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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir du texte de Jean-Pierre Wampach, “Disparités régionales et scolarité en agriculture”, In Canadian Journal of Agricultural Economics / Revue canadienne d'économie rurale, vol. 18, no 1, 1970, pp. 1-5. [L’auteur nous a accordé, le 4 septembre 2015, l’autorisation de diffuser en accès libre à tous ce livre inédit dans Les Classiques des sciences sociales.]

[1]

Jean-Pierre WAMPACH *

Disparités régionales
et scolarité en agriculture
.”

In revue Canadian Journal of Agricultural Economics/Revue canadienne d’économie rurale, vol. 18, no 1, février 1970, pp. 1-5.

RÉSUMÉ

Une analyse graphique dégage, en 1961, pour l'agriculture québécoise et ontarienne, une relation entre la productivité moyenne en valeur de travail et le taux de scolarité de la population rurale agricole masculine, au niveau régional. La variable scolarité est introduite dans une fonction agrégée de production pour la province de Québec et son effet sur la production s'avère significatif. Les coefficients de régression de la variable scolarité et des autres, variables sont utilisés pour analyser les différences relatives de productivité du travail entre la région des environs de Montréal et la région de la Gaspésie-Côte-Nord. Comparativement à une analyse antérieure dont la scolarité était absente, celle-ci explique 6% de la différence de productivité. L'effet du taux de scolarité ne modifie guère les effets des autres variables, excepté celui de la région, qui est diminué du montant expliqué par la scolarité. La faible contribution du taux de scolarité à l'explication des différences régionales de productivité soulève la question d'un possible sous-investissement dans le capital humain en agriculture.

ABSTRACT

REGIONAL DISPARITIES
AND EDUCATION IN AGRICULTURE

A graphic analysis, at the regional level, in 1961, reveals in Québec and Ontario agriculture, a relationship between the average value productivity of labour and the level of education of the agricultural rural maie labor force. The education variable is introduced in the aggregate production function for Québec agriculture and found to have a significant effect on production. The regression coefficient of the education variable is used, together with the other regression coefficients, to analyse the relative gap of labour productivity between the Montréal (environs) region and the Gaspé-Côte-Nord region. In comparison with a previous analysis excluding education, it is found that differences in education explain 6% of the gap, without altering much the effects of the other variables, except the regional effect, which is reduced by 6%. The small contribution of education to the explanation of the regional disparities in agricultural labor productivity might reflect the under investment in human capital.

Introduction

Dans un article paru dans ce journal [2], j'ai tenté de mesurer, de décrire et d'analyser les disparités régionales de productivité moyenne en valeur du travail agricole au niveau des régions économiques du Québec et de l'Ontario, en 1951 et 1961. L'analyse reposait sur l'estimation d'une fonction agrégée de production agricole incluant les intrants : travail de l'exploitant et de sa famille, travail salarié, machines et outillage, terres et bâtiments, cheptel et aliments du bétail, engrais, Afin de capter les effets des conditions naturelles et économiques liées à la région économique, on a supposé que le niveau de la fonction pouvait varier de région à région. Une des limites de l'approche utilisée était de se baser sur l'homogénéité du facteur travail, à l'exception près que le travail des exploitants agricoles âgés et celui des aides familiaux ne comptaient que pour une fraction du travail d'un exploitant âgé de moins de 65 ans.  Un premier [2] pas vers le dégagement de l'influence des caractéristiques personnelles des agriculteurs avait été franchi par la présentation d'un graphique illustrant la relation entre productivité du travail et scolarité (graphique l). [1] L'objet de cet article est de pousser plus loin l'analyse de l'effet du niveau de scolarité sur la productivité du travail et de contribuer ainsi à une meilleure compréhension des causes des disparités régionales en agriculture.

GRAPHIQUE I.
Relation entre la productivité du travail agricole
et le degré d'instruction scolaire,  par région économique, 1961.

SOURCE. NOS CALCULS (cf. (2) et annexe)


Données

Le taux de scolarité est mesuré, au niveau du comté, par le pourcentage de la population rurale agricole masculine ayant dépassé le niveau élémentaire de scolarité (les chiffres régionaux figurent au tableau II de l'annexe). Les mesures ont été obtenues par calcul à partir de données non publiées, communiquées par le Bureau Fédéral de la Statistique. Une mesure analogue a été présentée par le Conseil Économique du Canada, à qui l'on se reportera pour comparer les taux de scolarité dans l'agriculture à ceux atteints dans d'autres provinces et d'autres secteurs de l'économie [1, tableau 8.9, p. 263].

[3]

Méthode

La méthode consiste à introduire dans la fonction agrégée de production agricole spécifiée antérieurement la mesure du taux de scolarité. Les paramètres de la fonction sont réestimés et un nouveau calcul des sources des disparités régionales de productivité est présenté. L'écart de productivité est exprimé en pourcentage par rapport à la région qui a la productivité inférieure, c'est-à-dire la région Gaspésie-Côte-Nord. On calcule de cette manière parce que l'effet régional (le déplacement de la fonction) a été estimé au niveau de l'ordonnée correspondant aux données de la Gaspésie-Côte-Nord et à partir de la fonction agrégée pour l'ensemble de la province. L'effet de la région des environs de Montréal a été supprimé pour raison statistique (cf. [2]). Le tableau II de l'article cité [2] donnait une analyse des différences entre les logarithmes des productivités moyennes, donc une analyse du rapport des productivités plutôt que de leurs différences relatives. Ici, le calcul suit le modèle présenté à l'annexe III de l'article cité [2].

Résultats

Les différences du taux de scolarité de la région des environs de Montréal par rapport à celui de la Gaspésie-Côte-Nord expliquent environ 6% de la différence relative de productivité du travail (tableau I). Comparativement à l'analyse précédente [2, tableau II], l'effet du taux de scolarité ne modifie guère l'influence des autres facteurs de production, ni celui des économies d'échelle, mais il réduit l'effet régional d'un montant égal à sa propre influence. L'effet régional se décomposerait donc en un effet de la qualité de la main-d'oeuvre, à présent mesuré, et en d'autres effets que l'on suppose liés aux conditions naturelles et économiques caractérisant la région.

TABLEAU I

Contributions de divers facteurs à la différence de productivité du travail
entre la région des environs de Montréal et la région Gaspésie-Côte-Nord, 1961
 [2]

Variable

Outillage par ferme

8.7

(6.1)

Aliments et semences dépensés par ferme

39.1

(27.3)

Salaires par ferme

14.8

(10.3)

Scolarité

8.9

(6.2)

Effet régional

20.0

(14.0)

Economies d'échelle

33.3

(23.2)

Résidu

18.2

(12.9)

Différence de productivité

143.0

(100.0)


Conclusions

L'analyse graphique révèle une "bonne" relation entre la productivité du travail agricole et le taux de scolarité, au niveau régional. Mais la productivité dépend de plusieurs autres facteurs, dont l'analyse économétrique s'efforce d'isoler et de mesurer les effets. En fait, une productivité élevée s'expliquerait davantage par les dotations en facteurs de production associés au travail, par des économies d'échelle et des effets de localisation que par des différences de qualité du facteur travail.

En considérant ces résultats, il ne faut pas perdre de vue les hypothèses sur lesquelles ils reposent. L'analyse suppose, par exemple, que l'on peut substituer, au niveau global, des exploitants plus qualifiés à n'importe quel autre intrant sans diminuer la production. C'est d'autre part une analyse statique qui éclaire peut-être, à un moment donné, les causes immédiates des différences de productivité, mais pas les causes plus lointaines. À cet égard, la faible contribution du taux de scolarité à l'explication des différences interrégionales de productivité soulève la question de l'investissement dans la formation des agriculteurs. Il n'est pas impossible qu'un accroissement à la marge du taux de scolarité ait une productivité marginale élevée au regard de son coût. Dans ce cas, la faible contribution du taux de scolarité à l'explication des différences interrégionales de productivité ne serait que la conséquence d'un sous-investissement dans la formation des agriculteurs.

Annexe

TABLEAU I
Fonction de production Cobb-Douglas pour l'agriculture, Québec, 1961

Variables

Coefficients de régression

Erreur
standard2

[1]

[2] (1)

Travail familial

0.680

0.532

0.150

Scolarité

0.099

0.040

Travail salarié

0.121

0.145

0.037

Machines et outillage

0.264

0.286

0.085

Cheptel et aliments du bétail

0.473

0.474

0.037

Terres et bâtiments

-0.002 (3)

0.045 (3)

0.077

Engrais

-0.000 (3)

-0.004 (3)

0.019

Gaspésie-Côte-Nord

-0.079

-0.083

0.019

Abitibi-Laurentides-Lac St-Jean

-0.054

-0.053

0.020

Québec-Trois-Rivières

-0.035

-0.028 (3)

0.017

Cantons de l'Est

-0.021 (3)

-0.022 (3)

0.016

Terme constant

0.715

0.504

Somme des coefficients

1.536

1.478

R2

.973

.970

Sources et définitions des variables autres que scolarité : cf. [2]

1 Chiffres repris du tableau I dans [2].
2 Des coefficients de la colonne [l].
3 Non significatif au niveau de 5%.


[5]

TABLEAU II.
Population rurale agricole masculine et pourcentage de cette population
ayant dépassé le niveau élémentaire de scolarité,
par région économique, Québec —1961

Régions

Population rurale
agricole masculine

% ayant dépassé
le niveau élémentaire
de scolarité

1.     Côte-Nord

480

7.5

2.     Gaspésie

33,080

9.9

3.     Lac St-Jean

9,608

16.4

4.     Québec

30,285

12.0

5.     Trois-Rivières

14,843

18.0

6.     Cantons de l'Est

28,717

14.8

7.     Montréal (environs)

40,683

18.6

8.     Montréal métropolitain

970

49.1

9.     Laurentides

7,241

14.4

10.   Abitibi

9,581

11.1

Province

175,488

14.6

Source : Nos calculs d'après des données non  publiés du Bureau Fédéral de la Statistique.


Références citées

1. Conseil Économique du Canada, 4e Exposé annuel, Ottawa, Imprimeur de la Reine, 1967.

2. Wampach, J.-P., "Effets des facteurs de production et effets régionaux sur le revenu agricole," Canadian Journal of Agricultural Economies/Revue Canadienne d'Économie Rurale, Vol. XVI, No 3, pp. 1-17, 1968.



* JEAN-PIERRE WAMPACH est Professeur agrégé, Département d'Économie Rurale, Faculté d'Agriculture, Université Laval.

[1] Le graphique, qui devait paraître dans l'article cité, n'a pas été publié ; il est reproduit ici. Les chiffres de l à 10 accompagnant les points du graphique identifient les régions économiques, dont la liste figure au tableau II de l'annexe.

[2] Les différences de productivité et d'intrants par agriculteurs sont exprimées en pourcentage par rapport à La Gaspésie-Côte-Nord (voir texte). Les contributions relatives sont indiquées entre parenthèses. Les contributions de la variable travail familial (inférieure à 2%) et celle de la variable terres et bâtiments (coefficient non significatif au niveau de 5% ) sont exclues.

Source : nos calculs ; sources, définitions et méthodes :  cf. [2] et annexe.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le samedi 5 décembre 2015 13:31
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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