RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Hervé Carrier, ÉVANGILE ET CULTURES de Léon XIII à Jean-Paul II. (1987)
Présentation


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Hervé Carrier, ÉVANGILE ET CULTURES de Léon XIII à Jean-Paul II. Cité du Vatican : Libreria Editrice Vaticane; Paris: Les Éditions MediaPaul; Montréal: Les Éditions Pauline, 1987, 276 pp. Collection: Culture, no 1. Une édition numérique réalisée par ma grande amie Gemma Paquet, bénévole, professeure à la retraite du Cégep de Chicoutimi. [Autorisation accordée par l'auteur le 17 novembre 2009 de diffuser la totalité de son oeuvre dans Les Classiques des sciences sociales.]

[7]

Présentation

 [9]

POUR UNE CONSCIENCE CULTURELLE

À la suite de Vatican II, les chrétiens portent un regard neuf sur le monde dans son rapport à l’Évangile. L'un des terrains privilégiés de leur intervention est celui de la culture, perçue désormais comme le nouvel espace de l'Église.

Le présent volume vise a illustrer l'apport du Concile et des Papes modernes à ce progrès de la conscience chrétienne. Nous voulons montrer comment, depuis Léon XIII jusqu'à Vatican II s'est développée ce que nous pouvons appeler une « conscientisation culturelle » des chrétiens. Avec Paul VI et le Synode des Évêques qui inspira l'exhortation Evangelii Nuntiandi de 1975, la rencontre de l'Évangile et des cultures vivantes est devenue une priorité pour l’Église. C'est également le souci central et constant de Jean-Paul II, pour qui le dialogue de l’Église avec les cultures actuelles revêt une importance décisive pour l'avenir du monde, comme il ne cesse de le répéter.

Nous verrons comment cette maturation du dialogue évangélique a bénéficié de la réflexion théologique et sociologique plus récente, qui a rendu les catholiques plus solidaires de leur époque, et leur a fait adopter les méthodes de l'analyse culturelle pour mieux définir leur service de l'homme et leur action évangélisatrice dans le monde. Cette sensibilité nouvelle aux cultures mérite toute notre attention.

[10]

LA MONTÉE DES CULTURES

De fait, une des évolutions les plus étonnantes de notre époque c'est la montée des cultures jamais auparavant, le fait culturel ne s'était affirme avec autant de vigueur dans la vie des individus et des sociétés humaines. Avec le dépérissement des idéologies et des utopies, c'est l'être humain lui-même qui cherche à s'identifier a neuf, comme sujet et acteur. Ce radicalisme, que nous appelons une conscientisation culturelle, est à la fois prometteur et révélateur d'inquiétude.

D'une part, la culture exprime un besoin fondamental d'identité, de dignité, de participation libre aux bienfaits de la civilisation. Mémoire autant que projet, la culture constitue la norme idéale qui porte l'homme aux dépassements féconds. Avec l'éveil des nouvelles nations, avec la révolution des médias, le progrès culturel apparait désormais comme l'aspiration majeure de tout homme et de toute lemme ; et cette aspiration, nous le soulignerons bient0t, est inséparablement liée au développement social, économique et politique des peuples. Ainsi, la montée des cultures promet un avenir plus humanisé et fraternel, plus respectueux des valeurs créatrices de l'esprit. Promouvoir la culture des personnes et défendre l'identité culturelle des peuples devient le défi majeur de nos engagements collectifs. Un champ immense s'ouvre ici à la responsabilité des personnes et des institutions, des chrétiens tout particulièrement.

Voyons aussi l'autre versant : les cultures de notre temps, porteuses des valeurs les plus hautes des peuples, s'accompagnent souvent de contradictions internes qui peuvent devenir fatales pour les communautés qui les incarnent. Fait inquiétant, disions-nous, et qui se manifeste de multiples façons : ici, c'est l'exaspération des cultures traditionnelles, [11] menacées d'éclatement face à une modernisation mal assimilée, ou à un pluralisme sans consensus minimal ; et ces tensions sont vécues, également, au sein de plusieurs communautés croyantes. Là, ce sont des nations nouvelles qui s'épuisent en combats dispersés contre la domination culturelle des puissants. Là encore, une immigration massive vient bouleverser l'équilibre culturel des pays d'accueil, créant des problèmes de cohabitation mal définis et loin d'être résolus. Et nous savons, par des expériences encore récentes, que des tensions culturelles exacerbées peuvent engendrer des guerres apparemment sans issue. Ailleurs, dans les pays à régime autoritaire, le choc est violent entre l'idéologie officiellement proclamée et la culture vivante des populations. Plusieurs nations de l'Est vivent ce drame éprouvant depuis quarante ans.

DIALOGUE
ET COMPRÉHENSION DES CULTURES

En écrivant ces pages, j'ai essaye de montrer comment l'Église se situe au cœur de ces préoccupations culturelles. Elle a conscience du caractère décisif que revêtent maintenant le dialogue et la compréhension des cultures, car il y va du destin de l'homme. On peut dire que notre époque est entrée dans le temps des cultures. L'observation sociale révèle nettement que deux soucis majeurs marquent nos contemporains :

D'une part, tous s'interrogent sur leur identité culturelle, dans un monde où les repères du passe sont brouillés par les changements rapides et universels qui emportent nos sociétés. Comment rester soi-même dans la dignité et la liberté, face au présent menace, à l'avenir à créer ? Toutes les collectivités humaines ont à redéfinir leurs traits essentiels dans un  contexte  socio-culturel en continuelle mutation.

La réaffirmation des identités culturelles appelle, par [12] ailleurs, le dialogue entre les cultures, car tous les hommes se découvrent de plus en plus interdépendants. Nul groupe ne peut vivre clos en lui-même, sous peine de s'épuiser dans l'isolement. Le monde de l'avenir ne pourra subsister que dans une culture de la solidarité, unique gage de justice, de paix, de développement pour tous.

La culture, dès lors, apparaît à l'Église comme le terrain privilégie de son action, soit qu'elle y porte expressément les valeurs de l'Évangile, soit qu'elle cherche simplement à défendre l'homme dans sa dignité radicale. L'Église proclame à notre génération que c'est essentiellement par sa culture que l’être humain peut survivre et progresser, et que l'avenir de l'homme dépend donc de sa culture.

L'Église se distingue, dans le monde actuel, comme l'une des rares instances capables d'assumer, en toute liberté et désintéressement, la défense de l’être humain comme tel. Une connaturalité se révèle ainsi, de plus en plus clairement, entre l’Église, l'être humain et la culture.

LES QUESTIONNEMENTS PRIORITAIRES

Parmi les innombrables problèmes qui se posent à l'horizon des cultures d'aujourd'hui, nous nous arrêterons à une  de questions qui semblent mériter une attention prioritaire de la part de nos contemporains, des chrétiens en particulier. En termes succincts, les principales interrogations qui nous orienteront seront les suivantes :

Comment le concept de culture a-t-il acquis une signification anthropologique et est-il devenu un instrument d'analyse sociale et une catégorie d'action pour le développement des sociétés ?

Comment l’Église en est-elle arrivée à moderniser son [13] concept de culture ? Pourquoi l'expression « civilisation chrétienne », utilisée couramment jusque vers 1950, a-t-elle cédé progressivement la place au concept de culture ?

Face aux cultures éclatées et menacées, comment les chrétiens peuvent-il se porter à la défense de l'homme et de sa culture ? Nous chercherons à montrer que le  combat pour la culture est indissociable du combat pour la justice.

Nous verrons aussi à quelles conditions éthiques le développement des cultures peut résulter de l'intervention des États, dont la majorité poursuit actuellement une politique culturelle.

Considérant plus directement l'action spécifique de l'Église, nous nous interrogerons sur les sens qu'il convient de donner à l'évangélisation des cultures, terme employé de plus en plus fréquemment depuis une quinzaine d'années. Nous considérerons en particulier la question de l'inculturation, devenue centrale dans les débats actuels sur l'insertion de l'Église dans les cultures de notre temps. Pour compléter cette question, nous examinerons les expériences d'inculturation que vivent les chrétiens dans les pays de première et de seconde évangélisation.

À l'intérieur même de l’Église, les chrétiens ont à vivre une situation de pluralité culturelle, qui n'est pas sans engendrer parfois des tensions, des incompréhensions, des conflits. D'où la nécessité d'approfondir les rapports du pluralisme et de l'universalité au sein de la communauté ecclésiale.

Finalement, nous nous arrêterons aux questions culturelles entendues au sens plus classique, et nous nous demanderons comment l’Église actuelle se situe par rapport au monde de la science et des arts. Par une sorte de vocation connaturelle, l'Église se fait l'alliée des sciences et des arts, comme signes d'espérance pour le cheminement de l'homme.

[14]

Le panorama des questions ici évoquées nous renvoie aux dimensions multiples de la culture que nous examinerons plus loin : la culture comprise au sens humaniste et classique, et la culture considérée comme style de vie ou comme anthropologie vivante.

 Face à ce vaste univers, l’Église se reconnaît une double mission : l'une est de défendre et promouvoir la culture de l'homme, sans autre prétexte, uniquement parce que l'être humain, créé à l'image de Dieu, mérite d'être aimé pour lui-même. L’autre mission, plus spécifiquement liée à la foi chrétienne, vise un objectif ultérieur qui est d'apporter librement l'Évangile au sein des cultures, pour leur permettre de croître selon toutes leurs virtualités et de se transcender dans l'espérance. C'est là le défi complexe et stimulant que représente la rencontre de l’Église avec les cultures.

Je tiens a remercier ici Sœur Maryvonne Duclaux, RSCJ., pour son assistance compétente dans toutes les phases d'élaboration de ce travail. Son concours me lut précieux tant pour la recherche de la documentation que pour la mise en forme progressive du manuscrit.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le lundi 29 août 2011 19:12
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie retraité du Cégep de Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref