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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Bernadette Rigal-Cellard, Sacraliser le territoire américain: Mount Shasta, quand les dieux viennent instruire les humains.” Version longue d’une communication présentée en 2007 à l’Université de Toulouse Le Mirail et publiée en version courte dans ANGLOPHONIA, no 23, un numéro intitulé: “La Montagne. Entre image et langage dans les territoires anglophones”. Toulouse: Les Presses universitaires Le Mirail, 2008, pp. 229-236. Ce texte va bientôt va aussi paraitre en anglais et en version courte chez Cambridge University Press. [Avec l’autorisation de Mme Bernadette Rigal-Cellard accordée le 4 juin 2009 dans Les Classiques des sciences sociales.]

Bernadette Rigal-Cellard

Université de Bordeaux

Sacraliser le territoire américain: Mount Shasta,
quand les dieux viennent instruire les humains
.”

Version longue d’une communication présentée en 2007 à l’Université de Toulouse Le Mirail et publiée en version courte dans ANGLOPHONIA, no 23, un numéro intitulé: “La Montagne. Entre image et langage dans les territoires anglophones”. Toulouse: Les Presses universitaires Le Mirail, 2008, pp. 229-236. Ce texte va bientôt va aussi paraitre en anglais et en version courte chez Cambridge University Press.


Résumé / Abstract
Introduction
1. Du Mont Shasta des géographes à celui des ésotéristes
2. Le premier grand récit du Mont Shasta : A Dweller on Two Planets, or the Dividing of the Way, par Phylos the Thibetan, alias Frederick S. Oliver
3. Unveiled Mysteries, par Godfre Ray King
4. The Summit Lighthouse
Conclusion
Références


RÉSUMÉ

Il s'agira de voir comment certaines montagnes américaines ont été désignées sommets telluriques de la géographie sacrée universelle. Le Mont Shasta, de par sa forme volcanique jaillissant au-dessus des basses terres et sa situation, à la fois au sud de la chaîne des Cascades faisant écho aux volcans trans-Pacifique et dans l'État le plus riche en spiritualités de tous ordres, a suscité un discours ésotérique particulièrement fécond, notamment au sein de la Théosophie américaine.

Je présenterai ici deux ouvrages mettant en scène la Fraternité de Maîtres Élevés qui hante ses pentes pour enseigner ses mystères aux humains, ceux de Frederick Oliver et de Guy Warren Ballard (fondateur de I AM) et enfin brièvement le groupe Summit Lighthouse fondé par Mark Prophet, dont l’épouse, Elizabeth Clare Prophet, fera ensuite le lien avec le Grand Teton.

Pour ces ouvrages et ces mouvements, le Mont Shasta n’est pas une métaphore de la transcendance mais véritablement la résidence des Maîtres.

ABSTRACT

This paper focuses on the origins of the significance of Mount Shasta for the Theosophist movements in America. It first presents the major text of the Atlantis canon, A Dweller on Two Planets, or the Dividing of the Way, by Phylos the Thibetan, alias Frederick S. Oliver, and in particular the second part “Seven Shasta Scenes” which narrates how a wise man led the narrator into the wonderful depths of the Mount to introduce him to a fraternity of higher spirits, the Lothins. Then, we look at a famous book Unveiled Mysteries, by Godfre Ray King, alias Guy Ballard, the founder of the I AM cult, who obviously got his inspiration from the first Shasta novel. Ballard replaces the Lothin fraternity with the Great White Brotherhood, a gathering of perfected humans who have deified themselves and come to Mount Shasta to teach humans how to reach the same level of enlightenment, Saint Germain being Godfre’s guide among those Ascended Masters. Ballard belongs to the old esoteric tradition that Helena Petrovna Blavatsky would popularize at about the same time Oliver’s book was written. We then briefly present one of the scions of I AM, the Summit Lighthouse, or Church Universal and Triumphant, its belief in the Ascended Masters communicating from Mount Shasta and finally from the Teton. In these books and religious movements those mountains are not viewed as metaphorically representing transcendence and spirituality, but they truly are the residence of those higher powers. Mount Shasta in particular is still one of the most popular power spots of New Agers who regularly convene on its slopes to await final liberation.


INTRODUCTION

La thématique de la représentation de la montagne dans les pays anglo-saxons nous permet de tourner le regard vers un des reliefs de l’Amérique du Nord les plus chargés de significations mythiques et cosmiques, sans cesse réinventées encore de nos jours, le Mont Shasta. Situé au nord de la Californie, il figure à l’extrême Ouest comme la clôture de la géographie sacrée partant, à l’extrême Est, des collines du Massachusetts qui permirent aux Puritains de se poser en modèle (« A City upon a Hill), il est un des reliefs de l’Amérique du Nord les plus chargés de significations mythiques et cosmiques, sans cesse réinventées encore de nos jours. Cela est dû aux besoins qu’éprouvent les peuples, les Américains comme les autres, d’inventer une fonction et une genèse au paysage qui les entoure ou qu’ils découvrent lors de leurs migrations. Et puisque la prise de possession d’un territoire implique l’appropriation symbolique et pragmatique de la force tellurique qu’y détectaient ses occupants antérieurs, il est évident que les espaces, notamment les montagnes, que les nouveaux Américains ont voulu sacraliser étaient déjà tenus pour sacrés par les Amérindiens. Les activités d’aujourd’hui s’inscrivent dès lors dans un continuum à la fois temporel, spatial et spirituel. Le Mont Shasta n’échappe pas à la règle et nombre de légendes indiennes lui donnent sens, comme pour Devil’s Tower (Wyoming).

Ce qui m’intéressera ici toutefois davantage que le substrat amérindien de l’imaginaire des montagnes, ce sera une étape plus audacieuse du processus de sacralisation du territoire américain, celle qui consiste à équilibrer la surpuissance tellurique et mystique de certaines zones bénies du Vieux Monde, essentiellement l’Égypte, la Grèce, le Proche-Orient, le Tibet et l’Inde, en hissant l’Amérique au même niveau grâce à un discours à valeur de révélation divine unissant les spiritualités orientales au christianisme dans ce qu’il a de moins institutionnel et de plus proche du fonds ésotérique occidental. Cette sacralisation de l’espace américain fait partie de l’entreprise commencée au 19e siècle pour couper le cordon ombilical avec l’Europe qui fournissait encore tous les modèles culturels. En peinture notamment, les peintres résolurent d’enfin représenter la nouvelle nation en ce qu’elle avait de plus époustouflant et ils se concentrèrent sur la Hudson River et sur le sublime des Rocheuses. La religion ne fit que se greffer sur les mêmes espaces.

C’est à partir d’un groupe, The Summit Lighthouse, que je suis depuis que je l’ai découvert il y a 30 ans dans les montagnes magiques encadrant les déserts de sel de l’Utah que j’ai remonté le cours de la rivière de cet ésotérisme made in America jusqu’à sa source qui se trouve être au sommet du Mont Shasta. Pour plus de cohérence ici néanmoins, je ferai avec vous le chemin inverse : nous partirons de cette montagne en compagnie de son premier disciple californien, Phylos le Tibétain, puis nous verrons comment son enseignement fut adapté par Godfre Ray King, fondateur du culte I AM, sous la tutelle du Maître Élevé Saint Germain.  Nous reviendrons enfin brièvement au Summit Lighthouse brillant de tous ses feux depuis Shasta et les Rocheuses. J’espère que vous me suivrez avec plaisir dans ce voyage sidéral de nos corps astraux vivifiés par l’énergie électrique de Mount Shasta dont je vais donner en premier les propriétés observables par l’homme ordinaire.


1. Du Mont Shasta des géographes
à celui des ésotéristes

Mount Shasta est le dernier volcan au sud-est, avec Lassen Peak (à 2000 pieds il est bien plus petit) de la grande Ceinture de Feu (Ring of Fire) entourant le Pacifique Nord, appelée chaîne des Cascades dans sa partie américaine. Parmi tous ces volcans, il arrive en premier pour sa masse (on l’estime à 450 km3), en second pour l’altitude avec ses 4322 m (14 000 pieds). Ce qui le rend si spectaculaire, alors qu’il n’arrive qu’en cinquième position parmi les sommets de la Californie, c’est sa forme élancée et son isolement le plus superbe car il n’est pas lié à la Sierra Nevada, et il domine les terres environnantes de plus de 3000 m. Il est donc visible de très loin avec son cône de neiges éternelles. Cependant, c’est aussi le cas de tous les grands volcans des Cascades, et puisque en outre, tous ces monts sont tenus pour sacrés par les tribus qui les entourent, pourquoi Mount Shasta a-t-il une telle aura ? Ces mensurations et son allure sont certes exceptionnelles, mais pourquoi pas Mount St. Helens, ou les Three Sisters, ou Mount Rainier qui veille sur Seattle, ou Mount Baker sur Vancouver ? L’explication est sans doute à rechercher dans une autre particularité géologique, la richesse minière de la région Shasta qui a suscité le grand développement historique et démographique de la Ruée vers l’or et le peuplement de la Californie. Il se trouve en effet que le premier grand texte (à ma connaissance) qui le sacralise nommément fut rédigé par un fils de chercheur d’or (celui que nous étudierons en dessous). La floraison de cultes religieux sages ou extravagants en Californie est liée à toute cette activité humaine. Certes, l’idéal spirituel du pays a voulu repousser toujours plus à l’Ouest, c’est-à-dire toujours plus près de l’Orient, sa frontière mystique, mais les autres États côtiers auraient pu faire l’affaire si la Californie n’avait pas réuni davantage qu’eux ces paramètres sociaux et économiques aussi importants sinon plus que son climat. Mount Shasta profite de tout cela en dépit de son éloignement relatif des grandes zones de peuplement. Il est perçu en fait comme un point magnétique au nord de l’État équilibrant la force tellurique de son sud. Ce fut au 20e siècle, après que l’extrême sud de l’État, Point Loma, dans la baie de San Diego, eut attiré les théosophes de Katherine Tingley dès 1897, que sa célébrité mystique s’échafauda car il est en effet intimement lié à la Théosophie ainsi que nous allons le voir. L’incandescence fantasmagorique de ce gigantesque volcan opèrerait la fusion entre Orient et Occident, et ce d’autant plus clairement qu’il est soudé à l’Asie par la croûte terrestre du si bien nommé « Ring of Fire ».


2. Le premier grand récit du Mont Shasta :
A Dweller on Two Planets, or the Dividing of the Way, par Phylos the Thibetan, alias Frederick S. Oliver

C’est un gros volume (plus de 410 pages divisées en trois parties ou livres) et je présenterai plus spécifiquement le livre deux, « Seven Shasta Scenes » (pages 242 à 393), qui divulgue l’enseignement reçu dans les cavités de la montagne par Phylos le Tibétain. L’homme aurait dicté ses mémoires à Frederick S. Oliver, qui se dit medium et se fit ainsi amanuensis, son scribe. Ce dernier, né en 1866 à Washington, DC, arriva à Yreka au nord de Shasta, à l’âge de deux ans avec ses parents chercheurs d’or. Il raconta que ce fut en arpentant les limites de la concession minière de ses parents qu’il fut pris de crises d’écriture automatique incontrôlables. Il termina le livre en 1886 et mourut à 33 ans en 1899. Le livre ne fut publié que plus tard en 1905 par sa mère. Une autre édition sortit en 1920, puis une autre en 1964 et la maison d’édition de Rudolph Steiner le republia en 1974. J’ai utilisé celle de 1920 mise en ligne par <Sacred-Texts.com>. Il s’agit d’un des textes majeurs de ce que l’on appelle le canon de l’Atlantide, fonds livresque et cinématique portant sur ce monde disparu, souvent associé aux autres mondes perdus de Lémurie et de Mu, civilisations réputées supérieures que de nombreux Américains considèrent comme ayant refait surface sous la forme de leur continent adoré ; croyance, il faut le dire, qui eut quelque gloire lors de la découverte de ces terres à une époque où justement on relisait les textes antiques, dont ceux de Platon qui décrit le premier l’Atlantide.

A Dweller on Two Planets ne surgit pas de nulle part mais bien du terreau en ébullition de son siècle en matière scientifique, technologique et spirituelle. Le 19e siècle naissait avec les découvertes des secrets de l’Égypte, et sa dernière partie découvrait les ruines de grandes civilisations disparues (en Amérique latine, ou au Cambodge notamment). Cette plongée dans un passé glorieux et ignoré jusqu’alors, associée aux progrès de la technologie, stimula l’imagination des poètes et des romanciers. Il est évident que l’auteur de notre premier texte sur Shasta, Frederick S. Oliver, dont on sait peu de choses, avait lu un grand nombre de récits et il est admirable qu’à seulement 18 ans, il ait su en tirer une somme si personnalisée. Par exemple, les dessins de sous-marins ou de fusées pour atteindre les astres qui accompagnent son récit rappellent les engins d’un Jules Verne. Il n’est pas impossible qu’Oliver l’ait lu car il fut traduit très tôt en anglais : ainsi Voyage au centre de la terre publié en 1864, fut traduit en 1871, ou Vingt mille lieux sous les mers paru en 1869 et traduit en 1873.

L’époque voit aussi le grand développement de l’activité minière, ce que met en scène par exemple un autre livre de Verne, Les Indes noires (1876-77). Comme chez lui, toutes les intrigues des disciples de Mont Shasta permettant l’accès à la connaissance ésotérique impliquent le passage par des mines fabuleuses, leur achat, leur vente, plus ou moins frauduleuse. La pratique cérémonielle des religions issues de Shasta reposera en grande partie sur des blocs de cristal de roche, quartz rose, améthyste, ou autres gemmes disposés dans les salles de culte pour métaphoriser la puissance et la lumière divines au cœur de l’individu conçu comme géode.

Dans le domaine strictement spirituel, ce fut la rencontre de l’Orient qui détermina l’évolution de la religion et de la philosophie américaine au 19e siècle. Beaucoup plus riches en développements ésotériques et exotiques que le Transcendantalisme, les ouvrages d’Helena Petrovna Blavatsky (HPB) faisaient ressurgir les mondes de l’Atlantide, de Lémurie, l’Hyperborée et de tout paradis de l’Âge d’Or dont les habitants auraient possédé la science de la Connaissance des pouvoirs divins. Toutefois comme c’est l’œuvre majeure de HPB, The Secret Doctrine, qui développe le monde d’Atlantis, et que ce livre ne parut qu’en 1889, Oliver n’a pu s’en inspirer  pour  l’Atlantide de A Dweller puisque il en termina la rédaction en 1886. En revanche, il a dû forcément lire le premier ouvrage de HPB, Isis Unveiled, car il fait régulièrement référence aux théosophes et il est évident qu’il a puisé bon nombre de ses révélations ésotériques chez elle.

Paru en 1877, Isis Unveiled oppose en quelque 650 pages les connaissances et les pouvoirs surnaturels des Orientaux, des magiciens, des alchimistes, à ceux des pseudo-savants de l’ère contemporaine et ceux des institutions religieuses chrétiennes aveugles, dictatoriales et mortifères. Cet énorme ouvrage fait subir une rude épreuve à ses lecteurs car c’est une avalanche d’affirmations sans appel (certes appuyées sur de nombreuses notes bibliographiques), les chapitres et les paragraphes s’enchaînant sans que l’on voie une véritable structuration ou progression argumentative. À sa sortie il suscita un grand engouement puisqu’il mettait à la portée de tous des éléments jusque là réservés à un petit nombre d’initiés, mais il est difficilement digeste de nos jours, alors que celui d’Oliver, A Dweller in Two Planets, met véritablement en scène ces connaissances, les structure en utilisant le mode narratif de l’enseignement socratique (promenade, découvertes, explication par le Maître, répétition, intrigue personnelle) et il peut se lire avec un peu plus de facilité.

La source la plus probable des mondes merveilleux d’Oliver a dû être Atlantis : The Antediluvian World d’Ignatius Donnelly (1831-1901) publié en 1882 juste avant qu’Oliver entreprenne son propre récit. Donnelly expliquait comment l’Atlantide était le monde perdu du Jardin de l’Eden, de celui des Hespérides, des Champs Élysées, où vivait notamment le petit-fils de Poséïdon. Le monde d’Oliver sera bien celui des Hespérides et des Poseids, et l’un d’entre eux sera Casimir Poséïdon, personnage que l’on retrouvera dans le panthéon bariolé de The Summit Lighthouse.

Un autre livre, Theory of Concentric Spheres, publié en 1826 par John Cleves Symmes (1780-1829), était sans doute connu d’Oliver. Il fut réédité en 1878, et le Congrès vota des crédits pour financer une expédition afin d’aller vérifier l’existence du trou de Symmes dans l’Antarctique qui permettait d’accéder au centre de la terre, laquelle était censée être creuse et formée par plusieurs cercles concentriques ouverts aux pôles (Guillaud 195-6). Oliver n’imagina ces cavités que pour Shasta, mais l’idée était dans l’air.

Il est vraisemblable aussi qu’Oliver ait lu Swedenborg ou ait entendu parler de ses théories sur les correspondances entre les monde céleste et terrestre. La fin de « Seven Shasta Scenes » me semble influencée par ce philosophe qui marqua profondément toute la culture américaine dès avant la Révolution.

Quant au style d’Oliver, il appartient à celui des romans de chevalerie de l’époque victorienne. De même qu’HPB adorait Fenimore Cooper, Oliver devait aimer l’inspirateur de ce dernier, Walter Scott, car il baptise la société secrète qui vit au creux du Mont Shasta « Lothinian Brotherhood », ce qui évoque le Lothian de l’Écossais. Son narrateur citera le poème de Scott « The Lady of the Lake » dans un passage où il donne le nom des auteurs dont il découvre les livres aux Hespérides avec la jolie Phyris : A Thousand Miles up the Nile, par Miss A. B. Edwards (1976), ou les œuvres de Milton, Tennyson, Moore, Shakespeare (333-35). On sent aussi la prosodie d’un Longfellow, tant l’auteur abuse de « Lo », d’inversions, d’interjections, d’exclamations, de périphrases poético sentimentales. Un exemple : « She put her arms about me, and held me long, while our eyes looked into each other’s souls. Then her lips met mine in one ecstatic throb, and---she was gone ! » (fin chapitre vii, 352)

En dépit de toutes ces affèteries, ou peut-être grâce à elles, le récit m’a paru mille fois plus divertissant que ceux de ses futurs imitateurs. De surcroît, A Dweller in Two Planets surgit non seulement du contexte spirituel et technologique de son époque, comme nous l’avons dit, mais il donne à voir la situation sociale de la Californie d’alors. « Seven Shasta Scenes » débute par des remarques très méprisantes envers les immigrants qui s’élèvent à peine au-dessus des bêtes, les Européens et surtout les coolies chinois (252) venus travailler dans les mines, et  il dénonce ici ou là  les méfaits des saloons, tant et si bien que certains passages peuvent se lire comme un manifeste des sociétés de tempérance : ainsi il demande à une pauvresse accoudée au bar : « Would you not rather that sherry was milk ? » (264). Et on le verra bien plus tard épouser cette jeunette qu’il aura sauvée du maudit breuvage.

Les intrigues du Livre Un se déroulent dans l’Atlantide. Le chapitre xviii retrace un voyage des rois sur le continent américain, qui n’est qu’une colonie de Poseid, notamment dans le Grand Canyon et la région de Yellowstone et du Grand Teton, exactement où l’on retrouve aujourd’hui The Summit Lighthouse. L’auteur (historique) du Geological Report of the Exploration of the Yellowstone and Missouri Rivers in 1859-1860 (1869), le professeur Hayden est le guide dans ces zones, et on apprend que s’il les connaît bien c’est parce qu’il est à l’origine un Poseida, un des habitants de ces terres disparues. Le livre d’Oliver fut rédigé quelques années à peine après la création du parc de Yellowstone (1872). Pour donner une idée de la thématique voici le résumé du chapitre XVIII :

Rai Gwauxln tenders Zailm Suzerainty over the land of Suern. He hesitates, as he is yet an undergraduate at the Xioquithlon; but as the Emperor promises him that the Governor whom as Envoy-in-Special of the Rai of Poseid, he (Zailm) had appointed over Suernis should execute the duties of the position until himself should be legally capable of doing so, he accepts the almost imperial honor, and is dismissed to the completion of the pleasure trip interrupted by the death of Rai Ernon. They visit the Umaurean (present American) colonies of Poseid, which are described. The Grand Canon of the Colorado is not merely the gradual product of time and water and weather, but of sudden formation through volcanic action. "The hand of Pluto was the major worker;" 12,000 years ago he saw a sea cover that region, which "fled away into the Gulf of California." Visit to the building on the summit of the greater of the Three Tetons, in Idaho, rediscovered by Professor Hayden while on the same expedition which made known to the modern world the famous Yellowstone region--Professor Hayden once a Poseida, attached to the government body of scientists stationed there. Visit to the copper mines, in the present Lake Superior region. Present of a knife of tempered copper. Incalia, west of the chain now known as the Rocky Mountains. Toward home, East, then South. Forsaking the realms of air for the depths of the sea at the rate of a mile a minute. Reproved by his father over the naim for recklessness.


Plus pertinent pour notre propos, le Livre Deux, « Seven Shasta Scenes », ouvre par cette déclaration : « If there are ‘sermons in stones and books in the running brooks’, then is ‘Tchastel’s’ craggy  pile a noble library in veritas. In its vastness, the grandeur and solemnity of  nature are expressed in mystic numbers carved in the eternal granite. » (242) Un jeune homme s’y promène, un mineur. Les gens ne savent pas que le mont recèle des secrets : 

that tall basalt cliff conceals a doorway. We do not suspect this, nor that a long tunnel stretches away, far into the interior of majestic Shasta. […] at the tunnel’s far end vast apartments, the home of a mystic brotherhood whose occult art hollowed that tunnel and mysterious dwelling : ‘Sach’ the name is. […] See, as I saw, not with the vision of flesh, the walls, polished as by jewelers, though excavated as by giants ; floor carpeted with long, fleecy gray fabric that looked like fur, but was a mineral product ; ledges intersected by the builders, and in their wonderful polish exhibiting veinings of gold, of silver, of green copper ores, and maculations of precious stones. Verily a mystic temple, made afar from the madding crowd, a refuge[…]. Seek and ye shall find[…]. Shasta is a true gardian and silently towers, giving no sign of that within his breast. But there is a key. The one who first conquers self, Shasta will not deny.  (248, les roches seront encore décrites 273= Égypte)


Tout est dit : le secret de la connaissance est en soi. C’est cette parcelle du divin qu’Oliver nommera au chapitre trois (292) le « I AM », termes isolés du I AM THAT I AM, « je suis celui qui est ». Il ne suffit pas de vivre une expérience incroyable dans le temple mystique, il faut comprendre qu’on est soi-même le dépositaire de la Sagesse, la fameuse Sophia dont HPB fait la base de son enseignement de « théo-sophie ». I AM c’est l’ego, le corps de l’esprit, ou l’esprit corps. Seule une minorité d’adeptes a pu développer un niveau élevé, mais seuls Jésus et Bouddha sont parfaitement en symbiose dans l’Esprit du Père (318).

Le personnage qui subit l’initiation dans le livre d’Oliver a plusieurs noms, correspondant chacun à une de ses nombreuses incarnations (on apprendra que chaque humain peut en avoir 40000). Dans le monde atlantide, il est Zailm, un Poseida, puis dans la diégèse du livre deux, Walter Pierson, un citoyen américain, et quand il dicte son message à Oliver, il se fait tibétain au nom très grec de Philos, toutes ces mondes venant d’un même fonds unique, ce que l’on appelle la Sophia Perennis. Quand il parle de son passé, il reprend les données biographiques d’Oliver (251). C’est dans un camp de chercheurs d’or qu’il se lie avec un Chinois, supérieur aux pitoyables coolies, « a real man », nommé Quong, et aussi Tchin. Ce dernier guide notre candidat à l’initiation dans les gorges de Shasta, sans jamais se perdre. Pour éclairer une caverne, il lui suffit de casser un fragment de rocher qui devient torche électrique. Le jeune homme médite longuement sur l’influence de la nature par rapport à celle de la société, et se rend compte qu’il a beaucoup lu, des ouvrages de sciences, ceux de Darwin, de Huxley, mais qu’il ne comprend pas pour autant l’univers (255…). Alors que Quong s’est éloigné, un grizzly se dresse, menaçant. Pierson cherche la fuite, mais Quong arrive et ordonne à l’ours de se coucher, et le « conquered ursine » de s’éloigner ensuite paisiblement (257). On comprend avec Pierson, que le Chinois est plus qu’un simple homme (il était déjà tellement plus qu’un Chinois !). Plus tard, ce sera une panthère qui sera calmée en pleine attaque (270).  On se souviendra de cette scène lorsqu’on verra, au siècle suivant, Godfre Ray King menacé par une panthère sur les pentes du même Mont Shasta.

Le chapitre deux évoque les nombreux voyages que Pierson avait entrepris pour ses affaires commerciales, notamment en Inde, et lorsque Quong lui révèle l’existence de la Lothinian Brotherhood, il peut en déduire que ces Lothins américains ressemblent aux yogi de l’Hindoustan : ils n’étudient pas ce qui est dans les livres, mais ils cherchent en eux-mêmes ce à quoi ils veulent s’affilier (261). Le Christ est invoqué, c’est lui qui donne la voie à suivre, la vérité, la vie. Comme la plupart des nouvelles religions, Oliver n’annule pas le message chrétien ; au contraire il le hisse au sommet de sa révélation, et il démontre le contenu ésotérique de la Bible, ainsi que le fait la Théosophie. Un Adepte de la Fraternité, Mendocus, dira comme HPB : « The Bible is sound occult doctrine so far as the matter in it has escaped the revisers, and worse than the revisers, the Roman Catholic interpolators and twisters of its truth. » (278) HPB, bien davantage qu’Oliver, à ma connaissance, insiste sur l’origine hindoue du christianisme, même si elle fait du Christ un principe de transfiguration mystique de tout individu.

Une des grandes leçons d’Oliver consiste à faire prendre conscience au lecteur de sa propre puissance : « you are born with powers which you can educe so as to become wiser than I. » (261) Dans la cavité magnifique des sphères lumineuses de toutes les couleurs tournent pour former un grand cercle de lumière, une roue, un essieu, la Vis Mortuus et la Vis Viva, ou encore Shiva le destructeur et son contraire, Vishnu et Brahm le créateur. Ces divinités sont présentées comme bouddhistes (283). Un autre guide prend soin du narrateur, Mol Lang, un Pertozian, au visage de Socrates, « the very personification of occult wisdom ». Pierson se transmue en une de ses précédentes incarnations, en Philos the Thibetan (289) qui tout d’un coup est confronté à son corps physique, couché : il comprend la réalité de son corps astral qui subit l’initiation (291). Mol Lang explique la loi du Karma, qui est aussi dans la Bible : « tu récoltes ce que tu sèmes » (309 et 348).

Arrivent ensuite les enseignements sur la réincarnation : chaque individu doit progresser sur chacune des sept planètes, chaque fois 800 fois, ce qui fait (par un calcul des plus étranges !) 49 époques de carnation, une incarnation étant annulée par la désincarnation, soit en tout 40 000 périodes, avant d’atteindre l’état d’homme parfait, le nirvana (311). Ces calculs se retrouveront  presque dans les mêmes termes dans la Scientologie, qui est on le sait en partie issue de la Science fiction, genre littéraire nourri précisément d’œuvres telles que A Dweller of Two Planets. Le mormonisme aussi, avant Oliver, concevait les humains comme vivant sur plusieurs planètes. Oliver n’innove donc pas, mais retranscrit des concepts assez populaires dans certains milieux américains depuis longtemps, et qui trouveront une nouvelle vie grâce à lui et la Théosophie. Pareillement, reprenant de vieilles légendes, le chapitre vi explique la disparition de l’Atlantide par le processus de décadence naturelle. Ce monde avait atteint un degré scientifique et psychique inégalé, mais comme les fruits, une fois mûr, il fut rongé par la pourriture. Les habitants de Poseid qui ne purent pas atteindre le niveau de perfection des adeptes laissèrent leur civilisation s’effondrer. L’Amérique est Poseid réincarnée :


it shall see its scientific people repeat, but on a higher plane, the attainment of Atla. As the centuries pass it shall see the successive enfleshment of those souls which in Atla made that land proud, prouder, proudest. But it shall do more, for America hath developed that soul-element which, when her people were Poseidi, was first faintly traced. So, through repeating, it shall do more—it shall have all Atla’s marvels wedded to the glorious soul foreseen for mankind by Him of Nazareth. It shall flourish so, and then, in the fullness of its time, decay. But that shall not be for four and a half centurial decades. (412)


« Seven Shasta Scenes » se termine une page plus loin par la transfiguration des éléments féminins et masculins dans la perfection du mariage fait aux cieux, expression qui me semble reprendre les théories de Swedenborg sur le mariage conjugal céleste. Le troisième livre, de 9 pages, est une « note de l’auteur », ce qui n’est guère clair tant l’auteur a vécu d’incarnations. Les toutes dernières lignes de A Dweller on Two Planets sont une ode à l’avenir de l’Amérique et à la démocratie qui élèvera tous du bas en haut :


All shall be converted from lower into higher ». Le poème déclare : «[…] The glory of a race grown great and free[…]/ A Shining shore is by the Future’s sea,/Whereon each man shall stand among his peers/As equal ; and to none shall bend the knee.[…] It is the choral song of liberty/It is the anthem of the coming Race.  (fin de tout le livre, 423)


Le livre se clôt sur la signature de Phylos en caractères atlantides.

Le nationalisme de cet ouvrage, que l’on pourrait imaginer disparu aujourd’hui tant il est typique d’une mode qui s’est chez nous effondrée, va au contraire prendre de l’ampleur dans les ouvrages suivants inspirés par le Mont Shasta car si Oliver a eu des admirateurs, il n’a pas fait de disciples au sens religieux du terme. On l’a dit, il est mort à l’âge de 33 ans, ce qui aurait pu être un signe suivi d’effet, mais il n’avait pas encore publié son opus. Ce seront ses imitateurs qui eux auront l’idée de fonder des chapelles. Ils réécriront alors leur propre version de A Dweller, la mettant au goût du jour. Quand on a comme moi commencé par leurs textes et qu’on découvre Oliver, on mesure l’imposture de ces prophètes qui se sont bien gardés de rendre à Oliver son dû en lui dérobant son panthéon et en vulgarisant son enseignement. Les textes édulcorés ainsi produits sont nettement moins intéressants. Ainsi la deuxième préface de Godfre se clôt par une invocation en forme de poème qui reprend le message de la fin de A Dweller : « America ! Thou shalt arise the Nation of Love and Gratitude to Life that opens the Door to the rest of the world into Freedom and Peace Eternal. » Les majuscules sont partout mais il manque le souffle épique et poétique d’Oliver, on tombe dans le plat discours « peace and love » qui sera caractéristique d’une certaine frange du New Age.


3. Unveiled Mysteries,
par Godfre Ray King

Godfre Ray King est le pseudonyme de Guy Ballard (1878-1939). Il raconta comment en août, septembre et octobre1930 alors qu’il se promenait sur le Mont Shasta lors d’une visite pour affaire dans une petite ville au pied (on apprendra qu’il a des concessions minières lui aussi), il rencontra un jeune homme qui lui tendit une coupe d’un breuvage exquis et qu’ensemble ils partirent découvrir les secrets de la montagne et de sa fraternité. Il rédigea ses aventures dans Unveiled Mysteries, dont le titre reprend celui de HPB, Isis Unveiled, mais il ne le publia qu’en 1934 après avoir fondé en 1832 le groupe « I AM », soutenu par les Presses Saint Germain créées en 1931. Parut en 1935 une suite encore plus romancée, The Magic Presence. Il lança un magazine, The Voice of the I AM. Les dictées reçues des Maîtres, essentiellement son protecteur Saint Germain et Jésus, furent compilées comme textes de travail pour les fidèles. Ses ouvrages passeront pour des Révélations, au sens prophétique, qui serviront d’Écritures pour des milliers de gens. Les époux Ballard en effet surent mettre en scène leur enseignement de ville en ville et on pense qu’ils touchèrent jusqu’à 3 millions de personnes (Ahlstrom 2:556). Ils organisaient des séances de guérison proches de celles de la Science Chrétienne, à partir d’affirmations positives, techniques enseignées chez eux par Saint Germain sur les pouvoirs inhérents à tout homme du fait de son union à l’I AM. Melton dénombrait encore plus de 300 groupes I AM en 1988 (Melton Almanac 13). Ils sont une des grandes composantes du New Age actuel.

Unveiled Mysteries reprend la structure initiatique de A Dweller on Two Planets, dans un style moins victorien sans être pour autant moins grandiloquent. Godfre Ray King explique qu’il a voulu écrire pour les masses et les Presses de Saint Germain obéissent à l’injonction du Maître Élevé qui les parraine : « the material in this Book is written in a plain, direct manner with no attempt to conform to artificial literary standards or outer world authority. » (Editor’s note, vi). La collection se signale pourtant par l’abondance de majuscules au moindre terme quelque peu important et la répétition verbeuse de tous ces mots.

L’ouvrage s’ouvre en pelures d’oignon de 21 pages : une longue dédicace, deux « tributes », deux préfaces, et enfin une présentation de la « Saint Germain Series » par Lotus Ray King. Le contrat de lecture est ainsi asséné : ce que vous allez lire est authentique, plusieurs autorités vous le certifient, peu importe que tous ces avant-propos soient de Ballard lui-même.

Il est annoncé que le Livre fut rédigé : « in the embrace of the majestic, towering presence of Mount Shasta, whose apex is robed forever in that pure, glistening white, the symbol of the ‘Light of Eternity’. » (xiii). Le chapitre un, « Meeting the Master » s’ouvre par ces lignes : « Mount Shasta stood out boldly against the western sky, surrounded at its base by a growth of pine and fir trees that made it look like a jewel of diamond-shining whiteness held in a filigree setting of green. »

Godfre évoque ensuite la rumeur sur la Fraternité et son amour instinctif pour Shasta : « I fell in love with Shasta and each morning, almost involuntarily, saluted the Spirit of the Mountain and the Members of the Order. » C’est alors qu’il va rencontrer Saint Germain qu’il substitue aux Quong et Mol Lang d’Oliver. Ce Maître Élevé est une nouvelle incarnation du Comte de Saint Germain, alchimiste du 18e siècle, célèbre dans le panthéon ésotérique car il avait vécu une vie haute en couleurs dans différentes cours d’Europe, notamment celle de Louis XV. On lui prêtait la fondation de la Franc-Maçonnerie, l’initiation de Cagliostro, et des connaissances surhumaines. Dans les années 1920 deux livres l’avaient sorti du cercueil, et Ballard, certainement au courant, en fit le grand Maître qui cherchait désespérément un Messager digne de son enseignement depuis des siècles. Saint Germain désigna Ballard, son épouse Edna et leur fils Donald comme seuls messagers accrédités. Godfre explique qu’il a pour mission de réaliser sur terre le Seventh Golden Age, le I AM permanent de la perfection.

Saint Germain a donc rejoint en Amérique la fraternité de Mont Shasta, laquelle appartient à la Grande Fraternité Blanche, ou Great White Lodge. Cette hiérarchie spirituelle appartient à l’ésotérisme occidental mais ce furent les publications de HPB (notamment The Secret Doctrine [1]), puis celles de Ballard justement et des Prophet qui la rendront populaire, sans doute avec l’aide du livre d’Oliver qui appelait ces entités l’ordre des Lothins [2]. Alors que HPB est très difficile à lire, le mérite de Ballard consiste à avoir simplifié le message afin qu’il soit en effet accessible sous sa forme romancée.

Cette Grande Fraternité est constituée d’individus qui se sont hissés au niveau de Dieu. Devant l’étendue des pouvoirs de Saint Germain, Godfre s’exclame : « Truly the Great Ascended Masters are Gods ». La liste des Maîtres inclut absolument tous les dieux de toutes les cosmologies connues ou inventées par Oliver et ses suiveurs, mais elle attend d’accueillir tout individu qui aura su réaliser son potentiel : 

The Ascended Master is an individual who by Self-Conscious effort has generated enough Love and Power within himself to snap the chains of all human limitation, and so he stands free and worthy to be trusted with the use of forces beyond those of human experience. He feels himself the oneness of Omnipresent God-Life. Hence all forces and things obey his command because he is a Self-Conscious Being of free will, controlling all the manipulation of the Light within Himself. (137)

La majuscule à la dernière occurrence de « Himself » alors qu’elle n’y était pas à la première démontre l’évolution potentielle de l’individu, puisque traditionnellement on réserve la majuscule au « Himself » de Jésus et de Dieu le Père. Les enseignements de I AM appartiennent à ce courant très américain qui envisage la divinisation de l’homme hic et nunc, courant que l’on voit apparaître avec Joseph Smith dès les années 1830 et qui sera relayé par la New Thought et toute la pensée positive. L’homme peut s’élever au-dessus de sa condition de mortel, non pas après la mort, ce que prêche le christianisme traditionnel, mais dès l’instant présent. En outre, cet être ne se contentera pas d’être auprès de Dieu, il sera un dieu lui-même. L’originalité de Ballard, dans cette riche tradition, aura été, selon les termes de Gordon Melton, de condenser en un seul enseignement les doctrines qui circulaient dans diverses communautés : 1. reconnaissance de la présence individualisée de Dieu dans chaque personne, la célèbre « Mighty I AM Presence » ou Dieu en action ; 2. Le recours à la flamme violette de l’amour divin ; 3. L’utilisation par les Maîtres Élevés du nom créatif de Dieu, I AM (Lewis & Melton 9). [3]

Bien qu’il soit précisé dans la prolifique littérature Saint Germain que le blanc de « la Grande Fraternité Blanche » ne se réfère pas à la couleur de la peau mais simplement à la lumière divine qui irradie les initiés, l’expression peut être perçue comme ambiguë en raison du contexte historique dans lequel elle fut réappropriée par Ballard. En effet, à la même époque, un autre occultiste, William Dudley Pelley (1885-1965) dirigeait la Legion of Silver Shirts qu’il avait fondée en 1933. Il se déclarait medium recevant les enseignements des mahatmas, et il affirma qu’Hitler était le chef que ces entités célestes avaient désigné pour guider le monde. Quand il dut faire face à divers problèmes juridiques, les Ballard récupérèrent une grande partie des Chemises d’argent. Ceci n’implique certes pas que Ballard partageait l’admiration de Pelley pour les Nazis, mais on sait que son message s’adressait à une élite qu’il voulait  « à 100% américaine » et il dénonçait tout projet politique susceptible de révolutionner le statu quo (Alhstrom, 418-19, n 7. 556-7).

Il est à cet égard symptomatique que les hautes personnalités des mondes disparus visités par Godfre avec Saint Germain dans Unveiled Mysteries soient toutes blanches (sauf erreur de ma part). Ainsi la fille du roi au Sahara, « a vision of loveliness », a des cheveux dorés (49). Puis dans le chapitre « Inca Memories » on attend très longtemps avant qu’une description physique des personnages soit donnée, car comme dans toutes les pages du roman, ce sont les pierreries, les soieries, et ici les plumes merveilleuses qui fascinent le visiteur. On finit toutefois par apprendre que les trois enfants de l’Inca, c’est-à-dire de l’empereur, sont physiquement parfaits car ils ont obéi aux injonctions de Saint Germain qui venait tous les jours les instruire : « All had most beautiful golden hair and violet-blue eyes. » (158) Ils sont bien entendu très grands. En revanche, la masse des Incas a la peau sombre et les cheveux noirs comme les Indiens d’Amérique actuels. Godfre explique que c’est parce que le peuple n’avait pas atteint le niveau des âmes à la connaissance avancée, contrairement aux peuples des autres civilisations brillantes de l’Égypte, de l’Atlantide et du Sahara. En revanche, au chapitre suivant qui se déroule dans les cités enfouies de l’Amazone, non seulement la famille du roi ressemble à celle du souverain Inca, mais toute la race. La description de ces êtres de lumière blanche est reprise mot à mot. La race à la cour de l’empereur Casimir Poseïdon (du royaume des Poseidi dont parlait Oliver) émerveille le narrateur par sa grande taille, son teint blanc et rose :


I held my breath astonished ; for I saw an entire race of golden-haired people with beautiful pink and white complexions. The men stood fully six feet two to six feet four inches in height, and the women averaged about five feet ten. Their eyes were a most beautiful violet-blue, very clear and brilliant, expressing great, calm Intelligence. (Unveiled 175-6)


Casimir Poseidon est magnifique lui aussi, très grand, élancé tel une flèche, et ses cheveux d’or tombent jusqu’aux épaules. La race supérieure des mondes parfaits disparus ressemblait bien à celle de Ballard, l’Américain blanc. Il faut cependant sans doute aussi remonter à l’époque antérieure : Ballard reprenait le projet de HPB qui était de permettre à ses lecteurs d’accéder à la connaissance que possédaient les Aryens au sens d’Hindous : « A large quantity of material has already been prepared, dealing with the history of occultism as contained in the lives of the great Adepts of the Aryan Race, and showing the bearing of occult philosophy upon the conduct of life, as it is and as it ought to be. » (Secret Doctrine, Préface Vol. 1, Page vii). Néanmoins, on ne peut ignorer que même si en 1888 cela n’avait pas la connotation d’après 1933, les théories sur la supériorité de cette race sur les autres étaient nombreuses dès le 19e siècle [4].

Dans les débuts de Unveiled Mysteries, exactement comme dans A Dweller, Saint Germain dissocie le corps astral du corps physique de son disciple qui reposera sur la montagne pendant les pérégrinations initiatiques. Pour rejoindre les mondes éloignés, elles s’effectuent toutes en volant par-dessus les terres et les océans, la géographie du continent étant régulièrement mentionnée. La quasi-totalité du récit rapporte l’enseignement oral de Saint Germain, très prolixe. La description des merveilles qu’il donne à voir à son élève en illustration des beautés divines allège le discours doctrinal assez répétitif, de même que quelques récits d’aventure toujours allégoriques certes mais dans un mode plus léger, comme par exemple à la fin du chapitre un la rencontre d’un fauve. Alors qu’il se rend au rendez-vous fixé par le Maître, une panthère se précipite sur lui, mais il prend conscience de la Présence Puissante de Dieu et du fait que l’animal aussi fait partie de Dieu. Il conquiert la peur. Le fauve devint alors l’animal protecteur du postulant. Lorsque celui-ci aura fait le plein d’énergie cosmique, la panthère n’aura plus besoin d’assurer sa fonction et mourra.

Une des particularités de l’ouvrage de Ballard consiste à étendre à tout le continent américain, nord et sud, le territoire que ses héros sacralisent par leur vols socratiques. Non seulement le corps astral de Godfre lui permet de contempler ses incarnations antérieures en France ou dans ces lieux connus pour leur sapience supérieure tels que Karnak et Louxor (22), mais il se téléporte dans les grands centres de l’Amérique latine. Les deux voyageurs survolent Los Angeles, le Mexique, les Andes, pour s’arrêter chez les Incas, au Pérou, en Amazonie. Quant au territoire strictement étatsunien, un chapitre est consacré aux mystères de Yellowstone, un à la vallée secrète près de Tucson dans l’Arizona, et un autre décrit la descente de Vénus sur le Grand Teton (sans qu’on puisse toutefois échafauder une explication psychanalytique sur cette aventure). Ces zones sont élevées au niveau du Tibet, de la Chine, du Sahara, en tant que grands centres mystiques. On voit dans le dernier chapitre que le Royal Teton est creux (244). Godfre y retrouve sa famille et de merveilleux instruments de musique, ainsi que douze invités arrivés de Vénus. C’est cette nouvelle Fraternité qui clôt le message du Maître. À la fin des festivités, les douze se rassemblent sur un cercle au sol, puis toute la montagne tremble de l’énergie qu’ils dégagent afin s’envoler vers leur astre. Attention, regardons bien le dessin qu’ils forment alors :

The entire mountain trembled with the Mighty God Power which they drew, and the Light thus focused took the form of an enormous eagle, its body violet and the head and feet of gold. The entire room became filled with a Blazing White Light forming one end of a Great Pathway of Luminous Essence on which the Twelve Radiant Beings returned to their home on Venus.  (258)


L’emblème de l’Amérique ainsi tracé, il n’est pas surprenant que l’enseignement du Maître s’achève quelques pages plus loin sur « America, God Bless you, and clothe you now with the Everlasting Shadowless Light. » Le livre se termine sur le modèle de A Dweller par deux poèmes signés de Chanera, l’un à « Glorious Mount Shasta », l’autre à sa montagne jumelle et équilibre magnétique, le « Mighty Royal Teton ». Le premier s’exclame :

Shasta ! O Mount Shasta !/ What Secrets do you hide,/ What dwells within that Heart of Yours,/What Light does There abide ?/ Beneath your snowy peaks so bright/What Blessings do you hold,/What knowledge do you guard so well/From those who seek too bold ? (Deux premières strophes).


4. The Summit Lighthouse

À la mort de Ballard, qui choqua profondément ses disciples qui pensaient qu’il ne pouvait mourir physiquement, divers problèmes surgirent, et plusieurs continuateurs du message, prétendant tous être les authentiques et uniques messagers des Maîtres Élevés, se disputèrent l’héritage.  Ce sera Mark L. Prophet qui en ressortira vainqueur et fondera au début des années 60 The Summit Lighthouse. Son épouse, Elizabeth apprendra sous sa direction à recevoir comme lui les dictées des Maîtres. Le message de Ballard sera repris presque textuellement et Mount Shasta à nouveau accueillera les chelas en quête d’initiation.

Ce n’est pas un hasard si après avoir fondé son groupe en Virginie, Mark Prophet partit l’installer dans les Rocheuses à Colorado Springs, puis sa veuve choisit les monts de Malibu et les hauteurs de Santa Barbara (où j’ai longuement fréquenté le groupe dans les années 70), et enfin le Montana. Le nom du groupe implique une position en hauteur, « Summit Lighthouse ». Le groupe prit un deuxième nom — Church Universal and Triumphant (CUT)—, mais revient de plus en plus au premier. En 1975 la communauté organisa un grand conclave Mount Shasta, à ses pieds. On y fit le point sur les apports bénéfiques des Maîtres Elevés, en particulier ceux de Saint Germain qui aurait été tour à tour tous les héros de la nation. Il aurait provoqué la naissance de la nation et sa progression vers la perfection en s’incarnant tour à tour en Washington, Lincoln etc. Un livre en ressortit : The Great White Brotherhood in the Culture, History and Religion of America.

Elizabeth Clare Prophet cherchait à s’installer au plus près des retraites de ces Maîtres Élevés. Rien n’étant à vendre près de Shasta, lorsque le magnat Forbes mit en vente son gigantesque ranch situé à la sortie nord-ouest de Yellowstone, Elizabeth Clare Prophet n’hésita pas. Elle baptisa Royal Teton Ranch son nouveau Camelot (nom de l’installation précédente à Malibu), y installa sa communauté, sa maison, les écoles et invita les chelas à la rejoindre. Quelques centaines de gens y aménagèrent, certains achetant des terres du vaste ranch. En 1990, il faisait 25000 acres entre les gorges de la Yellowstone River et les sommets. Il est actuellement un peu moins étendu.

Comme je m’étonnais (lors d’une visite en 2005) de son appellation puisque les Teton sont de l’autre côté de Yellowstone, environ à 80 km, on me répondit que c’était Saint Germain qui avait dicté ce nom. On se souvient qu’à la fin de son récit Godfre Ray King avait déjà reçu des révélations sur l’importance du Grand Teton : quand il visitait l’empire inca, le Maître avait ordonné que les archives y soient transportées (Unveiled Mysteries 134). Plus tard, Saint Germain décréta par l’intermédiaire de sa messagère Elizabeth Clare Prophet que tous ses compagnons de la Fraternité avaient déménagé justement l’année du transfert de CUT de la Californie au Montana. Dans le livre The Masters and their Retreats, à l’entrée « Brotherhood of Mount Shasta », on lit :

Mount Shasta was once the crown chakra of Lemuria. The Brotherhood of Mount Shasta withdrew their focus from the mountain in 1988. Sanat Kumara announced the ‘withdrawal of the Brotherhood[…]. This entire Brotherhood, therefore, does withdraw and does transfer their forcefield and focus both into the Grand Teton and into another area of the northern Rockies. (49)


Cette autre zone est justement celle où s’est installée CUT/The Summit Lighthouse, à l’adresse postale Corwin Springs. Le livre précise qu’il s’agit d’une retraite qui a pu rester ancrée dans le monde physique lors de la disparition de l’Atlantide alors que le cataclysme transporta les autres retraites des Maîtres dans les strates éthérées : « It has physical chambers secured within the mountain of the Grand Teton in the Teton range, as well as etheric components beyond the physical plane. Hence it is called a physical/etheric retreat. » (414)

Une des vidéos promotionnelles de CUT utilise l’alpinisme comme métaphore de la conquête de la connaissance de l’I AM au fond de soi, par l’ascension à l’imitation de celle du Christ, mais l’alpiniste en tenue violette, comme la flamme du I AM, grimpe les Teton, et non pas le volcan californien. Exit Mount Shasta.


CONCLUSION

Si ce mont n’a plus l’heur de plaire aux Maîtres de CUT, il n’en demeure pas moins un des plus forts power spots de nombreuses communautés New Age qui s’installent sur ses pentes, soit en permanence soit pour des festivals. L’héritage d’Oliver se porte bien car son livre et sa descendance sont parvenus à donner autant d’importance mystique aux montagnes américaines qu’aux monts de l’Himalaya ou de Grèce, ou qu’aux autres points telluriques de la planète, et cela grâce à des ouvrages qui ne doivent pas être lus comme étant figuratifs, métaphoriques, mais qui doivent être pris pour des autobiographies véridiques. Ce dernier point est très important, car en effet, ces histoires rocambolesques que nous prenons pour des allégories —ce qu’elles sont bien entendu— ne sont pas perçues comme telles, mais bien comme de Saintes Écritures infaillibles et ce par plusieurs milliers d’adeptes. Nous sommes à des années-lumière de la poésie métaphysique et de son recours à la métaphore de la montagne.

Il y a bien chez les adeptes de I AM ou de CUT la « suspension of disbelief », ils ne mettent pas en doute les histoires surnaturelles de ces ouvrages. Ils ne prennent pas non plus la montagne comme le reflet de la transcendance inaccessible. Pour eux, au contraire, par les hiérophanies des Maîtres Élevés, cette transcendance se fait constamment immanente, et chaque individu peut, si son âme est pure, accéder au grade de Maître Élevé et se délecter dans les salons de l’Atlantide et sur les pentes de Shasta.

Il est bien évident qu’à m’avoir lue, vous pensez que seuls les Américains peuvent croire à de telles balivernes, et ne jamais métaphoriser les récits initiatiques du canon de Mont Shasta.

Et pourtant !!! Le seul groupe du courant atlantide qui ait véritablement mis en pratique, au sens fort du terme, les enseignements d’Oliver et de Ballard, c’est une communauté italienne, de Turin. Elle s’est baptisé Damanhur, du nom du lieu qui vit naître le dieu Horus dans le delta du Nils, et d’Égypte le groupe s’est retrouvé dans l’Atlantide. Les disciples ont décidé de réaliser ce que d’autres n’avaient fait qu’imaginer : faire surgir de la matière les grandes salles décrites dans les livres que nous avons parcourus, et les creuser, non pas à Mount Shasta, ou dans le Grand Teton, mais chez nous, au cœur des Alpes. J’avoue n’avoir jamais rien vu de tel, ni mes collègues spécialistes des nouvelles religions. La communauté est à une quarantaine de kms de Turin. On se gare sur un grand parking et un minibus vous emmène dans la montagne jusqu’au domaine sacré. On pénètre d’abord dans un temple égyptien, aux murs recouverts de fresques, ce qui à l’origine permettait de tromper les curieux ou la police qui pensait avoir affaire à des égyptomaniaques. Puis, comme dans A Dweller on Two Planets, et dans les aventures de Tintin Les cigares du Pharaon, votre guide appuie sur l’œil d’une des figures égyptiennes et vous demande de reculer. Une énorme porte s’ouvre alors. Vous pénétrez dans de très longs couloirs creusés au pic dans le roc. Tout a été fait à la main, et on vous explique, car tout de même on est en Europe, que c’était pour accélérer le dégrossissage de l’être interne divin. Au bout s’ouvrent des salles, de différentes tailles, les unes au-dessus des autres afin de constituer un gigantesque triangle dans la masse de la montagne. Elles sont de forme pyramidale, et elles sont décorées avec tout le génie italien de la mosaïque, la verrerie, les marbres veinés et colorés et les pierres précieuses. On y respire les effluves enchanteurs de l’Atlantide, on y entend la musique de l’Atlantide, on y danse les danses de l’Atlantide. Dans une salle spéciale on fait des expériences avec des électrodes sur l’aura des disciples volontaires…

Une fois revenus dans le monde profane, vous pouvez acheter des tissus féeriques en cachemire et autres soieries qui sont tissés par les chelas et sont vendus aux plus grands couturiers de Milan et de Paris. On vous propose aussi des pastas aux couleurs inouïes, bleues, vertes, jaunes, oranges, fabriquées spécialement pour Harrod’s et Fauchon. La Montagne Magique, recelant authentiquement des secrets et des beautés indescriptibles dans son sein et sur ses pentes n’est pas en Amérique, elle est dans notre vieille Europe. Est-ce à dire que Mount Shasta a du souci à se faire ?


RÉFÉRENCES

Sources premières :

Phylos the Thibetan, alias Frederick S. Oliver. A Dweller on Two Planets, or the Dividing of the Way. Los Angeles : Baumgardt Publishing Co, 1905. Édition utilisée : celle de <Sacred-texts.com> tirée de celle-ci : Los Angeles : Poseid Publishing Co., 1920.

Phylos the Thibetan [ES. Oliver, pseud.]. 1991 [1899]. A Dweller on Two Planets or, The Dividing of the Way. Blauvelt, N.Y.: Spiritual Literature Library, Garber Communications.

Godfre Ray King, alias Guy Ballard.  Unveiled Mysteries. Schaumburg, Illinois: Saint Germain Press, 1934.

----The Magic Presence. Schaumburg, Illinois: Saint Germain Press,1935.

Elizabeth Clare Prophet. The Great White Brotherhood in the Culture, History and Religion of America. Los Angeles: Summit University Press, 1978.

Mark L. Prophet and Elizabeth Clare Prophet. Compiled and edited by Annice Booth. The Masters and their Retreats. Corwin Springs, Montana: Summit University Press, 2003.

Autres études consultées

Ahlstrom, Sydney E. A Religious History of the American People. 2 vol. Garden City, NY: Doubleday, Image Books, 1975 (Yale UP, 1972).

Blavatsky, Helena Petrovna. Isis Unveiled. 2 vol. New York : J. W. Bouton, 1877.

-----The Secret Doctrine. 2 vol. London : Theosophical Publishing Co., 1888.

Guillaud, Lauric. Histoire secrète de l’Amérique. Paris : Philippe Lebaud-Éditions du Félin, 1997.

Introvigne, Massimo. Le New Age des origines à nos jours : courants, mouvements, personnalités. Paris : Éditions Dervy, 2005.

Lewis, James and J Gordon Melton, ed. Church Universal and Triumphant in Scholarly Perspective. Stanford, California : Center for Academic Publication, 1994.

Melton, Gordon. New Age Almanac. Detroit : Visible Ink Press, 1991.

Mount Shasta Annotated Bibliography http://shasta.siskiyous.edu/ (consulté 2007)

SPIRITUAL PILGRIMS AT MOUNT SHASTA, CALIFORNIA[sup *].

Authors : Huntsinger, Lynn ; Fernández-Giménez, María ; Govinda, Lama Anagarika

Source: Geographical Review; Oct2000, Vol. 90 Issue 4, p536, 23p, 4 charts, 1 map, 3b.

Autres textes importants sur Shasta

Un livre de 1980 par Van Valer, Nola C.  My Meeting with the Masters on Mount Shasta.  Red Bluff, Calif.: The Radiant School, 1982. Reprinted 1994 by Seekers and Servers, Mt. Shasta Calif. with additional chapter (xxi) entitled 'Lessons for Introspections' by Phylos. Raconte comment en 1930 elle est venu à Shasta et son mari aussi et comment il a rencontré Mol Long à McCloud. Le sage lui offrit alors une coupe de soupe claire d’un goût inouï qui lui transmit des vibrations. (Ce breuvage annonce celui que Ballard dégustera grâce à Saint Germain à peu près à la même époque. Elle reprend surtout tout le texte d’Oliver)

En 1940 Vera Atlantica alias de Mary Jesse publie Revelation of Mt. Shasta pour expliquer comment après s’être formée au voyage astral dans l’Himalaya elle a visité Shasta où elle a rencontré le Maître qu’elle avait appelé par télépathie.

En 1942 Norman R. Westfall publia sous le pseudonyme de Mah-Atman-Amsumata le livre Lord Maitreya or the New Golden Age (Los Angeles : Ansumata publishin co). Cet auteur raconte comment les Ballard le négligèrent et il affirma être lui aussi en contact avec Saint Germain et les Maîtres Élevés rencontrés sur Shasta en 1940 ou 41. Comme le livre d’Oliver, son récit parle de l’Atlantide, de la Lémurie, de Krishna, d’autres divinités hindoues, de nains et d’anges débarquant de Lémurie. Il affirma aussi avoir rencontré à Shasta City Marie la mère de Jésus, elle-même un Maître Élevé.  Il parle du mont, toujours présent dans le texte, en ces termes : "Mt. Shasta, 'The Mountain of God' in America, is indeed the greatest focus of Light in the Western World at this time and will remain until the Great Work planned by the Great White Lodge is completed here for the in-coming and establishing of the New Golden Age" (p. 153). [MS492]. http://www.siskiyous.edu/shasta/bib/B17.htm



[1] Ainsi il y est écrit: STANZA IV: LEARN WHAT WE, WHO DESCEND FROM THE PRIMORDIAL SEVEN, WE, WHO ARE BORN FROM THE PRIMORDIAL FLAME, HAVE LEARNED FROM OUR FATHERS.(Secret doctrine, Vol. 1, Page 88) 

[2] Toutefois, il ne suffit pas d’être théosophe ou sympathisant pour être en communication privée avec les Maîtres. Ainsi, le co-fondateur de la Théosophie, Olcott, lui aussi reçut des messages mais de moindre importance que ceux que captait HPB. Après la mort de celle-ci, seul William Q. Judge, un des autres fondateurs de la Théosophie, prétendra être en contact avec eux, mais cela sera mis en doute par les disciples notamment en Europe. Les responsables suivants n’entrèrent pas en contact mediumnique avec la Fraternité jusqu’à ce que Alice A. Bailey le prétende à nouveau dans les années 1920. Son Maître fétiche était Djwal Khul et elle publie ses messages en 1920, Elizabeth Clare Prophet du Summit Lighthouse publiera aussi les dictées de ce Tibétain. Alice Bailey fut renvoyée de la Théosophie et monta sa propre branche, l’Arcane School.

[3] Ce n’est pas lui qui inventa le terme I AM pour nommer son groupe. Ce fut une femme, Emma Curtis Hopkins, qui développa le concept à la fin du 19e siècle. Elle fonda la New Thought, et elle fréquenta la Science Chrétienne. Mary Baker Eddy enseignait comme on le sait que la maladie  n’existe pas et qu’il suffit de prononcer des affirmations positives pour aller mieux. Mary Curtis Hopkins transforma les affirmations en « décrets » (decrees) et elle reprit la formule I AM pour leur donner force, puisqu’il s’agit soit de la déclaration de l’Exode (3 :14) « I AM THAT I AM », soit, et ce que la fondatrice préférait, de la parole de Jésus dans Jean (10) : I Am one with thee ». Toutefois, on trouve aussi l’expression répétée chez Oliver. La transmission du message d’Emma Curtis Hopkins passera par Annie Rix Militz, qui peu à l’aise dans le concept de réincarnation qui faisait flores à l’époque, insistera sur celui de l’ascension de l’âme, encore une évolution que les Prophet développeront. C’est quelque temps après la mort d’Annie Rix Militz que Ballard entra en scène par le récit de sa promenade sur Mount Shasta. (Melton in Lewis & Melton 4-9).

[4] Pour le rapport de la Théosophie et des suiveurs (notamment Steiner) à la race « blanche », voir les articles dans le numéro de Nova Religio, Vol. 11:3 (February 2008) : Peter Staudenmaier. « Race and Redemption : Ethnic and Racial Evolution in Rudolf Steiner’s Anthroposophy », 4-36 ; James A. Santucci. The notion of Race in Theosophy, 37-63.


Retour au texte de l'auteure: Bernadette Rigal-Cellard, Bordeaux 3. Dernière mise à jour de cette page le dimanche 9 août 2009 16:40
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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