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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir du texte de Gérard Bouchard, “Pour une laïcité inclusive.” In ouvrage sous la direction de Gérard Bouchard, Gabriella Battaini-Dragoni, Céline Saint-Pierre, Geneviève Nootens et François Fournier, L’interculturalisme. Dialogue Québec-Europe. Actes du Symposium international sur l’interculturalisme. Contribution au chapitre 3: “La laïcité: un aperçu des modèles et des débats actuels.” Montréal: 25-27 mai 2011. Montréal: L’Interculturalisme, 2011, 611 pp. [Le 14 juillet 2003, Mme Céline Saint-Pierre accordait aux Classiques des sciences sociales sa permission de diffuser, en accès libre et gratuit à tous, toutes ses publications.].

[2]

Gérard Bouchard

Sociologue - historien, Université du Québec à Chicoutimi

Pour une laïcité inclusive.”

Contribution au chapitre 3 : La laïcité : un aperçu des modèles et des débats actuels. Un article publié dans l’ouvrage sous la direction de Gérard Bouchard, Gabriella Battaini-Dragoni, Céline Saint-Pierre, Geneviève Nootens et François Fournier, L’interculturalisme. Dialogue Québec-Europe. Actes du Symposium international sur l’interculturalisme. Montréal : 25-27 mai 2011. Montréal : L’Interculturalisme, 2011, 611 pp.

Notice biographique

I. Introduction

II. Qu’est-ce qu’un régime de laïcité ?

III. Les paramètres de la laïcité inclusive

IV. La laïcité inclusive

Les valeurs fondamentales
L’arbitrage des droits
Les signes religieux : à l’encontre d’une prohibition intégrale
À propos du hidjâb
L’objectif d’intégration
Le cas de la prière dans les conseils municipaux
La valeur patrimoniale

V. Laïcité et interculturalisme

Références

Notice biographique

Historien et sociologue, Gérard Bouchard est professeur au département des Sciences humaines à l'Université du Québec à Chicoutimi et titulaire d'une Chaire de recherche du Canada. Il est également membre du programme de recherche « Société réussies » de l'Institut Canadien de Recherches Avancées.

Ses principaux domaines d'intérêt sont les imaginaires collectifs, les mythes, le fondement symbolique du lien social, la gestion de la diversité ethnoculturelle, la Révolution tranquille. Ses publications incluent La pensée impuissante : Échecs et mythes nationaux canadiens-français 1850-1960 (Boréal, 2004), La culture québécoise est-elle en crise ? (co-écrit avec Alain Roy, Boréal, 2007), Mythes et sociétés des Amériques (co-écrit avec Bernard Andrès, Québec Amérique, 2007), Fonder l'avenir : Le temps de la conciliation (co-écrit avec Charles Taylor, Rapport de la Commission de consultation sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences culturelles, Gouvernement du Québec, 2008) et la traduction en anglais de Genèse des nations et cultures du Nouveau Monde : Essai d'histoire comparée (McGill-Queen's University Press, 2008).

En plus de nombreux ouvrages, il a publié plus de 270 articles. Il a également reçu de nombreuses distinctions dont la Légion d'Honneur de France.

[3]

I/ INTRODUCTION

Je me propose d'exposer dans ce court essai une conception de la laïcité que je qualifie d'inclusive (à la suite de J. BAUBÉROT, 2004, 2006) et qui me semble inspirée de la philosophie de l'interculturalisme. Ce sera aussi l'occasion de montrer que les régimes de laïcité sont toujours des hybrides. Ils sont faits de composantes diverses, souvent en compétition, en tension, sinon en contradiction. Ils portent toujours aussi la marque de la société dans lesquels ils opèrent ; ils en reflètent le contexte, les traditions, les institutions, les sensibilités. Enfin, ils ne sont jamais fermés, ils appellent constamment des réévaluations, des négociations, des ajustements. Et pour toutes ces raisons, ils sont difficilement transposables d'une société à une autre.

Je précise d'abord quelques concepts. Je parlerai de laïcisation de préférence à sécularisation. Il me semble que cette dernière notion réfère à un changement survenu au cours des derniers siècles dans la vision du monde occidentale, au profit d'une nouvelle vision qui accorde de moins en moins de place à la dimension supra-naturelle, ouvrant ainsi la voie au règne de la connaissance positive et à un espace citoyen dans la gestion de la vie collective. En regard, la laïcisation renvoie surtout à des arrangements institutionnels dont le but est d'ordonner les rapports entre l'État et la religion, ou entre le citoyen et le croyant.

À l'encontre d'un usage courant et en me conformant à une définition qu'on peut trouver dans le Rapport de la Commission Bouchard-Taylor [1], je vais élargir la notion de religion et parler de conviction de conscience, notion dans laquelle j'inclus toutes les allégeances, toutes les croyances, principes et idéaux, religieux et autres, à la lumière desquelles une personne se définit, choisit ses grandes finalités et règle sa vie. C'est cette notion qu'ont également retenue Jocelyn Maclure et Charles Taylor dans leur récent ouvrage sur le sujet (2010). La raison de ce choix est simple : dans une société diversifiée, non seulement toutes les croyances de nature religieuse doivent être respectées mais aussi toutes les formes de conviction ou d'idéaux à caractère primordial, de nature religieuse ou non. À défaut de quoi, on risque d'établir au sein des convictions de conscience une hiérarchie en faveur du religieux.

[4]

Par ailleurs, au lieu de parler de laïcité pour caractériser un système propre à une société donnée, je vais parler de régime de laïcité (à l'exemple encore une fois du Rapport Bouchard-Taylor [2]). C'est une notion plus complexe et plus englobante, mais plus fidèle aussi à la réalité.

II/ QU'EST-CE QU'UN RÉGIME
DE LAÏCITÉ ?


Au Québec et ailleurs, le débat public fait couramment référence à des sociétés qui seraient plus ou moins laïques. En fait, c'est réduire le concept de laïcité à un sens très restrictif, celui de la séparation de l'État et de la religion (ou des convictions de conscience). En réalité, la laïcité recouvre un ensemble de dispositions, d'où la notion de régime de laïcité, laquelle met en présence cinq principes ou valeurs :

1. La liberté de croyance ou de conscience
2. L'égalité entre les systèmes de croyances
3-La séparation ou l'autonomie réciproque de l'État et des systèmes de croyances institutionnalisées
4. La neutralité de l'État vis-à-vis de tous les systèmes de croyances

5. Les valeurs coutumières ou patrimoniales. Cette dernière composante est moins formalisée et elle semble ne pas se situer au même niveau que les quatre précédentes. Elle est néanmoins suffisamment puissante pour bénéficier parfois, en toute légitimité, d'une préséance ad hoc3 sur les autres -ce qui peut survenir notamment quand elle est en confrontation avec la neutralité de l'État ou la liberté de conscience des personnes (ou plus précisément : la liberté de manifester ses croyances ou convictions profondes par des actes rituels ou autrement).

En voici quelques exemples tirés de la réalité québécoise : les funérailles nationales de chefs d'État dans une église catholique, les symboles de fêtes chrétiennes (Noël notamment) sur les places ou dans les édifices publics, le choix très orienté des jours fériés, la croix sur le drapeau du Québec, la sonnerie quotidienne des cloches des églises catholiques, les croix érigées le long des routes rurales, etc. C'est dans le même esprit que l'Italie vient tout juste d'être autorisée par [3] la Cour d'appel européenne à maintenir les crucifix aux murs de ses écoles. On voit, à partir de ces exemples (auxquels bien d'autres pourraient s'ajouter, notamment le crucifix au mur de l'Assemblée nationale du Québec) que le critère des valeurs coutumières peut acquérir parfois un poids important. Il s'agit donc bien plus que d'une composante ou d'une valeur marginale.

Ce qu'il importe de souligner, c'est que dans la vie quotidienne des institutions publiques, les cinq valeurs constitutives du régime de laïcité se trouvent souvent en concurrence. Par exemple, de nombreuses demandes d'accommodement mettent en conflit la liberté de religion et la séparation de l'État et de la religion. Pour ce qui est des instances de l'État, on pense au port du hidjâb chez les enseignantes, au menu hallal dans les cafétérias d'hôpital, aux lieux de prières dans les universités, et le reste. Parfois aussi, ce sont la neutralité de l'État et les valeurs coutumières qui sont en concurrence. Par exemple, réciter une prière aux réunions d'un conseil municipal ou dresser une crèche de Noël devant un hôtel de ville [3].

Ce qui, dans une société donnée, caractérise profondément un régime de laïcité et qui fait son originalité, c'est la façon dont il définit les rapports entre ces cinq valeurs ou composantes, la façon dont chacun est pondéré par rapport aux autres. À cet égard, je qualifie de radical un régime qui établit a priori une hiérarchie formelle entre ces composantes, qui octroie donc à l'une d'entre elles une préséance officielle aux dépens des autres. Et je qualifie d'inclusif un régime qui, au contraire, recherche un équilibre entre ces cinq valeurs. Je dis laïcité inclusive de préférence à laïcité ouverte pour deux raisons. D'abord parce que l'épithète « inclusif » marque bien l'orientation générale du régime, lequel poursuit un objectif d'intégration de la diversité religieuse dans le respect de droits individuels et des valeurs fondamentales de la société. En plus, cette appellation évite une critique souvent adressée à la laïcité dite ouverte que plusieurs accusent de pratiquer une ouverture tous azimuts aux demandes d'accommodement religieux (« ouverte à tout »).

[4]

Dans l'esprit de la laïcité inclusive, les situations de litige sont arbitrées en s'en remettant à ce qu'on peut appeler des critères dérivés. Ces critères peuvent être sociaux, fonctionnels ou contextuels :

1) Exemples de critères sociaux : a) les valeurs fondamentales d'une société (l'équité, l'égalité homme-femme, la sécurité personnelle, la non-violence), b) la préservation de l'ordre social, c) les impératifs de l'intégration collective.

2) Exemples de critères fonctionnels : a) la nécessité de préserver la crédibilité d'une institution fondamentale (ex : le système judiciaire, les forces de l'ordre), b) satisfaire aux exigences élémentaires d'un emploi (ex : le port de la burqa, par exemple, est jugé incompatible avec les règles de l'enseignement).

3) Critères contextuels : ce sont des critères de décision très empiriques qui se nourrissent de tous les éléments imprévisibles, souvent des détails, qui se révèlent au hasard des situations diverses pouvant survenir dans la vie quotidienne des institutions. Ici, le champ des demandes d'accommodement religieux fourmille d'exemples :

- Refus d'un élève de suivre un cours parce que son contenu est contraire aux préceptes de sa religion : s'agit-il d'un cours obligatoire ou d'un cours optionnel ? - Demande de lieux de prières à l'école publique : parle-t-on d'un local permanent ou d'un espace quelconque provisoirement libre à certaines heures de la journée ? D'un local de prières affecté exclusivement à un groupe religieux ou d'un local de réflexion ouvert à tous ?

- Report de la date d'un examen scolaire : de quel type d'examen s'agit-il ? Quelle est la longueur du délai, la fréquence de ces demandes ? Ces reports sont-ils déjà jugés admissibles pour d'autres motifs en vertu du règlement de l'institution ? etc.

Selon les situations et selon l'arbitrage qui est fait entre les éléments concurrents qu'elles mettent enjeu, il arrive qu'un principe ou une composante se voie octroyer une préséance sur les autres, mais sans consacrer une hiérarchie pré-déterminée. L'analyse des situations particulières est donc déterminante. Cela dit, cet exercice d'arbitrage n'est pas entièrement improvisé ou arbitraire, il est restreint et balisé par des normes. Ainsi, parmi les critères sociaux, il va de soi que les valeurs dites fondamentales sont souveraines. Il s'ensuit, par exemple, qu'à moins de circonstances vraiment exceptionnelles et impératives, toute demande d'accommodement [5] religieux doit être rejetée si elle enfreint le principe de séparation de l'État et de la religion, si elle porte atteinte à l'égalité homme-femme ou si elle entraîne l'exercice d'une violence quelconque.

Les énoncés qui précèdent appellent deux commentaires. D'abord, on notera que je considère comme une valeur la séparation entre l'État et la religion. Cette disposition a en effet acquis le statut d'une valeur parce que, dans l'histoire de l'Occident, elle a beaucoup contribué à faire émerger la liberté politique, l'autonomie citoyenne et, en définitive, la démocratie. La séparation est également perçue comme une valeur fondamentale à cause des luttes parfois très dures qui ont dû être menées pour la conquérir.

D'autre part, les régimes de laïcité, justement parce qu'ils résultent de luttes de pouvoir et de trajectoires historiques accidentées, sont rarement exempts de contradictions. Voici quelques exemples :

- Les États-Unis sont un pays laïc qui interdit la récitation de la prière à l'école, mais parallèlement, le discours politique américain est rempli de références à Dieu, tout comme le rituel de l'État (on en trouve des traces même sur les billets de banque).

- La France ne reconnaît pas officiellement l'islam, qui est pourtant la deuxième religion du pays en nombre de fidèles ; l'islam ne bénéficie donc pas des dispositions de la loi de 1905, contrairement au catholicisme, au protestantisme et au judaïsme. Par ailleurs, très pointilleuse au chapitre de la séparation de l'État et de la religion, la France n'en fait pas moins coïncider plusieurs de ses jours fériés avec des fêtes catholiques (Noël, Pâques, Ascension, Pentecôte...). Elle finance aussi très généreusement de nombreuses écoles privées dites libres, dont plusieurs sont religieuses.

- Nation pluraliste et multiculturaliste, où prévaut une séparation de fait entre l'État et la religion, le Canada a néanmoins inscrit dans le préambule de sa constitution une référence à la suprématie de Dieu. Autre contradiction : ce préambule affirme la suprématie de Dieu mais aussi la primauté du droit. Au sein de la diversité des religions, le Canada octroie aussi un statut particulier au protestantisme et au catholicisme.

- Le Québec, État laïque, subventionne des écoles privées ethno-confessionnelles et accorde des exemptions de taxes aux institutions religieuses.

[6]

Je reviens à la notion de régime de laïcité. À la lumière des énoncés qui précèdent, on voit qu'il est impropre d'affirmer, comme on le fait couramment dans le débat public, qu'une société est plus ou moins laïque qu'une autre. En fait, ce genre d'affirmation réfère à une seule composante du régime de laïcité : la séparation de l'État et de la religion, et il arrive en effet que cette séparation soit plus prononcée dans certaines sociétés que dans d'autres. Pour le reste, on doit se contenter d'observer que chaque société met en oeuvre son propre régime de laïcité, à savoir un arrangement particulier entre les cinq composantes déjà mentionnées, un arrangement qui est en accord avec les traditions, les contraintes, les valeurs, les aspirations de cette société.

III/ LES PARAMÈTRES
DE LA LAÏCITÉ INCLUSIVE


Ce sont là ce qu'on peut considérer comme les grandes lignes de tout régime de laïcité inclusive. S'agissant plus particulièrement du Québec, quels seraient donc les paramètres particuliers qui devraient inspirer le régime de laïcité ? J'en vois quatre :

1) Le Québec est une société nord-américaine de tradition libérale et sa culture politique est très imprégnée des influences anglo-saxonnes, d'où l'importance accordée aux libertés individuelles.

2) Mais le Québec est aussi une société de tradition française, européenne, d'où sa sensibilité à la dimension collective de la vie citoyenne, une conscience très vive des enjeux de société.

3) Le Québec est une petite nation qui, au surplus, est une minorité culturelle sur le continent nord-américain. Les Québécois francophones ont donc hérité de leur histoire le sentiment d'une fragilité collective et l'obligation de lutter constamment pour assurer leur avenir culturel. Sur cet arrière-plan s'est naturellement greffée l'idée que cette société doit s'efforcer d'êtres unie, solidaire, et que, dans la mesure du possible, il lui faut éviter les déchirures, les divisions profondes. Une société qui se sent menacée, fragile, doit en effet craindre par-dessus tout la fragmentation, les clivages durables, lesquels sont perçus comme des facteurs d'affaiblissement. L'impératif de l'intégration doit donc entrer dans la conception d'un mode de gestion de la diversité ethnoculturelle au Québec, et en particulier de la diversité religieuse.

4) Le Québec est une petite société francophone largement nourrie de références européennes et coincée, si on peut dire, dans un espace anglophone qui a pesé de toutes sortes de manières sur son histoire, sur son destin. Il a néanmoins appris à survivre et à se développer grâce à des [7] stratégies de négociation qui en ont fait une société hybride, différente de ses voisines, mais différente aussi de sa mère patrie. On pourrait dire qu'à travers tous les éléments d'adversité auxquels il a dû faire face, le Québec a su tracer sa voie depuis plus de trois siècles grâce à une pratique des amalgames, à une recherche des solutions mitoyennes. C'est une société qui ne pouvait se permettre les solutions radicales et quand il lui est arrivé de s'y adonner, elles ne lui ont pas réussi ou sont demeurées minoritaires sinon marginales, - pensons aux Rébellions de 1837-38 [4], à l'ultramontanisme de la seconde moitié du 19e siècle, au socialisme révolutionnaire des années 1960, ou, en ce moment même, à la thèse de l'indépendance « pure et dure » par opposition aux diverses formules mitigées de souveraineté-partenariat [5]. La plupart du temps, le Québec a progressé en empruntant la voie de la négociation, de l'entre-deux, la voie du pragmatisme, ce que j'appelle plus généralement la recherche d'équilibres. Le Québec semble être est une société condamnée, en quelque sorte, à une forme de sagesse dans tous ses élans.

En m'inspirant de ces paramètres, je présente brièvement ma conception de ce que pourrait être un régime de laïcité inclusive au Québec, une conception qui vise les équilibres et observe un maximum de cohérence. Encore une fois, cette proposition s'inspire de l'esprit de l'interculturalisme, mais il ne s'ensuit nullement que ce dernier modèle soit fermé à d'autres propositions.

IV/ LA LAÏCITÉ INCLUSIVE

Cette présentation va toutefois accorder une attention particulière à la dimension de la séparation entre État et religion, et plus spécialement à la question de l'expression du religieux dans les institutions de l'État puisque c'est ce qui alimente principalement la controverse actuelle au Québec.

Les valeurs fondamentales

Je précise d'abord que l'expression du religieux (ou de l'ensemble des croyances et des rituels qui en découlent) reste subordonnée au respect des valeurs fondamentales de la société québécoise. Il ne doit pas exister d'ambiguïté sur ce point. On fait souvent aux tenants d'une [8] laïcité non radicale un faux procès, à savoir qu'au nom du pluralisme, ils sacrifieraient les valeurs fondamentales du Québec, notamment l'égalité homme-femme. Je me permets de rappeler à ce sujet un extrait du Rapport de la Commission Bouchard-Taylor qui est passé un peu inaperçu : le respect de la valeur égalité homme-femme « disqualifie, en principe, toutes les demandes ayant pour effet d'accorder à la femme un statut inférieur à celui de l'homme » (p. 20 et 178). Je souligne aussi qu'au cours des années récentes, les cas d'accommodement qui ont porté atteinte à l'égalité homme-femme ont fait beaucoup de bruit, provoquant avec raison de vives protestations dans la population ; mais ils ont été somme toute peu nombreux et, grâce à la vigilance des citoyens, des médias et des institutions, ces faux pas ont été vite corrigés.

L'arbitrage des droits

Selon les dispositions du droit occidental, les citoyens sont autorisés à manifester en public leurs croyances, leurs convictions de conscience. C'est même un droit fondamental. Mais tous les juristes s'accordent aussi pour reconnaître qu'il n'existe pas de droit absolu, que tous les droits, même les plus fondamentaux, sont susceptibles d'être limités dans leur application lorsqu'ils entrent en conflit avec d'autres droits ou d'autres impératifs. Cela dit, pour restreindre ou supprimer un droit, il faut être en mesure de faire valoir des motifs supérieurs (en vertu de ce que les juristes appellent le critère de proportionnalité). La loi 101 adoptée en 1977 au Québec en offre un bon exemple. Elle restreignait des libertés importantes (par exemple, la liberté des parents de choisir l'école de leurs enfants aux niveaux primaire et secondaire), mais au nom d'un motif supérieur : c'est l'avenir même du Québec francophone qui était enjeu. La Cour suprême du Canada a du reste reconnu la légitimité de cette loi, ou tout au moins de ses objectifs.

Dans le même esprit, je crois qu'on peut légitimement prohiber le port de signes religieux chez certaines catégories d'employés de l'État, dans l'esprit d'une politique d'interdiction ciblée ou sélective. Ainsi, une telle interdiction devrait s'appliquer dans le cas des magistrats, des jurés, des agents de sécurité et membres des forces de l'ordre, du fait qu'ils exercent un pouvoir de coercition, de violence même. Au nom des institutions qu'ils incarnent, il est impératif que l'exercice de leur fonction soit entouré d'une crédibilité à toute épreuve aux yeux du citoyen. Il est de la plus haute importance que de ces fonctions émane une image d'objectivité intégrale. Pour une raison analogue, cette disposition pourrait être étendue à des officiers comme le [9] Protecteur du citoyen ou le Directeur général des élections, deux autres fonctions de l'État démocratique qui ne sauraient souffrir la moindre apparence d'impartialité.

La même disposition devrait s'appliquer au Président de l'Assemblée nationale et aux greffiers-secrétaires des municipalités (qu'on peut considérer comme les homologues du précédent à un autre échelon) [6]. Le motif : ils incarnent au premier chef l'institution de l'État, avec lequel ils entretiennent un rapport structurel. Ils se doivent donc de refléter aux yeux de tous deux valeurs fondamentales du régime de laïcité inclusive : la neutralité de l'État en matière de croyances ou de convictions de conscience et la séparation de l'État et de la religion [7].

L'interdiction du voile intégral s'appuie également sur un motif supérieur : dans ses rapports avec l'État ou les services de l'État, les citoyens peuvent exiger de ses employés qu'ils communiquent à visage découvert. C'est un besoin qui prend racine dans la civilisation dans laquelle nous vivons. D'autre part, comme employeur, l'État se doit de donner l'exemple en n'encourageant pas cette pratique vestimentaire. Par ailleurs, il va de soi que, dans le secteur privé, les patrons peuvent en décider autrement parce qu'ils ne sont pas directement concernés par le régime de laïcité.

Les signes religieux :
à l'encontre d'une prohibition intégrale


Plusieurs Québécois plaident en faveur d'une interdiction de tous les signes religieux dans les institutions publiques et parapubliques, ce que je considère comme une mesure excessive. En effet, cette proposition doit être soumise au critère général énoncé plus haut : quel est le motif supérieur qui en fonderait la légitimité ? Quelle est l'argumentation qui lui permettrait de passer avec succès le test du droit ? Personnellement, je ne vois pas qu'elle repose sur des motifs supérieurs équivalents à ceux que j'ai déjà évoqués.

[10]

1) Personne jusqu'ici n'a démontré que le port d'un signe religieux par un employé de l'État l'empêchait de faire son travail avec impartialité et de satisfaire à toutes les exigences de sa fonction [8].

2) On a tort d'affirmer que tous les salariés d'une institution publique ou parapublique sont des représentants ou des ambassadeurs de l'État laïque et qu'ils sont donc tenus de s'abstenir de porter des signes religieux (on parle ici non seulement des fonctionnaires au sens courant mais aussi des travailleurs de la voirie, des concierges d'école, des employés d'entrepôts, des électriciens de l'Hydro-Québec, des préposés au ménage, et le reste).

Il y a une distinction importante à faire dans le type de rapport qu'un employé ou un citoyen entretient avec les institutions publiques ou parapubliques. On peut parler d'un rapport structurel : dans ce cas, en vertu de sa fonction, l'employé représente bel et bien l'État, d'une façon permanente. C'est le cas du président de l'Assemblée nationale. On peut parler aussi d'un rapport contextuel ou circonstanciel : c'est le cas des salariés ordinaires, ou des citoyens qui fréquentent les instances de l'État pour des prestations de services (hôpitaux, écoles, les tribunaux), ou encore des personnes qui exercent leurs devoirs ou leurs droits de citoyen (députés, intervenants devant une commission parlementaire, personnes assistant à des séances de l'Assemblée nationale, etc.).

La prohibition intégrale pose donc un important problème de droit et, en l'état actuel, elle aurait visiblement peu de chance de passer le test de l'article 9.1 de la Charte québécoise ou de l'article 1er de la Charte canadienne, ou encore le test du droit international. En plus, elle entraînerait des conséquences sociales néfastes en écartant d'un grand nombre d'emplois les personnes qui se croient obligées de porter un signe religieux et en risquant de marginaliser plusieurs citoyens, ce qui est contraire à l'impératif d'intégration évoqué plus haut.

3) Il est exagéré de soutenir que le port de signes religieux chez certaines catégories d'employés de l'État viole le principe de la séparation entre l'État et les religions (ou les convictions de conscience). Historiquement, le principe de séparation établit que l'État et [11] les Églises peuvent gérer leurs affaires en toute autonomie, qu'aucune de ces deux parties ne doit empiéter sur les pouvoirs de l'autre. C'est exactement ce qui était en cause dans les débats des années 1960 au Québec : qui de l'État ou de l'Église devait contrôler les services et les institutions publiques comme l'éducation, les soins de santé ou l'assistance sociale ? Mais nous n'en sommes plus là, cette question de partage des pouvoirs étant maintenant bien réglée. Aussi paraît-il déraisonnable de penser que cette disposition fondamentale soit aujourd'hui menacée du fait qu'un petit nombre d'employés des institutions publiques et parapubliques portent un foulard, une kippa ou une croix durant leur travail ? Il importe de rappeler que la controverse actuelle porte essentiellement sur des symboles portés par des personnes plutôt que sur un partage de pouvoirs exercés par des institutions -ce en quoi réside, en définitive, l'enjeu fondamental.

4) Une prohibition intégrale des signes religieux dans l'ensemble des institutions de l'État constituerait un choix idéologique non justifié dirigé contre les croyants ou fidèles plus orthodoxes ou plus conservateurs. Une telle mesure affecterait en effet ceux qui croient devoir manifester leur appartenance religieuse (par le port de la kippa ou du turban, par exemple), ceux pour qui la foi est indissociable de signes visibles ou de rituels. Ce serait donc pénaliser une conception particulière de la religion qui, certes, heurte des attitudes ou des opinions au Québec mais qui n'en reste pas moins tout à fait légitime au regard du droit.

5) À l'appui de l'interdiction totale, on invoque parfois la nécessité de contrer l'essor des fondamentalismes religieux qui se manifestent présentement au Québec et la grave menace dont ils sont porteurs. Dans l'hypothèse (à démontrer) où pareils fondamentalismes existent effectivement, en quoi le fait de restreindre leur visibilité pourrait-il contribuer à les affaiblir ? Il me semble que pareille mesure serait plutôt de nature à produire l'effet contraire, soit de créer une tension accrue dans les rapports inter culturel s en durcissant les différences, en marginalisant des groupes de citoyens et en les poussant à la radicalisation.

6) Certains affirment qu'en permettant le port de signes religieux, l'État prend parti et encourage l'essor de la religion. En réalité, l'État n'est ni pour ni contre ; il respecte simplement les choix légitimes de certains citoyens. L'État n'a pas à encourager la religion mais il ne doit pas davantage la contraindre quand elle opère dans les limites de la loi.

[12]

7) L'autorisation de porter des signes religieux a aussi été associée à l'octroi de privilèges. Encore là, il faut rappeler que cette autorisation est valable pour tous les citoyens qui souhaitent s'en prévaloir, quelles que soient leur religion ou leurs croyances. Ceux qui, pour diverses raisons, choisissent de ne pas faire usage de certains droits parce qu'ils n'en éprouvent pas le besoin n'ont pas à en priver les autres.

8) Divers intervenants soutiennent que l'interdiction totale des signes religieux est la véritable voie de l'intégration sociale. Mais si l'intégration repose sur le respect mutuel, sur une adhésion aux valeurs de la société québécoise, sur une volonté de participer à la vie citoyenne et sur le goût de se mobiliser autour d'idéaux et de projets communs, quel est le meilleur moyen d'y parvenir : est-ce en restreignant la liberté des citoyens ou en leur permettant d'exprimer leurs différences ?

9) Un dernier argument à l'encontre de l'interdiction totale est la guérilla juridique dans laquelle elle engagerait pour longtemps le Québec et dont, selon toute vraisemblance, il sortirait perdant. Le coût à payer en termes de tensions et de divisions serait lourd et sans profit.

À propos du hidjâb

Au sujet, plus spécifiquement, du foulard musulman, divers arguments ont été présentés pour en interdire le port. Encore là, je ne crois pas qu'ils passent le test du motif supérieur :

1) Incontestablement, le foulard est souvent un symbole de soumission et même d'oppression. Mais pour plusieurs femmes musulmanes, il est tout autre chose : il est un symbole librement adopté de leur foi ou une marque identitaire. Ces femmes, qui exercent simplement leur droit, seraient donc lésées par une interdiction générale.

Pour ce qui est des autres femmes, celles qui sont opprimées dans leur famille ou dans leur communauté et auxquelles le port du foulard est imposé, on ne voit pas bien non plus en quoi leur condition se trouverait améliorée si le port du foulard était prohibé. Ces femmes soumises à un régime d'oppression familiale pourraient même encourir des représailles de la part de leurs proches pour s'être soustraites au port du foulard. Il faudrait concevoir des mesures plus efficaces pour leur venir en aide.

[13]

2) On a dit aussi qu'en lui-même, indépendamment des motifs des femmes qui le portent et du sens qu'elles lui donnent, le foulard serait un symbole intrinsèquement repoussant et condamnable, au même titre que la croix gammée ou les symboles du Ku Klux Klan. À cause de la diversité des motifs associés au port du foulard, c'est là une généralisation qui ne s'accorde pas avec la réalité québécoise.

3) On invoque aussi parfois le spectre d'un complot islamiste dont le port du foulard serait le signe annonciateur ou l'avant-garde. En vertu d'un effet domino, le port de ce symbole ouvrirait la porte à tout le reste, c'est-à-dire à un projet islamiste de domination politique de l'Occident accompagné de la destruction de ses institutions. Mais comment penser qu'un tel scénario puisse se réaliser sans une passivité invraisemblable et un consentement encore plus improbable de l'ensemble de notre société ? Disons que, pour le moment, nous en sommes encore loin.


L'objectif d'intégration

Finalement, à l'encontre d'une politique d'interdiction globale s'ajoute aussi l'argument de l'intégration de notre société. Tel qu'indiqué déjà, le Québec, pour diverses raisons qui tiennent à son statut de petite nation et sa condition de minorité culturelle sur le continent, doit se garder autant que possible de clivages et divisions susceptibles de l'affaiblir. Dans ce contexte, l'intégration apparaît comme une priorité nationale et cet objectif doit également être pris en compte dans le mode de gestion de la diversité religieuse.

Le cas de la prière dans les conseils municipaux

La controverse qui s'est élevée autour de la récitation de la prière catholique aux réunions des conseils municipaux appelle quelques commentaires. Cette pratique est contraire à l'esprit de la laïcité inclusive et, au regard du droit, elle semble avoir peu de chances de survivre. Les conseils municipaux sont des enceintes de même nature délibérative que les parlements, dont ils sont des créations en vertu d'un principe de délégation de pouvoirs. Du point de vue de la laïcité, les conseils municipaux sont donc assujettis aux mêmes règles, notamment la séparation de l'État et des religions (ou systèmes de croyances) ainsi que l'obligation de neutralité.

[14]

En vertu de la première obligation, les salles de réunion des conseils ne devraient donc pas arborer de signes religieux, afin de bien marquer le principe de séparation. En vertu de la seconde, la récitation de la prière catholique porte directement atteinte au respect de la diversité des croyances (religieuses et autres) dans notre société. C'est une règle -il est important de le souligner— qui s'applique même dans une société dont la majorité des membres se déclarent catholiques. Tous les citoyens d'une ville doivent en effet pouvoir s'identifier également à leur conseil municipal, indépendamment de leurs croyances. En matière de droits, le nombre ne fait pas autorité. Si on avait raisonné de cette façon dans le passé, les minorités dans nos sociétés n'auraient peut-être jamais obtenu la reconnaissance de leurs droits, qu'ils s'agissent des homosexuels, des groupes racialisés, des Autochtones ou des personnes handicapées.

Par ailleurs, pour en revenir à la prière, il est aisé d'imaginer des formules de remplacement qui ne briment aucunement le droit des catholiques —par exemple, la récitation d'un texte qui s'en tient aux valeurs fondamentales, compatibles avec tous les crédos, ou encore une période de silence au cours de laquelle chacun peut se livrer à la réflexion ou à la prière de son choix.

Enfin, il importe de rappeler que la règle de neutralité veut éviter que des personnes n'appartenant pas à la religion majoritaire ne soient lésées à cause de leurs croyances ou de leurs convictions de conscience.

La valeur patrimoniale

Cela étant dit, tel qu'indiqué précédemment, il arrive parfois que les principes de neutralité et de séparation cèdent légitimement le terrain au profit de l'argument patrimonial ou identitaire. L'aire d'application de cet argument doit cependant être soigneusement circonscrite. On dira qu'il peut être invoqué quand un symbole religieux s'est vidé de son sens officiel ou de ses références originelles pour glisser dans la sphère de la tradition, de la vie civique ou du patrimoine culturel et identitaire -ceci, par opposition à un symbole vivant qui continue d'exercer pleinement sa fonction primitive. On pense ici aux croix de chemin le long des routes rurales, aux [15] monuments religieux sur les places publiques de diverses municipalités, aux croix qui s'élèvent dans la plupart des villes, à la symbolique de Noël, etc. [9].

Pour relever de l'argument patrimonial ou identitaire, un symbole d'origine religieuse doit donc, au cours du temps, s'être refroidi, désactivé (ou reconverti, si on peut dire). Mais même dans ce cas, il ne s'ensuit pas nécessairement qu'il puisse trouver place dans n'importe quel lieu public, notamment dans l'enceinte même de l'État laïc ou de ses prolongements que sont les conseils municipaux.

La distinction entre symbole vivant et symbole désactivé est donc centrale. Une autre distinction s'impose, selon qu'un symbole peut-être dit visuel (une icône, une statue, un crucifix, une église) ou performatif, comme c'est le cas avec la prière collective à haute voix accompagnée du signe de la croix ; c'est là une manifestation beaucoup plus engageante, qui mobilise davantage que la simple vue ou contemplation d'un objet. On comprendra donc qu'un symbole visuel devrait passer le test de l'argument patrimonial plus facilement qu'un symbole performatif.


V/ LAÏCITÉ
ET INTERCULTURALISME


Ce modèle de laïcité inclusive s'inspire de l'interculturalisme québécois qui met l'accent sur le respect des différences ethnoculturelles (dont les différences religieuses) dans les limites des valeurs fondamentales. Il favorise aussi les rapprochements, l'intégration et l'essor d'une culture commune nourrie à la fois de l'héritage francophone québécois et des apports de l'immigration. Encore une fois, on voit qu'une préoccupation centrale est d'éviter autant que possible la fragmentation, les divisions, la marginalisation, et de renforcer la culture et la société québécoises. L'interculturalisme est aussi une formule qui cherche à écarter autant que possible les solutions radicales et invite à ne pas creuser inutilement entre citoyens des divisions durables qui ne peuvent qu'affaiblir la société québécoise. En d'autres mots, c'est une formule qui, tout en protégeant fermement les valeurs fondamentales et les prérogatives de la culture francophone, préconise la négociation d'équilibres dans un esprit démocratique. Des équilibres, par exemple :

- entre les cinq principes constitutifs du régime de laïcité,

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- entre le respect de la diversité et les impératifs de l'intégration,
- entre les droits individuels et le bien de la collectivité,
- entre la légitimité des appartenances particulières, propres aux minorités ethnoculturelles, et la nécessité d'une appartenance québécoise,

- entre les intérêts des minorités ethnoculturelles et ceux de la culture majoritaire, laquelle est elle-même une minorité sur le continent.

En somme, tout comme l'interculturalisme, le régime de laïcité ici proposé se veut un modèle mitoyen, entre la formule républicaine, trop peu soucieuse de l'expression des différences, et le néolibéralisme individualiste, trop peu soucieux des impératifs collectifs. Tout comme l'interculturalisme également, la laïcité inclusive appelle au débat démocratique de même qu'à un mélange de fermeté et de flexibilité : fermeté sur les principes, sur les valeurs fondamentales, et flexibilité dans les modalités d'application —tout cela au service d'un objectif commun qui est d'apprendre à vivre ensemble dans le respect des différences et, à cette fin, de cultiver les vertus nécessaires d'ouverture, de prudence et de réserve.

[17]

RÉFÉRENCES

BAUBÉROT Jean (2004). « Voile, école, femmes, laïcité », dans Alain Houziaux (dir.), Le voile, que cache-t-il ?, Ivry-sur-Seine (France), Les Éditions de lAtelier, p. 49-78.

BAUBÉROT Jean (2006). L'intégrisme républicain contre la laïcité, La Tour dAigues, Éditions de l’Aube, 302 pages.

BOUCHARD Gérard, TAYLOR Charles (2008). Fonder l'avenir : Le temps de la conciliation, Rapport de la Commission de consultation sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences culturelles, Gouvernement du Québec, 310 pages.

MACLURE Jocelyn, Taylor Charles (2010). Laïcité et liberté de conscience, Montréal, Boréal, 164 pages.



[1] Voir G. BOUCHARD, C. TAYLOR (2008).

[2] Sur plusieurs points, mon exposé reprend des propositions formulées dans le chapitre VII de ce rapport. Il s'en écarte sur quelques autres. Il ne s'agit donc pas d'une préséance a priori. Elle s'affirme seulement dans certaines circonstances.

[3] Dans ces deux cas, comme nous le verrons, on parle de valeurs coutumières parce l'objet de la demande porte sur un symbole qui est censé avoir perdu sa résonance religieuse originale.

[4] Je précise : non pas le mouvement patriote en lui-même mais sa militarisation en fin de parcours.

[5] On  pourrait allonger  la  liste :  l'annexionisme,  le  ruralisme  (ou  l'agriculturisme),  la fusion  dans  la  culture canadienne, etc.

[6] Les municipalités sont en quelque sorte des extensions de l'Assemblée nationale, en vertu des pouvoirs qui leur sont délégués.

[7] On aura noté que j'exclus de l'interdiction sélective tous les élus. Les obligations auxquelles un citoyen se croit tenu en vertu de ses croyances ne devraient pas le priver d'exercer le droit le plus fondamental qui soit en démocratie, celui de briguer un poste électif -à moins, bien sûr, que ces obligations entrent en conflit avec des valeurs ou des règles fondamentales de la société.

[8] On pourrait en dire autant des magistrats, membres des forces de l'ordre et autres officiers visés par l'interdiction sélective. Mais, dans ces cas particuliers, s'ajoute à l'objectivité une obligation d'apparence d'objectivité, étant donnée la nature exceptionnelle des fonctions concernées.

[9] Ceci n'exclut pas qu'aux yeux de certains croyants, ces symboles continuent d'être investis de significations religieuses ; mais dans l'ensemble, ils n'en appartiennent pas moins au domaine public et se prêtent aux appropriations les plus diverses.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le jeudi 21 août 2014 11:00
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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