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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

La société archaïque. (1818)
Table des matières


Une édition électronique réalisée du livre de Lewis Henry Morgan (1877), La société archaïque. Traduction française de l'Américain par H. Jaouiche, 1971. Paris : Éditions Anthropos, 1971, 653 pages. Présentation et Introduction de Raoul Makarius, ethnologue français. Une réalisation de mon amie, Marcelle Bergeron, bénévole, professeure à la retraite de l'École polyvalente Dominique-Racine de Chicoutimi, qui fait un remarqueble travail depuis plus de 2 ans. N'hésitez pas à la remercier. [JMT].

Avant-propos de l'auteur

Lewis Henry Morgan

Il a été établi avec certitude que la présence de l'homme sur la terre remonte à un âge très reculé. Les preuves n'en ont été réunies que tout récemment, au cours des trente dernières années, et le singulier privilège d'être le premier à reconnaître un fait aussi important échoit à notre génération.

On sait maintenant que l'homme a existé en Europe pendant la période glaciaire, à son début même, et il semble probable que sa présence remonte à une période géologique antérieure. La race humaine a survécu, alors que de nombreuses races d'animaux qui lui étaient contemporains ont disparu ; et son évolution, à travers les diverses branches de la famille humaine, a été aussi remarquable par le cheminement qu'elle a suivi que par les progrès qu'elle a accomplis. Comme la durée probable de son épopée est liée à des ères géologiques, on ne peut espérer lui donner une mesure précise. Cent ou deux cent mille ans ne serait pas une estimation exagérée de durée de la période qui sépare la disparition des glaciers dans l'hémisphère nord à nos jours. Aussi approximative que puisse être toute estimation d'une période dont on ne connaît pas la durée réelle, on peut dire que l'existence de la race humaine remonte à des temps immémoriaux et se perd dans une vaste et lointaine antiquité.

Cette affirmation change, dans la réalité des faits, les vues qui ont prévalu sur les relations entre sauvages et barbares, et entre barbares et hommes civilisés. On peut assurer maintenant, en s'appuyant sur des preuves irréfuta-bles, que la période de l'état sauvage a précédé la période de la barbarie dans toutes les tribus de l'humanité, de même que l'on sait que la barbarie a précède la civilisation. L'histoire de l'humanité est une, quant à la source ; une, quant à l'expérience ; une, quant au progrès.

Il est à la fois louable et naturel d'essayer de savoir, dans la mesure du possible, comment l'humanité a vécu pendant tous ces siècles des temps anciens, comment les sauvages, par une lente progression, à un rythme à peine perceptible, ont atteint la condition supérieure de la barbarie ; comment les barbares, par une progression similaire, ont finalement atteint la civilisation, et pourquoi d'autres tribus et d'autres nations sont restées en arrière sur le chemin du progrès, certaines à l'état de civilisation, certaines à l'état de barbarie, et d'autres à l'état sauvage. Il n'est pas présomptueux de s'attendre à ce que ces questions reçoivent une réponse dans l'avenir.

Les inventions et les découvertes sont en rapport direct avec le progrès de l'humanité et en jalonnent la voie, par une série d'étapes successives, alors que les institutions sociales et civiles, du fait de leur rapport avec les besoins permanents de l'homme, se sont développées à partir de quelques germes de pensée originels. Elles offrent pourtant une même échelle de progrès. Ces institutions, inventions et découvertes ont symbolisé, et préservé les principaux faits qui demeurent aujourd'hui significatifs pour illustrer cette expérience. Quand on les réunit et les compare, elles tendent à démontrer l'origine de l'humanité, la similitude des besoins des hommes arrivés au même stade de leur développement, et la permanence du fonctionnement de l'esprit humain dans des conditions sociales semblables.

Au cours de la partie la plus récente de la période de l'état sauvage, et de toute la période de la barbarie, l'humanité dans son ensemble était organisée en gentes, phratries et tribus. Ces organisations ont prévalu dans l'ensemble du monde archaïque, sur tous les continents, et ont été les instruments qui ont permis à la société archaïque de s'organiser et de se maintenir. Leur structure, et leurs rapports en tant qu'éléments d'une série organique, les droits, les privilèges et les devoirs des membres de la gens, des membres de la phratrie et de la tribu, illustrent le développement de l'idée de gouvernement dans l'esprit humain. Les principales institutions de la race humaine remontent à la période de l'état sauvage, se sont développées pendant la période de la barbarie, et ont atteint leur maturité dans la civilisation.

De la même manière, la famille a pris successivement différentes formes donnant naissance à de grands systèmes de consanguinité et d'affinité qui ont subsisté jusqu'à nos jours. Ces systèmes qui rendent compte des relations de parenté existant dans la famille aux diverses périodes au cours desquelles chacun d'eux s'est formé, constituent une illustration révélatrice de l'expé-rience de l'humanité durant le passage de la famille consanguine à la famille monogamique, à travers une suite de formes intermédiaires.

L'idée de propriété a suivi la même croissance, et le même développement. Inexistante pendant l'état sauvage, la passion et l'amour de la propriété, symbole des richesses accumulées, dominent maintenant l'esprit humain des races civilisées.

Ces quatre catégories de faits qui suivent, en lignes parallèles, les chemins du progrès humain de l'état sauvage à la civilisation, sont les principaux thèmes de ce livre.

C'est un domaine de recherches auquel, en tant qu'Américains, nous devons porter un intérêt particulier et dans lequel nous avons un devoir essentiel à remplir. Le continent américain, riche de biens matériels, on le sait, est aussi le plus riche en matériaux ethnologiques, philologiques et archéolo-giques illustrant la grande période de la barbarie. Puisque la race humaine a la même origine, elle a suivi les mêmes chemins, par des sentiers différents mais parallèles sur tous les continents, et d'une façon très similaire dans toutes les tribus et nations au même stade de développement. Il en découle que l'histoire et l'expérience des tribus indiennes d'Amérique offrent une image plus ou moins fidèle de l'histoire et de l'expérience de nos propres ancêtres dans des conditions correspondantes. Faisant partie de l'histoire de l'humanité, leurs institutions, leurs techniques, leurs inventions et leur expérience pratique représentent une valeur très grande et très particulière qui dépasse de beau-coup celle de la race indienne elle-même.

Quand on découvrit les tribus amérindiennes, elles représentaient trois périodes ethniques différentes, et de façon plus complète que nulle part ailleurs. Des matériaux pour l'ethnologie, la philologie et l'archéologie s'offraient avec une abondance jusqu'alors inconnue. Cependant, parce que, jusqu'à présent, ces sciences sont encore balbutiantes et fort peu pratiquées parmi nous, les chercheurs n'ont pas été à la hauteur de leur tâche. Mais alors que les fossiles demeureront sous terre, intacts pour l'étudiant de l'avenir, ce qui reste des arts, de la langue et des institutions indiennes périra. Ils meurent chaque jour, et cela depuis trois siècles. La vie culturelle des tribus indiennes dégénère sous l'influence de la civilisation américaine ; les techniques et la langue disparaissent, les institutions se dissolvent. Quelques années encore, et des faits qui pourraient facilement être inventoriés seront impossibles à mettre en lumière. Devant une telle situation, un appel pressant est fait aux Améri-cains pour qu'ils abordent ce vaste domaine et récoltent cette riche moisson.


Rochester, New York, Mars 1877
Lewis H. Morgan



Retour au texte de l'auteur: Raoul Makarius Dernière mise à jour de cette page le Mercredi 20 août 2003 12:16
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue.
 



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