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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

La mission colonisatrice des mormons de l’Empire de Déséret
au territoire symbolique de la Nouvelle Sion
(2005)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Bernadette Rigal-Cellard, “« ET VOUS FEREZ FLEURIR LE GRAND DESERT DE SEL, ET REGNEREZ SUR LA VALLEE SANS OMBRE ! » La mission colonisatrice des mormons de l’Empire de Déséret au territoire symbolique de la Nouvelle Sion.” Un chapitre publié dans l’ouvrage sous la direction de Bernadette Rigal-Cellard, Missions extrêmes en Amérique du Nord: des Jésuites à Raël, pp. 221-256. Bordeaux: Pleine Page, Éditeur, 2005.

Introduction

Le mormonisme est un concentré d’Amérique. Il a façonné une culture de pionniers qui a excellé dans la colonisation des terres vierges, et cela est particulièrement évident dans l’Utah, État unique par la géographie et le peuplement. Peu d’expériences religieuses ont été autant liées au concept de territoire—au sens d’espace géographique non peuplé (les Indiens comptant pour quantité négligeable) et désertique, au sens propre du terme—à coloniser, c’est-à-dire à rendre fertile, à peupler et à gouverner politiquement [1]. On peut considérer que leur expansion évangélisatrice de par le monde relève du même esprit, mais cela est moins original puisque la plupart des religions connaissent cette étape.

Sur les trente dernières années, nous avons pu mesurer personnellement les transformations du Bassin du Grand Lac Salé et de sa capitale fondée par la ferveur théocratique et centre mondial de plus de dix millions de saints des derniers jours, ou mormons [2]. La tenue en son sein des Jeux Olympiques d’hiver 2002 a couronné son évolution sur cent cinquante ans, du séparatisme spatial le plus absolu à l’intégration dans la nation et le monde. Ce faisant, la cité, qui, jusqu’au début des années quatre-vingt, frappait le visiteur par sa topographie sacrée dominée par l’architecture étrange et inquiétante du temple, est devenue une ville américaine quasi ordinaire, le temple n’étant plus repérable depuis les abords de l’agglomération [3]. Comme la cathédrale St Patrick’s à New York, il est dominé par des immeubles de bureaux (certes beaucoup moins hauts que les gratte-ciel de Manhattan) et la ligne d’horizon n’est reconnaissable que par les montagnes qui bordent la ville au nord et à l’est. Ces immeubles sont pour la plupart construits par des mormons eux-mêmes, là où le prix de l’immobilier est le plus fort, autour de Temple Square précisément. Ils n’ont pas craint de désacraliser ce que leur communauté tient pour la Cité de Dieu, et ont sacrifié au dieu Mammon. C’est de notre indignation de non mormone attachée à la spécificité de Salt Lake qu’est née la présente étude. 

Nous nous proposons ici d’évoquer l’épopée territoriale des mormons au service de leur mission agraire et urbanistique. Elle démarre en 1830 dans l’État de New York, et va se poursuivre dans leur Eden de l’Ouest, en Utah. L’historique du trek et de la mise en culture du Bassin du Grand Lac Salé étant consigné dans de nombreux ouvrages, nous nous attacherons à des aspects moins connus : la symbolique de la geste, l’appropriation des terres, la fondation de la théo-démocratie de Déséret, et l’urbanisme spécifique de la nouvelle Sion planifié pour favoriser l’accès au sacré et préparer la fin des temps. Enfin, nous verrons comment, maintenant que son temple est dominé par des immeubles profanes, l’Église de Salt Lake mène des luttes juridiques conjuguées à de surprenantes réalisations architecturales afin d’affirmer sa prééminence sur la cité et de réinventer un espace sacré à sa mesure [4].


[1] L’expérience des puritains en Nouvelle-Angleterre pourrait être comparée à celle des mormons, mais leurs terres ne ressemblaient en rien à celle des déserts de l’Ouest.

[2] Les autorités de l’Église déconseillent l’utilisation du terme mormon. Cependant, si autrefois il était péjoratif, il est maintenant utilisé sans connotation négative et par commodité. La seule appellation officielle est « saint des derniers jours », ou « membre de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours ».

[3] La population de la ville, Salt Lake City Metro, est de 170.000 habitants ; celle de l’agglomération de Salt Lake : 830.000 habitants et la zone nord-sud entre les montagnes à l’est et à l’ouest, le Wasatch Front : 1,5 million d’habitants.

[4] Nous remercions ici Mark Tuttle, directeur du service des relations publiques de l’Église, pour le temps qu’il nous a consacré, à la fois pour nous faire visiter le Conference Center et pour nous transmettre des documents. Nous avons effectué le reste de notre recherche à la bibliothèque Marriott de l’Université de l’Utah, et au CESNUR (Centre d’Études sur les nouvelles religions) de Turin qui possède le fonds sur le mormonisme le plus important en dehors de l’Utah, fondé et dirigé par Massimo Introvigne que nous remercions, ainsi que Mike Homer, avocat et historien à Salt Lake City, et Martha Bradley, professeur d’architecture à l’Université de l’Utah, pour leur aide amicale.

 


Retour au texte de l'auteure: Bernadette Rigal-Cellard, Bordeaux 3. Dernière mise à jour de cette page le mardi 27 novembre 2007 12:08
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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