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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Rachad ANTONIUS, “Israël: le devoir de mémoire et la politique du déni.” In ouvrage sous la direction de Micheline Labelle, Rachad Antonius et Georges Leroux, Le Devoir de mémoire et les politiques du pardon, chapitre 20, pp. 249-268. Montréal: Les Presses de l’Université du Québec, 2005, 466 pp. [Autorisation formelle accordée le 16 mai 2019 par Monsieur Rachad Antonius de diffuser cet article en libre accès à tous dans Les Classiques des sciences sociales.]

Rachad ANTONIUS
sociologue, professeur, Département de sociologie, UQÀM.

Israël : le devoir de mémoire
et la politique du déni
.”

In ouvrage sous la direction de Micheline Labelle, Rachad Antonius et Georges Leroux, Le Devoir de mémoire et les politiques du pardon, chapitre 20, pp. 249-268. Montréal : Les Presses de l’Université du Québec, 2005, 466 pp.

1. La problématique de la mémoire, du déni et du pardon
2. La mémoire des dominés
3. La politique du déni
4. L'impact sur l'opinion publique
Conclusion
Bibliographie

My view is that the historian is a judge, and above all a hangingjudge. And therefore I sit in judgment on Israeli leaders.
(Avi Shlaim, historien israélien,
professeur d'histoire à St-Anthony College, Oxford. [1])

1. La problématique de la mémoire, du déni et du pardon

Les questions qui portent sur la mémoire historique en Palestine/Israël posent un énorme défi à qui veut les affronter, tant les enjeux sont grands, les souffrances actuelles, les angoisses profondes, et les sentiments des divers acteurs à fleur de peau.

Et pourtant comment éviter ces questions dans une réflexion sur la mémoire et la souffrance ? Contrairement à bien d'autres situations coloniales, la dépossession des habitants de la Palestine se poursuit encore aujourd'hui et s'intensifie par moments, légitimée par les politiques des gouvernements occidentaux, et avec l'appui militant de certains courants intellectuels tout à fait « respectables ». L'entreprise coloniale ne fait pas partie du passé mais du présent. Il ne s'agit pas de néo-colonialisme ou de domination économique, mais d'une entreprise très actuelle de prise de contrôle du territoire et d'exclusion ou d'expulsion de ses habitants pour le bénéfice de gens venus d'ailleurs [2]. Il s'en suit que la reconnaissance des torts historiques ne consiste pas seulement en un retour sur le passé, car ces torts historiques sont des processus en cours d'exécution, et ils se déroulent en ce moment sous nos yeux. Simultanément, et paradoxalement, certains bénéficiaires de cette dépossession se sentent eux-mêmes blessés au plus profond d'eux-mêmes, voire menacés dans leur existence, à chaque tentative des dominés d'affirmer - et de se convaincre - qu'ils ne sont pas tout-à-fait vaincus.

Le résultat est que la société israélienne vit dans un « état de déni », selon les termes de l'historien israélien Ilan Pappe [3]. Cette situation empêche toute reconnaissance des torts infligés aux Palestiniens, et a fortiori toute demande de pardon et toute réparation. Si la reconnaissance de la mémoire historique et le pardon précèdent logiquement la réparation, ce sont, dans ce cas, les exigences de la réparation qui rendent la vérité historique et le pardon impensables pour les courants dominants en Israël, ainsi que pour les courants politiques, majoritaires dans la diaspora, qui appuient les politiques israéliennes de dépossession des Palestiniens.

La question de la Palestine n'est donc pas avant tout un enjeu de mémoire ; mais elle soulève cependant d'énormes enjeux de mémoire. Car la légitimité du projet colonial israélien repose presque entièrement sur la nécessité d'oublier et de faire oublier que la majorité de la population palestinienne — près de 60% [4] — a été expulsée de ses terres ; que cette expulsion, s'insérant dans un processus complexe, a souvent été violente, et que dans les autres cas la menace de l'usage de la violence a été très présente ; et que plus de 400 villages palestiniens, peut-être même plus de 500 villages, ont été détruits au bulldozer au lendemain de l'établissement de l'État hébreu, après la fin des hostilités, afin de rendre impossible le retour de leurs habitants. Et c'est la version du colonisateur, qui nie ces réalités historiques, qui permet aux promoteurs de la dépossession des Palestiniens de prétendre à la supériorité morale de leurs positions politiques. Contester cette supériorité morale entraîne immédiatement des accusations d'antisémitisme, comme nous le verrons plus loin.

Les interprétations officielles israéliennes de l'histoire de la Palestine sont en effet devenues dominantes dans le discours public en Occident. Elles ont fondé les représentations que l'on se fait du conflit, dans lesquelles les victimes de cette dépossession ont été transformées en agresseurs [5], compliquant singulièrement les questions de mémoire et encore plus celles de réparation.

Pour cette situation, comme pour plusieurs autres dans le monde, le devoir de mémoire est un impératif incontournable. Il concerne tant le discours public des politiciens que celui des chercheurs universitaires. L'enjeu principal, pour les historiens palestiniens, a été de faire reconnaître la véracité de leur récit de l'expulsion. Pour l'historiographie coloniale sioniste [6], il fallait au contraire falsifier la mémoire historique afin de légitimer le projet politique actuel du sionisme. Mais le clivage entre les deux tendances historiographiques ne suit pas strictement les lignes idéologiques, et encore moins les lignes nationales ou ethniques. Car ceux qu'on appelle les « nouveaux historiens » israéliens, qu'ils soient sionistes comme Benny Morris ou antisionistes comme Ilan Pappe et Avi Shlaim, invalident la règle. Leurs travaux confirment, dans les grandes lignes, le récit palestinien de l'expulsion de 1948, même si des différences existent sur des points spécifiques. Mais ces historiens restent minoritaires dans la société israélienne, et leur voix est complètement marginalisée dans la diaspora nord-américaine.

Le travail de mémoire sera donc inévitablement — et malheureusement — polémique et malaisé, puisque dans les milieux universitaires et plus généralement dans le paysage intellectuel occidental, des intellectuels, et non des moindres, appuient le projet colonial israélien et la dépossession des Palestiniens de leurs droits les plus fondamentaux. Cet appui prend précisément la forme de la falsification de la mémoire comme nous allons le voir plus loin.

La mémoire de la destruction de la société palestinienne dans son environnement d'avant 1948 dépasse largement, dès lors, le cadre académique, pour devenir un enjeu politique fondamental, et le lieu d'un combat âpre où les règles de l'éthique ne sont pas toujours respectées. En Occident, ce sont les rapports de force entre groupes sociaux qui ont permis à certains de dicter les termes du débat. Or c'est à l'éthique de la représentation historique qu'il faut revenir si l'on souhaite que ce débat se soustraie un tant soit peu aux déterminants politiques, et qu'il reflète la connaissance historique que l'on a à présent des événements de 1948 plutôt que le rapport de force entre, d'une part, ceux et celles qui appuient le projet colonial de prise de contrôle de la Palestine, et d'autre part, leurs victimes.

C'est dans cet exercice périlleux que nous allons nous lancer, n'appartenant ni à l'un ni à l'autre des deux groupes en présence.

2. La mémoire des dominés

La mémoire historique de la Palestine ne se réduit pas à la « catastrophe » de 1948, la naqba [7]. Le processus de destruction de la Palestine et de dépossession de ses habitants a commencé bien avant cet événement, et il se poursuit jusqu'aujourd'hui. Mais l'expulsion des Palestiniens de leur terre en 1948 a été — et continue à être — un événement historique majeur et traumatisant pour ceux et celles qui l'ont vécu et pour leurs descendants. C'est l'ensemble du projet palestinien contemporain d'édification nationale qui a alors été détruit. L'interprétation de cet événement joue un rôle majeur dans le renversement du rapport agresseur/victime dans l'opinion publique occidentale. Car pendant près de quarante ans, le récit de cette destruction a été nié en Occident. Des études sérieuses, écrites dans les trois décennies qui on suivi la naqba existent cependant. Certaines ont été écrites en langue arabe et n'ont jamais été traduites, telle l'œuvre fort détaillée, en plusieurs volumes, de Arif Al-Arif  [8]. Des études en langue anglaise existent aussi, telles celles de Walid Khalidi [9] et celles de Nafez Nazzal [10], toutes publiées avant l'émergence de ce qu'on appelle « les nouveaux historiens » israéliens, mais elles ont été ignorées des cercles universitaires occidentaux.

La mémoire de l'expulsion a aussi pris la forme de romans et d'œuvres littéraires. Les œuvres de Ghassan Kanafani, Elias Khouri, Mahmoud Darwish et d'autres ont gravé dans les mémoires des lecteurs les images de l'expulsion de 1948. Mais c'est aussi dans le quotidien, à travers les familles et les écoles, que la mémoire de 1948 a été transmise aux générations actuelles de Palestiniens et de Palestiniennes, mémoire soutenue par le vécu diasporique des Palestiniens. On ne peut pas oublier l'expulsion quand, plus de cinquante ans après la tragédie, la société palestinienne est toujours sous tutelle, marginalisée, et sans institutions étatiques viables et indépendantes.

Plus récemment, des efforts systématiques ont été déployés pour rétablir et populariser la mémoire historique des événements de la naqba [11]. Entrepris par des Palestiniens et par quelques rares israéliens qui travaillent en solidarité avec eux, ces efforts ont pris la forme de sites Internet, de collecte de témoignages de survivants et de re-constitution d'archives, puisque une partie importante des archives palestiniennes a été détruite lors de l'invasion de Beyrouth par l'armée israélienne en 1982.

Les témoignages oraux ainsi que les travaux des historiens palestiniens avaient établi la réalité historique des expulsions qui ont eu lieu en 1948, et des massacres qui les ont accompagnées. Mais il a fallu attendre les travaux de l'historien israélien Benny Morris —colonialisme oblige — pour que la narration palestinienne soit prise au sérieux en Israël et dans les universités occidentales, et pour qu'une partie de l'intelligentsia en Israël admette enfin l'ampleur du désastre que cette expulsion a entraîné [12]. Morris et ses successeurs - plus emphatiques envers les Palestiniens que ne l'a été Morris lui-même — ont analysé les processus par lesquels la population palestinienne a été chassée violemment de son territoire et dépossédée de son passé, de ses biens, et de son futur sur ce territoire [13]. Ils ont surtout démontré la réalité empirique de cette dépossession. Mais si les travaux de ces « nouveaux historiens » israéliens sont connus dans les milieux académiques, ils sont encore ignorés dans celui des politiciens et des éditorialistes en Occident, par lesquels l'opinion publique devient visible et qu'elle a un impact sur les prises de position officielles des gouvernements. Surtout, ces travaux font l'objet d'un dénigrement systématique par les tendances dominantes en Israël et par ceux et celles qui les appuient [14].

Il faut souligner ici que l'étendue des politiques d'expulsion de paysans palestiniens et des massacres qui ont eu lieu alors, ainsi que leur caractère (systématique ou non) ne font pas l'objet d'un consensus. Les historiens sionistes, incluant Morris, ont tendance à les minimiser, alors que les historiens palestiniens, ainsi que les nouveaux historiens israéliens non-sionistes ou antisionistes se sont fait un devoir de les documenter, et d'établir leur réalité empirique. Ce qui semble être établi de façon certaine, c'est que de tels massacres ont eu lieu, qu'ils ont été bien plus fréquents que la version officielle israélienne ne le reconnaît, et que les tentatives de les établir comme faits historiques ou de les faire connaître ont valu à leurs auteurs opprobre et sanctions.

Morris lui-même avait sous-estimé le caractère systématique des expulsions et l'occurrence des massacres, mais il s'est partiellement rattrapé par la suite. Dans un ouvrage intitulé Correcting a Mistake [15], il revient entre autres sur l'opération Hiram, durant laquelle la Galilée a été presque vidée de ses habitants arabes, pour souligner qu'il avait bel et bien trouvé des ordres explicites, dans les archives de l'armée israélienne, ordonnant aux officiers de vider la Galilée de ses habitants. Cet ouvrage confirme que le processus d'expulsion a été plus systématique que Morris ne le croyait auparavant. Dans une entrevue accordée à Haaretz en janvier 2004, Morris affirme :

What the new material shows is that there were far more Israeli acts of massacre than I had previously thought. To my surprise, there were also many cases of rape. In the months of April-May 1948, units of the Haganah [the pre-state defense force that was the precursor of the IDF] were given operational orders that stated explicitly that they were to uproot the villagers, expel them and destroy the villages themselves[16]

Morris note aussi qu'après les violences, qu'il juge somme toute limitées et mineures par comparaison à d'autres conflits, une partie des leaders palestiniens a suggéré de mettre les femmes et les enfants à l'abri des combats, contribuant ainsi à l'exode. Mais il justifie ces expulsions :

A Jewish state would not have come into being without the uprooting of 700,000 Palestinians. Therefore it was necessary to uproot them. There was no choice but to expel that population. It was necessary to cleanse the hinterland and cleanse the border areas and cleanse the main roads. It was necessary to cleanse the villages from which our convoys and our settlements were fired on. (Ibid.)

Le nettoyage ethnique (ce sont les termes de Morris) qui a eu lieu alors ne fait plus de doute. C'est sur le caractère systématique et pré-programmé de ces expulsions que Benny Morris d'une part, et Walid Khalidi, Nur Masalha et Norman Finkelstein d'autre part s'étaient affrontés dans un numéro spécial du Journal of Palestine Studies, reflétant le clivage plus large entre le récit officiel israélien des événements et celui des Palestiniens [17].

Des études détaillées existent à présent qui recensent les noms des villages détruits, le nombre approximatif de leurs habitants, leur location précise, ainsi que les nouveaux noms attribués aux colonies israéliennes qui ont été bâties à leur place ou sur leurs ruines [18].

Nous ne souhaitons pas refaire ici le débat entre les diverses tendances historiographiques évoquées. Retenons simplement que, dans la version la plus favorable à Israël, l'expulsion a été massive, qu'elle a été la conséquence directe du projet sioniste, et qu'elle a été souvent - mais pas toujours - extrêmement violente. Dans la version plus critique, celle des historiens palestiniens et des « nouveaux historiens » israéliens, cette expulsion faisait partie d'un plan global étudié minutieusement et mis à exécution de façon systématique.

Dans les deux cas, la signification de ce débat entre la mémoire des dominés et celle des dominants va bien au-delà de la question des réfugiés de 1948. Le sens profond de ce débat, c'est celui de la reconnaissance de l'injustice historique de 1948 [19] et des politiques d'occupation qui l'ont suivie, de la reconnaissance de l'agression dont ont été victimes les Palestiniens et les Palestiniennes, au niveau individuel ainsi que collectivement. Pour la société israélienne, c'est bien d'un devoir de mémoire qu'il s'agit, dans son sens le plus profond. Et c'est bien de cela que James Ron parlait en relatant son expérience de jeune soldat israélien. Mettant la situation des réfugiés palestiniens au Liban dans le contexte de l'injustice subie par les Palestiniens depuis 1948, il écrit :

I’ll take a first step by apologizing for my own misdeeds. (..) Recent history suggests that political deals are not enough, and that truth-telling is vital. (...) If it wants to end this anger, Israël should recognize and compensate those it harmed. If Israël will not do so on its own, the international community should pressure it to do so. If other countries can face up to their unpleasant pasts, why not Israël ? [20]

Mais les courants dominants en Israël et dans la diaspora n'en sont pas là. C'est plutôt la politique du déni qui est la règle générale, avec heureusement de nombreuses exceptions que nous nous devons de souligner.

3. La politique du déni

La réalité historique de l'injustice subie par les Palestiniens a été systématiquement niée dans le discours sioniste dominant. La fameuse phrase de Golda Meïr où elle affirmait que les Palestiniens n'existaient pas était plus qu'une boutade [21]. L'idée de la non-existence des Palestiniens en tant que sujets de droit a joué un rôle important dans la légitimation des politiques israéliennes aux yeux de l'opinion publique américaine et canadienne. Au début des années 1980, paraissait le livre de Joan Peters, From Time Immemorial [22], sur lequel nous souhaitons nous arrêter un moment, car il reprend et amplifie l'assertion de Golda Meïr. Le vaste appui que cette thèse a reçu est hautement significatif.

Ce livre d'apparence académique [23] avait comme thèse fondamentale que les Palestiniens (mot que l'auteure met d'ailleurs entre guillemets) n'existaient tout simplement pas. Que ceux qui avaient usurpé cette identité étaient en réalité des Arabes habitant les pays voisins, venus en Palestine pour profiter de la renaissance économique causée par l'arrivée des juifs européens, et qu'ils avaient par la suite prétendu êtres de « vrais » habitants du pays. L'auteure appuyait ses conclusions sur des statistiques faussées, sur des citations qu'elle avait trafiquées de façon majeure pour en modifier le sens, et sur des interprétations grossièrement boiteuses. C'est Norman Finkelstein qui attira l'attention sur ces aspects frauduleux du livre, et qui les exposa au grand jour en dépit des multiples pressions de ses professeurs [24]. Au bout de près de deux ans de débat public sur le livre, au cours desquels ceux qui le critiquaient se sont fait traiter d'antisémites ou de 'self-hating Jews', l'historien israélien Yehoshua Porath, spécialiste de l'histoire palestinienne et professeur à l'Université hébraïque de Jérusalem, a qualifié le livre de « fabrication » (forgery) et le chroniqueur du New York Times, Anthony Lewis, de « supercherie » (hoax). Ceci ralentit temporairement la carrière du livre mais ne mit pas fin à l'ardeur de ceux qui le défendaient.

Ce qui est significatif ici n'est pas la publication d'un livre frauduleux. Après tout, il y a de nombreuses supercheries de ce type. C'est plutôt l'appui exceptionnel qu'il a reçu et qu'il continue à recevoir de personnalités publiques, qui ne se sont pas rétractées après que son caractère frauduleux fut mis en évidence, et qui au contraire ont déclaré les conclusions justes même quand ils admettaient que la démonstration était défectueuse.... L'auteure fut invitée à d'innombrables et prestigieuses tribunes, dans les universités, au Parlement canadien, et dans des programmes radiophoniques littéraires. L'écrivain Saul Bellow déclara : « Millions of people the world over, smothered by false history and propaganda, will be grateful for this clear account of the origins of the Palestinians » [25]. L'historienne Lucy Dawidowicz affirma que ce livre « (was bringing) to light the historical truth about the Middle East ». Barbara Tuchman déclara « This book is a historical event in itself » [26]. Elie Wiesel, Prix Nobel, a endossé les conclusions du livre en termes élogieux. L'ex-directeur du bureau du recensement américain, Philip Hauser, en plus de sa note admirative sur la couverture du livre, prit la peine d'écrire une note méthodologique de deux pages pour dire combien l'analyse démographique de l'auteure était rigoureuse. Le livre devint un best-seller. Aujourd'hui même, le site web de l'ancien premier ministre israélien Benjamin Netanyahou promeut cette supercherie comme une source d'information fiable. Le livre fut réimprimé à nouveau en 2004 et largement promu et distribué. Il faut souligner que les appuis et les éloges du livre de Joan Peters sont venus de personnalités bien placées dans le paysage intellectuel nord-américain. Personne, parmi les historiens israéliens sérieux, même les plus à droite, ne considère ce livre comme valable, et sa carrière académique est terminée. Mais pas son utilité en tant qu'outil de relations publiques. Mais de nombreux sites internet et de nombreuses institutions de plaidoyer pro-israéliennes en Amérique du Nord continuent à faire sa promotion. Daniel Pipes, que le Président George W. Bush a nommé à la tête de la American Peace Academy, en fait lui aussi l'éloge et la promotion.

Pour comprendre la fonction de cette supercherie, publiée en 1984, il faut la replacer dans son contexte. Les premières critiques sérieuses de la politique israélienne envers les Palestiniens ont commencé à s'exprimer après l'invasion du Sud Liban et de Beyrouth en 1982. Les perceptions du conflit aux États-Unis commençaient à changer de façon perceptible, et pour la première fois depuis le début du conflit, les Palestiniens apparaissaient aux yeux de l'opinion publique comme des êtres humains d'abord, et même comme des victimes. Aux Nations-Unies, les initiatives demandant la résolution du conflit sur la base des principes du droit international et dans le cadre de l'ONU se faisaient de plus en plus pressantes, et les États-Unis et Israël étaient de plus en plus isolés dans les votes traitant du conflit. L'adhésion de l'opinion publique américaine devenait un enjeu majeur pour le maintien de la politique israélienne. Pour Norman Finkelstein, le livre de Peters était avant tout un exercice de relations publiques.

Ceci explique peut-être, du moins en partie, l'apparition de ce livre à ce moment, et l'extraordinaire effort de publicité qui l'a accompagné. Cette hypothèse est renforcée par le fait que le livre eut peu d'échos en Israël même, et pas beaucoup d'écho en Europe. L'enjeu du livre était l'opinion publique américaine, et en particulier celle de la diaspora juive en Amérique [27]. Le déni semble être beaucoup plus virulent dans la diaspora qu'en Israël même.

On pourrait multiplier les exemples de déni de ce type. Mentionnons seulement le traitement qu'à reçu le film « Route 181, Fragments d'un voyage en Palestine-Israël » des cinéastes Eyal Sivan et Michel Khleifi. Le premier est juif, le deuxième palestinien non juif, et tous les deux sont citoyens de l'État d'Israël. Le film tire son nom de la Résolution 181 de l'Assemblée générale des Nations-unies, votée en 1947 et proposant la création d'un état juif sur 57% du territoire de la Palestine du Mandat britannique. Les cinéastes se sont promenés sur le tracé de la frontière proposée dans la résolution 181, tracé qui tombe entièrement dans le territoire israélien actuel. Et ils ont laissé parler les gens qu'ils ont rencontrés, en leur demandant des questions sur le passé de leur communauté, de leur village. Hommes, femmes, Israéliens juifs ashkénazes, sépharades, israéliens arabes : chrétiens, musulmans ou druzes, et enfin bédouins sédentarisés, ils se sont tous exprimés sur leur vécu actuel mais surtout sur leurs souvenirs des événements de 1948. C'est un merveilleux travail de mémoire multiple, où les souvenirs, précis ou confus, sont exprimés à l'état brut, et où les récits se confrontent, et divergent quelques fois. C'est un merveilleux travail de mémoire mais aussi une ode à la réconciliation, car une chose ressort de ces nombreux témoignages : la possibilité d'un vivre ensemble au-delà des clivages. Quelques fois, pour quelques personnes seulement, une opinion est exprimée à l'effet que ce sont les choix politiques des dirigeants qui empêchent cette réconciliation. Mais une constante se dégage cependant, graduellement. Les Arabes évoquent leur dépossession. Pressés de dire ce qu'il y avait là avant leur arrivée, la plupart des juifs israéliens interviewés finissent par dire qu'il y avait des communautés arabes qui vivaient là. Des maisons, des champs cultivés par les Arabes, des villages habités par eux. Et peu à peu, sous Israël, apparaît la Palestine. Certains des colons de la première heure finissent par admettre : oui, nous les avons chassés de cet endroit. Où ? Là-bas, vers l'est. Derrière les collines. Et s'ils résistaient ? Nous avons employé nos armes.... Ces assertions étaient faites sans culpabilité, comme le constat distant d'une histoire ancienne.

Est-ce cela qui a provoqué les réactions virulentes au sujet du film ? Une campagne de grande envergure fut lancée contre le film, et sa projection fut quelquefois interdite. Prévue pour le 14 mars 2004 dans le cadre du 26e Festival International de Film Documentaire à Paris, la projection du film fut annulée par une décision commune du ministère de la Culture et de la Communication, du Centre Pompidou, et de la Bibliothèque publique d'information du Centre [28]. Une campagne de protestations fut également lancée contre la chaîne Arte, qui avait diffusé le film en novembre 2003.

Pour sa part, le philosophe Alain Finkielkraut, réagissant à la diffusion du film par Arte, s'est lui aussi déchaîné contre le film dans son émission "Qui vive", diffusée sur RCJ, le 30 novembre 2003. Le Monde rapportait les déclarations de Finkielkraut ainsi :

"Ce film est une catastrophe, le désastre de toute intégrité, une atteinte à toutes les vérités factuelles, a déclaré Alain Finkielkraut. Il constitue un appel au meurtre." Accusant Eyal Sivan d'être "l'un des acteurs de l'antisémitisme juif qui sévit aujourd'hui", Alain Finkielkraut suggérait aux auditeurs de créer "une espèce de barrière de sécurité" autour du cinéaste, suspecté d'avoir une telle "haine à l'égard des juifs" que, pour lui, "il s'agit de les tuer, de les liquider, et de les faire disparaître." [29]

En somme, l'évocation de la mémoire historique des dominés, même par un cinéaste israélien, constitue « un appel au meurtre » et de « l'antisémitisme ». La réalité du passé palestinien de la Palestine est insoutenable.... On est loin du pardon demandé par l'ex-soldat israélien James Ron.

Les accusations d'antisémitisme formulées par Alain Finkielkraut ne sont pas isolées. Une vigoureuse campagne de la droite pro-israélienne vise à définir toute critique du sionisme comme étant antisémite. À la définition classique du terme antisemitism :

« (1) hostility toward Jews as a religious or racial minority group, often accompanied by social, political or economic discrimination[30]

Le Merriam-Webster Third New International Dictionary, un des dictionnaires les plus populaires aux États-Unis, ajoute deux autres :

(2) opposition to Zionism (3) sympathy for the opponents of Israël. »

Définir l'opposition à une idéologie politique (d'ailleurs contestée à partir d'une lecture spirituelle du judaïsme [31]), ou aux politiques d'occupation israéliennes comme étant une forme de racisme, a pour effet de paralyser la réflexion critique. C'est une forme particulièrement néfaste de déni.

Ce sont ces conceptions qui sont à la base des prises de position de plusieurs personnalités politiques. À titre d'illustration, mentionnons l'article de l'ancien premier ministre du Canada, M. Brian Mulroney. Dans un texte publié dans le National Post, sous le titre « Israël is the New Jew » comportant en exergue : « contemporary anti-Semitism has added the Jewish state to its list of targets » il pourfend ceux qui critiquent l'état d'Israël, et écrit une page pleine sans mentionner une seule fois l'occupation militaire des territoires palestiniens [32]. Bien sûr il évoque la possibilité théorique qu'on puisse critiquer Israël sans être antisémite, mais il se garde de le faire et surtout il n'apporte, dans son long texte, aucun élément permettant de le faire. Dans un discours qui prend son origine au centre du pouvoir, Israël est donc représentée une fois encore comme la victime.

Plus récemment, c'est au tour de la députée Marlene Jennings [33] de reproduire l'idée qu'Israël est la victime. Critiquant le fait que le Canada se soit abstenu plutôt que de voter contre la résolution demandant à la Cour international de Justice d'examiner la question de la barrière de sécurité qui enferme les Palestiniens, Jennings déclare : « Israël is the victim and must be allowed to determine what measures it deems appropriate for its security... ». Ici aussi, la fonction de cette barrière dans l'annexion de territoires palestiniens est totalement absente. Le rôle d'agresseur et de victime est renversé. Les prises de position des M. Mulroney et de Mme Jennings ne sont pas exceptionnelles. D'ailleurs elles n'ont reçu aucune critique de la part d'autres collègues ou de la part d'éditorialistes. Elles illustrent plutôt la règle générale qui prévaut au sein de l'appareil politique canadien.

4. L'impact sur l'opinion publique

Nous avons affirmé au début de ce texte que les interprétations officielles israéliennes de l'histoire de la Palestine étaient dominantes dans le discours public en Occident, et qu'elles avaient fondé les représentations que l'on se fait du conflit, transformant les victimes de la dépossession en agresseurs. Nous croyons que le déni systématique des faits historiques, repris et porté par un certain nombre d'intellectuels et de politiciens, se reflète dans ces représentations. Ceci est vrai non seulement des interprétations que l'on se fait du conflit, mais des faits empiriques eux-mêmes.

Cette question a été étudiée par le Glasgow University Media Unit. Voici les points saillants de l'ouvrage qui fait état d'une étude de la couverture médiatique du Proche-Orient par la BBC et par la chaîne ITV, et de son rapport avec la construction des connaissances des téléspectateurs (compréhension, croyances et attitudes) [34]. Les résultats montrent un renversement du rôle des victimes et des agresseurs aux yeux des participants britanniques, allemands et américains ainsi que des éléments explicatifs de ce renversement.

Voici ce que les auteurs rapportent :

There is a preponderance of official 'Israeli perspectives', particularly on BBC 1, where Israelis were interviewed or reported over twice as much as Palestinians. On top of this, US politicians who support Israël were very strongly featured. They appeared more than politicians from any other country and twice as much as those from Britain. (ibid)

(...) Most (viewers) did not know that the Palestinians had been forced from their homes and land when Israël was established in 1948. In 1967 Israël occupied by force the territories to which the Palestinian refugees had moved. Most viewers did not know that the Palestinians subsequently lived under Israeli military rule or that the Israelis took control of key resources such as water, and the damage this did to the Palestinian economy. Without explanations being given on the news, there was great confusion amongst viewers even about who was 'occupying' the occupied territories. Some understood 'occupied' to mean that someone was on the land (as in a bathroom being occupied) so they thought that the Palestinians were the occupiers. Many saw the conflict as a sort of border dispute between two countries fighting over land between them. (ibid)

Les auteurs ont posé une question simple : qui occupe les territoires occupés et quelle est la nationalité des colons ?

Chez les Britanniques, seulement 9% en 2001 et 11% en 2002 ont répondu correctement que les Israéliens occupaient les territoires palestiniens et que les colons étaient des Israéliens. Chez les Allemands, seulement 26% ont donné une réponse correcte. L'échantillon américain était beaucoup mieux informé que la moyenne de la population, puisqu'il s'agissait d'étudiants en journalisme ayant déjà fait des travaux universitaires sur le conflit israélo-palestinien. Pourtant, parmi ce groupe relativement bien informé, seulement 29% ont donné une réponse correcte. Plus de la moitié de ceux qui ont donné la bonne réponse pensaient aussi que les Palestiniens occupaient les territoires occupés (tel qu'expliqué dans la citation précédente), démontrant ainsi une confusion étonnante.

C'est sans doute cet état d'ignorance de la population, soigneusement entretenu [35], qui permet à des politiciens et des politiciennes de prétendre qu'ils sont pour une solution juste et négociée du conflit, et d'appuyer, simultanément, toutes les mesures d'occupation du territoire prises par Israël, en pourfendant comme antisémites ceux qui critiquent les actions israéliennes.

Conclusion

La responsabilité historique du sionisme politique dans la destruction de la société palestinienne n'est pas qu'une question d'histoire et de mémoire. Les politiques de dépossession des Palestiniens de leur territoire se poursuivent activement encore aujourd'hui. Si quelques voix courageuses parlent de demander pardon pour ce qu'Israël a fait subir aux Palestiniens, elles restent extrêmement minoritaires en Israël et complètement marginalisées dans la diaspora. Ce sont les conséquences possibles de la réparation qui rendent ce devoir de mémoire impensable pour les courants politiques et intellectuels dominants en Israël. Car la moindre réflexion sérieuse sur la réparation remettrait en question les prémisses fondamentales du sionisme politique tel qu'il s'est développé historiquement au 20e siècle. Par ailleurs, la reconnaissance des torts infligés à la société palestinienne rendrait impossible la poursuite de la politique de dépossession qui est encore en vigueur. Or les tendances dominantes en Israël appuient le maintien des colonies et leur renforcement, et non pas leur démantèlement, ainsi que l'appropriation de portions importantes des territoires occupés en 1967, même si ces tendances souhaitent, du même souffle, se réconcilier avec les Palestiniens sans avoir à leur rendre leur territoire.... Le retrait des colonies de Gaza, loin de mettre un terme à la colonisation, permettra au contraire à Israël de justifier l'annexion des parties importantes de la Cisjordanie, ce que facilitera sans doute le Mur dont la construction se poursuit en dépit de l'avis de la Cour internationale de Justice mentionné précédemment. La guerre de 1948 n'est donc pas tout à fait finie. [36]

Il est peu probable, dans les circonstances actuelles, qu'Israël accomplisse son devoir de mémoire. La non-reconnaissance de cette injustice historique est sans doute un des plus grands obstacles à la résolution d'un conflit qui n'est pas près de se terminer, ainsi qu'à la réconciliation, pourtant souhaitée des deux côtés du Mur....

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[2] Voir par exemple l'analyse que fait la Cour internationale de Justice de l'effet du Mur sur les droits des Palestiniens, dans Cour internationale de Justice (2004), disponible sur son site : www.icj-cij.org.

[3] Conférence donnée à l'Université McGill, 22 janvier 2003. Thème repris dans son ouvrage : A History of Modern Palestine, One land, Two people, Cambridge, Cambridge University Press, 2004.

[4] Selon Walid Khalidi (1991), p. 9.

[5] Nous avons illustré ce renversement de rôles dans Antonius (2000). Voir aussi l'enquête de Philo et Berry (2004), dont il sera question à nouveau plus loin dans ce texte.

[6] Nous parlons ici du sionisme politique (et non du sionisme religieux) que nous définissons comme une idéologie politique nationaliste ayant eu pour but de créer et de maintenir un État dont le caractère principal est d'être l'État des Juifs. Historiquement, le sionisme politique a choisi d'ériger cet état sur une terre où vivait déjà un autre peuple...

[7] C'est par ce terme, signifiant « la catastrophe » que les Palestiniens désignent les événements de 1948.

[8] Al-Arif (s.d).

[9] Khalidi (1984).

[10] Nazzal (1978). Cet ouvrage est fondé sur une thèse de doctorat que Nazzal avait terminé quelques années plus tôt.

[11] Voir en particulier www.alnakba.org, ainsi que www.shaml.org/zshaml/site/. Voir aussi le texte de Salim Tamari dans ce volume, qui évoque plusieurs actions entreprises dans les années 90 visant à compiler les récits de l'exil.

[12] II y a toujours eu un petit nombre d'universitaires — nombre qui est de plus en plus croissant — qui ont témoigné dans leurs travaux et dans leurs positions politiques de la destruction de la société palestinienne. Mais il y en a encore, et qui occupent des positions prestigieuses, qui continuent à propager la thèse négationniste, celle qui nie que les Palestiniens ont été dépossédés de leur terre. C'est l'existence de cette option, qui ne relève pas de la liberté académique mais de la désinformation, qui est significative.

[13] Mentionnons entre autres Avi Shlaim (1987), Ilan Pappe (2004), Joseph Algazy (Vidal et Algazy, 2002), et Simha Flappan (1987).

[14] Ces travaux sont accessibles à un large public, et le journal Israélien Haaretz en a fait état dans de nombreux articles. Voir par exemple le texte de Gideon Levy, dans Haaretz, 3 novembre 2000. Quant au dénigrement des nouveaux historiens, voir par exemple Schvindlerman (2001).

[15] Morris (2000), longuement commenté et cité par Gideon Levy dans Haaretz (op. cit).

[16] Interview de Morris par Ari Shavit, Haaretz, 9 janvier 2004.

[17] Journal of Palestine Studies, Autumn, vol. 21, no 1, (1991).

[18] Khalidi (1992).

[19] Précisions que la reconnaissance de l'injustice historique de 1948 n'entraîne pas nécessairement qu'il faille la corriger en en créant une autre en 2005. C'est dans les principes du droit international qu'il faut chercher la solution de ce conflit.

[20] James Ron, « The Next Step for Israël », Boston Globe, 25 mai 2000. James Ron était alors professeur de sociologie à Johns Hopkins. Ce texte a paru dans plusieurs journaux, dont le Daily Star, de Beyrouth.

[21] Entrevue au Sunday Times, 15 juin 1969.

[22] Peters (1984).

[23] Sur les quelque 600 pages du livre, les références occupent 120 pages... mais plusieurs ont été altérées de façon fondamentale pour prouver la thèse de l'auteure, tel que l'a démontré Norman Finkelstein. Cependant le livre n'a pas été pris au sérieux par les historiens israéliens, étant destiné surtout au marché de l'opinion publique américaine.

[24] Finkelstein (2001).

[25] Sur la couverture arrière du livre.

[26] Sur la couverture du livre.

[27] Bien sûr, cette lecture de la fonction du livre ne démontre pas que ses thèses principales sont frauduleuses. C'est plutôt la comparaison des sources premières citées dans le livre avec ce qu'en a fait l'auteure qui a amené les critiques à considérer que ce livre était une supercherie.

[28] Lettre des cinéastes du 4 mars 2004, publiée sur le site http://u-blog.net/france/article/Censure.html (consulté le 15 mars 2005). La projection du film fut quand même autorisée à d'autres occasions.

[29] Le Monde, 2 mars 2004, rapporté par IsraNews. Consulté sur le site http://isranews.com/fr040302.htm en mars 2005.

[30] Nous endossons la partie (1) de la définition, sauf pour l'usage du mot « race ». Si le racisme est un phénomène très réel, le terme « race » est un construit social et ne reflète pas une réalité ontologique qui permet de classer les groupes humains, tel que le terme suppose dans son usage moderne.

[31] Voir Rabkin (2004).

[32] Brian Mulroney, « Israël is the New Jew », National Post, 10 février 2003.

[33] Marlene Jennings, citée par Janice Arnold, « Liberal MP calls for Government to be more pro-Israel », Canadian Jewish News, 26 février 2004.

[34] Philo G. et Berry M. (2004). Les faits saillants mentionnés ici sont tirés du site
http://www.gla.ac.uk/departments/sociology/units/media/israel.htm.

[35] Nous avons étudié les processus par lesquels cette représentation est reproduite dans Antonius (1986) et Antonius (2002)

[36] Pour reprendre le titre d'un ouvrage de Tanya Reinhart : Détruire la Palestine, ou comment terminer la guerre de 1948. Reinhart (2002).



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 2 février 2020 13:26
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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