eux-mêmes. À ce propos, sont aussi à consulter les 12 conférences prononcées lors du XIe Congrès des Franco-américains tenu à Bedford (N.H.), en septembre 1974 : Le Franco-américain au 20e siècle. Comité de Vie franco-américaine, 1976.

[44] Voir les communications de Richard Santerre, Thomas Landry, Paul Paré et Claire Quintal, lors du Colloque de 1976.

[45] À titre d’exemples d’une très abondante littérature, voir, en plus des études déjà citées : Comité d’orientation franco-américaine. Notre vie franco-américaine, Boston, 1949 ; Ernest R. D’Amours, « L’avenir de la culture française en Amérique du Nord », Le Canado-américain, 3, 2-3 (1962) : 14-20 et 26-32 ; Thomas-M. Landry, Mission catholique et française en Nouvelle-Angleterre, Québec, Éditions Ferland, 1962 ; Paul Chassé, « Les Canuks et les Cajuns, les États-Unis d’Amérique », Culture française, 3 (aut. 1976) : 38-49 ; Richard Santerre, « En quoi le français peut-il encore être utile en Amérique du Nord ? », Forces, 46-47(1979) : 48-57.

[46] En ce qui concerne les États-Unis, lire le remarquable bilan que fait Michael Kammen, « The Historian’s Vocation and the State of the Discipline in the United States » M. Kammen (sous la direction de), The Past Before Us (Ithaca, Cornell University Press, 1980) : 19-46.

[47] Robert Rumilly, Histoire des Franco-américains, Montréal, 1958. C’est aussi le thème majeur de deux études de Hervé B. Lemaire, « Les Franco-américains de Fall River », Conférence de l'Institut Franco-américain (Brunswick (Maine), Bowdoin College, 1961 ) :39- 49 et « Franco-American Efforts on Behalf of the French Language in New England » dans Joshua Fishman (sous la direction de), Language Lovaltv in the United States (The Hague, Mouton, 1966) : 253-279.

[48] Le Mohican, « Le carquois d’un Mohican », Le Canado-américain, 1, 2(août-sept. 1958) : 9.

[49] Mason Wade, « The French Parish and Survivance in Nineteenth Century New England », The Catholic Historical Review, 36, 2(juill. 1950) : 163-189.

[50] Sœur Florence Marie Chevalier, The Role of French National Societies in the Socio-Cultural Evolution of the Franco-Americans of New England from 1860 to the Present : an Analytical Macro-Sociological Case in Ethnic Integration Based on Current Social System Models, thèse de Ph.D., Catholic University of America, 1972.

[51] Gaston Carrière, Histoire documentaire de la Congrégation des Missionnaires des Oblats de Marie-Immaculée dans l'Est du Canada. 2e partie. Dans la seconde moitié du XIXe siècle (1861-1900), tome X, Ottawa, Éditions de l’Université d’Ottawa, 1972 ; J.-Antonin Plourde, Dominicains au Canada. Livre des documents. Vol. 2 : les cinq fondations avant l’autonomie (1881-1911), s.l, 1975.

[52] J.-Antonin Plourde, « Sainte-Anne de Fall River ». Le Rosaire (juin-juill.-août 1969) : 56 p. et « 1870-1970. Cent ans de vie paroissiale, SS. Pierre et Paul de Lewiston », Le Rosaire (1970) : 56 p.

[53] Kenneth Woodbury, « An Incident between the French Canadians and the Irish in the Diocese of Maine in 1906 », The New England Quarterly, 60 (juin 1967) : 260-269.

[54] Dennis R. Garff, Heirs of New France : an Ethnic Minority in Search of Security. A Study of Canadian Society and Politics in Late Nineteenth Century New England and Quebec Province, Fletcher School of Law and Diplomacy, 1970.

[55] Philip Silvia, « The Flint Affaire French-Canadian Struggle for Survivance », The Catholic Historical Review, 65, 3 (juill. 1979) : 414-435 ; Richard S. Sorrell, The Sentinelle Affair (1924-1929) and Militant Survivance : The Franco-American Expérience in Woonsocket, R.I., thèse de Ph.D., State University of New York at Buffalo, 1975 ; il a publié un résumé satisfaisant dans « Sentinelle Affair (1924-1929), Religion and Militant Survivance in Woonsocket, R.I. », Rhode Island History, 36, 3 (août 1977) : 67-80.

[56] George F. Thériault, The Franco-Americans in a New England Community. An Experiment in Survival, thèse de Ph.D., Harvard University, 1951 ; pour un résumé voir : « The Franco-Americans of New England », Mason Wade (sous la direction de), Canadian Dualism/La dualité canadienne (Québec, Presses de l’Université Laval, 1960) : 392-411.

[57] Peter Haebler, Habitants in Holyoke : the Development of the French Canadian Community in a Massachusetts City, 1865-1910, thèse de Ph.D., University of New Hampshire, 1976. Dommage que ces deux études reflètent une connaissance insuffisante du Québec.

[58] Michael J. Guignard, La foi. La langue. La culture. The Franco-Americans of Biddeford, Maine, Michael Guignard, 1982. Gerald Blazon, A Social History of the French-Canadian Community of Suncook, New Hampshire (1870-1920), University of New Hampshire, 1974 ; Pierre Anctil, Aspects of Class Ideology in a New England Ethnie Minority : the Franco-Americans of Woonsocket, Rhode Island (1865-1929), thèse de Ph.D., New School for Social Research, 1980 ; Pierre Anctil avait déjà attiré notre attention sur l’importance de son sujet dans « La franco-américanie ou le Québec d’en bas ». Cahiers de géographie du Québec, 23, 58 (av. 1979) :39-53. N’ayant pas lu, pour diverses raisons, les trois thèses ci-dessus, je juge plus prudent de ne pas les commenter.

[59] Gilles Paquet, « L’émigration des Canadiens français vers la Nouvelle-Angleterre, 1870-1910 : prises de vue quantitatives », Recherches sociographiques, 5, 3 (sept.-déc. 1964) :319-371 ; Yolande Lavoie, L’émigration des Canadiens aux États-Unis avant 1930. Mesure du phénomène, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 1972 ; et « Les mouvements migratoires des Canadiens entre leur pays et les États-Unis au XIXe et au XXe siècles : étude quantitative », Hubert Charbonneau (sous la direction de), La population du Québec : études rétrospectives (Les éditions du Boréal Express, 1973) : 73-88 ; et L’émigration des Québécois aux États-Unis de 1840 à 1930, Québec, Éditeur officiel du Québec, 1979 ; Ralph D. Vicero, Immigration of French Canadians to New England, 1840-1900 : A Geographical Analysis, thèse de Ph.D., University of Wisconsin, 1968.

[60] En plus des études mentionnées ci-dessus, voir : Ralph D. Vicero, « Sources statistiques pour l’étude de l'immigration et du peuplement canadien-français en Nouvelle-Angleterre au cours du XIXe siècle ». Recherches sociographiques, 12, 3 (sept.-déc. 1971) : 361-377.

[61] Dans Claire Quintal (sous la direction de). Situation de la recherche sur la Franco-américanie, Premier colloque de l’Institut français du Collège de l’Assomption, mars 1980 (Québec, 1980) : 30.

[62] Pour cette période et la suivante, on trouvera des informations supplémentaires dans : Rolande Boulanger, L'émigration canadienne-française aux États-Unis : 1920-1930, thèse de M.A., Université McGill, 1972 et Claude Dionne, L'émigration du Canada aux États-Unis de 1945 à 1968, thèse de M.A., Université de Montréal, 1971.

[63] Donald Chaput, « Some Repatriement Dilemmas », Canadian Historical Review, 44 (déc. 1968) :400-412 et John Little, « La Patrie : Quebec’s Repatriation Colony, 1875-1880 », Communications historiques, 1977 (Société historique du Canada, 1977) : 67-85.

[64] Albert Faucher, « L’émigration des Canadiens français aux États-Unis au XIXe siècle : position du problème et perspective ». Recherches sociographiques, 5, 3 (sept.-déc. 1964) : 277-317 ; et « Explications socio-économiques des migrations dans l’histoire du Québec », Mémoires de la Société Royale du Canada, quatrième série, tome XIII (1975) : 91-107.

[65] Yves Roby, « L’évolution économique du Québec et l’émigrant (1850-1929) », L’émigrant québécois vers les États-Unis : 1850-1920 (Québec, Le Conseil de la vie française en Amérique, 1982) : 8-20. (Deuxième Colloque de l’Institut français du Collège Assomption, Worcester, Mass., mars 1981). Voir aussi Jean Hamelin et Yves Roby, Histoire économique du Québec, 1851-1896, Montréal, Fides, 1971.

[66] Ralph Vicero, op. cit, James Allen, « Migration Fields of French-Canadian immigrants to Southern Maine », Geographical Review, 62, 3 (juill. 1972) : 366-383 et « Franco-Americans in Maine : A Geographical Perspective », Acadiensis, 4, l (aut. 1974) : 32-66. Voir aussi Sylvie Rimbert, « L’immigration franco-canadienne au Massachusetts », Revue canadienne de géographie, 8, 3-4 (juill.-oct. 1954) : 75-85.

[67] Voir par exemple : Rémi Tremblay, Pierre qui roule. Souvenirs d’un journaliste, Montréal, Beauchemin, 1923.

[68] Pierre Savard, « Relations between French-Canadian and American Catholics in the last third of the nineteenth century ». Culture, 31, l (mars 1970) : 24-39. Savard a déjà consacré une minutieuse étude à la présence des États-Unis dans l’œuvre de Tardivel, Jules-Paul Tardivel, la France et les États-Unis, Québec, Presses de l’Université Laval, 1967.

[69] Jean-Guy Lalande, Le mouvement sentinelliste : réflexions sur un problème de survivance, thèse de M.A., Université Laval, 1971.

[70] Claude Galarneau, Les collèges classiques au Canada français, Montréal, Fides, 1978.

[71] Voir surtout l’article de Nive Voisine, « Les valeurs religieuses de l’émigrant québécois » (Québec, Le Conseil de la vie française en Amérique, 1982) : 21-38.

[72] Regroupés sous le titre. Silhouettes franco-américaines, Manchester, Publications de l’Association canado-américaine, 1957.

[73] Yves Roby, « Ferdinand Gagnon », Dictionnaire biographique du Canada, XI (Québec, Presses de l’Université Laval, 1982) :362-364.

[74] Les volumes de Tamara Hareven et Randolph Langenback, Amoskeag : Life and Work in an American Factory-City, New York, Panthéon Books, 1978, de Dyke Hendricken, Quiet Presence : Histoires de Franco-américains en New England, Portland (Maine), Guy Gannett Publishing Co., 1980, et de Normand Lafleur, Les « Chinois » de l'Est ou la vie quotidienne des Québécois émigrés aux États-Unis de 1840 à nos jours, Montréal, Leméac, 1981, démontrent bien la richesse des informations que l’on peut tirer des enquêtes orales. Les textes de présentation des deux derniers sont toutefois beaucoup trop superficiels.

[75] Philip Silvia, The Spindle City : Labor, Politics and Religion in Fait River. Massachusetts, 1870-1905, thèse de Ph.D., Fordham University, 1973 ; Antony Coelho, Row of Nationalities : Life in Working Class Community : the Irish, English and French Canadians of Fall River, Massachusetts, 1850-1890, thèse de Ph.D., Brown University, 1980 ; Frances Early, French-Canadian Beginnings in an American Community : Lowell, Massachusetts, 1868-1886, thèse de Ph.D., Université Concordia, 1979 ; voir aussi l’ensemble des travaux présentés au troisième colloque annuel de l’Institut français du Collège de l’Assomption, Worcester, tenu en mars 1982 : The Little Canadas of New England, Assumption College, 1983.

[76] Iris S. Podea, « Quebec to <Little Canada> : the Coming of the French Canadians to New England in the Nineteenth Century », The New England Quarterly, 23, 3 (sept. 1950) : 365-380.

[77] Daniel Walkowitz, Worker City, Company Town. Iron and Cotton-Worker Protest in Troy and Cohoes, New York, 1855-84, Urbana University of Illinois Press, 1978 ; Tamara K. Hareven, Family Time and Industrial Time. The Relationship between the Family and Work in a New England Industrial Community, Cambridge, Cambridge University Press, 1982 ; Frances H. Early, « The French-Canadian Family Economy and Standard-of-Living in Lowell, Massachusetts, 1870 », Journal of Family History (été 1982) : 180-200.

[78] Richard Sorrell, « Sports and Franco-Americans in Woonsocket, 1870-1930 », Sports (aut. 1977) : 116-126.

[79] Ernest B. Guillet, French Ethnic Literature and Culture in an American City, Holyoke, Massachusetts, Amherst, University of Massachusetts, 1978.

[80] Paul-P. Chassé, Les poètes franco-américains de la Nouvelle-Angleterre (1875-1925), thèse de doctorat. Université Laval, 1968.

[81] Richard Santerre, Le roman franco-américain de la Nouvelle-Angleterre, 1878-1943, thèse de Ph.D., Boston College, 1974 ; le même auteur a préparé une imposante anthologie de la littérature franco-américaine pour le compte du National Materials Development Center : Littérature franco-américaine de la Nouvelle-Angleterre. Anthologie, 1980-1981, 9 vol. En même temps François Roche présentait au public : Les Francos de la Nouvelle Angleterre. Anthologie franco-américaine (XIXe siècle). Editions Lare, 1981.

[82] Armand B. Chartier, « Pour une problématique de l’histoire littéraire franco-américaine », Claire Quintal (sous la direction de). Situation de la recherche sur la Franco-américanie (Québec, Le Conseil de la Vie française en Amérique, 1980) : 81-100.

[83] Voir à ce propos les commentaires éclairés de Richard Sorrell, « L’histoire en tant que roman, le roman en tant qu’histoire. Le roman ethnique franco-américain de langue anglaise », Claire Quintal, op. cit., p. 64-81.

[84] Consulter à ce sujet le travail innovateur dirigé par Eric Waddell et Dean Louder sur les Québécois installés en Floride : « Les nouvelles migrations de Québécois : La Floride », Vie française, 36, 10-11-12 (1982).

[85] Si cela peut constituer une mesure quelconque du phénomène en question. Le Devoir avouait dans son édition du 21 janvier 1981 posséder une quatre-vingtaine de points de vente en Floride, chiffre que doivent dépasser très largement les journaux québécois plus populaires.

[86] Ce journal est disponible également au Québec, avec des bureaux à Hollywood en Floride et à Chambly au Québec.

[87] Voir de Calvin Veltman : « Le sort de la francophonie aux États-Unis », Les Cahiers québécois de démographie, 9 (1980) : 43-58 ; et Language Shift in the United States, Amsterdam, Mouton, 1983, 432 p.

[88] L’exception demeure Robert B. Perreault qui a fait paraître en 1983, à Manchester (N.H.), un roman en français intitulé : L'Héritage.

[89] New York, McGraw Hill, 1963, 152 p.

[90] Garden City (N.Y.), Doubleday and Co., 1961, 239 p.

[91] Voir à ce sujet les études récentes de Gérard-J. Brault et de Irène Mailhot-Bernard.

[92] Voir Du continent perdu à l’archipel retrouvé. Le Québec et l’Amérique française, édité par Eric Waddell et Dean Louder, Québec, Presses de l’Université Laval, 1983, 312 p.

[93] « 50 Who Made the Différence. A Célébration of Fifty American Originals », Esquire, New York, 100, 6(déc. 1983).

[94] « Du Québec en Nouvelle-Angleterre : Les Franco-américains de Chicopee (Massachusetts) 1860- 1980 » (mémoire de maîtrise préparé sous la direction du professeur Jean-Marie Mayeur (Université de Paris-lV Sorbonne), 1983) : 80.

[95] « The French National Societies », The New England Quarterly (juin 1939) : 315-332, 321.

[96] Outre l’Association canado-américaine, fondée en 1896, et dont le siège social se trouve à Manchester, New Hampshire, il y a l’Union Saint-Jean-Baptiste, fondée en 1900, dont le siège social est à Woonsocket, Rhode Island.

[97] En 1982, Guignard a publié sa thèse à son compte dans un livre qu’il a intitulé La foi. La langue. La culture. The Franco-Americans of Biddeford, Maine.

[98] Louis Hémon, Maria Chapdelaine (Paris, Bernard Grasset, 1924) : 252.


Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 4 juillet 2021 15:42
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref