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Collection « Les auteur(e)s classiques »

Les origines du capitalisme moderne. (Esquisse historique). (1926)
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Une édition électronique réalisée à partir du livre d'Henri Sée (historien, 1864-1936), Les origines du capitalisme moderne (Esquisse historique) (1926). Paris: Librairie Armand Colin, 1926. Collection Armand Colin, no 79. Section d'Histoire et sciences économiques, 210 pages. Une édition réalisée grâce à la précieuse coopération de Serge D'Agostino, professeur de sciences économiques et sociales en France, qui m'a prêté ce précieux livre.

Avertissement


Dans cette esquisse, nous ne nous sommes nullement proposé d'écrire une histoire générale du capitalisme. Nous avons encore bien moins eu le dessein de tenter un essai sociologique. Est-il besoin de dire qu'en aucune façon, ce modeste essai ne peut avoir la prétention de rivaliser avec l'œuvre monumentale du professeur W. Sombart, Der moderne Kapitalismus, qui se recommande par son érudition, si étendue, bien que parfois un peu trouble, et surtout par ses vues si suggestives ?

Notre dessein a été simplement de réunir, d'une façon synthétique, un certain nombre de données historiques, vraiment sûres, élaborées surtout en vue des services qu'elles pourraient rendre à la sociologie et à l'économie politique. C'est, en un mot, un essai de synthèse et d'histoire comparée, écrit sans aucun parti-pris politique, ni social. Nous avons tenté de nous rendre compte de la grande évolution économique et sociale, qui a abouti, au XIXe siècle, au triomphe du capitalisme et de la grande industrie (Note 1).

Il importe encore d'indiquer la méthode que nous avons suivie. Si nous nous sommes proposé de fournir quelques matériaux historiques à la sociologie et à l'économie politique, nous nous sommes bien gardé d'emprunter quoi que ce fût aux méthodes de ces deux sciences.

La sociologie, en effet, ne tient qu'un compte secondaire de l'espace et du temps ; elle a surtout pour objet de décrire l'organisation des sociétés in abstracto. Or, pour nous, les deux facteurs, temps et espace, sont essentiels, car c'est surtout l'évolution de phénomènes économiques que nous étudions, et dans des régions bien déterminées. L'économie politique se propose d'étudier les lois de la production, de la distribution et de la consommation des richesses, sans tenir un compte trop étroit des « contingences », bien que l'idée d'évolution la pénètre peu à peu et qu'elle ait de plus en plus recours aux données de l'histoire (Note 2). Or, l'histoire doit s'occuper tout particulièrement de ces contingences. Ce qui ne veut pas dire que nous n'ayons pas tiré grand profit de la fréquentation, des sociologues et des économistes. Ils s'attachent surtout à l'observation de la société contemporaine. Mais l'historien, pour comprendre le passé, a besoin de connaître le présent et de s'en rendre compte. Si nous n'avions pas sous les yeux une société, régie en grande partie par l'organisation capitaliste, l'idée ne nous viendrait pas d'en étudier la genèse.

La méthode, qui nous a semblé la plus légitime et la plus fructueuse dans l'ordre d'études que nous avons tentées, c'est la méthode comparative (note 3). Comme nous avons voulu étudier les origines du capitalisme, non pas dans un seul pays, mais partout où on peut les saisir, la pratique de l'histoire comparée s'imposait d'autant plus fortement. Nous avons dû y avoir recours dans l'espace, mais aussi dans le temps, car l'accumulation des capitaux,- condition nécessaire dit capitalisme -, ne s'est pas produite au moyen âge de la même façon que dans les temps modernes, et l'organisation capitaliste du moyen âge, encore sporadique et embryonnaire, est très différente de l'organisation qui prévaudra aux XVIIIe et XIXe siècles. Ce sont principalement ces différences qui nous permettent de saisir le sens de l'évolution et de déterminer le caractère de la société capitaliste moderne.

Nous nous sommes toujours appliqué à recourir aux faits concrets. Néanmoins, comme nous avons voulu faire œuvre de synthèse, comme nous avons employé la généralisation, nous n'avons pu, nous le craignons, éviter toute abstraction, puisqu'entre généralisation et abstraction, il existe un lien assez étroit.

Un autre inconvénient d'une étude comme celle-ci, c'est que l'on est obligé de reléguer dans l'ombre des faits d'un autre ordre, - politiques, religieux, intellectuels, etc. Or, nous reconnaissons que ces faits peuvent avoir exercé, en bien des cas, une notable influence sur la genèse du capitalisme. Les personnalités aussi passent complètement à l'arrière-plan ; or, n'ont-elles eu aucune influence sur l'évolution des faits économiques que nous étudions ? L'œuvre de Colbert, par exemple, si on en a souvent exagéré l'importance, n'a-t-elle pas contribué à l'évolution du capitalisme, tout au moins en France ?

En un mot, tous les faits individuels, qui forment la trame de l'histoire générale, sont sacrifiés, et sans doute d'une façon excessive, Cependant, un essai de synthèse et d'histoire comparée, comme celui que nous avons tenté, ne peut-il rendre quelques services, même à cette histoire générale ? Ne peut-il expliquer plus fortement certains faits d'un autre ordre, contribuer à en montrer le lien ? Sans doute, on peut considérer que l'individuel seul correspond à la réalité; mais, comme le général est plus intelligible que le particulier, son étude peut nous aider à mieux comprendre cette catégorie de faits, qui ne se sont jamais produits qu'une fois, d'une certaine façon, et qui, tant qu'ils restent isolés, sont difficilement accessibles à la science.


Notes:

(Note 1) Des fragments de ces, études ont paru dans la Revue de synthèse historique (numéros de juin et décembre 1924, de juin et décembre 1925) et aussi dans la Revue d'histoire économique (an. 1924).
(Note 2) VOY. W. ASHLEY, Evolutionary economics, publié en français dans la Revue économique internationale, 25 sept. 1925.
(Note 3) Voy. le beau discours d'Henri PIRENNE, De la méthode comparative en histoire (Compte-rendu du Congrès des sciences historiques de Bruxelles, 1923), ainsi que notre article, Remarques sur l'application de la méthode comparative à l'histoire économique et sociale (Revue de synthèse historique, déc. 1923).


Retour au texte de l'auteur: Henri Sée Dernière mise à jour de cette page le Lundi 05 mai 2003 13:04
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue.
 



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