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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Regards croisés sur l’État et la démocratie. tome II. Démocratie et participation. (2021)
Présentation


Une édition électronique réalisée à partir du livre sous la direction de Suzy CASTOR et Katia BONTÉ, Regards croisés sur l’État et la démocratie. tome II. Démocratie et participation. Port-au-Prince, Haïti: une publication du CRESFED, 2021, 291 pp. [Autorisation formelle accordée le 12 septembre 2022 par la directrice du CRESFED, Madame Suzie Castor, de diffuser ce livre en accès libre dans Les Classiques des sciences sociales.]

[9]

Regards croisés sur l’État et la démocratie.
Tome II.
Démocratie et participation.

Présentation

1. Charles L. CADET [1]

Depuis 1989, la revue Rencontre du CRESFED s’efforce d’animer une réflexion plurielle, contradictoire même, sur les principales dimensions de l’évolution de la société haïtienne à partir d’une philosophie promotrice d’humanisme, de valeurs démocratiques et d’ouverture intellectuelle et scientifique la plus avancée. Cet effort s’est matérialisé par la structuration de la revue en six grandes rubriques dont, en particulier, celle intitulée « Histoire immédiate et inachevée » démarrant à chaque fois par la conduite d’une « table ronde » portant sur une des grandes problématiques de la période contemporaine d’Haïti. À l’analyse, trois groupes de thématiques se détachent suite à l’utilisation de cette formule d’échanges et de débats : les faits ou évènements relevant de la dynamique sociétale globale, les transformations politico-institutionnelles et les mutations économiques. Généralement, ce qui ressort de cette expérience périodique de confrontation d’idées est son riche apport intellectuel et scientifique à la compréhension de l’évolution de la société haïtienne. Le hasard a fait que les échanges organisés sur la première thématique ont concerné en premier lieu les mutations sociétales depuis les années 1950 avec le politique, l’économique et le socioculturel comme lignes de force principales. Parmi les divers apports de cette réflexion plurielle, il faut rappeler, d’abord, la mise en évidence d’une tendance lourde comme « l’État faible », caractérisant déjà le 19ème siècle haïtien de même que toute la première moitié du 20ème siècle. C’est en effet ce trait structurel qui fait que l’État en Haïti ne s’est jamais senti en rien responsable des préoccupations et besoins de la grande majorité souffrante de la population et qu’il a, par contre, toujours été totalement tourné vers les intérêts des groupes oligarchiques nationaux et étrangers. Notons, aussi, que les participants à ce grand débat ont eu à signaler des tendances fortes plus récentes qui ont pris place à compter de la seconde moitié du 20ème siècle. Ce sont par exemple : la désinsularisation d’Haïti ou [10] pour dire autrement l’internationalisation de sa gouvernance, le développement d’une économie fortement informalisée et de services, la déstabilisation du système éducatif et du système culturel associée en même temps à la percée du créole, le franchissement d’une nouvelle étape dans le mouvement féministe, les mutations sociodémographiques sous diverses formes dont la forte émigration contemporaine, la bidonvilisation et la ruralisation des « grandes villes ». On peut inscrire dans cette réflexion orientée vers la dynamique sociétale, les échanges portant sur l’impact du grand séisme de Janvier 2010 et ceux intéressant les mutations intervenant dans les relations haïtiano-dominicaines. Si l’on considère, par exemple, le premier débat, on note d’abord qu’il a permis de redécouvrir de « vieux problèmes » sous un forme plus accentuée comme : le disfonctionnement total de l’État déjà caractérisé comme étant « faible » pour toutes les périodes antérieures ; la grande dépendance vis-à-vis de la communauté internationale qui caractérisait déjà la période post-Duvalier. Reconnaissons, toutefois, qu’il y a eu aussi des « paroles neuves » à l’exemple de ces observations : l’extrême complexité de la reconstruction symbolisée par le triptyque « déconstruire, construire et reconstruire » ; les conséquences négatives de l’inexistence en Haïti d’un véritable « capital social ». Cependant, remarquez qu’en dépit des situations très déstabilisantes induites par le grand choc du séisme, les débats ont mis en exergue que beaucoup d’espoir a été placé dans le mouvement de solidarité internationale qui l’a suivi surtout avec les annonces mirobolantes d’apports financiers. Malheureusement, les échanges ont fait aussi ressortir que des années après on peine à mesurer les résultats effectifs des investissements annoncés. Si on fait une revue générale des numéros de la revue Rencontre depuis ses premières publications, les questions politico-institutionnelles apparaissent le thème dominant ou le plus souvent traité d’entre tous. Mais, l’intérêt de cette seconde grande thématique des « tables rondes » est qu’elle s’est focalisée spécifiquement sur les transformations politico-institutionnelles attendues ou projetées. Effectivement, l’analyse permet d’isoler ces trois sous-thèmes : les problématiques liées à la modernisation ou bien à la refondation de l’État, la réalité de la dite « transition politique » et le triptyque « Partis politiques, société civile, élections ». Arrêtons-nous sur le sous-thème lié à l’État. C’est une question qui a été abordée dans les débats antérieurs, mais cette fois-ci elle est visualisée sous ces trois nouveaux angles : le défi renouvelé de sa construction, l’État de Droit et la problématique de la décentralisation. Comme on le comprend, ces trois groupes de questions sont très liés mais il faut ajouter que la richesse des échanges a mis en relief que la compréhension de l’un apporte des éléments à une plus grande maitrise intellectuelle de l’autre. Si on s’intéresse maintenant au troisième sous-thème, on découvre l’extrême difficulté qu’a Haïti à construire et à institutionnaliser de grands partis politiques en dépit du fait [11] que la Constitution de 1987 en fait le socle du système démocratique qu’elle prône. De multiples causes ont été signalées, mais ici on peut mentionner la forte et permanente résistance du pouvoir en place de même que la culture politique en vigueur au niveau de la société haïtienne elle-même. Les débats ont également montré que les élections ont toujours été une pomme de discorde en Haïti : avant comme après la Dictature des Duvalier. La période contemporaine se caractérisant surtout par ce qui a été désigné comme le « régime électoral de tutelle » destiné à jeter les bases d’un régime de « démocratie formatée ». Par ces deux caractérisations, on voit s’exercer, bien entendu, l’énorme influence de l’International sur la vie politique dans le pays. On termine ce rétrospectif par un clin d’œil sur les résultats des réflexions concernant les questions économiques. À la différence des deux premiers groupes de grandes thématiques présentés antérieurement, ce troisième a fait très rarement l’objet d’échanges. C’est en effet la seule thématique pour laquelle cela s’est passé seulement une fois alors que dans le cas des questions politico-institutionnelles on note qu’on a eu neuf (9) « tables rondes ». Ce n’est donc pas un hasard si le véhicule de communication pour les questions économiques a été surtout les articles d’auteurs. Cependant, faute de pouvoir organiser une « table ronde classique », la revue a décidé de reproduire « un dialogue sur les mutations économiques » animé par deux économistes haïtiens. À cette occasion, le public des lecteurs de « Rencontre » a pu découvrir les origines de l’économie de rente en Haïti et apprendre que celle-ci s’est métamorphosée au cours de la période contemporaine et est même devenue le mode dominant d’évolution de l’économie nationale. Mais, ce qui a fait moins de consensus, entre les dialoguistes, est le rôle du capital international dans les mutations passées et les transformations projetées ou espérées.

[12]

2. Marie Frantz JOACHIN [2]


« État et Démocratie » sont principalement les deux thématiques autour desquelles gravitent des sujets faisant l’objet de débats au cours des tables rondes de la revue Rencontre durant ces vingt-neuf ans (1989-2018). Ceci traduit, selon toute évidence, la prise en compte de l’aspiration du peuple haïtien à l’émergence d’un régime politique constitutif d’un État unitaire susceptible de répondre aux desiderata des différentes couches de la société haïtienne. Autrement dit, un État qui instaure des institutions devant permettre d’assurer le développement économique, la stabilité politique, le développement de la société civile et la sauvegarde des droits et libertés des personnes. Si cette velléité du peuple haïtien pour la construction de cet État démocratique constitue un élément fondamental de cette longue transition démocratique que vit le pays, l’apparition de cette thématique à trois reprises dans les titres de la revue (Nos 11-12 ; 13-14 et 26-27) au cours de cette période est incontestablement l’expression de l’impasse dans lequel se trouve la démocratie en Haïti trente-trois ans après la chute de la dictature des Duvalier. La corruption avérée des dirigeants, l’impunité, l’absence d’esprit de service public et de souci du bien commun ainsi que le non-respect des libertés publiques représentent des facteurs dévastateurs qui rendent le pays ingouvernable. Les décisions prises par les autorités politiques étant constamment contestées. Les exigences sont celles d’un changement de paradigme en matière de gouvernance, d’une rupture avec l’État kléptocratique qui nous caractérise ou encore de démarches visant à « défaire le nœud historique », pour reprendre le titre de la table ronde du N° 19 de la revue Rencontre. D’où la permanence de la transition et de l’instabilité. Les évènements que vit le pays depuis juillet 2018 laissent supposer qu’il y aurait matière à produire un autre numéro de « Rencontres » sur la transition. Les acteurs politiques et sociaux ont réclamé en 2015 un nouvel épisode de « transition » dans la grande transition entamée depuis [13] 1986 et en réclament encore en 2019, deux ans après la tenue des élections. Ces phases de « transition » nous portent à questionner les moyens généralement utilisés pour atteindre l’objectif démocratique. Haïti n’a pas connu de véritable stabilité politique en dépit de la tenue d’élections sous la supervision et avec l’accompagnement technique de la dite communauté internationale. Sur un total de huit (8) élections présidentielles organisées dans le pays, la passation d’un Président élu à un autre n’a été effectuée qu’en trois occasions (1995, 2000, 2011). La table ronde du N° 31 de la revue Rencontre, appréhende les enjeux et les significations des élections en Haïti. Les débats mettent en relief des variables politiques extrêmement importantes telles : la tutélisation du système électoral par l’international et la faiblesse de l’État. L’enregistrement de faible taux de participation aux élections est de toute évidence un indicateur du peu d’engouement de la population haïtienne pour ce modèle de démocratie qui les exclut de toutes questions fondamentales en dehors des grandes messes électorales. Ceci est d’autant plus vrai que le citoyen et la citoyenne qui s’est abstenue aux élections, se mobilise continuellement pour exiger le respect de ses droits. Les table rondes des Nos 13-14 ; 17 ; 20-21 ont constitué des espaces riches en échanges et ont alimenté les réflexions autour de la société civile et des partis politiques. Le fait, pour la société civile, d’adresser les besoins réels et immédiats des acteurs à intérêts divers et de les défendre face à l’État, permet à celle-ci de gagner la sympathie de la population. En revanche, les Partis Politiques, obnubilés par leurs intérêts aveugles pour le pouvoir et leur inconsistance, se décrédibilisent. Leurs mésalliances et leurs positionnements opportunistes créent une situation de confusion et renforcent la méfiance de la société civile vis-à-vis d’eux.

Dans ces circonstances, l’articulation société civile et société politique est extrêmement difficile. Toutefois, il convient de souligner que la société civile fournit des repères susceptibles de favoriser un meilleur positionnement des acteurs/trices politiques et d’affiner leur stratégie comme nous le notons par moment lors des mobilisations sociales conduites par des Petro Challengers sur la reddition de compte. En effet, les citoyens et citoyennes ont compris que la pleine possession des droits civiques et politiques d’un individu ne saurait résider exclusivement dans le fait de pouvoir déposer un bulletin dans l’urne. L’acquisition et l’exercice de la citoyenneté impliquent entre autres, la contestation et le contrôle des décisions et des décideurs. Cette conception de la démocratie, traduit une certaine volonté de sortir de l’illusion de participer aux affaires publiques à travers ses représentants, dont les pratiques révèlent leur propension à remplir leurs poches et à se servir au lieu de se préoccuper des intérêts collectifs. L’Assemblée Constituante de 1987 avait probablement identifié ce besoin de la population haïtienne d’élargir le système de démocratie représentative avec des éléments de base fondé sur une certaine répartition [14] de la capacité de prise de décision et une distribution des ressources à l’échelle du territoire. Les tables rondes des numéros 15-16 et 28-29 de la revue Rencontre traitant respectivement de la question de la décentralisation et de l’État de droit ont abordé un ensemble de questions qui montrent comment la décentralisation telle que prescrite par la Constitution s’inscrit dans une dynamique de rupture avec l’État dictatorial centralisé et dégage une vision favorisant une participation citoyenne consensuelle à travers des collectivités territoriales. L’immobilisme caractérisé des pouvoirs successifs dans la mise en place des collectivités territoriales traduit leur désintérêt pour la décentralisation. La décision du Président de la République, Jovenel Moïse, de ne pas publier les résultats des élections indirectes pour la constitution des assemblées municipales, en juillet 2017, en est un exemple patent.

Le blocage du processus de mise en place des assemblées participe aussi d’une démarche d’exclure les représentants des pouvoirs locaux des espaces décisionnels nationaux et de les délégitimer de l’exercice de leur pouvoir de contrôle. La législation prévoit en effet, tel que le souligne Jean Rénold Élie (Rencontre 15-16), la participation des collectivités locales dans le choix des juges de la Cour d’appel et de 1ère instance, dans l’élaboration du plan du département, dans l’étude et la planification des projets de décentralisation et de développement du pays.

Naturellement, cette décision a été soutenue par le Sénat qui avait pris une résolution recommandant au Président de surseoir aux élections indirectes. Est-ce parce que la présence des Assemblées serait défavorable aux sénateurs dans la mesure où ils ne disposeraient plus de la même latitude pour décider du Fonds de Gestion des Collectivités Territoriales (FGDCT). De plus, les assemblées locales, pour reprendre Tony Cantave (Rencontre 15-16) détrôneraient les parlementaires de leur rôle d’agent de développement qu’ils se sont octroyés, pour les maintenir dans le rôle pour lequel ils sont élus : législateur.

Ce tour de force des pouvoirs exécutif et législatif contre les pouvoirs locaux est caractéristique du mode opératoire des dirigeants nationaux qui demeurent attachés à l’héritage de la dictature. Ils s’opposent ainsi à toute forme de cohabitation entre les pouvoirs dans le respect de leur responsabilité respective. Ils agissent fort souvent en dehors de la loi et ce, en toute impunité. La transgression par le Président de la République de la loi électorale, qui lui fait obligation de publier dans l’immédiat les résultats des élections transmis par l’institution électorale, n’a été que timidement dénoncée par la société haïtienne. Dès lors, se pose la question de l’État de droit qui suppose l’application des lois par les forces publiques y compris à l’endroit d’elles-mêmes. La récurrence depuis trois décennies, de la revendication « Chanje Leta » est un indicateur du non accomplissement de l’étape de consolidation de la démocratie en Haïti dont l’État de droit en est [15] le corolaire. L’État de force que nous avons connu depuis la naissance de la nation ne s’est jamais encore transformé en État de droit. À titre d’exemple, le rapport de la Mission des Nations Unies pour la Justice (MINUJUSH) sur le massacre de La Saline a confirmé celui de la Direction de la Police Judiciaire et des organismes de défense des droits humains en ce qui concerne l’implication de l’Exécutif, à travers l’action de plusieurs hauts fonctionnaires, dans des massacres perpétrés contre la population. Entre les mois de novembre 2018 et mai 2019, il a été répertorié selon ces rapports, deux autres massacres au moins, respectivement dans les quartiers populaires de Martissant et de Carrefour Feuille. Plus de soixante-dix personnes ont été tuées rien qu’à La Saline. En dépit, des cris de divers secteurs de la société haïtienne, les autorités indexées sont encore à leur poste et jouissent ainsi de l’immunité/ impunité. L’organisation de massacres comme technique de répression et de terreur pour imposer le silence à la population revendicatrice, rappelle lugubrement les pratiques de la dictature des Duvalier. De plus, la criminalisation systématique des mouvements de protestation contre l’impunité et la corruption semble être une autre technique utilisée par le pouvoir exécutif pour justifier les interventions musclées et violentes des forces de l’ordre contre les manifestants/tes quand elles ne procèdent pas à leur disparition. Comme le souligne les N° 32-33 de la revue Rencontre, le défi renouvelé de la construction de l’État est à relever. Au cours des trois décennies, le pays a raté à maintes reprises des occasions favorables à la mise en place d’un État au service de la Nation. On en veut pour preuve les débats effectués dans les Nos 22-23 et 24-25 de Rencontre autour de la reconstruction du pays suite au passage du séisme dévastateur du 12 janvier 2010. Plus d’un et d’une espéraient pouvoir transformer cette catastrophe en opportunité pour une refondation d’Haïti en prenant en compte particulièrement les dimensions institutionnelle, économique, sociale et territoriale. Il est navrant de constater que, neuf ans plus tard, la société haïtienne est encore en attente de la mise en place d’un cadre légal et règlementaire adapté à nos besoins pour doter le pays d’institutions fortes et efficaces. Le réseau de transport national, s’inscrivant dans le cadre de la refondation territoriale, demeure pourtant très dégradé et la distribution des personnes et des biens se réalise dans des conditions indignes et inhumaines. L’insécurité civile perdure faute de préparation à la saison cyclonique et la gestion des risques et désastres. Il en est de même de la gestion du social qui est transférée vers de grosses Organisations Non Gouvernementales. La nouvelle orientation de la coopération internationale que suggère Suzy Castor (Rencontre : 2012) n’était pas au rendez-vous.

L’épineuse question relative au rapport de la République Dominicaine avec Haïti a été tout bonnement occultée. L’État haïtien n’a pas su profiter du séisme pour construire de nouveaux rapports avec la République voisine.

[16]

Alors que Haïti est le 2ème partenaire commercial des Dominicains, l’anti-haitianisme militant continue à prendre de l’ampleur avec la répétition systématique d’actes de violences criminelles tel que le révèle les débats sur les perspectives des relations haïtiano-dominicaines du N° 30 de la revue.

La refondation économique reposée sur les investissements privés tarde à se concrétiser. Il est indéniable que la situation économique de la population se précarise de plus en plus avec un taux de change qui avoisine en juin 2019 le taux de 95 gourdes pour un dollar USD dans un pays dont l’économie se caractérise par une dépendance extérieure presqu’absolue. Les réflexions sur l’évolution de l’économie contemporaine haïtienne du N° 34 de la revue fournissent des outils d’analyse pour appréhender le mode d’insertion internationale de l’économie haïtienne, la prépondérance accordée au secteur tertiaire au détriment de l’agriculture, et le système dénommé « rente » pour reprendre le concept de Fritz Jean (Rencontre, mars 2018). Par ailleurs, si nous considérons que les bouleversements qu’a connu la société haïtienne peuvent entrainer une nouvelle qualité du social, nous pouvons supposer qu’avec le séisme du 12 janvier, nous disposons de matériaux pour enrichir et d’approfondir les réflexions de la table ronde sur le demi-siècle de mutations sociétales, contenue dans le N° 18 de la revue. La nouvelle forme de relation établie entre les opérateurs économiques et l’État d’une part, l’invasion des ONG après le tremblement de terre d’autre part, sont des éléments susceptibles de provoquer des modifications dans les structures et les comportements sociaux notamment dans la hiérarchie et la position sociales. En conclusion, les sujets traités par les tables rondes ont été bien documentés, ce qui fait leur richesse. Elles participent pleinement de la production de la pensée et de la diffusion du savoir pour une transformation profonde de la société haïtienne, qui depuis plus de deux siècles, après la Révolution anti-esclavagiste, anticolonialiste et antiraciste, n’a pas réussi à construire l’État-Nation. L’occurrence de certains thèmes tels État, Démocratie, Transition, et leur imbrication d’un intervenant à l’autre, nous met face à cette impérieuse nécessité de construire l’État démocratique. Les débats nous fournissent quelques pistes de solutions très intéressantes sur des questions systémiques susceptibles de guider les générations présentes et futures de couches sociales détentrices du contrôle et porteuses d’un véritable projet de développement économique et social tel que le souhaitait Michel Hector : « Une autre voie de construction de l’État-Nation : L’expérience christophienne : 1806-1820 ».



[1] Membre du comité éditorial de la revue Rencontre.

[2] Membre du Conseil de Rédaction de la revue Rencontre.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 23 octobre 2022 19:36
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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