RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les sciences sociales contemporaines »

UUne édition électronique réalisée à partir du texte de Jean-Luc Bonniol, “La couleur des hommes, principe d'organisation sociale. Le cas antillais.” Un article publié dans la revue Ethnologie française, vol. XX, no 4, 1990, pp. 410-418. Numéro intitulé: “Paradoxes de la couleur.” [L'auteur nous a accordé le 30 janvier 2012 son autorisation de diffuser ce texte dans Les Classiques des sciences sociales.

Jean-Luc Bonnniol

Laboratoire d’Écologie humaine,
Université d’Aix-Marseilles III, France.
 

La couleur des hommes,
principe d'organisation sociale.
Le cas antillais.”

Un article publié dans la revue Ethnologie française, vol. XX, no 4, 1990, pp. 410-418. Numéro intitulé : “Paradoxes de la couleur.”

Introduction

1. L'archéologie d'un préjugé

Avant la colonisation
Esclavagisme et développement du préjugé
Dérives et avatars
2. La ligne de couleur

Saint-Domingue : une théorisation accomplie de la ligne de couleur
La ligne de couleur au travers des généalogies : l'exemple de la Désirade

3. Les catégories de métissage

L'affirmation du phénotype
4. Les stratégies intergénérationnelles
La clôture endogamique du groupe blanc : l'exemple des Békés de la Martinique
Homogamie et hypergamie chez les gens de couleur
5. Couleur et société coloniale
Références bibliographiques

[410]

Introduction

La couleur, ou l'utilisation d'un trait physique comme fondement de l'ordre social... Problème qui ne cesse d'obséder celui qui veut appréhender les sociétés antillaises, à la recherche du principe qui les fait mouvoir et se reproduire. Voilà en effet des sociétés qui n'obéissent guère à des déterminations purement économiques, mais sont profondément marquées par une idéologie devenue à son tour déterminante. Cette idéologie s'appuie sur la prise en compte sociale d'un critère « physique » évident qu'est la couleur de l'épiderme, critère auquel peuvent s'adjoindre d'autres critères complémentaires : couleur et texture des cheveux, traits du visage, couleur des yeux... Une opposition fondamentale oppose ce racisme « coloriste », tel qu'il est apparu dans les sociétés esclavagistes modernes propres à l'histoire de la colonisation européenne et tel qu'il a ensuite investi la sensibilité occidentale, et l'antisémitisme, qui a dû toujours faire face à l'absence d'une différence physique objective, et pallier au caractère fantasmatique des traits physiques éventuellement allégués...

L'idéologie coloriste, que nous dénommerons désormais par son appellation traditionnelle de « préjugé de couleur », est hiérarchisante : alors que dans ce qu'on dénomme aujourd'hui communément « racisme » on veut avant tout rejeter hors des frontières du groupe, ici – i.e. les colonies de plantation anciennement esclavagistes - on organise le corps social. Voilà finalement ce principe que Socrate désespérait de trouver, lorsqu'il était en quête d'une justification pour faire accepter aux citoyens de la République idéale d'être élevés et classés en trois classes hiérarchisées. Depuis trois siècles la couleur, trait physique qui a le privilège d'être transmis aux descendants, et par là d'être en quelque sorte incorporé dans l'essence des êtres, contribue à légitimer une telle hiérarchisation...

1.  L'archéologie d'un préjugé

Pour comprendre l'articulation du préjugé de couleur à une organisation sociale, il faut d'abord se préoccuper de sa genèse et pour cela tenter d'ordonner des données historiques, déjà largement connues, dans ce qu'on pourrait appeler une « archéologie » de l'idéologie raciale, afin de dégager les différentes strates, accumulées lors de diverses époques, d'un même schème mental.

Avant la colonisation

Certaines associations relatives à la couleur, en particulier celles concernant l'opposition du noir et du blanc, paraissent transculturelles, liées à des cycles fondamentaux comme celui du jour et de la nuit. La valorisation du clair par rapport à l'obscur trouve (van der Berghe et Frost, 1986) une illustration générale à l'humanité dans le choix préférentiel que les hommes, quelle que soit la coloration effective de leur groupe, feraient des femmes plus claires [1]. Et ailleurs qu'en Occident, la symbolique sociale a pu jouer des couleurs : en Inde, les varna sont avant toutes choses les couleurs (Isaacs, 1967 ; Gergen, 1967).

L'utilisation de la couleur dans l'ordonnancement de la diversité humaine paraît cependant avoir particulièrement été développée par l'Occident. La dévalorisation de la peau noire y a certainement une origine fort ancienne : c'est certainement dans le cas d'Israël qu'on en trouve l'expression la plus fragran-te, avec la malédiction de Cham, qui servira pendant des siècles de justificatif à tous ceux qui y voyaient l'origine d'une lignée humaine inférieure, prédestinée à toutes les oppressions [2]. Le christianisme antique devait amplifier ce préjugé, avec un symbolisme chromatique extrêmement affirmé, la blancheur étant associée à la pureté et la noirceur au péché... Le couple noir-mal devient alors une composante essentielle de la mythologie occidentale et chrétienne ; peut-être faut-il également faire l'hypothèse, à partir de cette époque, de la projection sur les Noirs d'une lascivité désormais réprimée (si visible, des siècles plus tard, dans l'Othello de Shakespeare...).

Durant le Moyen Age occidental, certains thèmes « racistes » se précisent (Delacampagne, 1983). La référence à la couleur reste cependant marginale, faute de contacts étroits avec des populations de teinte différente. Il est ainsi difficile de repérer une ségrégation [411] par rapport aux rares Noirs insérés dans les milieux populaires européens de cette époque, même si l'on doit constater dans le même temps l'évidence d'un stéréotype négatif (Frederickson, 1981). L'Islam médiéval, lui aussi héritier, dans une certaine mesure, de l'Antiquité et de la tradition judaïque, engagé dans le commerce transsaharien, est certainement plus prolixe en formulations et en pratiques sociales liées à la couleur, où se lisent une nette dépréciation du Noir (Lewis, 1982).

Esclavagisme et développement du préjugé

À partir des grandes découvertes, la différence physique - au premier plan la différence de couleur - devient primordiale dans la perception de l'étrangeté. À côté des interrogations sur l'humanité des Amérindiens, le phénomène noir, qui paraît relever d'une anomalie, demande à être expliqué [3]. Dès le XVIe siècle apparaît une terminologie spécialisée ; des mots jusque-là inconnus entrent dans le langage courant : nègre, métis, mulâtre, caste, race... Les théorisations raciales « scientifiques », près de deux siècles plus tard, vont s'inspirer de ces conceptions populaires préexistantes : il n'est pas étonnant de constater que l'un des taxons majeurs des classifications qui commencent à fleurir au XVIIIe siècle est justement la « race » noire...

La période coloniale introduit l'Autre dans le jeu des rapports sociaux et l'y maintient dans une position amoindrie. Les premières années de « fondation », dans les Antilles de colonisation française, constituent un moment privilégié pour scruter l'émergence du préjugé. La société y est encore peu hiérarchisée : le sucre n'a pas encore fait son apparition et l'esclavage reste un phénomène relativement marginal à côté de l'engagement. Si l'on peut lire dans le témoignage des premiers chroniqueurs la présence de stéréotypes raciaux et une certaine latence du préjugé, celui-ci ne semble pas encore imprégner la pratique sociale [4].

Les liens paraissent par contre fondamentaux entre l'esclavage (et le recours à la traite africaine) et le développement du préjugé. Le fait important dans cet esclavage moderne est qu'un troisième terme d'ordre racial vient s'ajouter aux deux premiers qui définissent déjà les pôles sociaux antagonistes : aux maîtres libres « blancs » s'opposent les travailleurs esclaves « noirs ». La segmentation raciale se juxtapose à la stratification socio-économique, déjà sanctionnée par une coupure juridique : de là le caractère particulièrement verrouillé du système. La « race »finit donc par devenir consubstantielle à l'ordre esclavagiste, que l'on peut désormais qualifier de socio-racial.

Le fait qu'une différence phénotypique se superpose à la hiérarchie sociale et à la coupure juridique ne relève au départ que d'une coïncidence historique. À la limite, si la barrière juridique avait fonctionné sans faille, assurant une étanchéité parfaite des deux segments sociaux l'un par rapport à l'autre, cette coïncidence ne serait restée qu'un simple épiphénomène... Mais le contexte idéologique dans lequel s'instaurait le système esclavagiste trouvait là à bon compte des moyens de légitimation immédiats par l'adoption d'une représentation mentale préexistante (l'équation réversible « esclave = noir » s'est vite imposée dans les esprits). De plus, les contradictions de l'ordre socio-racial (affranchissements, développement du métissage), qui brouillaient la superposition parfaite de la coupure juridique et de la segmentation raciale, imposaient un recours accru au préjugé, dont le développement est ancré moins dans le système lui-même que dans ses contradictions. Comme l'affirme M. Duchet, « si le mépris de l'esclave est dans la logique de l'esclavagisme dès l'origine, le « préjugé de couleur » est surtout un signe de sclérose, le signe d'une tension interne, et comme un vice de structure que l'Histoire a peu à peu révélé » (Duchet, 1969).

L'idéologie coloriste est clairement fixée dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Elle se manifeste d'abord par la supériorité des Blancs envers tous les non-Blancs, et cette supériorité a une traduction juridique. Le préjugé s'exprime ensuite dans ce qu'on a pu appeler le « sous-racisme » des gens de couleur, qu'on devrait plutôt dénommer racisme dérivé, dans la mesure où il constitue un reflet et une intériorisation du racisme originaire, le racisme blanc. C'est une véritable cascade de mépris qui s'est ainsi mise en place, du plus clair vers le plus sombre, au travers de toute une hiérarchie de nuances. On aurait tort de minimiser ce versant du préjugé et cette dialectique des contradictions secondaires, « les groupes intermédiaires participent au préjugé, à titre d'opprimés et d'oppresseurs » (Labelle, 1978).

Dérives et avatars

En continuant à se référer essentiellement aux Antilles de colonisation française, on constate que c'est au moment où le préjugé de couleur a acquis une nette assise juridique qu'il commence à être remis en question. Dès la deuxième moitié du XVIIIe siècle se mettent en place les bases idéologiques de la législation révolutionnaire qui aboutissent, nonobstant quelques tentatives de restauration au début du XIXe siècle, à la disparition juridique du critère de couleur, par le principe affirmé de l'égalité de tous les libres (1833), précédant de quelques années l'abolition de l'esclavage. Mais le critère racial devait cependant survivre à l'institution dans laquelle il avait pris naissance, puisque la société restait largement partagée [412] entre propriétaires blancs et descendants d'esclaves... À la pérennité des infrastructures socio-économiques a répondu la pérennité de la confusion d'un ordre social et d'un ordre racial. Certes, à partir de la Troisième République, l'atmosphère intellectuelle n'est plus à défendre le préjugé en tant que tel, et la doctrine coloniale classique ne semble plus de mise. Mais, dans le secret des consciences et la sphère privée, le préjugé a encore de beaux jours devant lui. Il a continué à inspirer jusqu'à nos jours la clôture endogamique du groupe blanc créole, et certaines stratégies matrimoniales de blanchiment chez les Gens de couleur.

De plus, la société antillaise est restée caractérisée par l'obsession coloriste, qui a imprégné tous les processus identitaires qui se déroulaient en son sein. L'idée de race, même si elle ne devait plus servir à fonder une hiérarchie, n'en a pas moins continué à interpréter les différences... La démarcation entre Mulâtres et Noirs a continué une longue carrière dans l'histoire d'Haïti : en se retirant, fût-ce très tôt comme à Saint-Domingue, « la colonisation abandonne en alluvion... une philosophie des ethnies que le temps, avec tous ses bouleversements, n'est pas encore parvenu à éroder... » (Debbasch, 1967). Dans les Petites Antilles restées françaises la couleur n'a pas cessé d'alimenter les phénomènes d'identification, la marque raciale pouvant ressurgir à tout instant, en particulier lors de toutes les crises politiques graves.

Durant les années trente, un élément nouveau est entré en scène, avec un mouvement, sans cesse plus affirmé, de revalorisation de la couleur noire. Né dans les îles anglaises, puis développé en Amérique du Nord, ce mouvement a trouvé dans les colonies françaises son expression la plus accomplie, avec le courant de pensée qui s'est cristallisé autour de l'idée de « négritude ». Ce « retournement » se situe en fait dans le schéma coloriste traditionnel, qu'il contribue à reproduire en inversant les termes de la polarisation. Ainsi se sont positionnés un certain nombre d'intellectuels antillais, dans un jeu racial qui a certes commencé avant eux mais dans lequel ils se situent d'emblée, retournant le service avec une certaine violence compensatoire...

Le phénomène s'est accentué dans le nouveau contexte de la départementalisation, marqué par l'arrivée massive de métropolitains : la couleur est devenue marque d'autochtonie et les antagonismes sociaux, en particulier ceux entre originaires et allochtones, ont pu être vécus sous la forme d'affrontements raciaux, au moment même où l'on constate une atténuation, voire une disparition du préjugé de couleur traditionnel, sous les effets conjugués de l'idéologie égalitariste républicaine et de l'intégration dans la société globale (Giraud, 1979)... La couleur a donc eu tendance à être utilisée comme emblème identitaire, et tout le débat culturel et politique, en particulier lorsqu'il s'est orienté vers la recherche des « racines » ou de l'« authentique », s'en est trouvé affecté.

2. La ligne de couleur

Représentations et pratiques dépendent ainsi de la logique identitaire qui préside à la définition des groupes en présence. Logique exprimée par les partitions imposées à la réalité du continuum biologique, qu'il s'agisse de la ligne de couleur ou des catégories de métissage.

Quel est le sort réservé aux rejetons issus d'un mélange entre deux populations différenciées par la couleur ? L'une des solutions, adoptées par les sociétés antillaises, est de faire subsister, malgré le mélange, deux populations, assurant par là la conservation de la dichotomie originelle : c'est dire que les individus mêlés sont assimilés à l'une des populations parentales et exclus de l'autre. Dans ce cas émerge une « ligne de couleur » qui isole un segment blanc, alors qu'un large éventail généalogique et phénotypique se déploie dans la population dite de couleur, éventail dont rend traditionnellement compte la taxonomie populaire du métissage.

Il semble qu'une telle ligne soit présente dans pratiquement toutes les situations coloniales où ont été mis historiquement en contact « Blancs » et « Noirs ». Mais elle peut être plus ou moins stricte ; elle peut se déplacer à l'intérieur d'un groupe jusqu'à l'inclure tout entier... Pour les besoins de l'analyse, on partira des essais de théorisation de la ligne qui ont trouvé leur formulation la plus claire dans la Saint-Domingue du XVIIIe siècle, puis on essaiera de suivre cette ligne au fil des générations, dans le réel généalogique d'un groupe insulaire.

Saint-Domingue :
une théorisation accomplie de la ligne de couleur


Saint-Domingue constitue, durant une période relativement brève (moins d'un siècle, de la cession à la France en 1697 jusqu'au début de la crise révolutionnaire en 1791), « une des plus intenses expérimentations capitalistes esclavagistes de l'histoire » (Mintz, 1971). L'idéologie de couleur apparaît comme l'un des fondements essentiels de la « doctrine coloniale » issue de cette expérience historique.

L'une des pièces maîtresses de ce système de pensée est la « ligne de couleur », qui doit établir un partage sans faille entre les Blancs et tous les autres, quel que soit leur degré de « décoloration », en rejetant [413] pêle-mêle tous ceux qui ne sont pas considérés comme indemnes de contamination, « ramenés à l'autre couleur fondamentale, pour la raison qu'ils en sont en partie issus... » (Debbasch, 1967). L'observateur attentif de l'ancienne Saint-Domingue qu'est Moreau de Saint-Méry donne à l'idée de la ligne sa formulation la plus radicale : « L'opinion... veut par conséquent qu'une ligne prolongée jusqu'à l'infini sépare toujours la descendance blanche de l'autre... » [5].

Un raisonnement de type généalogique donne le pas au « génotype » sur le « phénotype » : « Un sang mêlé quoique parvenu à la septième ou à la huitième génération et quoique arrivé au point où la couleur aurait l'apparence de celle d'un Européen n 'en serait pas moins toujours un sang mêlé et ne pourrait se dire égal ni marcher de pair avec un Blanc européen » [6].

Cette distinction infinie, Moreau de Saint-Méry lui-même l'affirme, ne peut être entretenue que par l'œil du préjugé : « Il faut des yeux bien experts pour reconnaître ces derniers mélanges d'avec les Blancs purs, et l'on peut dire qu'en général il n'y a guère que la tradition orale ou écrite qui serve de guide à cet égard » [7].

Au cours de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, dans une atmosphère qui s'envenimait, il fallut faire la preuve de la pureté de son extraction. La pièce essentielle du dossier était certainement l'arbre généalogique, ce « prisme magique par le secours duquel ils (les colons) s'assureront des couleurs mères et primitives... » [8].

La ligne de couleur au travers des généalogies :
l'exemple de la Désirade


Ce contrôle généalogique se retrouve dans toutes les sociétés métissées obéissant au même modèle : ainsi, il est souvent rappelé, à propos de la Martinique, qu'un Blanc peut très bien être exclu du groupe des Békés par suite du souvenir d'une ascendance mêlée, même si rien dans son apparence physique ne peut le laisser prévoir. En continuant à se situer dans une telle logique de pensée, on peut s'interroger sur l'efficience d'un tel contrôle, et sur sa traduction en termes sociaux. Pour répondre à une telle question, une procédure adaptée peut consister à opérer soi-même l'examen, en se livrant pour cela à une opération de reconstruction exhaustive des réseaux généalogiques sur des populations-tests. Il est alors possible de suivre le comportement matrimonial et reproducteur de tous les individus depuis les origines. Ainsi peut apparaître, au fil des générations, la réalité d'une ligne de couleur...

Le choix d'une de ces populations s'est porté sur la petite île marginale qu'est la Désirade, au large de la Guadeloupe. L'île a connu un système d'habitations cotonnières au XVIIIe et au début du XIXe siècle ; elle en a hérité, malgré l'homogénéisation des conditions de vie consécutives à la libération des esclaves, une société racialement segmentée, du moins jusqu'aux années récentes. Son isolement et sa petitesse en font un laboratoire idéal pour dégager un modèle qui est applicable, sur un autre ordre de grandeur, à l'évolution qu'ont connue les îles à sucre...

À partir d'un corpus de données généalogiques recueillies dans les registres paroissiaux et d'état-civil, divers programmes d'analyse ont été mis en œuvre : l'un d'eux s'est centré sur les proportions individuelles d'ascendance par rapport au segment fondateur « blanc ». Il a permis d'édicter des catégories généalogiques, qui mesurent en fait la proximité - ou l'éloignement - par rapport à ce que nous pouvons appeler le « pôle blanc » de la population insulaire. On constate alors qu'un certain nombre d'individus, au fil des générations, continuent à descendre exclusivement de ce segment, dont tous leurs ancêtres font partie : ils constituent un groupe blanc qui se maintient dans le temps, indemne de tout mélange.

On a donc là un effet de barrière, puisque le secteur blanc s'est refusé à la pénétration de gènes extérieurs. Il connaît certes une érosion manifeste, mais le groupe arrive malgré tout à maintenir son individualité, et même à conserver un effectif étale pour les deux dernières générations... Stratégie consciente ? Nous en sommes persuadés, sous l'effet du pattern structurant de l'idéologie de la ligne de couleur. Mais on peut toujours alléguer que le hasard aurait bien pu amener au même résultat... L'exemple a contrario du destin du secteur noir prouve le contraire. Au départ, un segment initial beaucoup plus fourni en individus, mais ensuite dégringolade irrémédiable : il reste finalement un seul individu pour la dernière génération ! C'est dire la rapidité avec laquelle un groupe peut se dissoudre dans une population « générale », lorsqu'il n'a pas de stratégie consciente de survie. C'est dire aussi combien le concept de barrière ne s'applique pas par rapport au pôle noir : le terme de « noir », lorsqu'il est employé, ne peut que désigner des individus qui sont, d'une manière ou d'une autre, déjà métissés...

Au-delà de la barrière entourant le groupe blanc se produit en effet un puissant mouvement de brassage, au sein duquel se mêlent les apports « blancs » et « noirs ». La descendance « blanche » ne se cantonne pas dans le groupe de même appellation mais se diffuse dans le reste de la population insulaire. La barrière est donc perméable dans un sens mais non dans l'autre ; cette hémiperméabilité fait que le flux génique ne peut aller que des « Blancs » vers la population [414] de couleur, qui se trouve par là en perpétuelle évolution alors que l'autre reste stable [9].

3.  Les catégories de métissage

On voit par là que la logique de la ligne de couleur n'est pas contradictoire avec celle de métissage, bien au contraire. Cette partition est cohérente dans les perspectives du segment racialement dominant. Mais les valeurs liées à l'idéologie de couleur diffusent dans le reste du corps social, qui est alors tenté d'utiliser les nuances chromatiques entraînées par la miscégénation comme autant de paliers reliant les deux pôles raciaux. Au sein de la population de couleur se déroule donc parallèlement un autre phénomène identitaire, le regroupement des individus mêlés dans des catégories de métissage, qui peuvent avoir un fondement généalogique et/ou phénotypique. Retour à la théorisation généalogique de Saint-Domingue

Là encore, on retrouve une remarquable théorisation du phénomène dans la Saint-Domingue du XVIII" siècle. Toute la gamme des nuances entre le blanc et le noir était ainsi prise en compte, au travers des catégories consignées dans la célèbre classification rapportée par Moreau de Saint-Méry, qui lui-même s'était fondé sur son observation personnelle, mais aussi sur la tradition orale et sur des documents écrits.

Le principe de la classification est essentiellement généalogique, puisque les catégories ne se définissent pas par l'aspect physique de leurs membres, mais par leurs origines, ce qui leur donne une place déterminée sur l'axe reliant les pôles blanc et noir originels. Ceci permet à Moreau de Saint-Méry d'exprimer cette position à partir de calculs mathématiques relativement complexes. Si l'on considère qu'un individu se compose de 128 parties (que l'on pourrait considérer idéalement comme des probabilités d'origine à partir de 128 ancêtres, ce qui implique une information généalogique correspondant à 7 générations et à ce que l'on peut estimer comme le maximum de profondeur d'une conscience généalogique), les différentes catégories se définissent du noir vers le blanc (voir tableau ci-après).

Ces « fourchettes » de valeur correspondent aux différentes combinaisons possibles pour obtenir chaque type : ainsi la combinaison première, celle d'un blanc et d'une Noire donne un Mulâtre « équilibré » avec 64 parties pour chacune de ses deux ascendances, mais il est 11 autres combinaisons pour « donner » un Mulâtre, et il peut donc y avoir « tel mulâtre plus rapproché du blanc au 'un autre de 14 parties ».

Catégories

Parties blanches

Parties noires

sacatra

8 à 16

112 à 120

griffe

24 à 32

96 à 104

marabou

40 à 48

80 à 88

mulâtre

56 à 70

58 à 72

quarteron

71 à 96

32 à 57

métis

10 4à 112

6 à 24

mamelouc

116 à 120

8 à 12

quarteronne

122 à 124

4 à 6

sang-mêlé

125 à 127

1 à 3


L'arbitraire agit donc sur toute la classification, selon les termes mêmes de Moreau de Saint-Méry, parfaitement conscient qu'il ne propose que des « approximations »... C'est là qu'intervient dans une certaine mesure la prise en compte du phénotype. Pour chaque catégorie généalogique figure ainsi une correspondance phénotypique obligée. Ainsi le mulâtre « imberbe comme le nègre, a comme lui un caractère laineux dans les cheveux, mais son poil est plus long ». Le quarteron « a la peau blanche, mais ternie par une nuance d'un jaune très affaibli ; ses cheveux sont plus longs que ceux du mulâtre et bouclés. Il les a même assez souvent blonds » [10]...

L'affirmation du phénotype

On retrouve dans toutes les situations de métissage Blanc/Noir le même modèle, plus ou moins affirmé, de « mathématique raciale », selon l'heureuse expression de Michèle Duchet (Duchet, 1969), à défaut d'une telle fureur classificatoire. On note cependant dans tous les cas une tendance à l'affirmation de l'évaluation phénotypique par rapport à l'évaluation généalogique.

En Haïti même, le lexique populaire du métissage est désormais composé majoritairement d'une terminologie coloriste. Les qualificatifs utilisés témoignent d'une belle diversité : noir, noir bleu, noir charbon, noir jais, noir rosé, noir rouge, noir clair ou foncé, sombre, brun, brun foncé, brun clair, brun franc, brun rougeâtre, acajou, marron (clair ou foncé), bronzé, basané, caramel, rapadou (sucre brut en pain), mélasse, canelle, prune, pêche, violette, caïmite, café au lait, chocolat, cuivré, sirop, sapotille, pistache, bronze, couleur d'huile, jaune, jaunâtre, jaune rosé, banane mûre, jone tankou bel mai moulin (jaune comme du beau maïs moulu), rouge brique, rougeâtre, rouge, rosée, kaka jouromon (vieille couleur jaune de girau-mon), beige, blanc, blanchâtre, rouge sanguin, rouge écrevisse, jaune abricot... [11].

[415]

C'est également le cas aux Petites Antilles, où l'on s'aperçoit d'une certaine dérive vers des catégories fondées sur l'apparence physique : ainsi celle des Cha-bins, excellemment définis par M. Leiris comme « des individus qui semblent présenter au lieu d'un amalgame une combinaison paradoxale de traits... » (Leiris, 1955). Outre la couleur de la peau, les caractères physiques discriminants sont ceux que l'on retrouve dans toutes les sociétés métissées de l'Afro-Amérique : couleur et « qualité » des cheveux ; traits du visage... Ce sont ces caractères qui permettent une catégorisation, c'est-à-dire l'alignement de certains individus au sein du continuum chromatique ; c'est à partir d'eux que peuvent éventuellement s'établir des frontières de groupe.

4. Les stratégies intergénérationnelles

De telles représentations débouchent sur une pratique raciale qui a gardé jusqu'à nos jours une certaine pérennité. Il persiste toute une constellation de traits diffuse, où l'on voit parfaitement à l'oeuvre la vision raciale de la société. Mais c'est surtout dans le domaine des stratégies matrimoniales que la permanence des pratiques paraît la plus évidente.

La clôture endogamique du groupe blanc :
l'exemple des Békés de la Martinique


L'un des premiers faits que l'on peut immédiatement remarquer - surtout à la Martinique - réside dans la clôture du groupe blanc créole. Ceux qu'on appelle à la Martinique les Békés forment une partie intégrante de la société martiniquaise, dont ils constituent un pôle à la fois isolé et fonctionnellement intégré. Le facteur essentiel ayant assuré le maintien d'une telle spécificité raciale tout au long de l'histoire de la Martinique s'explique par la forte cohésion du groupe par rapport à l'extérieur et un contrôle social très strict. À partir d'une dualité des normes entre l'homme et la femme, celle-ci est chargée d'assurer la pureté raciale, en procréant exclusivement dans le cadre du mariage, un mariage préférentiellement endogame, ce qui assure la reproduction du groupe semblable à lui-même de génération en génération. Ainsi s'explique la plus grande fréquence et la plus grande cordialité dans les rapports de sociabilité entre Blancs et gens de couleur du côté masculin, alors que le compartimentage racial est beaucoup plus marqué chez les femmes, la femme blanche évitant par là tout risque de contact, dangereux en puissance, avec l'homme de couleur... Une éventuelle mésalliance est sanctionnée rigoureusement par l'exclusion du dissident - dit béké sauté barrière - hors du groupe. Et la mémoire collective doit à jamais retenir de tels écarts à la norme. Ces interdits ne valent cependant pas pour les unions naturelles des hommes, qui demeurent courantes et admises, car elles ne constituent pas une menace pour l'homogénéité du groupe. Ces unions ont d'ailleurs alimenté, tout au long de l'histoire des Antilles, le processus de métissage.

Ce contrôle strict de la ligne de couleur s'appuie sur un système de valeurs largement partagé. Pour tous les Békés, il existe un fort sentiment d'identification au groupe auquel on est fier d'appartenir et qu'on relie au territoire de l'île. Préserver une entité raciale a d'abord un intérêt économique. La terre, par là, a pu rester concentrée entre les mains des membres du groupe, qui a pu ainsi conserver sa prééminence tout en sachant s'adapter aux mutations contemporaines de la société « départementale » (Beaudoux, 1969).

Homogamie et hypergamie chez les gens de couleur

Au sein même des gens de couleur, on peut noter, à côté de cette endogamie du groupe blanc, une nette tendance à l'homogamie, c'est-à-dire à des mariages qui unissent des semblables au plan du type physique. Le Mulâtre, voyant son type physique valorisé, a tendance à se séparer du plus « noir » que lui : une telle attitude débouche sur la formation de sous-groupes à la fois phénotypiques et sociaux qui visent à se refermer vers le bas tout en restant ouverts vers le haut. Car ces stratégies se déploient tout au long de la catégorisation raciale, jouant de compensations possibles de la position de race à la position de classe. Ce jeu de compensations est particulièrement bien illustré par un certain nombre de proverbes, du type : tou mulatpov se nèg tou nèg rich se mulat (tout Mulâtre pauvre est un Nègre et tout Nègre riche est un Mulâtre...), ou par les maximes régissant le choix d'un amoureux, telles qu'elles sont rapportées par Frantz Fanon (Fanon, 1954) : ainsi, pour justifier un mauvais investissement racial : « X est noir, mais la misère et plus noire que lui... »

Joue également en la matière le statut de l'union : le métissage est initié par les rapports illégitimes de l'homme blanc, qui voit par là une part de sa descendance s'assombrir ; dans le même temps, pour la femme noire ou de couleur, l'union avec un homme blanc ou plus clair peut représenter une chance d'éclaircissement de sa descendance (d'où le thème de la Mulâtresse courtisane et des lignées bâtardes de familles métisses...) R. Bastide fait ajuste titre remarquer que si la miscégénation s'était réalisée dans le mariage, elle aurait effectivement démontré une réelle absence de préjugé. Mais dans la mesure où elle s'est développée par le canal d'unions illégitimes et souvent clandestines, elle n'a fait que conjuguer la [416] domination sexuelle et l'oppression raciale : « derrière la miscégénation on trouve exactement ce qu’il y a derrière l'institution de la prostitution en Occident : la défense d'un groupe considéré comme supérieur, et donc intouchable, au détriment d'un autre groupe racial ou social » (Bastide, 1961). Apparaît là l'image très sexuée du métissage, qui renvoie traditionnellement à l'union de la femme de couleur et de l'homme blanc sous le sceau de l'illégitimité, alors que l'union de l'homme noir et de la femme blanche est restée jusqu'à une date assez récente largement impensable.

La prééminence du blanc étant le deus ex machina du système, il s'agit, pour les individus et les lignées constituées, de gérer avec soin leur capital racial de manière à augmenter leur part « blanche », comme en témoigne le célèbre passage de Salvat Etchart (Etchart, 1967) sur les demoiselles Alicanthe (menant leur « combat », génération après génération, avec « une tranquille et persévérante ferveur »...). Cela afin de gravir les divers échelons pour, stade ultime, en contradiction avec l'ensemble du système, « passer la ligne », ce qui ne peut concerner que quelques individus qui sont capables d'échapper à la mémoire collective et d'occulter à leurs propres yeux une part de leur ascendance... (Debbasch, 1967).

5. Couleur et société coloniale

Ce sont essentiellement les vieilles sociétés coloniales, esclavagistes et post-esclavagistes, qui ont fait de la couleur leur principe d'organisation interne, et c'est à partir d'elles que l'Occident dans son ensemble a hérité d'une certaine conception coloriste des hiérarchies et des identités. Mais comment le préjugé de couleur s'articule-t-il à un type de formation sociale ? Question que se sont posés les acteurs de ces sociétés pratiquement dès l'origine. L'attitude spontanée est d'accepter le préjugé pour ce qu'il affirme, à savoir que l'esclavage est naturel aux gens de couleur noire, la couleur étant perçue comme déterminante des rapports sociaux. Mais très vite le préjugé a été considéré comme pure convention, nécessaire au bon fonctionnement de la société esclavagiste, apparaissant comme le fruit de certaines circonstances sociales : « préjugé d'autant plus utile qu'il est dans le cœur même des esclaves, et qu'il contribue au repos de la colonie » [12].

Le préjugé de couleur apparaît dans cette perspective comme déterminé : c'est un cheminement intellectuel de ce type qui a pu inspirer de nos jours les analyses d'inspiration marxiste qui y voyaient confirmation de la détermination, en dernière instance, des rapports de production. Le préjugé est alors considéré comme une idéologie qui permet de légitimer, a posteriori, des rapports de production nés en dehors d'elle (Harris, 1964), avec une fonction essentielle d'occultation-dissimulation (Labelle, 1978).

Il est cependant possible de constater que la « race » n'est pas une forme déguisée (et déterminée) de la classe, ou du moins n'a correspondu avec elle que dans le bref instant de la naissance de la formation sociale. Dès le départ, par les contradictions sur lesquelles nous avons déjà mis l'accent, s'est mis en branle un processus qui, « en désaisissant (les rapports sociaux) de leur fonction de rapports de production, a abouti à leur prégnance » (Jamard, 1983). Le critère racial continue en effet à s'objectiver dans des groupes sociaux réels, dont l'élément fédérateur est un type physique transmissible par le canal de l'hérédité biologique. En d'autres termes se développe l'autonomie distinctive des relations raciales : « les caractères phénotypiques acquièrent une valeur propre » (Jamard, 1983). Ces caractères étant inscrits dans le biologique et héritables de génération en génération, le phénomène prend donc une dimension temporelle au long cours... La référence à la couleur et aux autres traits physiques discriminants induit une très grande viscosité des rapports sociaux ; elle contribue en quelque sorte à cristalliser les hiérarchies sociales premières...

Dans cette perspective d'une autonomie relative de l'ordre racial, il est possible d'affirmer que la valorisation de certains caractères physiques entraîne la formation d'un véritable capital racial, « dont le volume est en raison inverse de la distance généalogique à la classe des esclaves » (Jamard, 1983). Ainsi s'installe une hiérarchie au long de laquelle ce capital racial est à la fois un enjeu et un moyen des luttes qui se déroulent dans le classement et pour le classement (idée empruntée à P. Bourdieu : la vision du classement est fonction de la position occupée dans le classement). Ce qui explique d'une part la vision d'un espace gradué entre les pôles extrêmes chez les gens de couleur et leurs stratégies intergénérationnelles (les Mulâtres, comme on l'a vu, cherchant à se distinguer des Noirs), et d'autre part la vision dichotomique des Blancs, dont la politique est en fait de maintenir la liaison première entre classe et race dominante (faisant appel, dans un premier temps, à un appareil juridique de ségrégation face au danger mulâtre, témoignant qu'il y a « péril en la demeure » (Jamard, 1983) et limitant vers le haut, par la clôture endogamique de leur groupe, les stratégies des gens de couleur à qui les femmes blanches demeurent interdites...). La terminologie classificatoire des types physiques varie ainsi selon la [417] position sociale [13] et le type physique de l'individu classant.

La couleur a été jusqu'ici présentée avant tout comme une réalité symbolique, suivant en cela la plupart des analystes, qui ont prôné une mise à distance par rapport à la réalité biologique du phénomène (Guillaumin, 1972). Il semble pourtant s'établir tout un jeu d'interactions entre le biologique et le social qu'on ne fera ici qu'évoquer (Benoist, 1966). Une donnée fondamentale réside dans le fait que l'apparence physique, si elle est immédiatement revêtue de significations sociales, se constitue à partir d'une constellation de traits biologiques. Et, dans la mesure où l'on se sert de ces traits pour incarner les différences sociales, il apparaît tout à fait nécessaire de sauvegarder ces apparences inscrites dans le corps, tant qu'elles sont porteuses de discrimination.

Se pose donc un problème de reproduction inédit : comment assurer le renouvellement, de génération en génération, d'une situation dont tous les paramètres ne sont pas sociaux et ne sont pas transmissibles socialement, mais passent par le canal de l'hérédité biologique ? Comment se rendre maître de celle-ci ? Comment gouverner la dynamique des structures de populations ? On saisit là la nécessité, pour ce type de sociétés, de trouver une solution au problème physique de la dilution des couleurs, qui aurait effacé, à terme, leur fondement même, en s'assurant, par une économie matrimoniale bien surveillée, des « couleurs mères et primitives »...

Jean-Luc Bonniol
Aix-en-Provence

[418]

Références bibliographiques

Bastide R., 1961, « Dusky Venus, Black Apollo », Race, 3,1 : 10-18.

Beaudoux-Kovats E., 1969, Une minorité dominante : les Blancs créoles de la Martinique, Paris, thèse de doctorat.

Benoist J., 1966, « Du social au biologique, étude de quelques interactions », L'Homme, 6, 1.

1978,« La organizacion social de las Antillas », in M.M. Fragi-nals (ed), Africa en America, UNESCO, 1978, trad. fr. in Études Créoles, 79, 1.

1986, « Le métissage », in D. Ferembach et coll. (eds), L'homme, son évolution, sa diversité. Manuel d'anthropologie physique, Paris, Éditions du C.N.R.S. et Douin éditeurs, 1986.

Benoist J. & J.L. BONNIOL, 1989, « Social values and population structure : phenotype and généalogies in La Desirade (West Indiesà) », International Journal of Anthropology, 4, 1-2 : 103-111.

BONNIOL J.L., 1980, Terre-de-Haut des Saintes. Contraintes insulaires et particularisme ethnique dans la Caraïbe, Paris, Éditions Caribéennes.

1988, Couleur et identité. Le miroir des apparences dans la genèse de populations créoles, Aix-en-Provence, thèse dact.

Cohen W.B., 1980, Français et Africains. Les Noirs dans le regard des Blancs, Paris, Gallimard.

Debbasch Y., 1967, Couleur et liberté. Le jeu du critère ethnique dans un ordre juridique esclavagiste, Paris, Dalloz.

Delacampagne C, 1983, L'invention du racisme, Paris, Fayard.

Duchet M., 1969,« Esclavage et préjugé de couleur », in P. de Comarmond & C. Duchet, Racisme et société.

Etchart S., 1967, Le monde tel qu'il est, Paris, Mercure de France.

Fanon F., 1954, Peaux noires, masques blancs, Paris, Seuil.

Frederickson G., 1981, « Le développement du racisme américain : essai d'interprétation sociale », in S.W. Mintz, Esclave = facteur de production, Paris, Dunod.

Gergen K.J., 1967, « The Significance of Skin Color in Human Relations », Daeadalus.

Giraud M., 1979, Races et classes à la Martinique, Paris, Anthropos.

Guillaumin C, 1972, L'idéologie raciste. Genèse et langage actuel, Paris-La Haye, Mouton.

HARRIS M., 1964, Patterns ofRace in the Americas, New York, Walker.

ISAACS H.R., 1967, « Groupe Identity and Political Change : the Rôle of Color and Physical Characteristics », Daedalus.

Jamard J.L., 1983, « Réflexions sur la racialisation des rapports sociaux en Martinique : de l'esclavage bi-racial à l'anthropony-mie des races sociales », Archipelago, 3-4.

Labelle M., 1978, Idéologie de couleur et classes sociales en Haïti, Montréal, Presses de l'Université de Montréal.

LEIRIS M., 1955, Contacts de civilisations en Martinique et en Guadeloupe, Paris, Gallimard.

Lewis B., 1982, Race et couleur en pays d'Islam, Paris, Payot.

Mintz S.W., 1971, « Groups, Group Boundaries and the Perception of Race », Comparative studies in society and history, 13,4 : 437-450.

Van Der Berghe P.L., Frost P., 1986 ; « Skin Color Préférence, Sexual Dimorphism and Sexual Sélection : a Case of Gene-culture Co-Evolution », Ethnie and Racial studies, 9,1.



[1] Les données proviennent des Human Relations Area Files, catégorie 832 (« stimulation sexuelle, idéaux de la beauté érotique »). A partir de 51 cas utilisables, les auteurs constatent une préférence trans-culturelle écrasante pour les femmes claires (dans les limites du spectre local).

[2] L'interprétation raciale de la malédiction de Cham paraît cependant plus récente que la rédaction du texte biblique.

[3] Comme le remarque judicieusement Léon-François Hoffmann, les Européens ne se penchaient jamais sur le problème de leur propre couleur : Le nègre romantique, Paris, Payot, 1973.

[4] Citons en particulier : R.P. Du Tertre, Histoire générale des Antilles habitées par les Français ; R.P. Labat, Nouveau voyage aux îles de l'Amérique.

[5] Moreau de Saint-Méry, Description... de la partie française de l'île de Saint-Domingue, rééd. Paris, Larose, 1958, p. 100.

[6] Mémoire de la milice, p. 23, Bibl. Moreau de Saint-Méry, XX/97, Archives nationales.

[7] Moreau de Saint-Méry, Larose, 1958, p. 92.

[8] Mémoire pour le Sieur Reculé, Bibl. Moreau de Saint-Méry, XX/97, Archives nationales.

[9] Pour de plus amples développements sur l'exemple désiradien, on pourra se reporter à Jean-Luc Bonniol (1988) et à J. Benoist & J.L. Bonniol (1989). Sur un cas d'extension de la ligne de couleur à un groupe tout entier, voir J.L. Bonniol (1980).

[10] Moreau de Saint-Méry, Larose, 1958, p. 88-89, p. 102.

[11] Liste établie par M. Labelle (1978), p. 131.

[12] Dépêche ministérielle du 27 mai 1771 (le Ministre au Gouverneur de Saint-Domingue).

[13] Ce que confirme Micheline Labelle (1978) pour Haïti : une vision bipolaire caractérise les paysans pauvres et les bourgeois mulâtres, alors que la petite bourgeoisie est affectée d'une vision hiérarchique.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le samedi 9 novembre 2013 10:30
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie retraité du Cégep de Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref