RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Père Éric de Rosny, s.j., ICI OU LÀ EN AFRIQUE. Récits et péripéties. (2002)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir du livre du Père Éric de Rosny, s.j., ICI OU LÀ EN AFRIQUE. Récits et péripéties. Préface de Pierre-Marie Mesnier. Paris: L’Harmattan, 2002, 204 pp. Collection: Graveurs de mémoire. [Autorisation accordée par l'auteur le 27 décembre 2011 de diffuser tous ses livres dans Les Classiques des sciences sociales, autorisation retransmise par Jean Benoist, un ami personnel du Père de Rosny.]

[13]

Ici ou là en Afrique.
Récits et péripéties.

Introduction

Les remontées de la mémoire


Les courts récits qui suivent n'ont pas trouvé place dans mes livres [1]. Us auraient mérité d'y figurer autant que d'autres mais ils n'entraient pas dans cette sorte de sélection naturelle qui s'impose à l'auteur quand il écrit sur un sujet. Je pensais qu'ils mourraient de leur belle mort dans le lit de ma mémoire mais je sous-estimais la capacité de celle-ci à sauvegarder ce qui lui paraît répondre à une nécessité dont elle a seule le secret. Est conservatrice surtout la mémoire visuelle que mes amis devins m'ont appris à découvrir et même à exploiter. Les événements de ces récits sont restés là, tranquilles, je ne sais où dans ma tête ou dans mon cœur, attendant l'heure de leur réapparition à la surface de ma [14] conscience. Ils se rappellent de temps en temps à mon bon souvenir et je me dois de rendre justice à leur endurance en les mettant par écrit.

À la différence d'un rêve, qui lui aussi a la faculté de faire retour, les événements que je rapporte sont réels, se sont passés exactement comme je les raconte, moyennant une mise en forme de ma part qui est d'ordre littéraire. Chez les Douala on distingue les rêves ordinaires (ndoti) qui, la plupart du temps, s'évanouissent au réveil, des songes (jene la ndoti) qui eux peuvent être encore relatés dix ans après la nuit de leur naissance. Mes visiteurs m'en rapportent certains avec une telle véracité, un tel luxe de détails que parfois je jurerais qu'ils les ont vus la nuit précédente. Il m'arrive même de me demander s'ils ne racontent pas des faits réels. Non, mes récits retracent tous des événements que j'ai vécus éveillé, autrement ils n'auraient pas résisté à la concurrence impitoyable que se font les fantasmes. Ce ne sont pas des nouvelles romancées. Le seul point commun de ces récits et de mes rêves est que j'en suis dans les deux cas l'acteur, l'observateur principal, ou parfois la victime.

[15]

Des récits généralement mouvementés ! Combien de fois ai-je entendu l'hôtesse de l'avion annoncer d'une voix blanche qui se voulait rassurante : « Nous entrons dans une zone de turbulence. Veuillez attacher votre ceinture ! » En l'air, sur mer ou au sol, il est rare qu'un événement se passe sans perturbation ou ne fasse craindre un drame qui le plus souvent, par bonheur, ne se produit pas et vire même au tragi-comique. Mais celui-là s'oublie moins vite que des histoires roses sans incident. Sans doute est-ce pourquoi le côté pathétique des péripéties que je raconte a contribué à me les faire garder en mémoire. J'ai écrit ces mini-drames sans difficulté. Ils ne m'ont pas résisté pendant le travail de l'écriture comme ce fut le cas pour certains épisodes de mes livres. Ils étaient prêts à sortir parce que je les avais dans les yeux. J'en ai arrêté le nombre à vingt-trois pour la bonne raison qu'aucun autre ne s'imposait à moi pareillement.

Je me suis demandé dans quel ordre je devais les placer. Comme ils me sont revenus à la mémoire les uns après les autres sans égard pour la chronologie, je n'ai pas voulu les ranger en suivant les dates réelles. Il suffit de savoir qu'ils se passent à un moment donné du presque demi-siècle [16] que j'ai vécu en Afrique, de 1956 à nos jours [2]. Pourtant il me fallait bien les classer. J'ai choisi un découpage géographique, lequel s'est trouvé brouillé par les voyages. Que le lecteur ne se soucie donc pas du classement arbitraire que j'ai choisi ! Il peut très bien les lire à sa guise dans le désordre. Pardon pour l'impression d'éparpillement qu'ils donnent dans le temps et dans l'espace !

Il doit bien y avoir quand même une relation de parenté entre ces souvenirs qui s'entêtent à rester vifs, une certaine idée directrice, quelque chose qui leur est commun. Je compte sur le lecteur pour découvrir dans son trousseau d'expériences la clé d'interprétation qui me manque dans la mesure où il a vécu, quels que soient le lieu et l'époque, des scènes non pas analogues mais aussi fortes. Selon moi, leur parenté secrète est à chercher dans le saisissement qui continue de s'emparer de moi devant l'inventivité des Africains, en butte à des difficultés quotidiennes de l'autre monde, pour rester eux-mêmes. Une irréductible humanité.

Douala, 1er janvier 2002



[1] Ndimsi, ceux, qui soignent dans la nuit, CLE, Yaoundé 1974 ; Les yeux de ma chèvre, sur les pas des Maîtres de la nuit en pays douala, PLON, coll. Terre Humaine, Paris 1981 ; Presses Pocket, 1987 ; L'Afrique des guérisons, Karthala, coll. Les Afriques, Paris 1992 ; La nuit, les yeux ouvertsLe Seuil, Paris, 1996 ; Étude panoramique des Nouveaux Mouvements religieux et philosophiques à Douala, Macacos, Douala 2000.

[2] À La fin de l'ouvrage, p. 201 : situation des récits dans le parcours de l'auteur entre 1956 et 2002.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 16 juin 2013 7:21
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie retraité du Cégep de Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref