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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

LA BATAILLE DU QUÉBEC. Premier épisode: Les élections fédérales de 1993 (1994)
Présentation


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Denis Monière et Jean Herman Guay, LA BATAILLE DU QUÉBEC. Premier épisode: Les élections fédérales de 1993. Montréal: Les Éditions Fides, 1994, 199 pp. Une édition numérique réalisée par Pierre Patenaude, bénévole, professeur de français à la retraite et écrivain, Chambord, Lac—St-Jean. [Autorisation formelle accordée par l'auteur le 27 septembre 2008 de diffuser ce livre dans Les Classiques des sciences sociales]

[7]

La bataille du Québec.

Premier épisode:
les élections fédérales de 1993

Présentation

Par Denis Monière

Nous estimons que parce que les campagnes électorales sont le temps fort des choix collectifs, elles méritent une attention particulière. Contrairement à ce qu'on a cru pendant longtemps, la performance d'un parti durant une campagne électorale peut avoir un effet déterminant sur le résultat du scrutin. Ce phénomène est particulièrement évident au Canada depuis l'élection de 1984 où on a assisté à de fortes variations de l'opinion publique durant les campagnes électorales. L'électorat est de plus en plus versatile et critique à l'endroit de la classe politique. L'électeur canadien n'obéit plus aux identités partisanes, il attend les campagnes électorales avant de faire son choix et se détermine en fonction des positions des partis sur les principaux enjeux. Les spécialistes en marketing politique ont observé que les partisans inconditionnels ne représentent plus que 30 % des électeurs et que tous les autres sont susceptibles de bouger selon les options débattues [1].

[8]

Dès lors, le parti qui est en avance dans les intentions de vote au début de la campagne n'est pas nécessairement en tête le jour du scrutin, comme cela est arrivé au Parti libéral en 1984 ; et un parti peut connaître de fortes oscillations de son soutien populaire comme ce fut le cas pour les conservateurs en 1988. Rien n'est donc joué au début d'une campagne électorale et la différence entre la victoire et l'échec dépend des performances des chefs et des partis.

L'élection de 1993 ne déroge pas à la règle. Elle a été particulièrement mouvementée puisqu'elle s'est caractérisée par la montée de deux nouveaux partis, par la chute du Parti conservateur, par la marginalisation du NPD et par un regain de popularité et de crédibilité de Jean Chrétien comme leader politique. Alors qu'au début de la campagne les conservateurs, grâce à la popularité de leur chef, avaient effectué une remontée spectaculaire et étaient nez à nez avec leurs adversaires libéraux, ils connurent durant la campagne une descente aux enfers qui les ramena aux plus mauvais jours de l'époque Mulroney. Cette débandade du Parti conservateur s'est faite au profit de deux nouvelles formations politiques : le Bloc québécois qui a récupéré la clientèle nationaliste qui avait, depuis 1984, soutenu le beau risque du fédéralisme ; et, dans l'Ouest, ce fut le Reform Party qui vit affluer vers lui les éléments les plus conservateurs du Parti conservateur.

Au Québec, on a pu observer trois mouvements de l'opinion publique. Il y eut une montée constante du soutien au Bloc québécois qui a commencé la campagne avec 40 % des intentions de vote et qui a obtenu près de 50 % des suffrages. Dans une proportion similaire, l'opinion a aussi changé en faveur du Parti libéral qui recueillait au début de la campagne 23 % des intentions de vote et qui a gagné 10 points pour terminer avec 33 % des votes. Enfin, le soutien [9] au Parti conservateur s'est effondré durant les 47 jours de campagne passant de 32 % au début à seulement 14 % à la fin, une perte de 18 points.

Deux données expriment l'ampleur de la déroute conservatrice au Québec : les candidats conservateurs sont arrivés en troisième position dans 63 des 75 circonscriptions électorales et 50 candidats conservateurs n'ont pas atteint le plancher de 15 % qui donne droit au remboursement de 50 % des dépenses électorales encourues. Les électeurs québécois ont déserté le Parti conservateur qui a perdu 39 % de son soutien électoral au Québec, les conservateurs ayant obtenu 53 % des votes en 1988 et seulement 14 % en 1993.

Dans cette monographie électorale, nous avons voulu rendre compte de la dynamique de la campagne électorale fédérale de 1993 afin de comprendre le rejet massif du Parti conservateur et le choix des Québécois de soutenir le Bloc québécois. Nous analyserons les événements et les facteurs qui ont pu influencer le résultat et nous reconstituerons le discours politique des partis en compétition. Nous porterons une attention spéciale au rôle des médias qui servent de courroie de transmission entre les acteurs politiques et les citoyens. Nous examinerons le contenu du débat des chefs et tenterons d'évaluer ses effets. Nous décrirons la stratégie publicitaire des partis. Nous interpréterons les résultats et dégagerons la signification de cette élection.

Nous avons intitulé ce livre La bataille du Québec pour souligner que depuis le rapatriement unilatéral de la Constitution l'enjeu des campagnes électorales canadiennes au Québec n'est pas simplement de changer l'équipe gouvernementale, mais qu'il pose à chaque fois plus ou moins explicitement la question de l'avenir politique du Québec. À cet égard, le rejet de l'entente de Charlottetown, le 26 octobre 1992, par 56 % de l'électorat québécois a ouvert une brèche [10] majeure dans la légitimité du système fédéral canadien et a intensifié le conflit Québec-Canada. Dans ce contexte, chaque consultation électorale peut décider du sort constitutionnel du Québec. Un mouvement dans un sens ou dans l'autre de l'électorat peut peser lourdement sur le dénouement de cette crise politique. Dès lors, les élections qui se tiennent au Québec depuis l'échec du renouvellement de la constitution nous semblent plus importantes que les autres et peuvent avoir des effets déterminants sur le destin politique du Québec.



[1] Ce chiffre est avancé par Marie-Claude DUCAS, « Chasse aux flottants », Info-presse, vol. 9, no 2, octobre 1993, p. 49.


Retour au texte de l'auteur: Denis Monière, politologue, Université de Montréal Dernière mise à jour de cette page le mercredi 29 mai 2013 12:33
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie retraité du Cegep de Chicoutimi.
 



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