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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Jean MEYNAUD, LES GROUPES DE PRESSION. (1965)
Conclusion


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Jean MEYNAUD, LES GROUPES DE PRESSION. Paris: Les Presses Universitaires de France, 1965, 127 pp. Collection: « QUE SAIS-JE ? » LE POINT DES CONNAISSANCES ACTUELLES, N° 895. Une édition numérique réalisée par Marcelle Bergeron, bénévole, professeure à la retraite de l'École polyvalente Dominique-Racine de Chicoutimi. [Autorisation accordée par les ayant-droit de l'auteur le 19 octobre 2008 de diffuser toutes les publications de l'auteur.]

Conclusion


Le tableau des groupes de pression que l'on vient d'esquisser ne comporte-t-il pas de sérieuses lacunes ? Beaucoup seront probablement tentés de le penser en évoquant les nombreuses catégories que cet ouvrage n'analyse pas (mouvements de résistance contre une puissance occupante) ou ne fait que mentionner (ligues paramilitaires). Portant sur les organismes d'information, de noyautage et de combat, étroitement associés aux événements de la période la plus récente, ce silence, reconnaissons-le, a de quoi surprendre. Il est indispensable de le justifier.

En principe, l'intégration de ces phénomènes dans le cadre tracé ne soulèverait pas de difficultés particulières. Il suffirait d'élargir les objectifs des groupes jusqu'au renversement par la violence de l'ordre établi. La liste des instruments devrait embrasser le recours à l'émeute et les diverses tactiques de subversion. Dans cette perspective, l'armée devient l'une des voies d'accès les plus efficaces ou, si l'on préfère, l'un des points essentiels d'application de la pression. Des liaisons, qui ne sont pas à sens unique, s'établissent alors entre des militaires en service actif et les représentants de ces groupements.

L'assimilation est d'autant plus plausible qu'en plusieurs cas il n'existe pas de solution de continuité entre les démarches dans le cadre du régime et les tentatives visant à le dominer ou à le renverser. L'essai de persuasion par les moyens habituels ayant échoué, on en vient au soulèvement insurrectionnel, considéré comme la dernière carte. En voulant introduire des distinctions dans un tel processus, ne court-on pas le danger d'une séparation arbitraire et artificielle ? Deux motifs pourtant ont conduit à accepter ce risque.

Le premier tient aux difficultés de la documentation sur de pareils sujets. En dépit de la publication de multiples travaux journalistiques, les données élémentaires de la question font encore défaut. Pourtant, l'argument n'est pas décisif. En appliquant à ces problèmes les techniques, lentes il est vrai, de l'investigation scientifique, il serait sans aucun doute possible d'aboutir à des explications plus solides que les affabulations si souvent répandues. Rares sont aujourd'hui les questions sur lesquelles une équipe de chercheurs qualifiés ne serait pas en mesure d'apporter des éléments de valeur.

Le deuxième obstacle demeure, au moins pour l'instant, plus difficile à vaincre : il touche à la cohérence théorique de l'analyse. La catégorie « groupes de pression », telle que l'a forgée la science politique contemporaine, est-elle apte à accueillir les réseaux et autres organismes clandestins, les groupements d'auto-protection et les « services d'ordre », les dispositifs armés mis en place pour résister au gouvernement par le fer et le feu... Cette extension n'aboutirait-elle pas à enlever toute portée à un instrument d'étude qui a fait ses preuves pour la description et l'évaluation de la politique courante ?

Les spécialistes anglo-saxons considèrent volontiers que partis et groupes de pression suffisent à traduire les luttes autour du pouvoir, les premiers tentant de le conquérir et les seconds de l'influencer. C'est une position probablement réaliste pour les pays dans lesquels s'affirme un consentement général sur le jeu des institutions gouvernementales et où prévaut globalement le souci de la légalité. S'il n'en est pas ainsi, cette présentation dualiste ne convient plus.

En prenant avec quelques autres la responsabilité d'introduire dans la science politique française la notion de « groupes de pression » – approximativement dans l'acception et, donc, dans les limites que lui donnent les auteurs anglo-saxons – nous avons toujours eu le sentiment qu'elle ne suffit pas à embrasser la totalité des rivalités et combats qui se manifestent dans la sphère gouvernementale de pays comme la France. Elle s'applique beaucoup mieux aux affaires quotidiennes qu'aux changements révolutionnaires. Les événements de ces dernières années rendent cette incapacité éclatante : par bien des côtés, un organisme comme l'Union pour le Salut et le Renouveau de l'Algérie française, échappe aux cadres habituels de l'analyse politique. Malheureusement, le déroulement des faits est allé plus vite que le perfectionnement des concepts scientifiques.

Au stade actuel, l'attitude la moins contestable paraît être de conserver la catégorie « groupes de pression » qui permet déjà de systématiser une part appréciable des interventions qui s'exercent sur les autorités. Mais cette tâche ne doit pas dispenser d'un autre effort, beaucoup plus complexe : identifier tous les groupements que ce concept semble mal préparé à absorber et tenter d'en réaliser une classification rigoureuse (qui ne se laisse pas abuser par le qualificatif adopté : ainsi, mouvements de type paramilitaire prenant le titre de « partis »). Il s'agit donc avant tout d'établir une typologie.

À l'issue de ces recherches, il sera possible de situer ces catégories les unes par rapport aux autres, de montrer leurs ressemblances et différences, d'énoncer les liaisons qui les unissent, autrement dit, de passer des recherches fragmentaires à une vision synthétique. Ainsi sera-t-on en mesure d'évaluer avec plus d'exactitude le rôle spécifique et l'influence propre des organismes que l'on a essayé d'analyser dans ces pages.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le mardi 28 avril 2009 9:47
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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