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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Critique épistémologique de l'analyse systémique de David Easton.
Essai sur le rapport entre théorie et idéologie
(1976)
Avant-propos


Une édition électronique réalisée à partir du livre de M. Denis Monière, Critique épistémologique de l'analyse systémique de David Easton. Essai sur le rapport entre théorie et idéologie. (1976). Montréal: Éditions de l'Université d'Ottawa, 1976, 250 pp. Collection des sciences sociales, no 4. Une édition numérique réalisée par Marcelle Bergeron, bénévole, professeure à la retraite de l'École polyvalente Dominique-Racine de Chicoutimi, Ville de Saguenay. [Autorisation formelle accordée par l'auteur le 28 novembre 2008 de diffuser ce livre dans Les Classiques des sciences sociales.]

Avant-propos

L'objet de ce livre est la critique d'une théorie d'analyse d'un point de vue épistémologique. Cette précision implique que notre problématique est plus centrée sur l'aspect critique que sur l'épistémologie en tant que telle. Cela limite la portée ou le sens que nous donnons au mot épistémologie. Il ne s'agit pas de tracer ici des lignes de démarcation entre le scientifique et l'idéologique à l'intérieur de la théorie systémique. L'objectif n'est donc pas de situer ou de placer une coupure épistémologique dans l'œuvre d'Easton car notre à priori est qu'une telle coupure n'existe pas puisque par définition nous posons : 1° que toute pratique sociale se fonde sur une idéologie, une vision du monde, 2° que la pratique scientifique n'est pas autonome, séparée, différente et au-dessus des autres pratiques sociales, et 3° que, par conséquent, la pratique théorique en tant que pratique sociale est elle aussi conditionnée par l'idéologie. 

Nous tenterons donc de soutenir qu'il n'y a pas de coupure épistémologique, c'est-à-dire que la science n'est pas l'autre de l'idéologie, qu'il y a par conséquent un rapport d'articulation entre l'idéologie et la théorie qui fournit les concepts de la pratique scientifique. C'est donc une mise en situation idéologique globale de l'analyse systémique qui est visée et non pas simplement une mise en situation éclectique qui critiquerait seulement certains éléments de ce cadre conceptuel. 

Il ne s'agit pas non plus de faire une recherche sur l'opérationnalité de la structure conceptuelle imaginée par Easton, c'est-à-dire de déterminer dans quelle mesure elle est applicable à l'étude empirique de la réalité. En ce sens, notre critique n'est pas empirique mais théorique (ou philosophique). Elle vise essentiellement à mettre en lumière les postulats de l'analyse systémique, à rattacher ces postulats à un système de valeurs, à décrypter les rapports entre ce système de valeurs et une idéologie particulière, et finalement à montrer les conséquences de l'utilisation de ce cadre conceptuel pour la production des connaissances et pour la praxis. Ceci définit donc les limites ou l'optique de notre critique épistémologique qui est en fait un essai de réflexion sur le rapport entre théorie et idéologie. 

Pour ce faire, il fallait dans un premier temps analyser le développement de la science politique contemporaine afin de voir s'il était possible de retracer à travers les principales phases de cette évolution un rapport entre d'une part la problématique sociale et politique concrète, et d'autre part, les orientations théoriques et la délimitation de l'objet de la science politique. C'est cette réflexion que nous présentons en introduction. Il s'agissait à ce niveau de voir si notre hypothèse était plausible à l'égard des modèles théoriques qui ont précédé l'analyse systémique. Cette introduction se veut donc une synthèse du développement de la science politique, présentée du point de vue de ceux qui se sont interrogés sur le problème du rapport entre la science politique et l'idéologie. Cette réflexion et cette relecture critique de l'histoire de la science politique nous ont permis de constater que notre problématique n'était pas originale et que d'autres auteurs avaient retracé des liens entre certaines théories ou approches de la science politique et certaines idéologies, donc que notre hypothèse était plausible. 

Fort de cette constatation, nous avons, dans les chapitres qui suivent, appliqué cette hypothèse à l'analyse systémique telle que définie par le cadre conceptuel d'Easton. Pour faire cette étude, nous nous sommes surtout appuyés sur les quatre ouvrages publiés par Easton : The Political System, A Framework for Political Analysis, Analyse du système politique, Children in the Political System. Nous avons aussi à l'occasion complété notre matériel en nous référant aux nombreux articles publiés par Easton. Nous avons enfin dans la mesure du possible dans notre démarche critique, tenté de respecter la logique même de l'œuvre d'Easton qui dans un premier temps, de 1949 à 1956, s'est intéressé aux problèmes de la théorie de la connaissance et au rôle de la théorie politique, et qui dans un deuxième temps s'est attaché à la construction de son cadre conceptuel (1956-1969). 

Conséquemment, le premier chapitre porte essentiellement sur le problème de la connaissance scientifique en science politique, sur le problème de l'objectivité, du rapport entre fait et valeur, entre théorie et pratique, entre science pure et science appliquée. Cette approche permettait non seulement de présenter les positions d'Easton, mais aussi de retracer la filiation intellectuelle de la conception « eastonienne » de la connaissance et par ce biais de faire une critique générale du positivisme. 

Le deuxième chapitre examine la conception « eastonienne » de la théorie politique en la situant à l'intérieur du débat concernant les qualités scientifiques respectives de la méthode inductive et déductive, et ainsi dans le cadre du débat sur le rôle de la théorie en science politique. Il s'agira dans ce chapitre de montrer que dans la logique positiviste où s'inscrit la conception de la théorie d'Easton, ce sont les valeurs dominantes de la société qui deviennent les critères constitutifs de la théorie. 

Dans les deux chapitres suivants nous tentons de mettre en lumière les conséquences épistémologiques de la logique analytique positiviste, fondée sur le principe de l'extériorité, en montrant comment la problématique et les concepts définis par l'analyse systémique sont non pas extérieurs, mais plutôt situés à l'intérieur d'une pratique concrète historiquement située, et qu'en ce sens, ils sont intelligibles en fonction même du projet particulier inhérent à cette pratique : la domination technocratique. 

Le troisième chapitre vise donc à décrypter les rapports entre la problématique théorique d'Easton et la problématique sociale concrète des sociétés capitalistes avancées. La cible principale de notre critique sera la conception même du politique chez Easton, ou autrement dit, la spécificité fonctionnelle du système politique, ce qui nous amènera à analyser le problème de la persistance et du changement dans le modèle systémique pour faire apparaître le système de valeurs sous-jacent à la problématique « eastonienne ». 

Enfin le dernier chapitre a pour objet d'examiner comment la conception du fonctionnement du système politique présentée par Easton s'articule à la rationalité du fonctionnement des sociétés capitalistes avancées. Dans cette optique, nous mettrons en situation idéologique les postulats de la division du travail, de la spécialisation des tâches, de la hiérarchie et de l'inégalité qui servent de fondements à la définition du fonctionnement du système politique dans la problématique et le cadre conceptuel d'Easton.



Retour au texte de l'auteur: Denis Monière, politologue, Université de Montréal Dernière mise à jour de cette page le samedi 3 mai 2008 10:37
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cegep de Chicoutimi.
 



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