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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Les mutations sociales québécoises: un profil ethnographique (1989)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir de l'article de M. Marc-Adélard Tremblay, Les mutations sociales québécoises: un profil ethnographique”. Un article publié dans la revue L’Action nationale, vol. 79, no 8, octobre 1989, pp. 954-971. [M Marc-Adélard Tremblay, anthropologue, retraité de l’enseignement de l’Université Laval, nous a accordé le 4 janvier 2004 son autorisation de diffuser électroniquement toutes ses oeuvres.]

Introduction

La thématique des mutations sociales, des changements techniques et institutionnels comme des transformations socio-politiques n'a cessé d'être au premier plan des préoccupations des spécialistes des sciences humaines, lesquelles, comme on le sait, firent leur apparition à une période historique de relative stabilité sociale. Ainsi on comprend pourquoi, dans un premier temps de leur développement, elles ont disséqué des traditions séculaires et des institutions immuables. Cette orientation était comme naturelle, car il fallait comprendre comment s'effectuait, d'une génération à l'autre, la transmission des coutumes et la reproduction intégrale des pratiques culturelles. 

Mais avec l'avancement technique et la révolution industrielle, la croissance des villes, les contacts de civilisation et la diffusion des valeurs et avec l'émergence d'une culture de masse à l'échelle du « village planétaire », le thème de la dynamique sociale est devenu un objet primordial d'observation et d'analyse, sous l'éclairage d'une multitude de paradigmes et de perspectives théoriques concurrentiels. Il y eut une telle prolifération de ces études dynamiques que le concept de changement en vint à faire l'objet de vives contestations. Mes efforts en vue de construire quelques vignettes sur les mutations sociales d'ici ne me permettront pas de dénouer la crise épistémologique associée à cette notion. Toutefois, l'analyse présentée devrait refléter l'envergure des changements qui s'inscrivent sous nos yeux, les impacts individuels et collectifs qu'ils produisent et, en particulier, le genre de crise que l'on observe dans l'espace socioculturel québécois. 

 

Les mutations sont la résultante de l'histoire 

Qu'elles soient diachroniques ou synchroniques, qu'elles obéissent à des forces exogènes ou à des dynamismes internes, qu'elles se produisent sur une courte période selon un tempo accéléré ou sur une longue période selon un rythme relativement lent, les mutations sont invariablement la résultante de l'histoire. Tandis que les transformations à longue portée sont vraisemblablement structurelles et prévisibles, celles qui surgissent brusquement dans des univers sociaux limités résultent d'une conjoncture particulière. Ces dernières ont tendance à être aléatoires, donc imprévisibles. Cette distinction entre changements structurels et conjoncturels peut paraître simpliste sous l'angle de la conceptualisation, mais elle est d'une grande utilité dans la stratégie opératoire que j'utiliserai au moment de la construction de vignettes des mutations sociales québécoises. 

Je m'intéresse aux changements structurels tout en étant conscient que les conjonctures peuvent acquérir un caractère de permanence relative : c'est le cas, semble-t-il, de la récession économique qui a frappé le continent nord-américain durant la période 1981-1983 principalement et qui perdure dans certains secteurs de l'économie québécoise. Cet objectif analytique m'amènera à braquer ma lunette d'approche sur la globalité, dans un premier mouvement, et dans un deuxième temps, sur les manifestations individuelles. Je regarde avec une plus grande attention les changements morphologiques susceptibles de modifier le trajet et l'avenir de la francophonie québécoise. Quelle méthodologie doit m'inspirer pour choisir des indicateurs (valides et fiables) des changements morphologiques en cours ? Tout en m'appuyant sur les connaissances acquises sur la société québécoise, je ferai aussi appel à mes intuitions et à mon vécu : je chercherai à réconcilier les unes et les autres afin qu'émergent les forces infrastructurelles. 

Que le changement structurel soit le résultat d'un processus naturel ou la conséquence d'une intentionalité, il représente un objet d'observation d'une grande complexité, nécessitant l'utilisation d'une perspective qui soit la plus compréhensive possible. C'est justement l'objectif central d'une approche systémique de la réalité sociale. En examinant l'histoire des sciences sociales et humaines, on est frappé par la multiplicité des perspectives conceptuelles utilisées dans l'étude du changement, chacune d'elles proposant un type particulier d'explication. 

En gros, on peut regrouper ces schèmes conceptuels en quatre grandes classes : les modèles historiques ; les modèles d'orientation fonctionaliste ; des perspectives macro-culturelles où se retrouvent l'approche holistique, le matérialisme historique et la perspective systémique ; et des schémas micro-culturels. Ces cadres conceptuels d'ensemble n'épuisent pas l'univers complet des grilles conceptuelles employées dans les sciences anthropologiques et humaines. Notons, en passant, que ces différentes visées théoriques représentent autant de positions épistémologiques et de lunettes d'approche pour scruter les faits de culture dans leurs tendances les plus apparentes comme dans leurs éléments symboliques et même cachés. Chacune de ces approches, avec plus ou moins de vigueur, s'intéresse à l'analyse des transformations sociales et des mutations.

 

À partir de la réalité sociale 

Mon regard s'inspire d'une perspective systémique de la réalité sociale à l'intérieur de laquelle les composantes sont en interrelations et se transforment sous la poussée de dynamismes multiples qui imprègnent plusieurs vecteurs en même temps. Toutefois, en m'inspirant des voies tracées jadis par Robert K. Merton, il m'apparaît justifiable d'abandonner l'une ou l'autre des grandes théories explicatives du changement auxquelles j'ai renvoyé plus haut qui nous enferment dans une impasse épistémologique d'envergure pour m'orienter vers des explications de moyenne portée. Ces dernières, justement, sont centrées sur des objets restreints d'observation qui peuvent, en temps opportun, être réinsérés dans des patrons et configurations culturels plus vastes. C'est en ayant en tête ce fonds de scène théorique quelque peu imprécis que j'esquisserai quelques-unes des transformations sociales québécoises dont l'intensité, la portée et la persistance me laissent penser qu'elles sont structurelles. 

Les composantes de cette mosaïque culturelle seront constituées des pièces suivantes : (a) la portée sociale des nouvelles technologies ; (b) les nouveaux tracés de la pyramide démographique ; (c) la mouvance des structures et pratiques économiques ; (d) les mutations politiques et étatiques. Je laisserai volontairement de côté d'autres transformations structurelles : les soubresauts dans le régime de distribution des services et soins de santé, les piétinements de la réforme scolaire, les réorientations du contrôle social, le bourgeonnement de l'information [1], autant de mutations additionnelles qui viendraient appuyer les tendances observées dans les changements structurels examinés ici.


[1] La création, l'entreprosage, la sélection, la transformation et la distribution de l'information.


Retour au texte de l'auteur: Marc-Adélard Tremblay, anthropologue, retraité de l'Université Laval Dernière mise à jour de cette page le samedi 10 juin 2006 10:11
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur au Cegep de Chicoutimi.
 



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