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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir du texte de Louis Gill, “La dette du Québec et le budget 2015-2016.” Une version abrégée de cet article a été publié dans LA PRESSE +, Montréal, édition du 2 avril 2015, sous le titre « Fonds des générations : un choix contestable. » [Autorisation formelle accordée par l’auteur le 4 août 2015 de diffuser cet article en accès libre à tous dans Les Classiques des sciences sociales.]

Louis Gill
[économiste, retraité de l’UQÀM.]

La dette du Québec
et le budget 2015-2016
.”

Une version abrégée de cet article a été publié dans LA PRESSE +, Montréal, édition du 2 avril 2015, sous le titre « Fonds des générations : un choix contestable. »


Au cours des six dernières années, de 2009 à 2015, la dette brute du Québec a augmenté de 48 milliards de dollars, dont le tiers (16 milliards) est le résultat de déficits budgétaires annuels cumulés. La majeure partie de l’accroissement de la dette provient, non pas d’excès de dépenses courantes comme certains le prétendent, mais des investissements nets du gouvernement en immobilisations (27 milliards) et des placements, prêts et avances au bénéfice des sociétés d’État (11 milliards), pour lesquels le gouvernement doit emprunter. Pendant ces six années, le gouvernement a par ailleurs déposé 6 milliards dans le « Fonds des générations », dont l’objectif est de réduire le poids de la dette, mesuré par son rapport au Produit intérieur brut (PIB). En dépit de ces versements, le rapport dette/PIB est passé de 52 % en mars 2009 à 55 % en mars 2015. Si aucun montant n’avait été déposé dans le Fonds des générations, il aurait été de 56,5 % en 2015. Le versement de 6 milliards dans le Fonds des générations a permis de réduire d’à peine 1,5 point de pourcentage la hausse du rapport dette/PIB, au coût élevé de 6 milliards de dollars.

Et cela n’est qu’un pâle signe annonciateur de ce qui s’en vient. C’est plus du double de ce montant de 6 milliards, soit 13 milliards, que le gouvernement déposera dans le Fonds des générations au cours des cinq prochaines années, entre 2015 et 2020. Il prévoit que le rapport de la dette au PIB sera alors de 49 % le 31 mars 2020. Ici encore, il est utile de savoir que si aucun versement n’était effectué dans le Fonds des générations au cours de cette période, le rapport de la dette au PIB serait de 52 % en 2020. Nous sommes en droit de nous demander s’il est opportun, pour gagner trois modestes points de pourcentage, de sacrifier 13 milliards de dollars qui manquent dramatiquement aux fonds publics à la suite des compressions annoncées dans le budget qui vient d’être déposé.

On ne peut par ailleurs qu’être frappé par le contraste entre ces 13 milliards destinés à la réduction du poids de la dette et les sommes anémiques, quatre fois moindres, que le gouvernement consacre à son « Plan économique du Québec » destiné « à favoriser la croissance », au cours de la même période de cinq ans. D’autant plus que, sur les 3,4 milliards prévus à cet effet, les deux tiers ne verront le jour qu’au cours des deux dernières années du plan et les trois quarts consistent en allégements fiscaux. Le plan ne prévoit que 121 et 361 millions de dollars respectivement pour les deux premières années. Cela est d’autant plus dramatique que c’est par une croissance du PIB supérieure à celle de la dette qu’on peut espérer voir le rapport dette/PIB diminuer. Cette croissance du PIB repose sur les investissements à faire dès aujourd’hui dans l’éducation, dans la santé et dans les infrastructures.

La comparaison internationale

S’il est bien connu que le poids relatif de l’endettement du Québec (en pourcentage du PIB) est plus élevé que ceux du Canada et des autres provinces, on ne saurait souscrire au portrait catastrophiste que le gouvernement fait de la situation pour justifier des mesures d’austérité qui menacent l’intégrité des services publics. Il est regrettable à cet effet de voir ressurgir, dans une récente étude de Jonathan Deslauriers, Robert Gagné et Jonathan Paré, intitulée « L’heure juste sur la dette du gouvernement du Québec » (HEC Montréal, mars 2015), le recours à une mesure qui se réclame abusivement de la « méthode de calcul de l’OCDE » pour mesurer l’endettement d’un pays.

Telle que définie par l’OCDE, cette mesure comptabilise les engagements financiers de l’ensemble des administrations publiques : gouvernement central et gouvernements de paliers inférieurs, comme ceux des provinces, des territoires et des municipalités, ainsi que des administrations qui dépendent de ces gouvernements pour leur financement et dont ces gouvernements garantissent la dette. Elle exclut les entreprises des gouvernements comme Hydro-Québec, ainsi que les engagements envers les régimes de retraite.

Contrairement à ce que soutiennent le gouvernement et de nombreux économistes, dont les auteurs de l’étude qui vient d’être mentionnée, cette mesure n’a pas à inclure une portion de la dette du gouvernement du Canada, proportionnelle au poids du Québec dans  l’ensemble canadien. Le Québec n’a en effet aucune responsabilité dans les décisions du gouvernement fédéral qui mènent à l’accumulation de sa dette, ni aucune responsabilité de payeur de dernière instance de cette dette.

Le calcul de la portion de la dette du Canada à imputer au Québec, ainsi que de ses actifs, serait nécessaire en cas d’accession du Québec à l’indépendance. De tels calculs ont d’ailleurs été effectués en 1990, au sein de la Commission Bélanger-Campeau. Mais nous n’en sommes pas là, et la dette du Québec continue à être évaluée, comme celle des autres provinces, dans le cadre constitutionnel actuel.

Il est remarquable que cette prétention d’ajouter une portion de la dette du gouvernement du Canada dans le calcul de la dette du Québec ne soit jamais formulée à l’égard du calcul de l’endettement des autres provinces. Si on le faisait, l’Ontario, qui compte pour 40 % de l’économie canadienne et qui aurait ainsi à majorer sa dette de 40 % de la dette directe consolidée du Canada (660 milliards), se retrouverait dans la moitié des pays les plus endettés de l’OCDE. Il en serait de même, aux États-Unis, de la Californie qui, en dépit de sa dette relativement faible, se verrait propulsée au sommet des plus endettés en devant comptabiliser sa portion, environ 13 %, de l’énorme dette des États-Unis, de 60 000 milliards de dollars.

Fin du texte



Retour au texte de l'auteur: Louis Gill, économiste québécois, retraité de l'UQAM Dernière mise à jour de cette page le mardi 22 septembre 2015 7:40
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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