RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les auteurs classiques »

GESTAPO. L'organisation, les chefs, les agents, l'action de la Gestapo à l'étranger. (1940)
Préface


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Pierre Dehillotte, GESTAPO. L'organisation, les chefs, les agents, l'action de la Gestapo à l'étranger. Paris: Les Éditions Payot, 1940, 211 pp. Une édition numérique réalisée par Michel Bergès, bénévole, directeur de la collection “Civilisations et politique”.

[5]

GESTAPO
L’organisation. – Les chefs. – Les agents.
– L’action de la Gestapo à l’étranger.

Préface

De tous les mystères qu’offre cette guerre, qui n’en est pas avare, le plus troublant, parce qu’il attire autant qu’il effraie, est celui de cette terrible police secrète qui a mieux servi les desseins d’Hitler que ses armées elles-mêmes.

De tout temps le public fut friand de ces récits d’aventures, de ces duels implacables et obscurs entre le conspirateur et ces forces de l’ombre au service d’un régime ou d’un homme. Et l’on ne saurait nier qu’elles furent indispensables à plus d’un pour assurer, affermir ou faire respecter l’autorité de l’État. On a beaucoup médit de la police de Richelieu. C’était cependant celle du plus grand artisan de l’unité française. L’abbé Dubois, Fouché, Metternich, ont eu la leur aussi qui avait du moins la pudeur de demeurer cachée et insaisissable.

La singularité de la Gestapo est d’être devenue une institution officielle, publique, avec ses uniformes, ses fanions, ses règlements et ses insignes. Hitler, par l’omnipotence affichée qu’il a déférée à la Gestapo, a élevé la délation, l’hypocrisie, la trahison au rang de vertus civiques. Sous cet aspect, la conception nationale-socialiste du rôle de la police dans l’État est une nouveauté dans la structure de IIIe Reich. Il y eut toujours en Allemagne une certaine prédilection pour l’espionnage, une certaine considération pour celui qui en acceptait les risques. Les nazis ont codifié ces tendances, les ont érigées en principes, en ont fait le creuset d’un véritable apostolat.

C’est cette démonstration non moins utile pour l’Histoire [6]  du point de vue technique que du point de vue psychologique qui a été entreprise ici par M. Pierre Dehillotte. Son livre est une étude sérieuse, réfléchie, documentée. Il n’a cédé à l’attrait d’illustrer son récit par des exemples suggestifs que dans la stricte mesure où ils s’imposaient. Sa formation journalistique lui a du reste rendu léger cet effort.

Il y a dans le journalisme d’aujourd’hui deux catégories qui s’opposent plus souvent qu’elles ne s’accordent. Le reporter, qui est un oiseau de passage, qui picore dans les grosses tartines de l’actualité et ne voit le plus souvent que les apparences furtives, passagères, habilement composées pour lui, et pour ses journaux. Il y a le correspondant qui est encore là quand le reporter n’y est plus. Celui-là ne saurait se mouvoir dans son poste sédentaire et parfois lointain sans une parfaite connaissance de l’histoire du pays où il vit, des dessous, des mobiles et des ressorts intimes qui déterminent les réactions de l’opinion ou les décisions des gouvernements.

M. Pierre Dehillotte est, dans le genre, un des plus qualifiés pour traiter les problèmes les plus épineux de l’Allemagne, de l’Europe centrale et méridionale. Avant la guerre de 1914, il avait été pendant quatre ans le collaborateur de M. Comert, correspondant du Temps en Allemagne. Après l’Armistice, il devenait le correspondant du Temps à Madrid, et de 1932 à 1938, celui du Journal des Débats et de l’Agence Fournier, d’abord à Berlin et ensuite à Vienne et à Prague.

Cette énumération de capitales, dont deux aujourd’hui sont décapitées, rend suffisamment explicite l’intérêt du devoir professionnel qu’y accomplissait Pierre Dehillotte avec conscience et courage. Autant dire qu’il fut le témoin des drames successifs où sombrèrent l’une après l’autre l’Allemagne démocratique, l’Autriche indépendante et la Tchécoslovaquie libre.

[7]

J’ai connu Pierre Dehillotte dans les salles de rédaction du Temps. Les caractéristiques de son information étaient toujours l’inédit, la sincérité et l’explication secrète, profonde, qui rend d’un seul coup vraisemblables toutes les invraisemblances de l’étranger. Rien ne l’étonnait, parce qu’il avait été longtemps aux sources des campagnes mensongères de Berlin ou d’ailleurs. Quand je le revis, plus tard, à Berlin, quelques mois avant l’arrivée d’Hitler au pouvoir, il émit sur l’évolution de la politique allemande quelques lugubres pronostics qui tous se sont réalisés. Il faudrait relire les articles qu’il envoya, vers cette époque, au Journal des Débats pour se convaincre qu’il ne s’agit pas là de simples politesses confraternelles et rituelles dans une préface.

Son style dépouillé, concis et ferme, est une garantie d’authenticité. S’il ne dédaigne pas l’ironie et le détail pittoresque, il n’enjolive et ne fleurit rien. Certaines de ses pages ont la sécheresse d’un rapport, mais les documents et la clarté de l’exposé leur donnent un caractère historique puissant. Les anecdotes, les traits, racontés avec la même sobriété n’en sont que plus forts, plus convaincants. C’est en somme une contribution considérable que M. Pierre Dehillotte apporte à l’histoire de ces temps singuliers. Ce sont des livres comme le sien qui rendent moins ardue la tâche des historiens de l’avenir. Et, pour le présent, c’est un service qu’il rend à son pays, car connaître l’ennemi n’est-ce pas le meilleur moyen de le battre ?

Georges Suarez



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 24 septembre 2023 13:35
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref