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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Perspectives étudiantes féministes. Actes électroniques. (2010)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir des Actes du colloque Perspectives étudiantes féministes. Actes électroniques. Colloque étudiant les 12 et 13 mars 2010 à l'Université Laval. Québec: Chaire Claire-Bonenfant - Femmes, savoirs et sociétés, Université Laval, 234 pp. [Autorisation accordée le 4 février 2013 par Hélène Charron, sociologue, professeure et chercheure associée, Chaire Claire-Bonenfant, Femmes, savoirs et société, Université Laval, de diffuser les Actes de ce colloque dans Les Classiques des sciences sociales.]

Introduction


Les études féministes constituent un champ de recherche relativement jeune. En Amérique du Nord, elles se sont développées d’abord dans les universités anglophones, dans les années 1970, sous l’appellation de women’s studies. Dans ces universités, les professeures ont rapidement compris l’importance de former des départements, de façon à assurer la pérennité de leurs efforts.

Du côté des universités québécoises francophones, c’est seulement dans les années 1970 et 1980 que les études féministes ont fait leur apparition dans les répertoires
de cours. Or, les professeures féministes francophones ont adopté une stratégie alternative à celle de leurs collègues anglophones. Craignant la dépolitisation et
la ghettoïsation des études féministes si ces dernières étaient regroupées dans un département distinct, elles ont préféré élaborer des cours féministes à l’intérieur
des programmes disciplinaires existants. La voie adoptée par les féministes francophones a contribué à questionner directement les savoirs androcentriques présentés dans les champs disciplinaires traditionnels et a rejoint une plus grande population d’étudiantes et d’étudiants.

À l’Université Laval, par exemple, les complicités entre professeures féministes se sont transformées en collaborations pluridisciplinaires de diverses natures : cours et projets de recherche pluridisciplinaires tels que le Diplôme d’études supérieures spécialisées (DESS) en études féministes et groupes de recherche comme le Groupe de recherche multidisciplinaire féministe (GREMF). Mais cette politique connaît une contrepartie : la plus faible institutionnalisation des études féministes dans les universités francophones fragilise leur statut qui demeure précaire.

Aujourd’hui les études féministes connaissent de grandes transformations dans les universités québécoises. La traduction française d’ouvrages majeurs de théoriciennes anglo-saxonnes – pensons notamment à celle, tardive, des travaux de Judith Butler – tout comme le rapprochement entre les universités anglophones et francophones du Québec – pensons ici à un événement tel que Back Off! organisé conjointement par le Women’s Studies Association of Concordia et le Centre des femmes de l’UQAM et dont la première édition date de 2008 – sont à la fois des moteurs et des manifestations de cette évolution. Les débats entre perspectives, voire la confrontation entre écoles de pensée, rendent les études féministes plus vivantes que jamais. Sous la pression des études gaies et lesbiennes, des queer studies et des études postcoloniales, elles n’ont pas disparu : au contraire, elles se sont enrichies. Elles ont même à bien des égards envahi des sphères traditionnelles du savoir en faisant une entrée dans des disciplines aussi variées que l’architecture et la médecine.

Néanmoins, les cours, les programmes et les activités scientifiques en études féministes sont perpétuellement à défendre. En dépit des enrichissements évoqués, et d’une pratique centrale à la réflexion féministe, qui consiste à importer au sein de ses champs académiques des outils de transformation sociale développés sur le terrain et des problématiques issues des luttes contre les inégalités de genre, la conservation des ressources dédiées aux études féministes demeure un défi.

En 2010, nous devons toujours défendre la scientificité et même la pertinence des études féministes dans nos universités et dans nos programmes, quand il ne s’agit
pas directement de lutter contre l’abolition des moyens qui conditionnent leur existence. C’est ainsi que nous voyions, dans l’organisation d’un colloque étudiant féministe à l’Université Laval, une occasion de promouvoir les études féministes comme perspective scientifique, mais aussi d’en faire un geste collectif.

En tant que jeunes chercheures et chercheurs en études féministes, il nous apparaît indispensable de prendre des initiatives et de créer des ponts avec les chercheures d’aujourd’hui et d’hier afin que la volonté de mettre fin aux inégalités de genre demeure vivante dans tous les sens du terme : vive, tenace et en évolution. Malgré un marasme social généralisé, la mobilisation féministe ne flanche pas dans le Québec d’aujourd’hui. Des rassemblements comme Rebelles sans frontières ou la Marche mondiale des femmes en sont des exemples évocateurs. Dans le monde scientifique, des colloques étudiants tels que Féminisme(s) en mouvement / Feminism(s) in motion tenu en 2008 à l’UQAM et Mettre en scène le(s) féminisme(s) : genre et sexualité sous les feux de la rampe en mai 2010 à McGill sont des démarches inspirantes de la relève du Québec, un mouvement auquel nous désirons contribuer.

Le colloque Perspectives étudiantes féministes

La première édition de Perspectives étudiantes féministes est née d’une forte volonté de donner un nouveau souffle aux études féministes à l’Université Laval.

Bien ancrées dans la communauté universitaire de par le rayonnement de l’Université féministe d’été, de la revue scientifique Recherches féministes et du Diplôme d’études supérieures spécialisées (DESS), les études féministes ne sont pas absentes du campus. Néanmoins, la diffusion des travaux des étudiantes et des étudiants qui s’intéressent aux inégalités de genre, de même que le réseautage féministe, sont une autre affaire. Même la Chaire Claire-Bonenfant Femmes, Savoirs et Sociétés, qui constitue une ressource inestimable, est un lieu peu investi par les nouvelles générations de chercheures de l’université si l’on pense à son potentiel. Il est vite apparu que l’absence de réseau entre les étudiantes et les étudiants travaillant dans une perspective féministe est un facteur (dé)structurant majeur auquel il faut prioritairement s’attaquer. Il explique que dans nos disciplines respectives, nous avons peine à poursuivre des recherches féministes : le manque de soutien intradisciplinaire n’est pas contrebalancé par une multidisciplinarité féministe qui peine à s’exercer faute de réseau suffisamment ancré et intégrateur pour les jeunes chercheures.


À l’initiative de deux professeures, Stéphanie Rousseau, professeure au Département de sociologie de l’Université Laval, et Louise Langevin, alors titulaire de la Chaire Claire-Bonenfant sur la condition des femmes (renommée depuis), une trentaine d’étudiantes des cycles supérieurs ont été conviées à une première réunion de réseautage en janvier 2009. Cet appel qui a lancé l’aventure et la détermination des initiatrices, que nous remercions, a été pour nous une source de motivation précieuse. Dans le déroulement du processus, la mise sur pied d’un colloque s’est vite imposée comme l’activité à privilégier. En amont, il contribuait au développement
des habiletés de communication nécessaires à toute carrière scientifique. En aval, il permettait d’offrir une voix aux jeunes chercheures et chercheurs en études féministes qui ont beaucoup à dire sur les inégalités sociales d’aujourd’hui.

Dès le départ, nous avions l’intention d’instaurer une structure collégiale pour mobiliser la communauté étudiante féministe. Le nombre incroyable d’étudiantes présentes lors de la première réunion, lequel témoignait d’un réel besoin de mobilisation, nous y encourageait. Pourtant nous avons dû restructurer notre organisation puisqu’au final peu de personnes se sont avérées disponibles pour s’impliquer dans le comité organisateur. Les étudiantes, en revanche, ont soutenu les membres du comité organisateur pendant l’événement.

Fortes du besoin de nous organiser ici même, à Québec, nous avons prévu dès le départ de faire deux appels à communications. Cette procédure nous assurait une meilleure visibilité pour une première édition, et par le fait même nous rassurait nous-mêmes quant à la participation et à la planification du colloque. Contre toute attente, le nombre de propositions a été considérable dès le premier appel à communications. Plus d’une vingtaine de réponses diversifiées ont été déposées. Nos critères ont été appliqués à la lettre pour la sélection : cohérence du résumé, rigueur scientifique et perspective féministe démontrée. Pour plusieurs, un colloque en études féministes à l’Université Laval était l’occasion d’une première communication scientifique ou d’un premier article revu par les paires avec la publication des Actes. Nous voulions, fidèles aux principes féministes, appuyer la démarche de toutes et tous. En ce sens, le deuxième appel à communications, à l’automne 2009, était une opportunité à saisir pour les personnes ayant reçu lors du premier appel une réponse négative et des commentaires critiques sur les éléments à bonifier.

Le colloque s’est déroulé les 12 et 13 mars 2010 et comprenait vingt-trois communications étudiantes. Deux panels se déroulaient simultanément pour permettre au grand nombre de personnes retenues de présenter leurs travaux. Toutes les séances ont été animées par une professeure ou une chercheure de l’Université Laval, spécialiste de la thématique abordée.

Il nous est apparu intéressant, pour ce colloque étudiant qui se voulait rassembleur, de programmer en matinée des conférences qui se déroulaient en plénière et qui donnaient l’occasion à toutes et tous de discuter des différents aspects de l’engagement féministe avec des chercheures reconnues. Dans cet esprit, une séance d’ouverture sur le développement des études féministes au Québec a été présentée conjointement par Huguette Dagenais, professeure émérite au Département d’anthropologie de l’Université Laval, et Francine Descarries, professeure au Département de sociologie de l’Université du Québec à Montréal, sous la présidence de Diane Lamoureux, professeure au Département de science politique de l’Université Laval. Le lendemain, une deuxième séance a abordé le thème de la démocratisation des savoirs féministes : Lucie Gélineau, professeure associée au Département de médecine sociale et préventive de l’Université Laval et chercheure au Centre de santé et de services sociaux de la Vieille-Capitale, ainsi que Lise Gervais, coordonnatrice générale de Relais-femmes, ont accepté notre invitation d’aborder les défis de la recherche féministe et de la transformation sociale. Plus d’une centaine de personnes ayant assisté au colloque, la pertinence des études féministes au Québec et à l’Université Laval nous semble sans équivoque.

Présentation des Actes

Le déroulement du colloque a largement dépassé nos attentes, tant sur le plan de la fréquentation, du sérieux des échanges, que de l’enthousiasme témoigné (un privilège des événements féministes!) et des motivations attisées. Nous espérons que vous trouverez dans ces Actes du colloque Perspectives étudiantes féministes autant de plaisir, de remises en question et de découvertes que nous en avons eus lors du colloque. Nous vous offrons ces Actes en version électronique, dans un format convivial et accessible gratuitement, dans le but avoué d’assurer la pérennité de l’événement et de faire découvrir ces jeunes chercheures et chercheurs en études féministes. Onze conférencières et conférenciers du colloque Perspectives étudiantes féministes y présentent une version remaniée de leur communication. Certaines y dévoilent les résultats de leurs travaux de recherche de maîtrise ou de doctorat alors que d’autres y explorent des auteures, des théories féministes ou des enjeux en marge de leurs études, mais toujours avec une même passion.

La première section des Actes présente les propos de Francine Descarries sur le développement des études féministes au Québec. Ce thème, retenu pour la conférence d’ouverture, nous tenait particulièrement à cœur, parce que la mémoire du travail qui a dû être accompli par nos prédécesseures, de même que celle des divers contextes qui ont mené au développement des études féministes – ou qui l’ont parfois freiné –, nous est, en tant que relève, nécessaire.

Les trois textes de la deuxième section des Actes présentent des réflexions portant sur le féminisme, de la théorie à la pratique. Alors que Soline Blanchard s’intéresse aux interactions entre « féminisme de chaire » et « féminisme de chair » à partir de sa trajectoire d’étudiante, de travailleuse et de militante, Marie-Hélène Deshaies aborde la question de la contribution des théories féministes à la recherche portant sur l’État et les politiques publiques et Dominique Tanguay se penche sur les principes et les enjeux de la recherche féministe.

La troisième section des Actes regroupe des points de vue féministes sur la situation des femmes à l’international. Le regard de Rose-Myrlie Joseph se pose sur l’articulation des rapports sociaux de sexe, de classe et de « race » dans le travail des femmes migrantes haïtiennes; Émilie Pinard s’intéresse à l’aménagement participatif de la maison des femmes de Malika au Sénégal et à ses conséquences sur les relations de pouvoir.

La quatrième partie des Actes est consacrée à la présence des femmes et du féminisme dans les arts et les médias. Aurélie Bureau y relate l’évolution des portraits de la femme dans la littérature québécoise sous l’impact du féminisme; Frédéric Clément y traite de la représentation des femmes de la fin des années 1960 dans le cinéma québécois d’aujourd’hui; Tanya Déry-Obin nous propose de réfléchir à la manière dont les avancées technologiques, et plus particulièrement le cyberespace, peuvent constituer un contexte propice aux valeurs prônées par le féminisme; Maria-Hélèna Pacelli, pour finir, nous entretient des pratiques de résistance créative féministes et comment cette réappropriation culturelle permet aux femmes d’effectuer une prise en charge individuelle et collective de leur citoyenneté.

La dernière section des Actes porte sur deux questions relatives au corps et à la sexualité des femmes et aux rapports de pouvoir qui s’y tissent. Claire Grino s’intéresse au débat entourant les nouvelles techniques de reproduction et se propose de relever les différences de régime de savoir et de pouvoir qui encadrent la contraception et l’avortement d’une part et les nouvelles techniques de reproduction d’autre part. Finalement, Rhéa Jean, en mettant l’accent sur les inégalités entre les hommes et les femmes ainsi que sur la violence inhérente au rapport prostitutionnel, critique l’utilisation de l’approche de réduction des méfaits lorsqu’elle est appliquée à la prostitution.

Les différents textes proposés témoignent parfaitement de la pertinence d’intégrer la perspective féministe dans l’ensemble des disciplines scientifiques et artistiques. Les études féministes sont désormais présentes de la sociologie au droit, de l’architecture à la science politique en passant par la philosophie, les études cinématographiques et littéraires. Les études féministes sont présentes partout où il est nécessaire de penser et de construire le changement social en faveur d’une plus grande égalité.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le mercredi 17 avril 2013 11:29
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie retraité du Cégep de Chicoutimi.
 



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