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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Bernard Hours, L'État sorcier. Santé publique et société au Cameroun. (1985)
Postface


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Bernard Hours, L'État sorcier. Santé publique et société au Cameroun. Paris: Les Éditions L'Harmattan, 1985, 165 pp. [L’auteur nous a accordé, le 15 avril 2022, l’autorisation de diffuser en libre accès à tous ce livre dans Les Classiques des sciences sociales.]

[163]

L’ÉTAT SORCIER.
Santé publique et société au Cameroun.

Postface

Marc AUGÉ

La question que pose l’ouvrage de Bernard Hours, fondamentale, c’est celle du sens - non pas le sens que nous pourrions donner aux comportements des autres mesurés à l’aune de notre efficacité et de notre intelligence des choses, mais le sens dont les autres qui sont pour le sociologue un objet d’occasion - en l’occurrence les soignants et les malades au Cameroun - investissent une pratique qu’ils sont condamnés à maîtriser et à comprendre pour survivre alors même qu’elle ne relève bien évidemment ni de la seule rationalité ni du seul souci de l’efficacité. Il faut faire avec ce que l’on a : et les mots du sociologue, en la matière, risquent d’être aussi faux que sont mensongers les intitulés dont se pare en Afrique, et sans doute ailleurs en plus d’un endroit, l’institution médicale. Rationalité, efficacité, médecine moderne, hôpital, médicament : le leurre des institutions participe du mensonge des mots et, à la limite, personne n’y peut rien, ni les infirmiers, ni les malades, ni l’État qui n’a pas vraiment les moyens de faire de ceux-là ses agents et de ceux-ci ses protégés.

La notion d’itinéraire thérapeutique, dès lors, itinéraire à la fois géographique (d’un guérisseur l’autre) et intellectuel (à la recherche des causes et des moyens d’y remédier) possède une incontestable valeur heuristique, car elle inscrit le désarroi des individus dans le contexte problématique de l’institution ou de l’État, qui sont à la fois pour chacun un objet d’attente et de réflexion - la condition et la limite du pensable.

C’est entre ville et campagne que se joue plus précisément [164] le drame du sens perdu, du sens à retrouver - entre un univers de cohérences projeté sans doute illusoirement dans le passé et un univers moderne et plus précisément urbain dont les puissants et les puissances posent plus de problèmes qu’ils n’en résolvent, au moins pour le corps malade que la médecine moderne n’est pas assez moderne pour guérir, lorsqu’elle n’a de moderne que le nom, ni la traditionnelle assez traditionnelle pour expliquer, quand la tradition se perd dans la multiplicité des guérisseurs de hasard.

Le rapport au corps, à la santé et à ceux qui prétendent la maintenir ou la restaurer est encore une fois exemplaire : immaîtrisé, inachevé, difficile ou insensé il renvoie à un autre désordre. On ne pense jamais la singularité ou dans la singularité, jamais l’individu sans la société, le quotidien sans l’histoire : la chaîne réelle et imaginaire qui unit les malades aux infirmiers et ceux-ci à l’État nous est ici restituée dans sa pleine complexité ; l’ethnologue, comme les malades qu’il observe, sait que la cause de leur mal n’est pas tout entière en eux.

Marc AUGÉ



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le mercredi 11 mai 2022 14:14
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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