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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Vincent Lemieux, “Les politiques publiques et les alliances d'acteurs”. Un article publié dans l'ouvrage sous la direction de Vincent Lemieux, Pierre Bergeron, Clermont Bégin et Gérard Bélanger, Le système de santé au Québec. Organisations, acteurs et enjeux. Chapitre 5, pp. 107-128. Québec : Les Presses de l'Université Laval, 1994, 370 pp. [Autorisation de l'auteur accordée le 13 août 2004 de diffuser toutes ses publications.]

Vincent Lemieux 

Les politiques publiques et les alliances d'acteurs”. * 

Un article publié dans l'ouvrage sous la direction de Vincent Lemieux, Pierre Bergeron, Clermont Bégin et Gérard Bélanger, Le système de santé au Québec. Organisations, acteurs et enjeux. Chapitre 5, pp. 107-128. Québec : Les Presses de l'Université Laval, 1994, 370 pp.

Introduction
 
Définition des politiques publiques
Les acteurs dans le secteur de la santé
Les politiques publiques étudiées
L'émergence des politiques
Un prolongement de la théorie de Kingdon
La formulation des politiques
La mise en oeuvre des politiques
Les alliances, les trois courants et la prise de décision
Quelques aperçus comparatifs
 
Conclusion
Références
 
Tableau 1. Préférences des alliances pour ce qui est de la régulation des affaires publiques
Tableau 2. Degré de savoir-faire des protagonistes des différentes alliances dans chacun des trois courants

 

Introduction

 

Les politiques publiques dans le secteur de la santé comme dans les autres secteurs sont faites d'un ensemble de décisions, reliées entre elles, où les acteurs politiques cherchent à rendre leurs préférences efficaces, c'est-à-dire à contrôler les décisions de la façon la plus avantageuse possible pour eux (sur le secteur de la santé par rapport à d'autres secteurs de politiques, voir Heidenheimer et al., 1990). 

Dans ce chapitre, après une brève introduction sur les politiques publiques, nous allons d'abord traiter des principaux acteurs politiques dans le secteur de la santé au Québec en les regroupant en des alliances, distinctes entre elles par les préférences de leurs participants. Ensuite, nous allons montrer comment les acteurs interviennent ou non dans les processus par lesquels se réalisent les politiques publiques dans le secteur de la santé, en distinguant, à la suite de Kingdon (1984), le courant des problèmes, le courant des solutions et le courant politique. Ces courants ne se retrouvent pas avec la même intensité dans les processus d'émergence, de formulation et de mise en couvre des politiques publiques, si bien que la présence plus ou moins influente des acteurs en ces courants explique, comme nous le montrerons à la fin, les principaux traits de la prise de décision dans les politiques publiques du secteur de la santé. 

 

Définition des politiques publiques

 

Les politiques publiques, que ce soit dans le secteur de la santé ou dans un autre secteur, peuvent être définies comme des tentatives de régulation de situations présentant un problème public, dans une collectivité ou entre des collectivités (sur ce point, voir Lemieux, 1989a, et aussi Pal, 1992). Un problème est public quand il touche de quelque façon à la répartition des moyens entre les acteurs sociaux. La régulation consiste à ramener la situation, où est perçu un problème public, à des normes dont elle s'est éloignée (c'est la régulation négative), ou encore à la rapprocher de normes qui n'ont pas encore été atteintes (c'est la régulation positive). Quant à la notion de collectivité, il faut l'entendre dans un sens large. Il peut s'agir d'une collectivité politique formée en État souverain, ou d'une sous-collectivité politique à l'intérieur de cette collectivité (une province, une municipalité), ou encore d'une grande organisation dont on veut étudier, par analogie, les politiques publiques (par exemple, un hôpital, une université, etc.). 

Nous parlons de tentatives de régulation pour bien marquer que l'ajustement des situations aux normes n'est pas toujours réussi, aux yeux des participants à la régulation, ou encore qu'elle est réussie aux yeux de certains mais qu'elle ne l'est pas aux yeux des autres. Quand la régulation apparaît déficiente, de nouvelles tentatives sont faites en vue de l'améliorer. C'est une autre façon de dire que la perception des problèmes publics, qui est à l'origine des tentatives de régulation, n'est pas la même d'un acteur à l'autre. Il arrive même que là où des acteurs voient un problème d'autres n'en voient pas ou voient un problème contraire. Par exemple, certains acteurs estimeront que le pouvoir du ministère de la Santé et des Services sociaux sur les médecins est excessif, d'autres estimeront qu'il n'y a pas à le modifier, et d'autres encore que ce pouvoir n'est pas assez grand. 

Les tentatives de régulation par les politiques publiques comportent plusieurs décisions, reliées les unes aux autres. Ces décisions sont souvent regroupées en trois processus, imparfaitement nommés « étapes », celui de l'émergence, celui de la formulation et celui de la mise en œuvre des politiques publiques (sur ces processus ou étapes, voir entre autres Edwards et Sharkansky, 1981 ; Brewer et deLeon, 1983 ; Jones, 1984). C'est à travers ces processus que les acteurs cherchent à contrôler, à leur avantage, les régulations que sont les politiques publiques.

 

Les acteurs dans le secteur de la santé

 

Un courant actuellement dominant dans l'étude des politiques publiques au Canada pose que dans chaque secteur de politiques publiques existe une « communauté » d'acteurs où, à l'occasion d'une politique donnée, un « réseau » de certains d'entre eux interviendrait dans les processus par lesquels se réalise la politique (voir en particulier Coleman et Skogstad, 1990). 

Comme l'indique le terme plutôt impropre de « communauté », les auteurs qui se situent dans ce courant ont parfois tendance à exagérer la convergence des intérêts qui existerait entre les acteurs dominants d'un secteur de politiques publiques, bureaucrates et intéressés des groupes les plus puissants. Peu de place est faite aux partis politiques et aux populations dont les opinions sont mesurées par les sondages ou s'expriment en votes à l'occasion des élections. 

Au lieu de poser, au départ, l'existence de « communautés » et de les réduire aux organisations et groupes spécialisés qui seraient des acteurs dominants, nous allons proposer une vue plus ouverte. Les acteurs qui participent aux politiques du secteur de la santé seront vus comme appartenant à des alliances qui se recoupent en partie. Les alliances font référence à des relations entre alliés, plus ou moins cohésives entre elles. Certains des participants à une alliance peuvent se coaliser pour un temps avec des acteurs d'autres alliances, selon des stratégies commandées par les situations qui se présentent. 

Pour l'étude que nous allons faire d'un certain nombre de politiques dans le secteur de la santé, on peut distinguer six alliances principales, dont les acteurs ont à peu près les mêmes préférences sur la réalisation des politiques publiques et plus précisément sur le caractère polyarchique ou hiérarchique (Dahl et Lindblom, 1953) de la régulation des affaires publiques, ainsi que sur le caractère différenciateur ou égalisateur des conséquences de la régulation. La polyarchie et la différenciation obéissent au principe de la variété ou de la diversification, alors que la hiérarchie et l'égalisation obéissent plutôt au principe de la contrainte ou de la restriction. 

Les alliances prennent des formes diverses. Elles peuvent être, en tout ou en partie, des associations permanentes ou des réseaux d'associations permanentes ; elles peuvent donner lieu à des coalitions temporaires à l'intérieur d'elles-mêmes ou avec des acteurs d'autres alliances ; elles peuvent aussi se traduire en tendances faites de coordination tacite plutôt qu'explicite ; elles peuvent même exister sous forme d'agrégats électoraux formés de ceux qui votent de la même façon. 

Parmi les alliances du secteur de la santé, il y a d'abord les deux grandes alliances partisanes, celle du Parti libéral et celle du Parti québécois. Elles comprennent les adhérents aux associations de ces deux partis, mais aussi des acteurs hors de ces associations qui appartiennent à des tendances faites de sympathisants de l'un ou l'autre parti, ou encore qui appartiennent aux agrégats qui se forment lors des élections. Dans les politiques publiques du secteur de la santé, ce sont cependant les élus et leurs entourages partisans qui sont les participants les plus actifs. Les deux partis ont des préférences pour la polyarchie et la hiérarchie à la fois : la polyarchie entre eux, et la hiérarchie dans la direction du gouvernement. Le Parti québécois a un caractère plutôt égalisateur, opposé au caractère plus mitigé du Parti libéral, égalisateur et différenciateur à la fois. Notons que même si l'Union nationale et le Ralliement créditiste avaient des députés à l'Assemblée nationale au cours des années 1970, nous ne les avons pas retenus, étant donné le rôle limité qu'ils ont joué dans la réalisation des politiques publiques (sur ce point, voir von Schoenberg, 1973). 

Les deux partis, quand ils ont dirigé le gouvernement, se sont appuyés sur l'alliance administrative, faite de fonctionnaires du Ministère mais aussi de plusieurs cadres du réseau, dans les hôpitaux et les conseils régionaux en particulier. L'alliance administrative se caractérise par ses préférences pour la structuration hiérarchique du pouvoir (Bergeron, 1992) où les supérieurs commandent à des subordonnés, qui peuvent être eux-mêmes des supérieurs d'autres subordonnés. Quant aux préférences des participants à l'alliance administrative qui touchent les conséquences des politiques publiques on peut présumer qu'elles vont, selon le cas, dans le sens de la différenciation ou dans le sens de l'égalisation, cet objet de préférences étant moins net pour eux que le premier. 

L'alliance médicale regroupe la grande majorité des médecins à l'exception de ceux qui travaillent dans les départements de santé communautaire (DSC) ou dans les centres locaux de santé communautaire (CLSC). Les dirigeants de la Corporation des médecins et des syndicats de spécialistes et d'omnipraticiens sont les principaux porte-parole de cette alliance, dont les participants préfèrent la polyarchie à la hiérarchie dans la régulation des affaires publiques, et la différenciation à l'égalisation pour ce qui est des conséquences de cette régulation. 

L'alliance communautaire a des préférences différentes de celles de l'alliance médicale. Elle regroupe surtout des acteurs appartenant à des CLSC et à des groupes qui gravitent autour d'eux, ainsi qu'à des départements de santé communautaire. Comme les participants à l'alliance médicale ces acteurs préfèrent la polyarchie à la hiérarchie dans la régulation des affaires publiques, mais en vue d'une action égalisatrice plutôt que différenciatrice. 

Enfin, au cours des années 1980 s'est formée une nouvelle alliance qu'on pourrait dire « managériale », en ce sens que ses protagonistes, moins nombreux que ceux des autres alliances, ont cherché sinon à privatiser certaines activités du secteur public, du moins à y introduire plus de concurrence et plus d'efficience grâce à des méthodes de gestion inspirées du secteur privé (sur ce point, voir Ouellet, 1987). Les préférences des participants à cette alliance vont vers la différenciation plutôt que l'égalisation et vers un mélange de polyarchie et de hiérarchie dans la régulation des affaires publiques. Ces participants sont recrutés dans la fonction publique et dans le « réseau » de la santé, surtout dans les hôpitaux, mais aussi dans le Parti libéral. Cette alliance est encore mal assurée et ses acteurs sont toujours susceptibles de rejoindre les rangs de leur alliance d'origine. 

Le tableau 1 résume les préférences présumées des participants de chacune des alliances, en allant de celles qui sont les plus portées vers la variété (+) à celles qui sont les plus portées vers la contrainte (-). 

Ce sont là les préférences habituelles des membres des alliances, ce qui n'exclut pas que dans des situations ou des conjonctures particulières, les préférences soient différentes. Ainsi à l'intérieur de l'alliance administrative, quand des fonctionnaires du Ministère cherchent à faire valoir leurs choix auprès de fonctionnaires du Conseil du Trésor, ils préfèrent la polyarchie à la hiérarchie, ou encore, quand le parti de gouvernement impose le bâillon au parti d'opposition, ses préférences vont évidemment à la hiérarchie, contre un parti d'opposition défenseur de la polyarchie.

 

Tableau 1

Préférences des alliances pour ce qui est
de la régulation des affaires publiques

 

Alliance

Polyarchie/Hiérarchie

Différenciation/Égalisation

(+)       (-)

(+)       (-)

médicale

+

+

managériale

±

+

libérale

±

±

communautaire

+

-

péquiste

±

-

administrative

-

±

 

D'autres alliances sont à l'œuvre dans le secteur de la santé, dont l'alliance syndicale que nous rencontrerons à l'occasion dans l'étude des politiques publiques choisies. Cette alliance a généralement des préférences qui vont dans le sens de la hiérarchie et de l'égalisation, ce qui la placerait en fin de liste, après l'alliance administrative, dans le tableau 1. L'étude des politiques de nature technologique (équipements et médicaments) qui est abordée dans le chapitre 15 nous aurait amené à ajouter une autre alliance qu'on pourrait dire « industrielle », dont les préférences sont assez proches de celles de l'alliance médicale. 

Nous nous limitons aux six alliances du tableau 1 pour ne pas trop compliquer nos analyses et parce qu'elles suffisent, pensons-nous, à cerner les principaux acteurs dans la prise de décision à propos des politiques publiques que nous étudions.

 

Les politiques publiques étudiées

 

De façon à comparer entre elles des politiques publiques du secteur de la santé et de voir ce en quoi elles se ressemblent et ce en quoi elles diffèrent, nous avons choisi des politiques telles que les protagonistes de chacune des alliances valorisent particulièrement au moins une d'entre elles. 

Deux des politiques que nous avons choisies ont leur origine dans la réforme du début des années 1970. Ce sont la politique concernant les CLSC, créés officiellement par la loi de 1971 sur les services de santé et les services sociaux, et la politique de décentralisation dont on peut également trouver l'origine dans cette loi, avec la création des conseils régionaux de la santé et des services sociaux (CRSSS), même si le mouvement de centralisation et de décentralisation dans le secteur de la santé commence bien avant cette date (Lemieux et al., 1974). Quelques années plus tard, vers le milieu des années 1970, le ministère des Affaires sociales prend des premières mesures concernant les effectifs médicaux, qui touchent à leur nombre, à la répartition entre les omnipraticiens et les spécialistes ainsi qu'à la répartition dans l'espace. C'est la troisième politique à laquelle nous nous intéresserons. La quatrième politique est celle du désengorgement des urgences. Dès la fin des années 1970 des études montrent que les services d'urgence des hôpitaux montréalais ont connu d'importantes hausses annuelles de fréquentations. Des mesures sont prises pour faire face à cette hausse, mais c'est surtout après les élections générales de 1985 et l'arrivée au gouvernement du Parti libéral que la politique prend forme. C'est aussi ce changement de gouvernement qui provoque l'émergence de notre cinquième politique, celle des organisations de soins intégrés de santé (OSIS). De telles organisations sont proposées dans les rapports d'un groupe de travail (le groupe Gobeil) formé par le gouvernement. Ces rapports cherchent à rationaliser l'organisation et le fonctionnement des organismes gouvernementaux ou publics. 

La politique particulièrement valorisée par les protagonistes des alliances partisanes est celle du désengorgement des urgences. L'alliance administrative est impliquée dans un peu toutes les politiques du secteur de la santé, mais ses protagonistes s'intéressent tout particulièrement à la politique de décentralisation. Les protagonistes de l'alliance médicale sont très impliqués dans la politique de répartition géographique des effectifs médicaux. Parmi les politiques qui sont prioritaires pour les protagonistes de l'alliance communautaire, il y a certainement celle qui concerne les CLSC. Ce sont des protagonistes de l'alliance managériale qui ont porté principalement le projet de politique concernant la création des OSIS, ce qui montre bien les limites de leur action dans un système de santé fortement étatisé. 

Les cinq politiques présentent une gamme suffisamment variée pour que l'on puisse tirer des enseignements généraux de l'étude des principales décisions qu'elles ont comportées. Nous étudierons ces décisions de façon comparative, d'une politique à l'autre, en distinguant celles qui se produisent dans les processus d'émergence, celles qui se produisent dans les processus de formulation et celles qui se produisent dans les processus de mise en oeuvre. 

 

L'émergence des politiques

 

On entend généralement par émergence des politiques le processus selon lequel des situations perçues comme posant des problèmes publics sont mises à l'agenda du gouvernement ou d'une autre instance officielle dans un but de régulation. 

L'ouvrage le plus original sur l'émergence des politiques est sans doute celui de Kingdon (1984), qui porte d'ailleurs sur le secteur de la santé, en plus de celui des transports. Après avoir observé comment les politiques de ces deux secteurs ont été mis à l'agenda du gouvernement américain, à la fin des années 1970, Kingdon élabore un début de théorie voulant qu'à l'occasion de crises ou de changements politiques une opportunité se présente (une « fenêtre politique » dans le langage de Kingdon) qui mêle ensemble trois courants qui ne se mêlent pas autrement : le courant des problèmes, le courant des options de solution à ces problèmes, et le courant politique, qui fait référence au personnel politique et aux idées qui sont dans l'esprit du temps. Ces courants sont portés principalement par des entrepreneurs, à l'affût des occasions favorables à l'émergence. C'est ainsi qu'une politique émergerait, par mise à l'agenda du gouvernement (pour une étude canadienne, inspirée de Kingdon, voir Harrison et Hoberg, 1991). 

Kingdon s'intéresse au jeu des acteurs internes ou externes à l'appareil gouvernemental, et conclut qu'aucun d'entre eux ne domine les processus d'émergence, mais que si une catégorie est bien proche de les dominer, c'est celle des politiciens. Cela tient surtout à leur importance dans le courant des problèmes et surtout dans le courant politique. Ce sont eux qui sont impliqués dans les changements politiques, l'une des deux occasions d'ouverture d'une fenêtre politique, propice à la mise à l'agenda. De plus les politiciens participent toujours à la décision de placer ou de ne pas placer à l'agenda du gouvernement la régulation d'une situation qui fait problème. 

L'émergence de la politique de désengorgement des urgences a ceci de particulier qu'elle résulte à la fois d'une situation de crise, exploitée par les médias, et d'un changement politique. Au cours de la campagne électorale de 1985, la situation fait l'objet d'une bonne partie du débat, à la radio, entre le Premier ministre Pierre-Marc Johnson du Parti québécois, et Robert Bourassa, le chef du Parti libéral, qui accuse le gouvernement péquiste de pratiquer une « médecine de guerre » à propos des urgences. Après la victoire libérale, et donc à la suite d'un changement politique, la politique devient un des points principaux à l'agenda du gouvernement. Celui-ci dispose d'éléments de solutions, entre autres dans le rapport Spitzer (1985) commandé par le Ministère et diffusé en mai 1985. Les protagonistes de l'alliance libérale ont dominé le processus de mise à l'agenda, avec l'aide d'administrateurs, en proposant une politique différenciatrice (on visait certains hôpitaux plus engorgés que d'autres) qui supposait une injection de nouvelles ressources monétaires. 

Les autres politiques étudiées ont émergé à la suite des changements politiques, ou des séquelles de changements politiques. La politique de décentralisation qui se concrétise par la création des CRSSS et la politique envers les CLSC émergent à la suite du rapport de la commission Castonguay-Nepveu, tandis que les tentatives pour faire émerger une politique concernant les OSIS découlent d'un groupe de travail formé par le nouveau gouvernement libéral, élu à la fin de 1985. Dans les deux cas, des changements de parti de gouvernement, soit l'élection de gouvernements libéraux en 1970 et 1985 respectivement, semblent favoriser ces émergences. En 1970 surtout, quand le président de la Commission d'enquête, Claude Castonguay, devient ministre des Affaires sociales. 

Les protagonistes des alliances libérale et administrative sont les plus présents dans l'émergence des politiques concernant les CLSC, mais ils reçoivent l'appui d'entrepreneurs de l'alliance communautaire, qui sont actifs sur le terrain, et celui à tout le moins tacite des alliances péquiste et syndicale. Le courant politique qui valorise la participation se mêle au courant des problèmes anticipés de financement des hôpitaux et au courant des solutions qui voient les CLSC comme des portes d'entrée du système, ce qui entraîne l'émergence de la politique. La politique de décentralisation est portée elle aussi par le courant politique valorisant la participation, mais elle est aussi une construction administrative, en prolongement d'un Ministère dont on veut qu'il se concentre sur les grandes fonctions centrales de planification, de programmation et de financement. 

Les deux politiques ont, au moment de leur émergence, un caractère hiérarchique et égalisateur, dans la foulée de la Révolution tranquille, alors que la politique concernant les OSIS concurrence les établissements en place et est différenciatrice, ce qui est caractéristique de l'alliance managériale. Ses entrepreneurs sont les seuls, avec la ministre Thérèse Lavoie-Roux et son entourage, à vouloir vraiment l'émergence de la politique. Les protagonistes des alliances libérale et médicale ont des positions plus ambivalentes, alors que les porte-parole des alliances péquiste, administrative et communautaire sont opposés au projet. Le courant politique semble, à un certain moment, favorable à l'émergence de la politique des OSIS, mais l'approche des élections de 1989 contribue à marginaliser le projet. La nomination d'un nouveau ministre et d'un nouveau sous-ministre aurait aussi contribué à décourager les promoteurs du projet. Ils n'avaient plus la motivation nécessaire pour chercher à convaincre les nouveaux dirigeants du Ministère du bien-fondé de leur projet. De plus la création des OSIS apparaissait incompatible avec la réforme projetée par l'alliance administrative, sous la direction du nouveau ministre, Marc-Yvan Côté. 

La politique de répartition géographique des effectifs médicaux émerge quant à elle comme un des aspects d'une autre politique qui préoccupe le ministère des Affaires sociales, au début des années 1970, soit celle qui vise à limiter le nombre des médecins et à changer la proportion des médecins omnipraticiens par rapport à la proportion des médecins spécialistes. Ce sont des protagonistes de l'alliance administrative qui font émerger la politique, en profitant de la division, dans l'alliance médicale, entre les omnipraticiens et les spécialistes. La politique de répartition est évidemment égalisatrice, elle est aussi hiérarchique en grande partie, en ce qu'elle ne tolère pas de système concurrentiel à celui qu'on veut mettre en place. 

L'émergence ou la non-émergence des cinq politiques étudiées confirme, de façon générale, la théorie de Kingdon. Ce sont ou bien des situations de crise ou bien des changements politiques et leurs séquelles qui créent les conditions favorables à une mise à l'agenda, généralement par le conseil des ministres du parti qui dirige alors le gouvernement. En plus du courant politique, la perception par les décideurs qu'il y a, selon leurs finalités, un problème de répartition des moyens, et que des éléments de solution (qui se trouvent dans les travaux liés à des commissions d'enquête ou à d'autres expertises) existent, font que l'ouverture d'une fenêtre politique réunit les trois ingrédients nécessaires à la mise à l'agenda.

 

Un prolongement de la théorie
de Kingdon

 

Il n'existe pas à propos de l'élaboration des politiques publiques de théorie comparable, par son originalité et sa fécondité, à celle de Kingdon. A bien y regarder, cependant, il est possible d'étendre cette théorie aux deux autres grands processus de la réalisation des politiques, celui de la formulation et celui de la mise en œuvre. 

Des trois courants que distingue Kingdon, ce sont le courant politique et le courant des problèmes qui sont les plus importants lors de l'émergence, le courant des solutions étant néanmoins nécessaire pour qu'on envisage que la politique puisse être formulée puis mise en œuvre dans les processus suivants. Les deux types de fenêtre politique qui permettent que l'émergence arrive à son terme, par la mise à l'agenda, sont d'ailleurs liés l'un au courant politique et l'autre au courant des problèmes (la situation de crise, qui rend un problème proéminent). Dans la formulation, il semble bien que ce soit le couplage du courant politique et du courant des solutions qui importe le plus. Le courant des problèmes est aussi présent, et il se peut fort bien que la définition des problèmes change en cours de formulation, mais, parce qu'ils ont été mis à l'agenda, les problèmes publics auxquels s'attaquent les politiques sont davantage acquis dans le processus de formulation que le sont le soutien politique et la formulation des solutions. 

Dans la mise en œuvre, ce serait l'autre couple, le courant des problèmes et celui des solutions, qui serait tout particulièrement important, le courant politique, au sens où l'entend Kingdon, étant moins présent, sauf dans les politiques publiques où la mise en œuvre est très politisée. Autrement dit, alors que la formulation consisterait surtout à élaborer puis à faire adopter des solutions, qui soient portées par un courant politique, la mise en œuvre, quant à elle, consisterait surtout à appliquer ces solutions à des problèmes publics. Ces problèmes peuvent être différents ou perçus différemment qu'ils l'étaient au moment de l'émergence ou de la formulation. L'émergence, rappelons-le, repose davantage sur le courant des problèmes et le courant politique que sur le courant des solutions. 

Nous allons voir que nos cinq politiques publiques, à l'exception de celle des OSIS, ont traversé plus d'une formulation, parce que l'application des solutions aux problèmes publics de répartition des moyens a été reprise ou encore remise en question. C'est l'occasion de rappeler que les politiques publiques ne se déroulent pas de façon linéaire ou même circulaire, mais plutôt de façon « tourbillonnaire »(Monnier, 1992, p. 87). Non seulement il y a anticipation d'un processus à l'autre, l'élaboration étant anticipée au moment de l'émergence, et ainsi de suite, mais dans la formulation, par exemple, il y a retour à l'émergence pour remettre en question les problèmes tels qu'ils ont été définis à ce moment. Il y a de tels retours également, au moment de la mise en couvre et de l'émergence, celle-ci pouvant consister à remettre à l'agenda des problèmes publics dont on évalue qu'ils n'ont pas été réglés dans la mise en couvre d'une version précédente de la politique publique. 

 

La formulation des politiques

 

Il y a formulation d'une politique quand des mesures visant à réguler les situations mises à l'agenda sont élaborées puis finalement adoptées par l'instance compétente en ce domaine. 

Parce qu'il suppose le concours, surtout, du courant politique et du courant des solutions, le processus de formulation des politiques est souvent conduit par les protagonistes des alliances partisanes, appuyés par ceux de l'alliance administrative. C'est généralement des acteurs de cette alliance que viennent les formulations de solutions qui sont ensuite discutées ou négociées par des acteurs d'autres alliances. 

Les politiques publiques dans le secteur de la santé illustrent cette façon de procéder. Quand le projet de loi sur les services de santé et les services sociaux, qui prévoit la création des CLSC, est discuté au début des années 1970, c'est surtout la vocation de ces organismes et la composition de leurs conseils d'administration qui retiennent l'attention (Lemieux et Labrie, 1979). Le président de la Fédération des médecins spécialistes déclare que les CLSC, en tant qu'organismes qui offrent des services de première ligne, ne sont nécessaires que dans les milieux urbains défavorisés et, de façon temporaire seulement, dans le milieu rural, en attendant que les cliniques médicales, concurrentes des CLSC, s'étendent jusque-là. Les porte-parole de l'alliance médicale, inquiets de l'action des premiers CLSC qui sont en voie d'implantation, demandent qu'un conseil des médecins et dentistes soit créé à l'intérieur des CLSC. 

Les alliances communautaire et syndicale sont aussi présentes dans le débat. Leurs porte-parole demandent que les représentants de la population soient majoritaires au conseil d'administration. Le ministre Castonguay, qui est le leader de l'alliance partisane et de l'alliance administrative, arbitre le débat. Il consent à la création d'un conseil des médecins et dentistes et augmente à la fois la représentation des professionnels et des non-professionnels au conseil d'administration, tout en ajoutant deux représentants de la population, nommés par le gouvernement (à titre de « représentants socio-économiques »). 

Quand, après des évaluations du fonctionnement des CLSC, donc de la mise en couvre de la politique, il y aura de nouvelles formulations, les autorités des alliances partisane et administrative continueront d'arbitrer les débats entre des membres de l'alliance médicale et de l'alliance communautaire. L'alliance administrative n'est d'ailleurs pas sans participer elle-même au débat, comme ce fut le cas lors de l'opération-bilan, faisant suite à des attaques, en 1974, de députés libéraux, qui sont aussi des médecins. L'appartenance de ces députés à l'alliance médicale l'emporte sur leur appartenance à l'alliance libérale, alors dirigée par le ministre Forget. La tendance administrative dans l'équipe chargée du bilan veut une structuration plutôt hiérarchique du pouvoir, du Ministère aux CLSC et de ceux-ci à la population, alors que la tendance communautaire veut une structuration plus polyarchique. De même le rapport du comité Brunet, en 1987, alors que tous les CLSC prévus sont implantés sur le territoire, cherche à concilier les finalités de l'alliance administrative avec celles de l'alliance communautaire, tout en tenant compte de l'existence dans l'environnement des organisations (hôpitaux, polycliniques) à forte présence des membres de l'alliance médicale (sur l'évolution de la politique concernant les CLSC, voir Lemieux 1989b, p. 188-192). 

La politique de décentralisation, concernant les CRSSS, manifeste elle aussi la prédominance de l'alliance administrative. Il y a recul de la tendance administrative dans un premier temps de l'élaboration, quand les offices régionaux prévus dans une première version du projet de loi de 1971 deviennent des conseils régionaux à la suite de l'arbitrage du gouvernement libéral. Les alliances communautaire et médicale appuient pour des raisons différentes cette transformation : les médecins, parce que les pouvoirs des conseils sont moins menaçants pour eux que ceux des offices ; les groupes communautaires, parce qu'ils croient que la structuration du pouvoir aura plus de chances d'être polyarchique que hiérarchique. 

Au fil des années, de nouvelles formulations de politiques confieront de nouveaux mandats aux conseils régionaux, dans un mouvement qui sera dit de décentralisation. Ce mouvement sera tout particulièrement important lors du premier mandat du Parti québécois (1976-1981). Mais comme Jean Turgeon (1989) l'a montré, la plupart de ces mandats concernent des moyens peu importants, les moyens les plus importants (les finalités, l'organisation, les ressources financières) continuant d'être contrôlés par le Ministère. Les conseils régionaux devant gérer de plus en plus de mandats sont en quelque sorte contaminés par la tendance administrative, qui s'impose face à la tendance communautaire, ce qui n'est pas sans inquiéter des protagonistes de l'alliance médicale, qui craignent davantage les fonctionnaires que les groupes communautaires. 

Le rapport de la commission Rochon puis les projets d'élaboration successifs des ministres libéraux Lavoie-Roux et Côté conduisent à transformer les conseils régionaux en régies régionales, où l'on cherche à concilier une structuration encore plus hiérarchique du pouvoir, en 'consacrant ces organismes comme des « petits ministères en région », et une structuration plus polyarchique, en organisant une présence plus prononcée des citoyens dans le conseil d'administration. 

C'est par l'élaboration de mesures visant à diminuer le nombre de médecins spécialistes par rapport au nombre de médecins omnipraticiens que le ministre et ses fonctionnaires agissent, dans un premier temps, sur la répartition géographique des effectifs médicaux. Les deux fédérations de médecins, celle des omnipraticiens et celle des spécialistes, participent aux négociations. Vers la fin des années 1970 des mesures incitatives visent à une plus grande égalisation géographique de la répartition, puis, prétextant le peu de succès de ces mesures le ministre péquiste, puis la ministre libérale (après 1985) tendent, avec l'appui des fonctionnaires, d'une part, à ajouter des mesures plus contraignantes aux mesures incitatives, et, d'autre part, à associer, par la voie de groupes de travail et d'une table de concertation, des représentants de l'alliance administrative (hors de l'appareil gouvernemental central) et de l'alliance communautaire à des consultations, tout en affirmant que c'est au gouvernement de prendre les décisions finales. 

Le projet de loi 120 sur les services de santé et les services sociaux, présenté au début des années 1990, augmente les mesures contraignantes visant à assurer une meilleure répartition, tout en donnant aux gestionnaires des établissements plus de pouvoirs sur les médecins. Ceux-ci protestent contre cette « bureaucratisation » et forcent le ministre Côté à négocier des conditions plus avantageuses pour eux, dont certaines seront incluses dans la version du projet de loi finalement adopté en 1991. 

La formulation de la politique de désengorgement des urgences a commencé, selon toutes les apparences, par être très ponctuelle. En mars 1986, quelques mois après la victoire libérale de décembre 1985, la ministre Thérèse Lavoie-Roux annonce un plan de 156 millions de dollars sur trois ans pour désengorger les salles d'urgence de Montréal et de Québec. Quelques mois plus tard une somme de 15 millions est ajoutée pour atténuer le problème des urgences dans les régions dites « périphériques » de la Montérégie, de Laurentides-Lanaudière et de Trois-Rivières. Les plans sont élaborés par les fonctionnaires du Ministère en collaboration avec les conseils régionaux concernés, donc par des participants à l'alliance administrative. Un peu plus tard, une politique liée au désengorgement des urgences, celle du maintien à domicile, vise à avoir des effets sur l'occupation des lits dans les hôpitaux (Joubert et al., 1991). Des membres de l'alliance communautaire participent à cette politique, qui est aussi le fait de fonctionnaires de l'alliance administrative. La politique est différenciatrice, visant certaines régions plutôt que d'autres, et elle a un certain caractère polyarchique, par la participation des CLSC et des groupes communautaires. 

Il n'y a pas lieu de revenir sur la politique concernant les OSIS, étant donné qu'elle n'a pas franchi l'étape officielle de l'émergence. Notons seulement que le caractère extrêmement compliqué de la formulation des règles (ses concepteurs ne distinguaient pas moins de 37 paramètres...), visant à définir ces organismes dans le système public de la santé, n'a pas aidé à en favoriser l'émergence. Le moins qu'on puisse dire c'est que l'alliance managériale n'a pas su s'imposer dans le courant des solutions, quand elle s'est inscrite dans le processus de formulation de sa politique. 

Les processus de formulation des politiques étudiées montrent l'importance du courant des solutions dans les débats entre les acteurs appartenant aux différentes alliances, mais non sans que le courant politique importe également, étant donné que c'est par ce courant que les solutions autres que strictement administratives sont finalement adoptées.

 

La mise en oeuvre des politiques

 

Une politique qui a été élaborée et finalement adoptée est mise en couvre quand des mesures de régulation sont effectivement appliquées aux situations qui font problème. 

Dans le prolongement de la théorie de Kingdon, nous avons posé que les processus de mise en couvre dépendaient principalement du courant des problèmes et du courant des solutions. Plus exactement, la mise en couvre est réussie quand les solutions sont appliquées de façon adéquate aux problèmes publics de répartition des moyens qui sont à l'origine des politiques, ou encore qui sont constatés en cours de réalisation des politiques. Ce serait donc ceux qui sont chargés de l'application des solutions et ceux qui sont impliqués dans les problèmes qui tiendraient le plus de place dans les processus de la mise en couvre, ainsi d'ailleurs que dans les processus d'évaluation qui leur sont souvent associés. 

La politique de décentralisation illustre cette affirmation théorique. Cette politique avait surtout pour finalité d'égaliser les relations entre le centre et la périphérie et de permettre, par une structuration moins hiérarchique du pouvoir, aux membres de l'alliance communautaire, principalement, de participer davantage aux décisions qui les concernaient. À cet égard la mise en œuvre de la politique n'a apporté que des solutions partielles aux problèmes détectés. La décentralisation en direction des régions a favorisé la bureaucratisation des conseils régionaux, elle a entraîné dans certains dossiers la centralisation du local vers le régional, et dans d'autres dossiers, elle n'a pas empêché les établissements, les hôpitaux en particulier, de continuer de faire pression sur les instances centrales du Ministère de façon à profiter du monopole dont elles disposent sur l'attribution d'équipements coûteux (sur ce point, voir Rocher, 1990). 

La création de régies régionales et la volonté d'y asseoir les citoyens peuvent être interprétées, dans cette perspective, comme une tentative un peu contradictoire de donner plus de pouvoir aux administrations régionales et de limiter ce pouvoir en favorisant celui des citoyens (à ce sujet voir le chapitre 7 sur la participation des citoyens). 

La mise en oeuvre de la politique concernant les CLSC est intéressante de notre point de vue parce qu'elle met en scène, à un moment ou l'autre, des représentants de chacune des alliances que nous avons distinguées, même si c'est l'alliance administrative qui est au centre du processus. Dès le début de la mise en œuvre, au commencement des années 1970, des membres de l'alliance libérale, qui sont aussi des médecins, s'inquiètent à l'Assemblée nationale, de ce qui se passe dans certains CLSC, sous le couvert de l'action communautaire, et proclament l'inutilité de ces organismes sur le plan médical. Comme nous l'avons déjà rappelé, le ministre Forget crée alors un groupe chargé d'une opération-bilan, où s'affrontent des membres de l'alliance administrative et de l'alliance communautaire. Il y aura d'ailleurs un rapport minoritaire, venant des représentants de cette seconde alliance, qui proposera une structuration polyarchique des relations entre les CLSC et leurs principaux partenaires, alors que le rapport majoritaire proposera une structuration davantage hiérarchique (Lemieux et Labrie, 1979). Par d'autres interventions les médecins obtiendront du Ministère que la présence dans les CLSC de leurs collègues d'obédience communautaire soit contenue par des règles contraignantes. L'extension à l'ensemble du Québec du réseau des CLSC opposera des protagonistes de l'alliance communautaire à ceux des alliances administrative et partisane. Quand un nouveau bilan des CLSC sera fait au milieu des années 1980, le comité manifestera (dans le rapport Brunet) surtout des tendances administratives et même managériales, contre les initiatives communautaires soi-disant trop variées prises par les CLSC. 

La politique concernant les CLSC montre que, même si le courant politique est moins présent que les deux autres dans la mise en œuvre, il n'est quand même pas tout à fait absent, surtout quand il y a politisation de ce processus. Pour cette raison ou pour d'autres, la mise en œuvre entraîne souvent des évaluations qui peuvent être considérées comme de nouvelles tentatives d'émergence, avec la prédominance du courant des problèmes et du courant politique qu'elle implique. 

Dans la politique de répartition géographique des effectifs médicaux des protagonistes de l'alliance administrative, sous l'autorité des ministres et donc des partis de gouvernement, ont réussi à réduire, dans la mise en œuvre, le nombre relatif des médecins spécialistes par rapport aux médecins omnipraticiens, mais leurs succès dans l'amélioration de la répartition géographique furent plus limités, surtout du côté des spécialistes. Des membres de l'alliance communautaire, appuyés dans certains cas par des élus, ont renforcé par leurs récriminations les constats faits par les bureaucrates, selon lesquels les mesures incitatives, appuyées par les organisations de médecins, ne suffisaient pas et qu'il fallait imposer aux omnipraticiens et spécialistes des mesures plus contraignantes. On a vu, à propos des processus d'élaboration, que les mesures coercitives avaient rencontré une forte opposition de la part des membres de l'alliance médicale, unis sur ce point, et que le ministre et ses conseillers administratifs avaient dû reculer pour revenir à des mesures plus incitatives. Le premier ministre, sensible à la dimension politique et électoraliste du débat, serait intervenu en faveur des médecins, contre les positions de certains participants des alliances administrative et communautaire. 

La mise en œuvre de la politique de désengorgement des urgences a donné lieu à des stratégies fort compréhensibles de la part de certains directeurs généraux d'hôpitaux et de leurs entourages. Ils voulaient convaincre la direction du Ministère qu'il y avait des problèmes d'urgence à régler dans les hôpitaux, de façon à pouvoir utiliser les sommes d'argent consenties pour régler les problèmes plus généraux de déficit budgétaire dans ces hôpitaux. C'est probablement pour ces raisons et aussi parce que, dans les faits et dans l'opinion publique, le problème des urgences n'apparaissait pas vraiment réglé, que le ministre Marc-Yvan Côté a créé, en février 1990, le Groupe tactique d'intervention (GTI), fait surtout de cadres et de professionnels de la santé, dont plusieurs médecins et infirmières, avec pour mandat de se rendre dans tous les services d'urgence présentant des problèmes d'engorgement, de mettre en lumière les problèmes d'organisation et de fonctionnement des salles d'urgence et de regarder les politiques et procédures d'admission et de gestion des lits hospitaliers. Le Groupe avait une tâche d'évaluation et d'assistance à la mise en œuvre de la politique. 

Un groupe de travail du Ministère, le Groupe stratégique des urgences, s'est inspiré des conclusions du GTI pour proposer une nouvelle formulation de la politique qui va jusqu'à remettre en question le mode actuel de financement des hôpitaux. Ce qui montre bien que c'est l'importance du courant des solutions qui est commune au sous-système de la formulation et au sous-système de la mise en oeuvre, et que c'est dans ce dernier sous-système qu'on trouve des problèmes souvent oubliés dans la formulation. 

 

Les alliances, les trois courants
et la prise de décision

 

La brève étude que nous avons faite de chacune des politiques publiques, dans leurs processus d'émergence, de formulation et de mise en œuvre, a montré que les principaux protagonistes de chacune des alliances n'ont pas une présence égale dans le courant politique, dans le courant des problèmes et dans le courant des solutions. On peut expliquer cela par des différences dans le savoir-faire de ces protagonistes en chacun des trois courants, le savoir-faire politique, le savoir-faire critique et le savoir-faire technique. 

Le tableau 2 établit de façon approximative la quantité de savoir-faire des protagonistes de chacune des alliances dans le courant politique, dans le courant des problèmes et dans le courant des solutions, en distinguant trois degrés (+, ± et -), de la plus grande quantité à la plus petite.
 

Tableau 2

Degré de savoir-faire des protagonistes des différentes alliances
dans chacun des trois courants

 

Alliance

Courant politique

Courant
des problèmes

Courant
des solutions

(savoir-faire
politique)

(savoir-faire
critique)

(savoir-faire
technique)

libérale

+

±

-

péquiste

+

±

-

administrative

±

±

+

managériale

±

-

-

médicale

-

+

+

communautaire

-

+

±

 

Les degrés de savoir-faire ont été établis de manière approximative, de façon à rendre compte de ce que nous avons constaté du pouvoir des alliances dans les processus d'émergence, d'élaboration et de mise en œuvre des politiques. 

Notons cependant que nous nous sommes astreints à accorder un nombre égal de degrés +, ± et -, soit six chacun. Le nombre de degrés n'est toutefois pas le même d'une colonne à l'autre. Au total, c'est dans la colonne du courant des problèmes qu'il y aurait le plus de savoir-faire, suivie de la colonne du courant politique et de la colonne du courant des solutions. Si on s'en tient aux six alliances et qu'on leur accorde (de façon sans doute contestable) un poids égal, il y aurait donc dans le système une espèce de déficit du savoir-faire technique par rapport au savoir-faire critique, ce qui pourrait expliquer que souvent les politiques publiques n'arrivent pas à régler de façon satisfaisante les problèmes auxquels elles s'attaquent. 

Au total, si on considère que chacun des trois savoir-faire a la même importance, ce sont les alliances administrative et médicale qui auraient le plus de pouvoir, suivies des alliances partisanes, puis des alliances communautaire et managériale. Il n'en est cependant pas de même dans les trois processus de l'émergence, de la formulation et de la mise en oeuvre. 

Le tableau 2 montre que les alliances partisanes ont au total le plus de savoir-faire dans les deux courants principaux de l'émergence des politiques, le courant des problèmes et le courant politique. Cela explique que les principaux protagonistes de ces alliances dominent les processus d'émergence, généralement avec l'aide de participants aux alliances administrative, managériale ou médicale qui fournissent, de façon secondaire, les éléments de solution nécessaires à la mise à l'agenda. Les administrateurs et managers, plus proches des politiciens, ont pour cela un avantage sur les médecins. Il peut toutefois arriver, comme dans le cas de la répartition des effectifs médicaux, qu'une politique vienne principalement du courant des problèmes et que le savoir-faire politique des alliances partisanes y soit moins nécessaire. À l'inverse quand une politique comme celle du désengorgement des urgences est fortement portée par le courant politique, les alliances partisanes y tiennent une place beaucoup plus grande. 

Dans les processus de formulation des politiques, à supposer que le courant des solutions et le courant politique y soient les plus importants, l'alliance administrative est celle qui, au total, a le plus de savoir-faire. Il est utile à cet égard de distinguer les processus d'élaboration des processus d'adoption dans ceux de formulation. Dans l'élaboration, le savoir-faire technique est celui qui importe le plus, alors que dans l'adoption, c'est plutôt le savoir-faire politique, du moins quand l'adoption n'est pas le fait des fonctionnaires. 

Ce n'est pas dire que la formulation se limite aux acteurs partisans et aux administrateurs, ou encore aux managers. Parce que les préoccupations touchant la mise en œuvre sont présentes dans la formulation, surtout s'il s'agit d'une nouvelle élaboration d'une politique déjà mise en œuvre, des protagonistes des alliances médicale ou communautaire peuvent fort bien intervenir parce qu'ils estiment que les solutions ne sont pas appropriées aux problèmes a propos desquels ils ont un savoir-faire critique. La politique de répartition des effectifs médicaux et celle concernant les CLSC montrent bien cela, de la part des médecins surtout. Parce qu'ils n'ont pas beaucoup de savoir-faire dans le courant politique, qui est déterminant au moment de l'adoption, les médecins chercheraient alors à se coaliser avec des protagonistes de l'alliance partisane qui dirige le gouvernement, ce qui s'est produit dans le cas des deux politiques en question. 

Dans la mise en œuvre, où nous avons présumé que le courant des problèmes et celui des solutions sont les plus importants, ce sont les alliances médicale puis administrative qui ont au total le plus de savoir-faire. La première a plus de savoir-faire critique que l'autre, ce qui explique en bonne partie les conflits entre les deux, les médecins se plaignant des solutions bureaucratiques proposées par les administrateurs qui, pour leur part, reprochent aux médecins d'être enfermés dans leur vision étroite des problèmes. L'opposition entre les valeurs de polyarchie et de différenciation propres aux médecins, et les valeurs de hiérarchie et l'égalisation tempérée de différenciation, propres aux administrateurs, contribue à alimenter le conflit. 

Les protagonistes de l'alliance médicale pourraient trouver des appuis du côté des managers, dont les valeurs sont plus proches des leurs, mais comme le montre le cas de la politique avortée des OSIS, les solutions des managers s'appliquent difficilement dans un système où la régulation étatique est encore hiérarchique et égalisatrice, bien plus que polyarchique et différenciatrice. 

Quant à l'alliance communautaire, la richesse de son savoir-faire critique, couplée à la pauvreté relative de ses savoir-faire technique et surtout politique l'écarte à toutes fins utiles des processus de formulation. Elle est mieux placée dans les processus d'émergence, où elle se trouve cependant dépendante des alliances partisanes, et dans le processus de mise en oeuvre, où les médecins ont cependant plus de savoir-faire qu'elle, et les administrateurs, autant. De plus, les protagonistes de l'alliance communautaire peuvent difficilement se coaliser avec les membres de ces deux autres alliances, car les préférences envers la régulation sont assez différentes de part et d'autre.

 

Quelques aperçus comparatifs

 

On peut se demander si les constats auxquels nous arrivons sur le savoir-faire des alliances et le pouvoir qu'elles exercent dans la réalisation des politiques publiques valent seulement pour un système de santé comme celui du Québec et des autres provinces canadiennes, ou s'ils valent aussi pour d'autres systèmes, dont ceux des États-Unis, de la Grande-Bretagne ou de la Suède (sur ces systèmes, voir en particulier Heidenheimer et al., 1990, p. 57-96 ; et Bjorkman, 1985). 

Dans tous les systèmes il semble bien que le pouvoir des médecins, dans ce que nous avons nommé l'« alliance médicale », soit dominant, du moins quand ils interviennent dans la prise de décision. C'est la conclusion de Bjorkman, qui a étudié, de façon comparative, la gouverne dans le secteur de la santé, en Grande-Bretagne, en Suède et aux États-Unis. Les médecins subissent à l'occasion les assauts des administrateurs et des politiciens, en particulier au moment des réformes importantes dans le secteur de la santé, mais leur pouvoir, qui est souvent un pouvoir de veto, réside fondamentalement en ce que leur participation est nécessaire à la mise en oeuvre des politiques, comme le montre bien le développement précédent sur les savoir-faire. 

Le pouvoir des alliances partisanes est davantage variable, selon les systèmes et les conjonctures. Dans tous les systèmes, on l'oublie trop souvent, ce sont des partis de gouvernement qui sont à l'origine des réformes importantes, que ce soit dans les processus d'émergence ou dans les processus de formulation, On n'a qu'à penser à la réforme de la fin des années 1980, en Grande-Bretagne, visant à introduire dans un système public des marges de manœuvre chez les médecins, qui s'apparentent à celles des acteurs dans le secteur privé, et à favoriser la concurrence entre les hôpitaux, avec la possibilité pour eux de se retirer du système public. Ces réformes portent évidemment la marque du gouvernement conservateur de Margaret Thatcher. Les positions différentes des administrations républicaines de Reagan et de Bush, et de l'administration démocrate de Clinton, à propos des changements à opérer dans le système de santé aux États-Unis, montrent elles aussi qu'en ce secteur comme en d'autres les alliances partisanes font parfois une différence. 

Ajoutons qu'aux États-Unis, comme le note Heidenheimer (1990, p. 67), il ne suffit pas pour qu'une réforme soit enclenchée que quelques ministres, appuyés de fonctionnaires, soient d'accord. Des négociations délicates doivent se faire à l'intérieur d'une alliance partisane et d'une alliance partisane à l'autre, au Congrès en particulier, sans parler des négociations avec les groupes d'intéressés, dont les médecins, mais aussi des membres de l'alliance industrielle (préoccupée d'assurances privées, d'équipements, etc.), plus importante dans un système qui demeure en bonne partie privé que dans les systèmes davantage publics. 

Si les membres des alliances administrative ou managériale sont habituellement les principaux conseillers des politiciens dans les réformes, petites ou grandes, du secteur de la santé, c'est surtout dans les reformulations, ainsi que dans la mise en œuvre que les administrateurs, plus que les managers, exercent leur pouvoir, lequel, aux yeux des médecins et des membres des alliances communautaires, va souvent dans le sens de la bureaucratisation. Cela vaut pour tous les systèmes publics, mais beaucoup moins pour un système mixte comme celui des États-Unis, où la bureaucratisation est plutôt le fait de l'alliance industrielle, et en particulier des compagnies d'assurances. 

Quant aux alliances communautaires, leurs membres semblent en position d'infériorité dans tous les systèmes. Les recherches sur le terrain faites par Bjorkman en Grande-Bretagne, en Suède et aux États-Unis le conduisent (1985, p. 414-415) à des conclusions désabusées sur la participation des membres de ces alliances aux conseils, commissions ou comités liés à la réalisation des politiques dans le secteur de la santé. Ils ne servent, dit-il, qu'à légitimer des options qui ont été sélectionnées par les administrateurs et les professionnels. Ils n'ont pas de prise sur les ordres du jour, et ils n'ont pas l'information nécessaire pour discuter efficacement des matières techniques. S'il arrive que les représentants de la population sont trop souvent en désaccord avec les élites, ils sont ostracisés par celles-ci. Dans un cas comme dans l'autre leur pouvoir est très limité.

 

Conclusion

 

L'étude de la prise de décision dans les cinq politiques publiques que us avons choisies conduit à des conclusions plus complexes que simples. Elle montre que les configurations dominantes d'acteurs varient selon qu'il s'agit des processus d'émergence, de formulation et de mise en œuvre, lesquels renvoient d'ailleurs l'un à l'autre. Le parti de gouvernement a généralement le dernier mot dans l'émergence et la formulation, mais il ne peut se passer des administrations, surtout dans la formulation et, de plus, il est habituellement absent de la mise en œuvre. Les administrations sont présentes dans les trois processus, mais elles sont généralement dépendantes des partis dans l'émergence et à la fin de la formulation, et ont aussi à composer parfois avec les médecins dans la formulation, et à peu près toujours avec eux ou les groupes communautaires dans la mise en œuvre. Ceux-ci, à la différence des médecins, n'ont pas beaucoup de pouvoir hors de ce processus, tandis que les managers, champions de l'efficience dans le secteur publie ou hors de lui, n'ont pas encore les appuis suffisants dans le courant politique et dans le courant des problèmes pour influencer de façon importante les politiques publiques dans le secteur de la santé. 

On peut cependant prévoir que dans les prochaines années le pouvoir de l'alliance managériale augmentera, étant donné les problèmes de financement des services de santé, qui deviendront de plus en plus grands. Cette augmentation de pouvoir ne se fera cependant pas sans heurts. Hors de l'alliance libérale, dont les préférences sont proches des siennes, l'alliance managériale aura à faire face à la résistance de chacune des autres alliances. L'alliance médicale, même si elle partage avec l'alliance managériale certaines valeurs de différenciation, résistera sans aucun doute aux limites dans la rémunération des médecins que les managers ne pourront manquer de proposer. L'alliance administrative, la plus proche concurrente de l'alliance managériale, est toujours susceptible par sa tendance à la bureaucratisation de limiter les valeurs de polyarchie et de différenciation qui sont portées par l'alliance managériale. Quant aux alliances péquiste et communautaire, si leurs préférences ne changent pas, elles seront sans doute plus opposées encore aux projets de l'alliance managériale et en particulier à ses valeurs de différenciation. 

Il demeure cependant que le monde des années 1990 n'est plus celui des décennies précédentes. Dans le courant politique, les idées qui sont dans l'esprit du temps ne sont plus les mêmes. Elles favorisent les valeurs de l'alliance managériale. Et comme le note Kingdon, au début de son livre, en citant Victor Hugo, une idée dont l'heure est venue est plus puissante qu'une grande armée.

 

Références

 

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*    Ce chapitre utilise des données qui ont été recueillies grâce à une subvention du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Je remercie Chantal Blouin, Dominique Caron, Louis Demers, France Gagnon et Joanne Laperrière qui ont collaboré à la recherche.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le vendredi 30 mai 2008 15:07
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cegep de Chicoutimi.
 



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