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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

La fin d'un règne (1971)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir de M. Louis Maheu, [sociologue, Université de Montréal], “Rapports de classes et problèmes de transformation: la thèse de la société post-industrielle”. Un article publié dans la revue Sociologie et sociétés, vol. 10, no 2, octobre 1978, pp. 11-35. Montréal: Les Presses de l'Université de Montréal. [Autorisation formelle accordée par l’auteur de diffuser cet article le 20 octobre 2006 dans Les Classiques des sciences sociales.].

Introduction

« Au-delà de l'économisme et du volontarisme, enfants jumeaux de la pensée historiciste liée au système d'action historique industriel, la sociologie des rapports de classes devient possible avec la formation de la société post-industrielle qui se reconnaît pour la première fois comme produit de son historicité » (A. Touraine, 1973, p. 207). 

Le développement de la structure sociale du capital comme support social déterminant, son émergence au sein de la structure sociale féodale ont certes profondément influencé la pensée sociologique. Le travail de Marx, notamment, aura entre autres mis en relief la grande pertinence d'un concept clé pour l'analyse de tels phénomènes : les rapports sociaux de classes. 

Ce concept devait contribuer à des analyses systématiques des structures sociales même si Marx lui-même n'en a pas produit et prévu tous les aboutissants. Certaines analyses, empruntant cet appareillage analytique, sont attentives à l'ensemble des répercussions sur la totalité d'une structure sociale de sa première division en rapports de classes ; pour d'autres, bien loin d'atteindre toutes les dimensions d'une structure sociale, les rapports sociaux n'en resteraient qu'à certains paliers spécifiques. Central au fonctionnement même d'une structure sociale, le rapport social de classes déterminant en marque les principales composantes. Aussi faut-il attendre d'une étude des structures sociales qu'elle mette en évidence ce trait. Il semble bien, malgré leur caractère incomplet, que telle soit l'inspiration première des analyses de Marx. 

Il est aussi, et toujours à propos de ce concept de rapport social de classes, une autre dimension de l'héritage sociologique de ce 19e siècle qu'il ne faut point perdre de vue. C'est bien dans l'intention d'échapper à de rapides et trop faciles problématiques opposant la société traditionnelle à la société moderne, ou encore la société paysanne aux sociétés marchandes plus soumises à l'industrialisation tout en affirmant, cependant, la volonté d'expliquer une transformation d'une structure sociale à une autre, que certains assignèrent à ce concept de rapport social de classes un lieu analytique précis. Il avait dès lors entre autres fonctions, notamment chez Marx, celle de permettre une analyse plus rigoureuse et plus satisfaisante d'une transformation spécifique, soit celle du passage de la structure sociale féodale à la structure sociale capitaliste. 

Aussi peut-on, à propos d'une question que la littérature sociologique a abordée depuis déjà un bon moment [1] et aborde dans une production contemporaine plus soutenue et de façon plus ou moins centrale et intégrée, soit celle de l'évolution des sociétés industrielles vers les sociétés post-industrielles, poser le problème d'une analyse en termes de rapports sociaux de classes. Parmi les nombreuses études qui se sont intéressées à l'émergence des sociétés post-industrielles ou au passage des sociétés industrielles à ces dernières [2], nous nous sommes plus longuement arrêtés aux travaux de Touraine pour deux raisons fondamentales. D'une part, on y propose une analyse de ces phénomènes largement sous-tendue par une utilisation extensive du concept de rapports de classes couvrant tant le procès de production que le procès de gestion sociale ; d'autre part, ses analyses sont parmi celles qui concluent le plus nettement à une définitive émergence d'une société dite post-industrielle. 

Depuis quelque temps déjà, on attend de la sociologie qu'elle éclaire l'ensemble de ces phénomènes. Ils ne sont pas tous réductibles d'ailleurs à l'émergence de nouvelles structures sociales. Au contraire, la systématisation progressive d'une structure sociale donnée, son évolution vers des positions de dominance dans des sociétés globales particulières, ou encore des ensembles historiques concrets, où s'articulent plusieurs structures sociales commandent déjà des études du changement. Mais les problèmes de passage, de transformation d'une structure sociale à une autre doivent aussi être reconnus. Par transformation, nous entendons un passage entre structures sociales tel que la structure d'arrivée est articulée au moyen d'un rapport social de classes déterminant autre que celui à l'œuvre dans la structure de départ, au point où il s'agit de fait d'une modification, d'un renversement de rapports sociaux de base [3]. 

Parmi les principales propositions fécondant les analyses et de l'évolution et de la transformation des structures sociales, on peut dégager d'abord toutes celles relatives à la construction même du concept de rapport social de classe. Ces dernières démarches analytiques ne sont pas toujours très perméables, paradoxalement, aux orientations et actions collectives d'agents sociaux liés et opposés entre eux. Elles s'en remettent trop souvent à des déterminants des positions de classes relativement indifférenciés du point de vue des rapports sociaux de classes eux-mêmes. Puis, au sein des propositions qui concluent à une transformation de la structure sociale capitaliste menant à la société postindustrielle, on peut mettre en relief celles qui discernent l'élaboration de cette dernière structure sociale autour d'une nouvelle forme d'accumulation, objet et produit d'un rapport social de base autre que celui opposant le capital et le travail, autre donc que celui désigné ici comme rapport social du capital au sens générique du terme. Il s'agit bien là du lieu analytique que doit occuper, avec rigueur et démonstration à l'appui, toute thèse relative à la société post-industrielle en tant que nouvelle structure sociale. 

Mais, bien sûr, les propositions qui distinguent entre diverses structures sociales posent encore les multiples problèmes théoriques de la transformation d'une structure sociale de départ à une structure sociale d'arrivée. Au delà même de la différence proposée entre des rapports sociaux de base distincts et divergents, on peut encore relever le problème de la voie d'entrée dans une nouvelle structure sociale. Comment y parvient-on, quelles sont les étapes, les phases d'une transformation ? Quelle est la fonction du concept de rapports sociaux de classes pour penser de tels passages ? On ne peut totalement dissocier le problème de la différenciation d'une nouvelle structure sociale de celui des voies de passage y menant. Pareille dissociation est encore plus difficile quand la quasi-totalité des propositions relatives à l'émergence de la société post-industrielle s'assignent elles-mêmes, comme paramètre et point de départ de ce processus, diverses formes plus ou moins achevées de la structure sociale capitaliste classique.


[1] Voir à ce sujet, Daniel Bell, The Coming of Post-industrial Society, New York, Basic Books, 1973, notamment l'introduction et le chapitre 1.

[2] A. Giddens, The Class Structure of the Advanced Societies, London, Harper Torchbooks, 1973, chapitre 14 et Daniel Bell, The Coming of Post-industrial Society, op. cit., chapitre 1.

[3] Cette notion de transformation s'apparente à celle de transition définie par P.P. Rey, les Alliances de classe, Paris, F. Maspero, 1973.


Retour au texte de l'auteur: Gérald Fortin, sociologue, Université Laval Dernière mise à jour de cette page le jeudi 15 février 2007 14:07
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur au Cégep de Chicoutimi.
 



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