RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les auteur(e)s classiques »

Mère d’Youville. Vénérable Marie-Marguerite du Frost de Lajemmerais veuve d’Youville, 1701-1771,
Fondatrice des Soeurs de la Charité de l’Hôpital-général de Montréal dites Soeurs Grises.
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Albertine Ferland-Angers, Mère d’Youville. Vénérable Marie-Marguerite du Frost de Lajemmerais veuve d’Youville, 1701-1771, Fondatrice des Soeurs de la Charité de l’Hôpital-général de Montréal dites Soeurs Grises. Montréal: Librairie Beauchemin Limitée, 1945, 389 pp. Une édition numérique réalisée avec le concours de Réjeanne Toussaint, bénévole, Chomedey, Ville Laval, Québec.

[11]

Mère d’Youville

Introduction

Dans la galerie de nos gloires nationales, il est un portrait qui nous a semblé avoir besoin d'être rafraîchi : celui de Mme d'Youville. Il s'efface des mémoires, et c'est dommage ! Cette pensée nous vint souvent à l'esprit, quand, au cours de nos recherches et découvertes documentaires, d'anciens registres, des lettres pieusement gardées, de vénérables portraits et d'authentiques reliques faisaient s'animer sous nos yeux cette grande Canadienne dont la vie est intimement liée aux dernières années du régime français au Canada. Mgr Prohászka a écrit : « L'homme, pour moi, n'est guère qu'une larve jusqu'à l'instant où il se dégage du cocon tissé des milliers de fils de l'apparence et des événements historiques. » Méditer, nous aider de la lumière des documents, pouvait seul nous donner l'espoir, et la joie, d'offrir de ces jours lointains le tableau, peut-être sommaire, mais respectueux de la Vérité, et sur ce fond, dessiner l'image de notre première fondatrice canadienne. La vision était belle, nous avons tenté la fresque. Notre humble travail fera-t-il entrevoir l'admirable Mme d'Youville ?

Au Canada, au temps où vivait Mme d'Youville, le nom patronymique était dévolu à l'aîné de la famille, quitte aux cadets d'adopter un autre nom. L'exemple le plus connu est celui des sept fils de Charles Le Moyne de Longueuil qui illustrèrent chacun un nom différent. Cette coutume a fait de nos annales canadiennes de véritables dédales pour les généalogistes et les historiens. Les fils de Mme d'Youville, tous deux prêtres, furent, eux aussi, connus sous deux noms différents. L'aîné, François, sous celui d'Youville, et Charles-Madeleine sous celui de Dufrost qui était le nom de sa mère née Dufrost de Lajemmerais. Il signait : Dufrost, sans prénom.

[12]

L'abbé Dufrost a laissé une esquisse manuscrite de la vie de sa mère, intitulée : Mémoires pour servir à la vie de Mde youville et tirés pour la plupart des dépositions des Sœurs dépeins, laSource, rinville et de Mde gamelin, et d'une autre Sœur. Et comme pour justifier son entreprise, il écrit immédiatement sous le titre : « Note : plusieurs personnes respectables non seulement dans le clergé, mais même parmi les séculiers donnèrent à Mde youville le titre de femme forte. »

Ce manuscrit ne portant pas de signature, il fallait en établir l'authenticité. Ce travail a été fait, en 1884, par les experts chargés d'examiner les documents destinés à la Commission Historique de la Cause de canonisation de notre héroïne. Nous ne saurions mieux faire que de reproduire leur témoignage.

Procès Informant volume 1, p. 498 — Rapport des Experts, MM. J. A. Cuoq, p.S-S., et H. A. Verreau, ptre.


« En vertu de la Commission qui nous a été donnée par lettres authentiques de Sa Grandeur Monseigneur l'Évêque de Montréal, le quatre mai de la présente année mil huit cent quatre-vingt-quatre, nous avons pris connaissance de plusieurs documents qui nous ont été remis par M. l'abbé Bonnissant, prêtre de Saint-Sulpice, postulateur en la Cause de Béatification et de Canonisation de la Servante de Dieu, Marie-Marguerite Dufrost de Lajemmerais, veuve de M. d'Youville. »
…………………………………………..
II
« Nous avons ensuite examiné deux cahiers en papier manuscrits et sans signature. Le premier a pour titre : « Mémoires pour servir à la vie de Mme Youville, etc. » Il renferme treize pages, est marqué A-B. L'écriture en est soignée.

« Le second a pour titre : « La vie de madame youville & &. » Il a trente et une pages et est marqué A-C. L'écriture négligée, les nombreuses ratures, les renvois, nous font croire que c'est la première copie d'un travail qui aurait été considérable s'il avait été terminé.
[13]
« Nous avons d'abord considéré les signes extrinsèques de leur ancienneté. Le papier de A-B porte la marque d'une fabrique anglaise ancienne ; celui de A-C n'a aucune marque, mais ces deux espèces de papier sont d'une contexture et d'une fabrication qu'on ne trouve plus dans le commerce, au moins en Canada. L'encre et le papier ont pris cette teinte jaunâtre qu'on trouve presque invariablement aux anciens documents.

« En second lieu nous avons reconnu et nous déclarons que chacun de ces cahiers a été écrit tout entier par la même personne, sans qu'aucune rature ni addition ne paraisse avoir été faite par une main étrangère.

« Comparant ensuite les deux cahiers, nous déclarons qu'ils ont été écrits tous les deux par une seule et même personne. Nous avons constaté cette identité par la forme et l'aspect général de l'écriture, preuve suffisante pour ceux qui ont une certaine habitude des manuscrits. Nous l'avons encore constatée à des signes particuliers que nous exposons plus loin.

« En troisième lieu, nous avons comparé ensemble les deux cahiers A-B et A-C et le Registre des baptêmes, mariages et sépultures de la paroisse de Boucherville. Les Actes de ce Registre à partir du 12 mai 1774 jusqu'au mois de juillet 1781, ont presque tous été écrits et signés par Mr Charles Madeleine Dufrost, fils de la Servante de Dieu et curé de Boucherville. Ce sont des actes authentiques, qui font foi devant les tribunaux soit civils, soit ecclésiastiques.

« Dans ces Actes, rédigés au jour le jour, tantôt avec soin, tantôt avec précipitation, avec différentes espèces d'encres et de plumes, on reconnaît que la forme et l'aspect général de l'écriture sont toujours les mêmes.

« De plus, nous avons constaté des signes particuliers d'identité, tels que la forme de la lettre « r », forme qui est très caractérisée au milieu des mots. Il en est de même, quoiqu'à un moindre degré, pour les lettres « s » et « f », surtout quand elles sont redoublées. Assez souvent l'accent aigü qui devrait surmonter la lettre « e » devient un accent grave dans des mots où il est impossible que l'écrivain ait été trompé par une prononciation fautive.
[14]
« Ces signes généraux et particuliers de l'identité des actes écrits par Mr Dufrost nous ont fait constater que les deux cahiers A-B et A-C ont aussi été écrits par ce vénérable prêtre.

« En conséquence, nous déclarons qu'ils sont authentiques et intègres. S'il fallait en fixer la date approximative, l'aspect de l'écriture nous la ferait placer vers les années 1777 à 1780. »
III
« Le troisième document qui nous a été soumis est un cahier petit in-quarto, en papier de VI-181 pages, intitulé : "Vie de Mme Veuve Youville, fondatrice et première supérieure de l'Hôpital Général". Il est sans nom d'auteur, mais on l'attribue à Mr Sattin, prêtre de Saint-Sulpice, chapelain dudit hôpital.

« Nous avons comparé l'écriture de ce cahier et celle des nombreux actes écrits et signés par M. Sattin dans le Registre des baptêmes et sépultures de l'Hôpital Général. Les caractères généraux et particuliers ne laissent aucun doute sur l'identité de l'écriture de la VIE et celle du Registre. Parmi les signes particuliers se trouve la forme des lettres capitales « F » et « T », l'emploi continuel de « L » (1 capital) au milieu des phrases. Nous n'avons constaté aucune interpolation dans cette vie. En conséquence, nous déclarons qu'elle est authentique et intègre. »

Signé : J. A. Cuoq, p.s.s., peritus
H. A. Verreau, p. Expert. »

Plus récemment, en 1837, on a photographié les deux cahiers Dufrost ainsi que plusieurs pages de diverses années du registre de Boucherville. Après examens comparatifs, d'autres experts ont conclu dans le même sens que messieurs Cuoq et Verreau.

L'abbé Dufrost donne les noms des personnes qui l'ont renseigné. Voici la date de décès de chacune d'elles : Mme Ignace Gamelin décéda le 10 avril 1789 ; la Sœur Rainville, le 29 novembre 1783 ; la Sœur Despins, le 6 juin 1792 ; la Sœur La Source, le 14 septembre 1778. Si la Sœur La Source a pu être consultée, [15] le manuscrit Dufrost doit être antérieur à 1778. Nous avons choisi l'abbé Dufrost pour guide, et nous lui devons le canevas du présent volume.

Le manuscrit de M. Sattin n'est pas signé non plus, mais il est daté de 1828. De plus, la feuille de garde porte le témoignage de la révérende Mère McMullen, supérieure générale de l'Institut De son écriture maintes fois identifiée, on lit : « Cette Vie est écrite de la main de notre très honoré Père Sattin, Sr McM. » Monsieur Antoine Sattin, prêtre de Saint-Sulpice, fut aumônier des Sœurs Grises de 1818 à 1836, l'année de sa mort

Les ouvrages sans signatures abondent dans la littérature canadienne. L'abbé Étienne-Michel Faillon, prêtre de Saint-Sulpice, auteur de plusieurs travaux considérables sur le Canada, n'a signé aucun de ses livres ; l'abbé François Daniel, de la même Compagnie, n'a pas, non plus, signé son Histoire des grandes familles françaises du Canada. L'abbé Sattin suivait donc la tradition sulpicienne de l'époque.

Si nous avons suivi l'abbé Dufrost, nous n'avons pas négligé de consulter l'érudit M. Faillon, plus abondant en détails, et, surtout, plus documenté. Sa biographie de Mme d'Youville, publiée en 1852, à Tours, chez Mame, est indispensable à qui veut connaître la fondatrice des Sœurs Grises.

Cependant, malgré ces guides estimés, nous avons voulu aller aux sources et consulter diverses archives publiques et privées. Aux archives publiques, nous avons été reçue avec la plus franche cordialité. C'est une joie de reconnaître la parfaite obligeance du major Gustave Lanctôt, sous-ministre, chef des Archives Publiques du Canada, à Ottawa, et de ses assistants, messieurs Norman Fee et Lucien Brault ; de Me E. Z. Massicotte, LL.B., D. ès L. chef des Archives Judiciaires de Montréal ; de messieurs Pierre-Georges Roy, D. ès L., et Antoine Roy, D. de l'U. de Paris, successivement chefs dévoués des Archives de la province de Québec.

Les archives privées des séminaires présentaient quelques difficultés de consultation pour une laïque. Les archivistes trouvèrent le moyen d'aplanir les obstacles, et c'est avec la conscience [16] de leur extrême condescendance que nous offrons nos remerciements à M. le Supérieur provincial de Saint-Sulpice, le chanoine J.-Eugène Moreau ; à Mgr Paul Bernier, en 1942, chancelier de la Curie métropolitaine de Québec, aujourd'hui chef du Secrétariat Permanent de l'Episcopat Canadien, à Ottawa ; à M. l'abbé Arthur Maheux, archiviste du Séminaire de Québec, et à son assistant, M. l'abbé Honorius Provost.

Chez les Sœurs Grises de Montréal, les archives nous furent largement ouvertes, et nous les avons explorées en toute liberté. Ce n'est pas sans émotion que nous avons manié d'authentiques documents, parfaitement conservés, que des mains vénérables avaient touchés avant nous. Nous remercions très cordialement les révérendes Mères du Conseil général des Sœurs Grises de nous avoir honorée de leur confiance en nous permettant de travailler dans leurs voûtes si méthodiquement ordonnées. Qu'elles soient assurées que si, au cours de cette biographie, nous avons bridé tout lyrisme, ce n'est pas faute d'enthousiasme : l'éloquence des faits nous en dispensait. Nous avons présenté la fondatrice telle que les documents la montrent, et telle que ses œuvres, justifiant les documents, la complètent On nous saura gré de l'avoir maintes fois citée, nous avons pensé qu'aucune interprétation ne valait le son même de son âme.

Mère d'Youville franchit la porte du cloître. Aïeule auguste, au
charme captivant, elle va visiter notre génération

Montréal, 1944


Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le mercredi 15 décembre 2021 15:45
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref