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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Pierre Doray, Amélie Groleau et Claude Lessard, “Le paradoxe du développement de la sociologie de l’éducation au Québec.” In revue Éducation et sociétés, 2017/2 (n° 40), pages 145 à 166. Éditeur: De Boeck Supérieur. Numéro intitulé: “Vingt ans après: la sociologie de l’éducation et de la formation francophone dans un univers globalisé. (1re partie)” [Claude Lessard nous a accordé, le 1er avril 2022, l’autorisation de diffuser en libre accès à tous ce texte dans Les Classiques des sciences sociales.]

[145]

Pierre Doray, Amélie Groleau
et Claude Lessard

Le paradoxe du développement
de la sociologie de l’éducation
au Québec
.”

In revue Éducation et sociétés, 2017/2 (n° 40), pages 145 à 166. Éditeur : De Boeck Supérieur. Numéro intitulé : “Vingt ans après : la sociologie de l’éducation et de la formation francophone dans un univers globalisé. (1re partie)”

Les auteurs [145]
Introduction [145]

Problématique [146]
Méthodologie [148]
L’institutionnalisation sociale de la sociologie de l’éducation dans les universités [148]
Les conditions externes de l’institution sociale [153]
Autour de l’institutionnalisation cognitive [154]

Un premier projet collectif : les aspirations scolaires des Québécois [155]
Les relations entre Éducation et Économie [156]
La profession enseignante [157]
Les relations multiculturelles en éducation [158]
La mise en œuvre des nouvelles politiques éducatives [159]

Conclusion [160]
Références bibliographiques [162]
Résumé


Pierre Doray, sociologue
Centre interuniversitaire de recherche sur la science et la technologie
Département de sociologie
Université du Québec à Montréal
CP 8888, Succ. Centre-ville
Montréal, Québec, Canada H3C 3P8
Courriel : doray.pierre@uqam.ca

Amélie Groleau, sociologue
Centre on Population Dynamics
Département de sociologie, Université McGill
Édifice Peterson Hall, 3460 rue McTavish
Montréal, Québec, H3A OE6
Courriel : amelie.groleau@mail.mcgill.ca

Claude Lessard, sociologue
CRIFPE, Université de Montréal
Département d’administration et fondements de l’éducation
Faculté des sciences de l’éducation
C.P. 6128, succursale Centre-ville, Montréal, Québec H3C 3J7
Courriel : claude.lessard@umontreal.ca


Introduction

Au Québec, la sociologie de l’éducation apparaît marginale au sein des départements de sociologie comme des facultés et départements de sciences de l’éducation. Elle est présente en recherche institutionnelle, mais sans pour autant dominer sa production. Cette spécialité ne dispose pas d’une très grande visibilité dans et hors de l’université et demeure peu enseignée. Malgré tout, elle semble avoir connu, ces dernières décennies, des développements significatifs dans le champ de la recherche en éducation. Cet apparent décalage prend un sens particulier dans l’environnement nord-américain où, traditionnellement, les champs de connaissance ont pu se déployer à l’université en associant fortement l’enseignement et la recherche. À la différence de pays comme la France, où ces deux aspects ont été historiquement séparés, la recherche relevant d’institutions [146] spécialisées comme le CNRS et l’enseignement supérieur dépendant des universités, au Québec, le modèle dominant a évité une telle coupure favorisant plutôt une dépendance mutuelle entre ces deux dimensions de la mission universitaire.

D’où l’hypothèse de travail qui guide cette analyse : au Québec, la sociologie en éducation s’est développée autour d’un paradoxe dont les termes sont, d’une part, une faible institutionnalisation dans l’enseignement universitaire et, d’autre part, une production intellectuelle sans commune mesure avec cette situation. Cette hypothèse structure cet article : après une brève présentation de la problématique de recherche, la question du faible développement de la sociologie de l’éducation dans l’université québécoise est explorée. Puis sont examinés les grands chantiers de la recherche en éducation pilotés au fil du temps par des sociologues de l’éducation, avant de discuter des implications de ces résultats.

Problématique

Tout au long du XXe siècle, particulièrement après la Seconde Guerre mondiale, l’enseignement supérieur a connu des développements importants, quantitatifs et qualitatifs. Le Québec n’a pas échappé à cette tendance et au déploiement de ce que Kerr, dès 1963, a nommé la multiversité, soit une institution de haut savoir incorporant un vaste ensemble de facultés, départements et écoles cultivant de nombreux champs de connaissances et de pratiques sociales, des plus anciennes aux plus récentes. La création de l’Université du Québec en 1968 et son déploiement sur l’ensemble du territoire en sont le symbole toujours vivant, donnant accès à l’enseignement supérieur à une génération de nouveaux étudiants, désormais moins souvent héritiers et plus nombreux dits de première génération. Sur le plan qualitatif, les transformations sont tout aussi remarquables : alors que l’université traditionnelle comportait un éventail restreint et séculaire de facultés, les universités d’après-guerre voient leurs domaines d’études se multiplier : en témoignent notamment les sciences sociales, politiques et économiques, la psychologie, l’éducation, le service social, etc.

Cet élargissement révèle un double processus. D’une part, d’anciennes et de nouvelles pratiques sociales s’académisent et cherchent à construire une base de connaissance scientifique, nourrie et légitimée par la recherche universitaire. D’autre part, les disciplines universitaires se professionnalisent en s’ouvrant à ces champs de pratique et en prétendant leur apporter théories, concepts et méthodes aptes à les améliorer. Ainsi, une université qui se conçoit comme investie d’une mission de service public y trouve son compte, liant savoir, modernisation et innovation sociale.

[147]

Au Québec, les sciences sociales et l’éducation participent de ces évolutions depuis un demi-siècle. L’institutionnalisation des sciences sociales, économiques et politiques dès l’après-guerre et l’intégration des écoles normales au sein de l’université québécoise procèdent de cette double logique d’académisation et de professionnalisation, dans le cadre global d’une institution universitaire qui participe et soutient l’essor d’un État-providence.

À quoi l’institutionnalisation des disciplines correspond-elle ? Fournier (1973, 27-28 ; 1985, 417) définit ce processus comme l’autonomisation d’un sous-champ intellectuel qui se traduit par l’acquisition, par un groupe de producteurs de biens symboliques, d’une légitimité culturelle passant notamment par l’accès à des postes dans le système universitaire. Proposant une analyse de cas sur l’institutionnalisation des sciences sociales au Québec, Fournier examine l’apparition d’un corps de spécialistes ainsi que les “[…] conditions sociales et culturelles [et] qui ont favorisé la reconnaissance sociale de leurs activités intellectuelles et scientifiques” (1973, 30). De son point de vue, une telle analyse doit tenir compte de la position de la discipline au sein du champ intellectuel international, mais aussi des rapports structurant la société au moment de son institutionnalisation. Dans cette perspective, il insiste sur la situation périphérique du Québec par rapport aux grands centres de production intellectuelle (France, États-Unis, Grande-Bretagne) au moment de l’essor des sciences sociales dans la province. Il souligne aussi que la conjoncture sociohistorique a eu une influence sur les conditions objectives qui ont favorisé le développement et l’évolution de ces disciplines.

S’intéressant plus spécifiquement au processus interne d’institutionnalisation des disciplines, Whitley (1974) y distingue deux dimensions constitutives. La première, l’institutionnalisation cognitive, renverrait aux problèmes et objets de la discipline et à son fondement épistémologique –théorie, méthodologie, frontières avec les autres disciplines–, alors que la seconde, la dimension sociale, engloberait les conditions concrètes d’émergence et de maintien de la discipline –organisation des enseignements et de la recherche, allocation des ressources et relations entre les membres d’une structure cognitive. Bien que fortement connectées, les dimensions cognitive et sociale de l’institutionnalisation scientifique n’évolueraient pas toujours au même rythme et ne seraient pas nécessairement cohérentes.

Prenant appui sur une double perspective, d’une part, l’effet de la conjoncture sociohistorique sur les conditions objectives de croissance d’une spécialité de la sociologie (Fournier 1973) et, d’autre part, le degré variable d’articulation dans son processus d’institutionnalisation entre les dimensions cognitives et sociales (Whitley 1974), l’article analyse la place quantitative de la sociologie de l’éducation dans l’enseignement universitaire et son importance qualitative dans le champ de la production scientifique en éducation à la lumière d’éléments clés de l’environnement social et politique québécois. Il se concentre sur la sociologie de l’éducation [148] développée en sciences de l’éducation, d’abord parce que l’éducation a été un champ négligé par les départements de sociologie québécois. Le nombre total de sociologues de l’éducation –chercheur dont l’éducation est le principal champ d’expertise– ayant travaillé dans un département de sociologie se compte sur une seule main. Ensuite, parce qu’à partir de leur intégration à l’université, les facultés d’éducation ont fait une place à la sociologie dans le cursus de formation des enseignants et dans la recherche.

Méthodologie

Le poids de la sociologie de l’éducation dans le champ de l’enseignement universitaire a été examiné de deux façons. D’une part, en répertoriant le nombre de sociologues de l’éducation embauchés en faculté de Sciences de l’éducation de 1970 à 2017 dans les quatre principales universités francophones québécoises : Université Laval, Université de Montréal, Université de Sherbrooke et Université du Québec à Montréal (UQAM). Était considéré sociologue tout professeur ayant obtenu une maîtrise ou un doctorat en sociologie. Ce choix pragmatique dissimule le questionnement sur ce qui fait le sociologue de l’éducation (formation ? perspective de recherche ?) et mériterait d’être développé plus amplement. L’information a été collectée dans les annuaires des facultés. D’autre part, toujours en recourant à la même source, les cours obligatoires à consonance sociologique ont été répertoriés dans les formations de 1er cycle en enseignement primaire, secondaire, de langues secondes (français et anglais) et en adaptation scolaire. Les programmes en éducation physique et en orientation scolaire ont été exclus. Le tableau se limite aux années 1970 et 2017, car il s’appuie sur le travail de Trottier et Lessard (2002) pour rendre compte de cette évolution.

Enfin, comme toutes les recherches effectuées par des sociologues n’ont pas été d’envergure équivalente, une démarche plus qualitative a été adoptée pour exposer le développement de la recherche en éducation selon une perspective sociologique, en insistant sur les grands chantiers réalisés en équipe et ayant marqué le développement cognitif de la spécialité au Québec.

L’institutionnalisation sociale de la sociologie
de l’éducation dans les universités


La sociologie a connu un développement important au cours des cinquante dernières années dans les quatre plus grandes universités québécoises. La [149] sociologie a gagné en autonomie et en légitimité à l’échelle sociale et culturelle au cours des années 1960 et 1970 (Rocher 1998) pour ensuite connaître une différenciation et une spécialisation. Ce processus a entraîné une phase de dissémination de la discipline en dehors de ses départements dédiés (Fournier 1985). À partir des années 1970, les sociologues embauchés se retrouvent en forte proportion hors des départements de sociologie, voire des facultés de Sciences Sociales. Les sciences de l’éducation accueillent une certaine proportion d’entre eux.

Les sciences de l’éducation entrent à l’université, en laissant derrière elles la pédagogie, vue comme une tradition empirique de régulation de l’enseignement conçu comme une pratique artisanale, institutionnalisée depuis la Renaissance et reproduite depuis au sein d’écoles normales. Leur intégration s’inspire du modèle américain qui comporte une double contribution de l’institution universitaire : celle des départements disciplinaires pour la formation des enseignants dans les matières scolaires et, pour la dimension professionnelle, une forte dépendance à l’égard de la psychologie, source privilégiée des théories de l’apprentissage et du développement cognitif, affectif, social et moral des élèves. En conformité avec la vision sociale de l’éducation véhiculée par la Commission Parent (1963 à 1966), une certaine présence de la sociologie de l’éducation dans les programmes de formation des enseignants, a aussi vu le jour, les différenciant ainsi de ceux des anciennes écoles normales (Hamel 1991). Cette présence s’est pourtant avérée très marginale tout au long de l’histoire du dernier demi-siècle.

Lors de leur création, les facultés d’éducation sont de taille modeste. En intégrant la formation des maîtres à l’université, les critères de qualification pour accéder à l’enseignement, mais également à la recherche changent. Alors que les professeurs des écoles normales étaient sélectionnés en fonction de leur expérience, l’embauche à l’université repose sur le titre scolaire, ici le doctorat. Pour reprendre Fournier (1973), cette nouvelle norme a une fonction de légitimation et n’est pas étrangère à l’entrée dans l’institution universitaire. Seule une partie des enseignants les plus scolarisés –plusieurs travaillant déjà dans des instituts universitaires avant la réforme– obtient alors un poste, laissant une place de choix à des professeurs fraîchement diplômés (Hamel 1991, 128).

La croissance des facultés d’éducation est très rapide (voir tableau 1) et, de 1970 à 1980, le nombre de professeurs des facultés des sciences de l’éducation augmente de façon marquée. La décennie 1990 se caractérise par un essoufflement dans le renouvellement du corps professoral coïncidant avec des restrictions budgétaires importantes dans l’enseignement universitaire (Tondreau & Robert 2011). À l’heure actuelle, Sherbrooke et l’UQAM disposent des plus grandes facultés d’éducation des universités francophones au Québec.

[150]

Tableau 1

Nombre de professeurs (sociologues vs total) des facultés d’éducation
de l’U. Laval, l’U. de Montréal, l’U. Sherbrooke et l’UQAM, 1970-2017
*,**

Université
Laval

Université
de Montréal

Université
de Sherbrooke

UQAM

Nombre
sociologues

N. total
professeurs

Nombre
sociologues

N. total
professeurs

Nombre
sociologues

N. total
professeurs

Nombre
sociologues

N. total
professeurs

1970

3

67

0

32

1

33

1

46

1975

4

99

3

64

1

20

2

49

1980

8

121

4

97

1

48

1

70

1985

8

130

6

97

1

73

2

82

1990

8

134

5

87

2

75

6

87

1995

8

127

6

97

4

89

5

96

2000

n.d

n.d

6

76

3

78

5

71

2005

n.d

n.d

3

72

1

91

4

84

2010

n.d

n.d

3

64

1

89

4

86

2017

4

89

4

68

1

95

2

117

Compilation 2018 à partir des annuaires des quatre universités mentionnées.

* 1982 plutôt que 1980 ; 1986 plutôt que 1985 ; 1996 plutôt que 1995
** 2008-2009 plutôt que 2010-2011



Le tableau 2 précise la place relativement faible des sociologues de l’éducation au sein des facultés. Sur l’ensemble des quatre universités, ils représentaient 2,8% du corps professoral en 1970. Profitant des embauches massives des années 1970, leur proportion grimpe légèrement jusqu’en 1980 puis atteint 5,6% au milieu des années 1990. Depuis, leur nombre est en diminution pour ne représenter que 3% des professeurs actifs en éducation en 2017. Dans l’ensemble des universités, les décennies 1980 et 1990 montrent la plus importante proportion de sociologues de l’éducation au sein des départements d’éducation avec des variations selon les établissements.

Il est possible d’expliquer les variations interétablissements par la place qu’occupent les sciences sociales en général et la sociologie en particulier dans chacun. L’Université Laval constitue un important foyer du développement de la sociologie québécoise moderne (Fournier 1989). Elle s’y est rapidement disséminée dans d’autres champs, notamment dès les années 1950, autour de la figure d’Arthur Tremblay à l’École de pédagogie et d’orientation. À l’inverse, la faculté d’éducation à l’Université de Sherbrooke a été créée (Faculté de pédagogie à [151] l’origine en 1961, puis de sciences de l’éducation en 1962) autour des champs de la psychoéducation, de la psychopédagogie et de l’orientation. Ces marqueurs historiques ont pu laisser des traces dans les cultures institutionnelles.

Tableau 2

Proportion de sociologues au sein des facultés d’éducation de l’U. Laval,
l’U. de Montréal, l’U. Sherbrooke et l’UQAM, 1970-2017

U. Laval

U. de Montréal

U. Sherbrooke

UQAM

Total %

1970

4.5
(n = 3)

0.0
(n = 0)

3.0
(n = 1)

2.2
(n = 1)

2.8

1975

4.0
(n = 4)

4.7
(n = 3)

5.0
(n = 1)

4.1
(n = 2)

4.3

1980

6.6
(n = 8)

4.1
(n = 4)

2.1
(n = 1)

1.4
(n = 1)

4.2

1985

6.2
(n = 8)

6.2
(n = 6)

1.4
(n = 1)

2.4
(n = 2)

4.5

1990

6.0
(n = 8)

5.7
(n = 5)

2.7
(n = 2)

6.9
(n = 6)

5.5

1995

6.3
(n = 8)

6.2
(n = 6)

4.5
(n = 4)

5.2
(n = 5)

5.6

2000

nd

7.9
(n = 6)

3.8
(n = 3)

7.0
(n = 5)

nd

2005

nd

4.2
(n = 3)

1.1
(n = 1)

4.8
(n = 4)

nd

2010

nd

4.7
(n = 3)

1.1
(n = 1)

4.7
(n = 4)

nd

2017

4.5
(n = 4)

5.9
(n = 4)

1.1
(n = 1)

1.7
(n = 2)

3.0


Or la place de la sociologie de l’éducation dans les facultés d’éducation ne se limite pas au nombre d’enseignants, mais se juge aussi aux savoirs transmis aux étudiants. L’analyse de Trottier et Lessard (2002) le montre en soulignant le caractère marginal de la sociologie dans les programmes de baccalauréat en enseignement au primaire et au secondaire dans onze universités québécoises. Si, en général, elle se maintient par le biais de certains cours obligatoires portant sur l’école et la société ainsi que sur les fondements de l’éducation, en 2002, il ne restait que deux facultés où un cours de sociologie était obligatoire (Université du Québec à Chicoutimi et Université Laval). Au processus de professionnalisation de la formation en enseignement, Trottier et Lessard (2002) ajoutent comme piste explicative la montée d’une conception individualisante de l’éducation qui favoriserait la prépondérance de certaines disciplines au détriment de savoirs plus fondamentaux (ex. sociologie, histoire, philosophie).

Tableau 3

Cours de sociologie/fondement social de l’éducation dans les baccalauréats
en éducation ou enseignement dans les facultés d’éducation

U. Laval

U. de Montréal

U. de
Sherbrooke

UQAM

Années

Matière
(intitulés)

1970

2017

1970

2017

1970

2017

1970

2017

Sociologie de l'éducation

LES

B. Édu.

Structures scolaires

B. Édu
BEPEP

BEPEP
BEL
BES
B.
adapt

B.
adapt

BEPEP
BEL
BES

BEPEP

BEPEP
BES
BEL
B.
adapt

Analyse sociale de l'école ou de l'éducation

BEPEP
BEL
BES

BEPEP
BEL
B.
adapt

B.
adapt

Diversité sociale et interculturelle

BEPEP
BEL
B.
adapt.

BES
BEL

BES
BEL

Milieu familial et social

BEPEP

Légende LES : Licence enseignement secondaire. BES : Baccalauréat enseignement secondaire. BEPEP : Baccalauréat enseignement préscolaire et primaire. B. Edu : Baccalauréat en éducation. B. adapt : Baccalauréat en adaptation scolaire. BEL : baccalauréat en enseignement des langues.


L’analyse de Trottier et Lessard (2002) est donc toujours d’actualité, du moins pour les universités examinées au tableau 2. La comparaison entre 1970 et 2017 illustre aussi la transformation de l’enseignement dispensé. Alors que le cours intitulé “sociologie de l’éducation” était obligatoire dans quelques programmes d’éducation à l’U. Laval et à l’U. de Montréal en 1970, celui-ci avait complètement disparu des curricula en 2017. Pourtant, comme le soulignaient déjà Trottier et Lessard (2002), la sociologie reste présente dans les enseignements –cours d’analyse sociale de l’éducation et sur la diversité culturelle en milieu scolaire. Les cours sur l’organisation et la structure scolaire peuvent aussi être l’occasion de réflexions sociologiques (Trottier & Lessard 2002), bien que cela dépende fortement de l’organisation des enseignements. L’U. Laval a ainsi combiné ce contenu au traitement des aspects sociaux de l’éducation (ici classé “analyse sociale”).

Les sociologues de l’éducation sont donc bien présents dans le milieu universitaire, mais leur place reste marginale et leur reconnaissance, limitée. Il en [153] va de même pour les enseignements. Selon Fournier (1985), les sociologues hors des départements de sociologie seraient davantage enclins à voir leur appartenance disciplinaire s’effriter au profit d’une identification plus forte aux milieux professionnels, davantage orientés vers des savoirs pratiques que des savoirs désintéressés (Fournier 1985, 420-421). Pourtant, bien que discrète, la sociologie de l’éducation reste dans l’espace de production de connaissances en général et au sein des sciences sociales en particulier.

Les conditions externes de l’institution sociale

Ce maintien s’explique de deux façons : d’une part, l’existence de relais à l’extérieur de l’université a permis aux sociologues de poursuivre des recherches sur l’éducation dans une perspective sociologique. La montée de l’État-providence, au cours des années 1960, a contribué à cet état de fait en institutionnalisant la recherche appliquée devant orienter et soutenir la décision publique. Les sociologues, en particulier en éducation, ont aussi contribué aux transformations en cours, notamment grâce à leur embauche au ministère de l’Éducation, au Conseil supérieur de l’éducation et à leur participation à différentes commissions d’enquête.

Les universités québécoises ont créé des unités administratives dont le mandat a été d’engager des études et des recherches devant guider l’action des administrations et aussi des unités académiques. Ce sont les bureaux de recherche institutionnelle (BRI). Leurs travaux, considérés comme de la recherche appliquée, sont orientés par les préoccupations de développement de l’établissement universitaire d’appartenance. Ils portent sur les effectifs étudiants ou sur l’évaluation institutionnelle d’une unité académique ou d’un programme d’études. Souvent rattachés à l’administration centrale des universités, certains bureaux sont parfois logés dans des facultés. La Faculté de l’Éducation Permanente de l’U. de Montréal s’est dotée ainsi dès sa création d’un bureau de la recherche qui s’intéresse à l’institutionnalisation de l’éducation des adultes dans les universités (Pineau 1980), à l’analyse de la composition socio-économique des publics étudiants (Therrien & Paquet 1980) et à l’évaluation de programmes. Au cours des années, la fonction évaluative a pris le pas. Au sein de l’U. du Québec, le BRI du siège social a innové en créant, en 1993, une enquête récurrente nommée ICOPE (Indicateurs de COnditions de Poursuite des Études), administrée à un échantillon représentatif d’étudiantes et d’étudiants des diverses constituantes de l’Université. Quelques années plus tard, le siège social a lancé Prospère (PROfil de Succès PERsonnel des Études), un outil de suivi individualisé de l’expérience scolaire des étudiants et étudiantes de l’université fondé sur l’enquête de la situation de chacun par rapport à des facteurs liés à la réussite.

[154]

Cette fonction de recherche institutionnelle existe aussi dans les cégeps, mais ne se traduit pas par une entité formelle. Il s’agit souvent de professionnels qui font des études sur le développement du cégep, les caractéristiques des étudiants ou des évaluations de programmes. Plusieurs commissions scolaires ont aussi créé des services aux mandats équivalents. Le conseil scolaire de Montréal, devenu le conseil de gestion de la taxe scolaire de l’île de Montréal, a employé des sociologues avec la responsabilité d’établir la carte de la défavorisation.

À cela s’ajoute l’engagement de sociologues dans l’action syndicale, comme membres des services d’éducation ou de recherche (Brooks & Gagnon 1994).

L’accès à des ressources externes a aussi permis aux sociologues de maintenir leur lien avec leur discipline. Le groupe de travail Procès de socialisation de l’Association Internationale des Sociologues de Langue Française (AISLF) a ainsi été le lieu de rassemblement des spécialistes francophones depuis plusieurs décennies. La revue liée à ce groupe, Sociologie et Sociétés, tout comme, mais à un moindre degré, le Réseau d’Éducation Francophone (REF) et quelques sous-groupes qui en ont fait partie, ont participé à l’institutionnalisation de la spécialité autant dans sa dimension sociale que cognitive. Dans la mesure où le Québec demeure un lieu de production sociologique périphérique (Fournier 1973), la participation des sociologues de l’éducation québécois dans ces réseaux, groupes et revues internationales francophones, s’est avérée cruciale.

Autour de l’institutionnalisation cognitive

Étudier le développement d’une spécialité au sein d’une discipline oblige à aborder les thèmes de recherche. Un premier constat ressort : les sociologues de l’éducation dans les facultés d’éducation ont eu une contribution intellectuelle continue et variée depuis les années 1960. Cela peut tenir à la persistance du programme de recherche mené par des professeurs (la sociologie du curriculum pour L. Levasseur à l’U. Laval, l’éducation des adultes pour P. Bélanger (2015) à l’UQAM ou les recherches féministes appliquées au champ de l’éducation pour R. Cloutier à l’U. Laval). La production est aussi liée aux conjonctures économiques et politiques, certains traits de ces périodes devenant des problèmes sociaux à mieux comprendre, comme l’évolution des aspirations scolaires étudiée par le projet ASOPE, la profession enseignante ou l’insertion socioprofessionnelle. La transformation des politiques de la science en politiques de l’innovation, depuis le milieu des années 1980, et l’insistance sur les transferts de technologies et de connaissances pour stimuler l’innovation technique ou sociale ont favorisé ce processus, rien que par l’augmentation du poids relatif des programmes de recherche ciblée au sein des organismes de recherche. Les travaux sur les liens [155] entre institutions éducatives et monde économique, sur le décrochage et la réussite scolaire ont bénéficié de telles subventions.

Finalement, certains thèmes ou perspectives de recherche restent absents de ce tour d’horizon (ex. enseignement supérieur), soit parce qu’ils ont été portés par des sociologues au sein de départements de sociologie, soit parce qu’ils ont été traités par des chercheurs en sciences de l’éducation.

Un premier projet collectif :
les aspirations scolaires des Québécois


Au tournant des années 1960, la sociologie de l’éducation s’est institutionnalisée au moment où la Commission royale d’enquête sur l’enseignement dans la province (commission Parent) rendait public son rapport à l’origine d’une réforme majeure du système éducatif québécois. Dans la foulée, P. W. Bélanger (U. Laval) et G. Rocher (U. de Montréal) entament une collaboration d’abord autour d’un livre collectif, École et Société au Québec (1970), où ils présentent leur conception de la sociologie de l’éducation, inspirée par la sociologie de l’action de Parsons. Ils coordonnent, avec P. Dandurand et F. Béland, le premier numéro de la revue Sociologie et Sociétés consacré à l’éducation (1973). Surtout, ils dirigent conjointement le plus important projet de l’époque en sociologie de l’éducation sur les Aspirations Scolaires et l’Orientation Professionnelle des Étudiants (ASOPE).

Cette recherche poursuit plusieurs objectifs. D’abord mieux intégrer dans la sociologie de l’action parsonnienne la place des contraintes structurelles dans l’explication des comportements. L’étude des aspirations est un thème pertinent parce qu’à l’intersection des choix individuels, des milieux sociaux dans lesquels les individus vivent et les environnements culturels qui produisent du sens à l’action (Bélanger, Rocher et al. 1981, 25). Le sexe, la classe sociale et l’appartenance ethnique sont considérés comme des “variables de contraintes structurelles lourdes”. Ensuite, mieux intégrer les théories du changement social dans la théorie de l’action. Là encore, les aspirations offrent un terrain intéressant car elles peuvent changer et posent le rapport au futur, d’où l’adoption d’une approche longitudinale. Un troisième objectif vise à introduire dans l’analyse l’idée de contradiction entre les aspirations et les comportements, entre les valeurs et les comportements et entre les aspirations et les valeurs.

Les enquêtes consistent à recueillir des informations auprès des élèves et des étudiants à différents moments de leur carrière scolaire, mais aussi auprès des parents, des directions d’école, des enseignants. ASOPE a été conçue pour rendre possible la comparaison des parcours des élèves et des étudiants québécois et ontariens et ainsi examiner les processus de démocratisation de l’éducation dans les deux provinces.

ASOPE a été une pépinière de chercheurs dont plusieurs sont devenus professeurs. Sur le plan théorique, si la théorie de l’action de Parsons était au [156] fondement du projet, d’autres apports ont été présents comme la reproduction et le débat entre Bourdieu et Boudon au moment même où il avait cours en France et dans la sociologie francophone.

Les relations entre Éducation et Économie

Le thème des relations entre éducation et économie émerge au Québec dans une conjoncture sociale particulière, la crise économique de la fin des années 1970 et du début des années 1980 caractérisée par une forte inflation, l’élévation du taux de chômage spécialement chez les jeunes et la transformation des modes de production en entreprise. L’intérêt pour la formation s’accroît car les critiques soulignent une “inadéquation” entre la formation des diplômés et les besoins du marché du travail. En 1986, le ministre de l’Éducation du Québec (MEQ) rend public un plan d’action en matière de formation professionnelle dont un des éléments est la réforme des programmes et de leurs modes de planification.

C’est dans cette conjoncture que des sociologues présents dans les facultés des sciences de l’éducation se sont intéressés aux articulations entre deux mondes sociaux, celui de l’éducation (formation) et celui de l’économie (emploi, travail, etc.). Elles portent sur des objets variés, dont l’insertion professionnelle rendue plus difficile, surtout pour les personnes les moins scolarisées, ou les pratiques de planification de l’éducation et de reconfiguration des pratiques éducatives, en particulier en formation professionnelle et technique.

Deux équipes de recherche se penchent sur l’insertion socioprofessionnelle. La première, autour de Trottier (1991, 1998 et 2001), l’inscrit à l’intersection entre les cheminements scolaires, les mesures de soutien à l’insertion et la structuration du marché du travail (Trottier 2000). Il convient aussi de tenir compte de la diversité sociale des jeunes, y compris pour ceux qui sont en difficulté. Une seconde équipe (animée par A. Baby de l’U. Laval et C. Laflamme de l’U. de Sherbrooke) propose une approche qui pense le système éducatif comme espace de socialisation et l’entreprise comme espace dit d’organisation, reprenant les termes de l’analyse sociétale (Maurice, Sellier & Sylvestre 1982). Le passage de l’un à l’autre est identifié comme le moment de transition professionnelle. L’insertion professionnelle ne se comprend qu’en tenant compte des trois dimensions, ce qui suppose d’examiner autant les stratégies individuelles que les “contraintes du fonctionnement du système d’emplois, du développement technologique, du syndicalisme” (Laflamme 1984, 210 ; Laflamme & Baby 1993).

Les relations éducation-économie (REE) associées à la planification de l’éducation ont été analysées par le Groupe interuniversitaire de recherche en Formation-Emploi sous la direction de M. Hardy (2003). Il s’agit de saisir comment les liens entre les organisations et les institutions des deux mondes se construisent. Les notions de partenariat et de collaboration, au cœur du propos, [157] constituent le volet axiologique de la recherche. Plusieurs objets sont examinés : la mise en œuvre de la formation en alternance travail-études (Landry 2002, Doray & Fusulier 2002, Doray & Bastien 2015), la collaboration entre établissements scolaires et entreprises en matière de formation en milieu de travail et les relations entre les instances du réseau éducatif et celles du réseau de la main-d’œuvre. Le point commun de ces recherches consistait à examiner l’institutionnalisation des pratiques.

Ces contributions entendent rompre avec une vision adéquationniste de la relation éducation-économie (Trottier 2000) qui apparaît pour les unes comme un moment dans un parcours de transition ou, pour les autres, comme des construits sociaux résultant d’un travail de la part de différents acteurs.

La profession enseignante

La crise économique mentionnée force le gouvernement à réduire les salaires des enseignants, situation qui fait du malaise enseignant un problème social. Se développent alors des travaux sur la condition enseignante, réalisés au Conseil Supérieur de l’éducation (CSE 1984), au ministère de l’Éducation (Cormier et al. 1979-1985), par les centrales syndicales (notamment sur la précarité d’emploi) et par des universitaires œuvrant dans des institutions responsables de la formation des maîtres (Lessard, Mathurin & McAndrew 1984, Lessard & Tardif 1996, 2003 ; Mellouki & Melançon 1995, Tardif & Lessard 1999, Tardif 2013). Une panoplie de réalités professionnelles est documentée : la féminisation croissante des effectifs, plus rapide dans l’enseignement que dans l’administration, la difficile insertion des novices dans le métier, le décrochage enseignant croissant au cours des premières années de pratique et la longue attente avant l’obtention d’un poste permanent, l’augmentation de la précarité d’emploi (surtout dans le secteur de l’éducation des adultes), le non-respect par l’employeur des champs d’enseignement, l’enjeu de l’autonomie professionnelle, la perte d’autorité auprès des élèves et de leurs parents, la non-reconnaissance sociale et la rémunération sous la moyenne de diplômés universitaires comparables, etc. Ces réalités nourrissent un diagnostic de perte de statut social, voire de “prolétarisation” du métier (Lessard 1990, 342). Les recherches discutent abondamment du couple professionnalisation/prolétarisation, notamment de manière comparative (Cattonar, Lessard & Maroy 2010). Au fil des ans, des recherches portent aussi sur les directeurs d’école (Lessard, Kamanzi & Larochelle 2008, Cattonar & Lessard 2011, Desjardins & Lessard 2011), les orthopédagogues (Tardif & Lessard 1992), les conseillers pédagogiques (Lessard & Des Ruisseaux 2004, Lessard 2016) et diverses catégories de techniciens occupant des fonctions d’encadrement auprès des élèves (Tardif & Levasseur 2010).

La professionnalisation est aussi saisie au sens d’explicitation d’une base de connaissance spécifique du métier, coconstruite dans le cadre de méthodologies de [158] recherche collaborative, puis transmise dans des dispositifs de formation initiale et continue. La contribution de l’université à la professionnalisation (Lessard & Bourdoncle 2002, 2003), la recherche en éducation et les rapports entre théorie et pratique –ou plutôt entre chercheurs et praticiens– dans le développement et le transfert des connaissances sont scrutés et débattus, notamment parmi les chercheurs québécois qui participent au REF. Au sein de ce réseau, la question du ou des savoirs professionnels des enseignants et la compréhension des apports des sciences humaines et sociales permirent de fédérer chercheurs et formateurs d’ici et d’ailleurs (Lessard, Altet, Paquay & Perrenoud 2004). Sur le plan local, la création du Centre interuniversitaire de recherche sur la formation et la profession enseignante (CRIFPE) a fédéré les chercheurs œuvrant sur la professionnalité du métier et sa valorisation sociale devenues un des axes majeurs du centre.

Les relations multiculturelles en éducation

Au moment où le Québec s’affirmait comme société francophone, la diversification ethnoculturelle croissante de sa population était reconnue, qui se manifeste, entre autres, à l’école. En milieu urbain, certains établissements peuvent compter des élèves provenant de plusieurs dizaines de sociétés. Des sociologues se sont de plus en plus intéressés à l’immigration et aux relations interethniques.

Les sociologues de l’éducation intéressés par l’expérience scolaire des immigrants et des groupes ethnoculturels sont regroupés au CEETUM (centre d’études ethniques des universités montréalaises) et à l’Observatoire de la Formation à la diversité et l’Équité qui était une de ses équipes. Trois orientations permettent de cerner la recherche en ce domaine. La première est celle de l’expérience éducative des étudiants provenant de l’immigration ou appartenant à divers groupes ethnoculturels (Magnan et al. 2017, Magnan & Larochelle-Audet 2017). Les groupes, souvent qualifiés comme à risque, font l’objet d’une analyse des dimensions de leur expérience éducative : leurs difficultés scolaires, leur réussite éducative, etc. La seconde orientation regroupe des travaux sur des politiques éducatives, souvent dans une approche comparative, face à l’immigration et la diversité ethnoculturelle et religieuse. Sur quelles perspectives sont-elles fondées ? Comment organisent-elles l’intégration du vivre ensemble au sein des écoles (Potvin et al. 2016) ? La troisième orientation constate que la diversité ethnoculturelle soulève un défi pour le vivre ensemble et l’inclusion dans les sociétés pluralistes et démocratiques, surtout pour l’école, d’où l’intérêt pour l’implantation de l’éducation inclusive (McAndrew, Potvin & Bori-Anadon 2013, Potvin 2014).

Enfin, des travaux moins nombreux posent la question de l’école et des relations ethnoculturelles d’une autre manière, comme les recherches sur les parcours étudiants des anglophones (Pilote & Magnan 2014, Magnan 2013) et des francophones en milieu minoritaire (Pilote & Magnan 2014). Depuis quelques [159] années, sous l’impulsion d’une mobilisation scolaire des Premières Nations et de politiques éducatives les visant, un intérêt croissant se dessine pour la situation éducative des autochtones. Ces travaux soulignent que “l’accroissement de la fréquentation postsecondaire ne se traduit pas par une réduction des inégalités entre tous les groupes sociaux” (Ratel & Pilote 2017, 169).

La mise en œuvre des nouvelles politiques éducatives

Au cours des dernières décennies, les États, sous l’impulsion des institutions internationales et de facteurs endogènes ont élaboré et mis en œuvre de vastes réformes éducatives et ont promu des politiques touchant à la fois des dimensions institutionnelles –gouvernance par les nombres et responsabilisation (accountability)– et substantielles –curriculum axé sur des compétences. Au Québec, les politiques ont mis l’accent sur la réussite éducative et la lutte contre décrochage scolaire fait l’objet d’interventions depuis 1992. D’autres ont porté sur l’enseignement en milieux défavorisés (Agir Autrement), sur l’inclusion des personnes en situation de handicap (politique d’intégration) et sur la gouvernance et la gestion axée sur les résultats. De plus, une réforme du curriculum visant à développer des compétences disciplinaires et transversales a été entreprise au tournant du XXIe siècle.

Les sociologues de l’éducation ont suivi ces évolutions politiques avec attention. À cette occasion, un rapprochement s’est produit entre la sociologie de l’éducation et l’analyse des politiques publiques ou, plus précisément, la sociologie de l’action publique. La publication en 2008 d’un numéro spécial de la revue Sociologie et Sociétés consacré aux nouvelles politiques d’éducation et de formation en témoigne. En parallèle, la mise en œuvre du nouveau curriculum (Deniger & Kamanzi 2006) et les effets des classements des établissements dans des palmarès (Desjardins et al. 2011) ont été étudiés.

De plus, les recherches de la Chaire de recherche du Canada de C. Maroy (U. de Montréal) portent sur la politique de gestion par les résultats dans les commissions scolaires au Québec et sur les différentes médiations et mécanismes d’institutionnalisation d’une nouvelle conduite de la pédagogie (Maroy 2017, Maroy & Vaillancourt 2013).

Le REF a permis de confronter, internationalement, les recherches sur l’évaluation des politiques publiques, l’obligation de résultat (Lessard & Meirieu 2004), la gouvernance en éducation, les rapports entre les secteurs d’enseignement privé et public (2011), l’école à l’épreuve de la performance (Maroy 2013), le développement des politiques de responsabilisation (accountability) et leur instrumentation en éducation (Dutercq & Maroy 2014) et le professionnalisme enseignant et les politiques de responsabilisation (Duterq & Maroy 2017).

Enfin, une exception au processus décrit ici doit être soulignée qui met l’accent sur la capacité des sociologues dans les facultés des sciences de l’éducation [160] à transformer des enjeux socio-éducatifs en question de recherche. Ainsi, malgré l’existence de conditions intellectuelles et institutionnelles, peu de sociologues des FSE se retrouvent à travailler sur la persévérance scolaire et la lutte contre le décrochage. À l’U. Laval, la faculté des sciences de l’éducation a créé un partenariat avec la Centrale de l’enseignement du Québec (CEQ maintenant la CSQ) pour fonder le CRIRES (Centre de recherche et d’intervention sur la réussite scolaire). R. Ouellet, le premier directeur, puis A. Baby (Baby et al. 1995) ont été parmi les premières chevilles ouvrières de ce centre. Néanmoins, les sociologues y ont plutôt été des organisateurs que des producteurs de la recherche.

Conclusion

L’analyse qui précède montre une faible institutionnalisation de la sociologie de l’éducation dans l’enseignement universitaire de sciences de l’éducation comme l’indiquent le peu de cours offerts dans les programmes de formation des enseignants et la présence marginale d’enseignants-chercheurs détenteurs d’un diplôme en sociologie. Elle révèle aussi une grande stabilité de cet état de fait depuis la création des départements et des facultés de sciences de l’éducation. Tout se passe comme si, une fois introduite à la naissance des facultés sous l’impulsion de la Commission Parent qui reconnaissait la pertinence d’une formation en sciences sociales pour les acteurs de l’éducation, à peu près rien n’aurait évolué, sinon dans le développement de la recherche. Celle-ci s’est attaquée à des objets dont la pertinence pour les acteurs de l’éducation et les décideurs politiques semblait réelle. Ces travaux révèlent une capacité des chercheurs à transformer des enjeux éducatifs en objets d’étude et à les construire d’une manière à la fois distanciée et pertinente. Le couplage apparaît réussi entre les grands enjeux sociaux en éducation et la recherche sociologique produite par des sociologues en sciences de l’éducation.

La dissémination des spécialités de la sociologie vers la sociologie hors département (Fournier 1985) a notamment eu lieu dans le champ de l’éducation. L’hypothèse peut être avancée d’un découplage ou d’une forte autonomisation des spécialités sociologiques –la sociologie de l’éducation au Québec– par rapport à l’activité des départements de sociologie. La question de savoir si, à terme, le champ sociologique est polycentré, composé d’un ensemble de spécialités, nichées à l’université dans divers domaines interdisciplinaires ou professionnels, relativement autonomes et indépendantes d’un noyau dur disciplinaire, dépasse l’objet de cet article. Mais elle mérite d’être posée, la situation du Québec révélant un cas de figure peut-être particulier : à une exception près, il n’y a pas de sociologues de l’éducation (i.e. lui consacrant l’essentiel de leur enseignement et de leur recherche) dans les quatre départements de sociologie. L’essentiel de la recherche sociologique ou à forte dimension sociale est produit en sciences de l’éducation, [161] par des sociologues ou par des docteurs en sciences de l’éducation dont les thèses ont été fortement ancrées dans la discipline sociologique.

Cette production intellectuelle étant située en sciences de l’éducation, et donc soumise à des impératifs de pertinence professionnelle, parce qu’elle s’adresse à des publics mixtes –autres chercheurs en sciences sociales et en éducation, formateurs de maîtres, cadres scolaires, professionnels de l’éducation et enseignants en exercice– elle apparaît plutôt ancrée dans les réalités et les préoccupations des milieux éducatifs que dans des questionnements théoriques propres à la sociologie fondamentale. Pourtant, en se situant aux échelles méso et microscopique, analysant les grands rapports sociaux (classes sociales, genre, relations interculturelles) et institutionnels (éducation et emploi, condition enseignante) au sein des dynamiques organisationnelles, intermédiaires et locales, ainsi que les stratégies et les jeux d’acteurs, elle a suivi l’évolution de l’ensemble de la sociologie de l’éducation, depuis que celle-ci s’est éloignée des grandes études macroscopiques typiques des théories de la reproduction. Il y a ici un couplage entre l’évolution des cadres d’analyse sociologique et l’obligation de pertinence qui pèse sur la production intellectuelle de chercheurs en sciences de l’éducation. Avec pour effet que les sociologues de l’éducation œuvrant en sciences de l’éducation ont pu et peuvent travailler tout en conservant pour l’essentiel leur identité disciplinaire.

C’est le cas de ceux qui ont interrogé les réalités socioscolaires des élèves issus de l’immigration, étudiant leurs parcours d’intégration à la société québécoise francophone et la contribution de l’école à leur francisation et à leur acculturation. Leurs travaux, souvent qualitatifs, notamment sur ce qui est nommé accommodements raisonnables, des pratiques et des dispositifs reconnaissant des différences culturelles et religieuses légitimes (suivant les chartes de droits et libertés fondamentales), ont participé au débat social et politique sur les modèles d’intégration (interculturalisme, multiculturalisme, intégration/identification à la communauté nationale francophone) à propos desquels la société québécoise cherche toujours sa voie. Ils ont joué un rôle notable dans l’élaboration de la politique interculturelle québécoise pour l’école, la lutte contre le racisme en milieu scolaire et ont collaboré à la définition d’une laïcité ouverte. À cet égard, la contribution des sociologues de l’éducation et de chercheures du domaine des relations interculturelles, à la Commission Bouchard-Taylor (2008) a été remarquée.

Les catégories de recherche, fondamentale ou appliquée, ne sont pas appropriées pour différencier la recherche faite en sciences de l’éducation de celle produite dans un département de sociologie. Si une recherche appliquée est construite pour résoudre un problème défini par un acteur éducatif, il faut constater que les sociologues de l’éducation sont parmi les moins enclins à travailler dans ce cadre. Plusieurs ont même tendance à résister à des approches d’ingénierie de la recherche éducative. Tout en insistant sur un ancrage dans les milieux, ils estiment nécessaire de travailler ou déconstruire la définition du problème, [162] de prendre de la distance par rapport à ce qui apparaît naturel ou évident sur le terrain et à produire une image de la réalité qui élargit les horizons de la compréhension des acteurs, celle-ci étant préalable à toute élaboration de solutions. En ce sens, les sociologues s’intéressent davantage à diverses formes de recherche dite collaborative qu’à des recherches action.

Cette posture particulière distingue les sociologues de l’éducation d’autres chercheurs en sciences de l’éducation dont la recherche –en didactique, gestion de classe ou technologies de l’enseignement– doit contribuer à l’amélioration de l’enseignement. D’ailleurs, les orientations institutionnelles actuellement dominantes portant sur la réussite éducative et incarnées dans une gestion axée sur les résultats et le projet de création d’un Institut national d’excellence en éducation (INEÉ), construit sur le modèle de son pendant dans le champ de la santé publique, valorisent une recherche qui fournit les données probantes d’une pratique efficace. À l’égard de ces développements, les sociologues de l’éducation, notamment celles et ceux qui s’intéressent à l’évolution du travail et du métier d’enseignant, apportent un point de vue plus large, dépassant la simple rationalité instrumentale, montrant les limites d’un modèle de professionnalisation du haut vers le bas, managérialisé, sans partenariat véritable avec les enseignants en exercice et suggérant des approches plus ouvertes, davantage ancrées dans la nature communicationelle de l’enseignement.

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Fin du texte

Résumé

L’article présente à partir de l’exemple québécois des évolutions qui ont concerné la sociologie de l’éducation dans de nombreux pays. Un paradoxe apparaît : les questions d’éducation ont presque disparu des départements universitaires de sociologie, en revanche la discipline joue un rôle structurant dans la constitution de nouveaux domaines concernant le genre, les minorités, les villes, l’enfance. Dans ce cadre, elle joue un rôle important dans la constitution de l’opinion et les débats politiques.

La situation québécoise présente cependant une originalité. Dans les pays européens, les rapports de confiance qui s’étaient établis dans les années 1960 entre les sciences sociales, l’opinion et les politiques d’État-providence n’ont pas résisté aux difficultés rencontrées par les tentatives de démocratisation. L’expertise est passée à des Centres de ressources internationaux qui filtrent les résultats des recherches universitaires. Au Québec, la circulation des savoirs sur laquelle s’était appuyée la Révolution tranquille s’est maintenue.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le lundi 4 avril 2022 9:03
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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