RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir du texte d'Anne Legaré, “La souveraineté: nation ou raison?” Un texte publié dans l’ouvrage sous la direction d’Alain-G. Gagnon, Québec: État et société. Tome I, chapitre 2, pp. 41-59. Montréal: Les Éditions Québec/Amérique, 1994, 509 pp. Collection: Société : dossiers documents. Une édition numérique réalisée par Pierre Patenaude, bénévole, professeur de français à la retraite et écrivain, Chambord, Lac—St-Jean. [Le 11 juillet 2004, Mme Légaré nous reconfirmait son autorisation de diffuser ce texte dans Les Classiques des sciences sociales.]

[41]

Anne LEGARÉ

Professeure associée, Département des sciences politiques, UQÀM

La souveraineté :
nation ou raison ?


Un texte publié dans l’ouvrage sous la direction d’Alain-G. Gagnon, Québec : État et société. Tome I, première partie: “Le nationalisme québécois et la réforme constitutionnelle.” chapitre 2, pp. 41-59. Montréal: Les Éditions Québec/Amérique, 1994, 509 pp. Collection: Société: dossiers documents.


Vues de l'extérieur, les transformations politiques qui ont cours au Québec depuis quelques années ne sont pas aisément saisissables. Elles sont parfois réduites à des catégories non pertinentes, décolonisation attardée, nationalisme ethnique ou frileux, protectionnisme, isolationnisme, provincialisme, etc. Outre l'esprit de facilité qui caractérise ces interprétations rapides, parfois démagogiques, il demeure que le fait québécois n'est pas d'une évidence absolue.

Les coordonnées objectives et subjectives du processus québécois sont difficilement comparables à celles de n'importe quelle situation extérieure ; c'est pourquoi la compréhension du mouvement qui les porte demande une attention particulière. Ce qui caractérise en effet ce mouvement, c'est une complexité d'éléments qui, à certains égards, peuvent apparaître contradictoires. Le Québec est une province économiquement développée, fortement intégrée à l'espace économique nord-américain, prospère et démocratique. À l'heure de la formation de grands ensembles économiques, à l'heure de l'ALÉNA, le Québec aspire à former un État souverain. Certains diront qu'il s'agit là d'une dérive nationaliste, d'une aspiration ethnique appuyée exclusivement sur la langue et la culture, d'une tendance protectionniste, d'une volonté de repli sur soi.

Pourtant, la protection de la langue et de la culture d'un peuple sont des aspirations fondamentales, bien légitimes, liées à son identité. Elles sont, de plein droit, démocratiques, et le droit international les reconnaît. C'est le caractère d'exclusion à l'endroit des cultures qui cohabitent en sol québécois qui enlèverait toute légitimité à ces aspirations, surtout dans un contexte de voisinage interculturel étroit, comme c'est le cas du Québec.

Or, contrairement à ce que soutiennent les détracteurs de la souveraineté du Québec, ce mouvement se caractérise par le pluralisme, traduit dans ses lois, l'ouverture et son respect de l'interdépendance continentale. Le Parti québécois a de longue date appuyé les accords visant à l'intégration économique continentale puis à l'ALÉNA, et sa conception de la démocratie se fonde sur les droits politiques et sur la non-discrimination culturelle ou ethnique. Le Bloc québécois, parti souverainiste sur la scène fédérale, se caractérise par les mêmes options. Ce mouvement représente une forme avancée de libéralisme politique, appuyée sur le respect des droits des minorités, sur ceux de la communauté anglophone et sur les droits collectifs des nations autochtones qui résident en sol québécois. Ce respect des droits des minorités est exhaustif. Non seulement préconise-t-il la reconnaissance des droits sociaux et culturels de ces minorités, mais encore il souscrit à des mesures de protection de ces [42] héritages spécifiques. Il faut aussi ajouter que la Charte des droits et libertés de la personne au Québec (tout particulièrement les articles 10, 43 et 86 à 92), qui continuera de s'appliquer advenant la souveraineté, est un engagement décisif en faveur de la diversité (Commission, 1992). Entretenir le doute sur ces faits, c'est extrapoler de façon inappropriée les retombées des nationalismes ethniques qui font suite à la chute de l'empire soviétique ou, encore, c'est projeter sur la communauté francophone un regard de suspicion, inspiré de siècles de domination, à l'effet que cette collectivité serait incapable d'égalité. Si on a raison de mettre en garde contre ces projections, il est important de saisir la portée réelle du cas québécois, car il échappe à toute configuration classique.

Qu'en est-il exactement ? Quelle est la nature du mouvement souverainiste ? Je tenterai d'abord de répondre à cette question en m'appuyant sur quelques prémisses théoriques à propos de la démocratie ainsi que sur les liens entre la citoyenneté et la nation. Je présenterai ensuite le poids spécifique de l'État dans la logique du mouvement souverainiste québécois qui fonde le principal horizon idéologique du mouvement québécois, ce que j'appellerai la rationalité subjective des partisans de la souveraineté, en lieu et place d'une idéologie nationaliste passéiste. L'État sera vu comme facteur aussi bien externe qu'interne. C'est à l'égard de ces diverses coordonnées que le Québec représente un cas d'espèce. Cette réflexion vise donc à poser les paramètres d'une lecture du mouvement souverainiste à la lumière des droits et des enjeux démocratiques qui le traversent.

Dans un premier temps, sur le plan de sa dynamique interne, cette volonté de changement soulève des questions décisives quant aux nouveaux liens qui se mettront en place entre la citoyenneté, l'État et la nation. C'est une nouvelle nation qui prendra forme. C'est un nouveau « vouloir vivre ensemble », selon la belle formule de Renan (1992, p. 54-55), qui dirait encore qu'« une nation est une grande solidarité, constituée par le sentiment des sacrifices qu'on a faits et de ceux qu'on est disposé à faire encore. Elle suppose un passé ; elle se résume pourtant dans le présent par un fait tangible : le consentement, le désir exprimé de continuer la vie commune. » Dans le cas de la nouvelle nation en formation à travers la transition qu'inaugurera la souveraineté, « la vie commune », cet « ensemble » évoqué ici devra donc comprendre le lien social et politique entre les divers ensembles culturels réunis en sol québécois.

Dans un deuxième temps, l'aspiration souverainiste sera abordée par rapport au statut spécifique des États souverains à l'égard de la démocratie, dans le cadre de la formation des grands ensembles. C'est pourquoi ce texte comprend deux parties. L'une qui établit un lien, sur le plan interne, entre citoyenneté et État dans la formation de la nouvelle nation ; la seconde qui relie, sur le plan externe, ce sujet politique aux enjeux de la communauté d'intérêts formée par un ensemble d'États, en même temps que son fondement là où s'exerce véritablement la démocratie, c'est-à-dire à l'intérieur de chaque espace national.


LA SOUVERAINETÉ :
UNE NATION À REDÉFINIR


La volonté souverainiste qui s'exprime sur l'échiquier politique du Québec désigne un mouvement d'affirmation politique régional et national à caractère démocratique [43] et libéral, dans une des aires économiques parmi les plus prospères du monde. Ce mouvement est l'initiative d'un ensemble dont les caractéristiques culturelles et linguistiques en font une communauté francophone spécifique. Cependant, au-delà de ces caractéristiques socio-démographiques, c'est l'unité des composantes politiques et économiques du Québec qui transgressent la spécificité de ce seul groupe et font de ce mouvement un cas d'espèce. En effet, le fait que le Québec appartient à l'aire économique nord-américaine (tout en aspirant à dénouer des liens coloniaux pour devenir souverain) invite ce mouvement à être créateur vis-à-vis des conceptions anciennes de la souveraineté, de l'État et de son lien à la nation. La parenté infime qui associe la communauté francophone à son partenaire immédiat en sol québécois, la communauté anglophone, sous-tend aussi l'ouverture de ce mouvement. C'est pourquoi le mouvement souverainiste du Québec, dans les orientations explicites qui caractérisent ses tendances dominantes, fait exception aux catégories politiques tout usage. Il est une expression typique du Nouveau Monde. La forte volonté souverainiste qui caractérise le Québec tend à assigner du même coup les processus actuels de légitimation nationale à l'enseigne de la transition.

La définition de la souveraineté véhiculée par ce mouvement se fonde sur ce que le juriste Jacques-Yvan Morin appelle « la souveraineté qualitative », à savoir une conception qui autorise à faire toutes ses lois, à prélever ses impôts et à signer des traités. Cependant, ce mouvement, parce qu'il veut adhérer à l'ALENA à titre d'État, accepte du même coup le principe de restriction de la souveraineté « quantitative » dans la mesure où, comme le dit J.-Y. Morin (1992, p. 14), la souveraineté demeure « la faculté pour un État de déterminer lui-même l'étendue de ses compétences, dans les limites dictées par le droit international ».

C'est cet esprit qui guidera notre analyse. En effet, « ce dont nous sommes témoins, dira J.-Y. Morin (1992, p. 3), [...] et qui doit éclairer notre lecture des événements québécois et canadiens, c'est de l'affirmation de deux tendances en apparence contradictoires : d'une part l'acception à l'Ouest, dans les pays développés, de restrictions à la souveraineté quantitative des États, tout en prenant garde de n'en pas abandonner le principe, la souveraineté “qualitative” et, d'autre part, le refus, surtout à l'Est et dans certaines parties du Tiers Monde, des limitations de souveraineté imposées par l'histoire à une époque où la force paraissait plus acceptable qu'elle ne l'est aujourd'hui, à la fin du siècle des droits de l'homme et du droit des peuples. Dans ce contexte, le cas du Québec [...] pourrait être exemplaire, s'il venait à être réglé correctement dans le contexte plus particulier du monde développé et de l'Amérique du Nord, continent qui, contrairement à l'Europe, n'est pas fondé sur le principe de diversité. » C'est l'ensemble de ces nouveaux enjeux que ce texte veut aborder afin de poser le caractère spécifique des conditions entourant le mouvement qui aspire à la souveraineté du Québec.

L'éclairage premier par lequel se pose, selon nous, la question québécoise est qu'elle induit le caractère mouvant et transitoire de la définition de la nation et de son lien avec l'État. Comme l'écrivait Renan (1992, p. 55), encore une fois, « les nations ne sont pas quelque chose d'éternel. Elles ont commencé, elles finiront. » Si on peut dire qu'il existe une nation culturelle québécoise définissable empiriquement et historiquement, à travers les liens sociaux et culturels des communautés qui résident en sol québécois, [44] la consolidation juridico-politique des liens de ses différentes composantes dans la perspective souverainiste reste encore un enjeu. Dans ce futur contexte, ces liens amèneront cette nation à se redéfinir. La consolidation de cette nation dans des conditions qui la constitueront par rapport à l'État du Québec et à ses institutions de droit demeure en effet un enjeu parce que ses liens avec les minorités seront plus directement visés par un processus d'élargissement, d'intégration et de légitimation. C'est la transition vers la souveraineté qui devra veiller à assurer la cohésion de cette nouvelle nation. La réussite d'un référendum annoncera cette transition : ce consentement devra s'approfondir par l'exemplarité des droits et s'appuyer sur le citoyen québécois comme sujet de la future constitution. C'est à travers une symbolique renouvelée que prendra forme ce nouveau consentement.

C'est pourquoi la redéfinition de la nation québécoise et sa dynamique interne est le véritable centre de cette transition politique. Son apport au futur État conditionne sa définition et son statut. Rappelons la définition de l'abbé Sieyès de 1789 : « La nation est un corps d'associés vivant sous une loi commune et représentée par la même législature. » (Sieyès, 1982, p. 31) Et encore, « toute société ne peut être que l'ouvrage d'une convention entre tous les associés [...], il n'y a point d'engagement s'il n'est fondé sur la volonté libre des contractants. Donc, point d'association légitime si elle ne s'établit sur un contrat réciproque, volontaire et libre de la part des co-associés [...] » Ainsi, « la volonté générale est donc formée par la volonté de la pluralité. Tous les pouvoirs publics, sans distinction, sont une émanation de la volonté générale ; tous viennent du peuple, c'est-à-dire de la nation. Les deux termes doivent être synonymes. » (Legaré, 1991, p. 72-73) Au-delà de la formation des grands ensembles, la nation dans son lien avec l'État demeure donc l'assise de ce contrat démocratique.

Le mouvement souverainiste québécois est ainsi traversé par une série de questions : la définition de cette nation en transformation, son lien avec la citoyenneté, la relation, enfin, entre la citoyenneté, la nation et l'État, le statut et la définition de la souveraineté dans le cadre de ce nouvel État au cœur d'un ensemble économique intégré, etc. Voilà autant de questions qu'on doit analyser pour évaluer le mouvement souverainiste dans son ampleur véritable, une ampleur théorique tout autant que politique.


UNE SUBJECTIVITÉ POLITIQUE
RATIONNELLE


Pour en saisir les assises, nous évoquerons d'abord le concept de démocratie. Il est déplorable, en effet, que le projet démocratique soit la plupart du temps évalué par rapport à sa manifestation comptable, à une majorité électorale ou référendaire. Il s'agit là, bien entendu, de l'expression d'un droit fondamental, le droit de vote. Le choix entre des partis exprime, quelles qu'en soient les apparences, des différences entre grandes familles politiques, entre pôles et rives d'appartenance. Toutefois, la démocratie, pour être véritable, traduit non seulement l'existence d'un sujet de droit mais aussi celle d'un sujet politique comme auteur de ce choix. Et ce sujet n'est jamais donné, a priori, comme dans une sorte de causalité structurelle ; il est, bien au contraire, en perpétuelle formation.

[45]

Toute volonté démocratique, exprimée dans un plébiscite, est l'indice de l'existence d'un sujet politique. Ce sujet politique peut être éclaté, fragmenté, mais il peut aussi être traversé par une série de caractéristiques qui en traduisent la relative unité. Cette tendance à l'unité n'est pas donnée par des structures qui lui préexisteraient. Elle est, bien au contraire, le fruit de multiples contingences historiques qui s'amalgament, s'associent, se consolident au cours des événements, comme un mouvement de convergences qui déborde toute prédiction.

C'est ainsi que la démocratie évolue, s'approfondit, élargit le spectre des possibles. Toute son histoire est celle d'émergences nouvelles. Peut-être est-ce là le premier constat qui demande modestie : la signification de la démocratie impose qu'on prenne acte de son parcours. Le mouvement souverainiste peut ainsi se comprendre à la lumière de ce présupposé fondamental : l'histoire voit l'émergence des subjectivités qui se constituent à travers la série de choix politiques auxquels les événements invitent. C'est donc historiquement que la démocratie se définit. C'est historiquement, par des acteurs politiques, que le fédéralisme canadien a été conçu. C'est historiquement, par la conscience d'autres acteurs, qu'il est remis en cause.

L'actuelle convergence souverainiste au Québec représente donc l'expression d'un tel parcours démocratique. Le caractère principal de ce mouvement, sa logique profonde, a pris forme d'abord à l'occasion de la commission Tremblay, en 1956, qui a inauguré le souci de rationalité étatique du Québec, thème qui deviendra ensuite central pour la population québécoise. À partir de ce moment, le mouvement historique d'affirmation souverainiste s'est divisé en deux principales tendances. La première, minoritaire, était inspirée par la référence aux origines, l'autre, largement dominante aujourd'hui, issue de la préoccupation politico-administrative de 1956, est caractérisée par la volonté de rationalisation étatique. La commission Bélanger-Campeau, en 1991, a aussi marqué un autre moment fort de cette tendance étatico-rationnelle. Le mouvement actuel, dans une logique et une rationalité approfondies, donne maintenant à toute sa démarche cette signification. C'est ainsi que la démocratie avance, par la clarification de plus en plus large d'un enjeu unificateur qui sous-tend l'émergence d'un nouveau sujet politique.

Qu'on le veuille ou non, le mouvement souverainiste repose sur un imaginaire étatico-politique et, disons-le, de tendance plutôt républicaine. C'est pourquoi il appartiendra à la société souveraine de créer, le cas échéant, les conditions d'une autonomie plus accomplie vis-à-vis de l'État et d'un espace public plus autonome. Le principe de diversité, inscrit à l'agenda souverainiste, y trouvera nécessairement une actualité. Le rationalisme souverainiste, si rassurant soit-il, accompagne donc des enjeux fondamentaux à l'égard de l'autonomie de la société vis-à-vis de l'État, hérités d'une longue culture politique québécoise d'intégration au bénéfice de l'État (Legaré, 1989). La transition suscitée par la souveraineté après le référendum devra donc être l'occasion de solliciter la subjectivité nécessaire à une démocratie politique encore plus accomplie.

La volonté souverainiste qui traverse la population québécoise, dans son expression récente (présence du Bloc québécois sur la scène fédérale, élection du Parti québécois), demande donc à être interprétée comme une phase dans une dynamique en mouvement qui s'inscrira en profondeur dans cette histoire de la démocratie bien au-delà du moment stratégique que constituera le référendum.  la présente heure de son évolution, [46] cette subjectivité politique s'exprime dans un contexte auquel elle s'ajuste, qui agit sur elle et qu'elle définit en retour. Elle se caractérise de façon prédominante par une volonté rationnelle, qui associe logiquement la souveraineté aux impasses du régime fédéral canadien, sans cesse éprouvées par le Québec depuis la Confédération et ayant fait l'objet de compromis répétés de la part du Québec.

Ce processus s'éclaire aussi à cause des tendances internes et externes qui agitent son environnement. Le mouvement souverainiste québécois s'évalue à la lumière de deux coordonnées du monde actuel. La première est le caractère à dominante technocratique des transformations politiques de l'État moderne dans son rapport à la société civile, transformations qui engendrent des représentations particulières de la souveraineté et de l'action politique. La seconde est le lien d'interdépendance qui s'établit entre les États et qui dessine les nouvelles exigences de la démocratie au sein des États, dans le cadre de la formation des grands ensembles inter-étatiques. Dans ce contexte, par exemple, la relation entre l'État et la nation change en ouvrant cette dernière du côté de la rationalité au détriment de l'« ethnicité ». Ainsi, ces grandes coordonnées du monde actuel agissent sur la nature même du mouvement qui aspire à faire du Québec un État souverain caractérisé par la rationalité subjective des citoyens. C'est cette symbolique qui transcendera les relations de différenciation à l'intérieur de la communauté nationale qui se formera autour de ce nouvel État.

L'objectif de cette réflexion consiste donc à rendre plus clair le fait que c'est à travers une série d'oppositions étatico-politiques qu'apparaît l'émergence de cette subjectivité. C'est pourquoi les caractéristiques de ce mouvement d'affirmation nationale ne sont pas conformes aux projections des catégories politiques traditionnelles.


LA CITOYENNETÉ COMME
CREUSET DE LA NATION


La formation de la nouvelle nation est tout d'abord sous-tendue par des polarités indissociables qui en conditionnent le caractère paradoxal et font son intérêt spécifique. Ces tensions renvoient au lien entre nation et citoyenneté.

1) La première question qui fait surface quand on examine le mouvement souverainiste, c'est le rapport entre la nation et les paramètres de la citoyenneté. En effet, la question qui se pose est de savoir de quelle manière ces deux pôles sous-tendent le sujet politique qui prend naissance, le citoyen du Québec, et qui sera sujet de droit de la future constitution. Le caractère propre de la nation québécoise et son poids politique pourraient faire penser que cette nation naturelle représente le dénominateur central dans cet enjeu. Nous pensons qu'il faut regarder les choses à la lumière d'autres critères. La nation est un processus en constante définition par son lien intime avec le social et le culturel et elle n'est pas donnée a priori, de façon empirique et définitive. La nation québécoise est liée, dans son affirmation, à la complexité culturelle changeante et différenciée du tissu social québécois. Le rôle important que joue au Québec la communauté anglophone, qui a un poids qualitatif décisif, sa place dans l'économie québécoise, le poids des diverses communautés culturelles ainsi que le rôle des peuples et nations autochtones, tous ces éléments doivent s'associer de nouveau de façon consensuelle au cœur d'une redéfinition de la nation. C'est pourquoi celle-ci constitue une [47] dimension stratégique dans l'architecture de la souveraineté. La définition de la nation québécoise formée par l'adhésion volontaire est l'horizon moral qui s'impose comme problématique essentielle de cette transition.

2) Si la nation n'est pas, a priori, un donné culturel, elle est, comme on l'a dit, formation, processus et espace d'auto-institution du politique. L'enjeu souverainiste québécois est ainsi l'expression d'un nouvel imaginaire démocratique. Cet imaginaire est traversé par une double mutation. D'un côté, la réussite de son objectif auto-instituant s'appuie sur la consolidation du lien entre les communautés qui doivent s'associer à la redéfinition de la nation. D'un autre côté, elle repose en même temps sur ce « vouloir vivre ensemble », selon l'expression consacrée de Renan et répétée souvent par René Lévesque, dont la communauté francophone se veut l’instigatrice. Cette volonté consensuelle a aussi été recherchée à travers la culture politique d'immigration mise en œuvre ces dernières années. Cette subjectivité nouvelle est donc, à cause des processus qui l'instituent, une subjectivité doublement consensuelle.

3) C'est dans ce sens aussi que cette nation libérale moderne, rouage du politique, entretient un rapport particulier à l'État. À ce palier, compte tenu du fait que l'État post-keynésien implique un changement dans les termes de son rapport à la société, le statut de la nation québécoise et sa transformation doivent tenir compte aussi de ces déplacements. De plus, compte tenu du poids des grands ensembles, le statut de la souveraineté devient partout au centre de la démocratie. Si la nation n'est pas naturelle, c'est qu'elle bouge, elle s'élargit ; nouveau sujet politique, elle s'articule d'une manière souple à un État lui-même en mutation et soumis aux contingences de la coopération multilatérale. C'est dans ce contexte que cette nouvelle communauté d'adhésion nationale se définira comme projet de toutes ses composantes.

C'est dans ces conditions que la citoyenneté tend à avoir le primat sur la nation dans la définition du sujet politique qui préside à la transition vers la souveraineté du Québec. En parlant de tendance, nous voulons indiquer que ce rapport constitue un enjeu-clé dans la formation du Québec en État souverain, qu'il est à la fois nœud et condition de sa réussite. En effet, l'ouverture de la société pluraliste et de la nation l'une sur l'autre, comme condition inévitable, force à accorder une attention particulière à la citoyenneté. Pourquoi ? Parce que même si l'État est l'horizon de rationalité de ce processus, c'est dans une sorte d'antériorité fondatrice que la démocratie se pose. Elle représente le principe premier qui guide ensuite l'analyse de la série de relations qui se mettront en place entre la nation et l'État. Cet ordre assigne les paliers de l'architecture comme suit : société-peuple, peuple-État, citoyen-État, nation-État, puis État-nation et, enfin, États-sociétés.

À l'origine, la société se donne en effet comme principe de diversité, de pluri-« ethnicité », composée d'atomes : individus, regroupements « naturels » s'opposant les uns aux autres, conflits, passions, rattachements, différenciation, pluralité. Il s'agit de l'ordre de nature où règne l'inégalité, la division, la différence. Les individus à l'origine de la société sont de culture, de tradition, de sexe, de provenance divers. Cet ensemble multiple n'existe pas comme sujet. C'est un principe naturel, antérieur à toute construction juridico-politique, un état de fait observable, descriptible ; un objet sociologique qui précède la subjectivité. On peut le décrire par ses critères apparents, socio-démographiques, et par les relations qui le traversent. Cela n'en fait pas pour [48] autant un sujet. Quand ce magma de différences devient-il alors sujet ? Ou à quelles conditions cette pluralité devient-elle unité, consensus, harmonie, lien social, nation ?

Cette diversité fondatrice devient sujet par un pacte que le peuple (sujet abstrait) contracte avec l'État, instance supposément à distance de la diversité qui fonde la société. C'est donc cette entente à deux qui fait du peuple un sujet. À partir de ce mouvement contractuel, le passage d'une société multiple au peuple-sujet, au peuple-citoyen, fonde le principe d'égalité des droits inscrit dans la constitution. À ce moment, le citoyen devient le sujet et le fondement légitime de l'État.

Il n'y a donc pas de citoyen ni de sujet sans l'existence de ce contrat qui, pour être consensuel, doit résoudre le mieux possible les divisions, les intérêts opposés, les passions, les différences qui sont au principe de la société, en préservant la pluralité et en garantissant en même temps l'égalité de tous qui est constitutive de la citoyenneté. Il y a donc toujours cette tension théorique à la base de la relation entre la société et la citoyenneté ; c'est pourquoi la citoyenneté (principe d'égalité des droits) devient centrale pour que ne soit pas laissée prise à la violence, réelle ou ressentie, engendrée par la pluralité des identités et des intérêts. C'est la citoyenneté qui préside à la formation de la nation élective. Elle en assure la cohésion et, avant que cette nation soit politiquement instituée, la citoyenneté désigne le nouveau sujet collectif qui régit les droits et obligations inscrits dans la constitution.

Par le droit, la citoyenneté assure l'égalité de tous à l'endroit du bien commun (la langue nationale et les langues des minorités, par exemple, en font partie) ; par ailleurs, parce qu'elle est sanctionnée par ceux qu'elle désigne, elle fonde la légitimité sur la reconnaissance mutuelle d'une égalité au-delà de la diversité des intérêts de chacun. Dans le régime fédéral, par l'opposition des communautés francophone et anglophone traduite sur le plan politique, la situation politique québécoise exprime une fracture de cette reconnaissance. Le Parti québécois, dans ses orientations, cherche au Québec à unifier ces divisions. Le projet de souveraineté, pour réussir, devra, quoi qu'il en soit, établir sa légitimité sur la base d'un renouveau du consensus. La reconnaissance par le plus grand nombre de la légitimité de ce pacte consacrera le statut de citoyen du Québec comme nouveau sujet national et comme support de la nouvelle nation. Lorsque se consolident les liens sociaux autour d'une citoyenneté mutuellement reconnue et conclue par un pacte légitime avec l'État, les liens politiques citoyen/État sont légitimement établis et la création d'une communauté consensuelle devient possible. Lorsque le citoyen est en mesure de dire « voici mes institutions, voici mes lois, voici 1’État qui me représente », il sanctionne ainsi l'existence de ce pacte. Alors, la légitimité de l'État est fondée et, en même temps, sont créées les conditions de la subjectivité : la nation politique est possible. C'est dans ces conditions qu'émerge un sujet politique et que sa vocation communautaire est sanctionnée.

Au Québec, il est clair que la présente situation politique, caractérisée par la transition, traduit un processus de déplacement et de recomposition des termes de ce contrat. La nation ou une communauté politique peut devenir une forme, l'expression de ce lien politique. Mais au-delà d'une série de critères sociologiques, elle risque de rester un fantasme régressif et même spontanément répressif si elle n'est pas sanctionnée par un contrat avec l'État. Jusque-là, cette nation, prise dans la dynamique canadienne, révélait un processus de transformation de la nation naturelle à la nation politique. La [49] nation, pour exister comme sujet politique, pour s'extraire du naturalisme, a besoin de l'État de droit qui garantit qu'elle fonctionne à la citoyenneté, c'est-à-dire à l'égalité des droits. C'est à cette condition que s'élabore cette véritable cohésion nationale que l'État est chargé de protéger. Le régime fédéral canadien représente cette forme de légitimation, mais une grande partie de la société québécoise ne s'y retrouve pas. Par conséquent, cette légitimation cherche maintenant une nouvelle voie. La nation politique consacre donc un processus de rationalisation des rapports subjectifs divers à travers l'État. Pour ne pas être ethnique, le mouvement souverainiste repose en effet pour une large part sur cette rationalité subjective.

C'est donc dans une phase contractuelle avec l'État que la nation élective, consensuelle, émerge comme sujet légitime, c'est-à-dire appuyé sur la reconnaissance du citoyen. La citoyenneté, ouverture et droit, est donc l'épicentre de la nation. C'est elle qui assure les droits égaux au cœur de la nation. Aussi la reconnaissance des droits de tous les ensembles et sous-ensembles de citoyens représente-t-elle un enjeu stratégique pour que le mouvement souverainiste réalise le passage de la nation-culture à la nation-raison. Ce passage signifie que l'identité culturelle qui s'affirme à travers le mouvement souverainiste s'appuiera désormais sur les paramètres d'une communauté politique fondée sur le droit plutôt que sur l'« ethnicité », passage que le rapport à l'État du Québec induira. La redéfinition de la nation, en cours à travers la transition vers de nouvelles représentations de l'État et de la société qui seront légitimées par la souveraineté, implique la primauté de la citoyenneté sur toute représentation culturelle excluante de ce nouveau sujet politique. L'imaginaire politique qui préside à la volonté souverainiste est donc celui d'une nation ouverte et élective, basée sur l'égalité dans la citoyenneté.


LA SOUVERAINETÉ COMME
RATIONALITÉ SUBJECTIVE INTERNE


C'est à l'intérieur des paramètres invoqués au début de ce texte, rationalité et interdépendance étatique, que s'esquisse le projet de souveraineté du Québec. La nation québécoise ne se suffit donc pas d'être « naturelle », réunissant ainsi anglophones et francophones dans un vague contrat canado-québécois, et c'est pourquoi, avant la souveraineté, elle constitue une figure transitoire. Elle deviendra le véritable sujet politique de l'État québécois lorsque, par la souveraineté, elle réunira un consensus qui inclura les minorités nationales dans un nouveau pacte légitime autour du futur État souverain.

Il importe par conséquent de prêter à la conscience souverainiste des termes appropriés. Dans cet esprit, l'évolution des consciences qui a cours, surtout depuis la commission Bélanger-Campeau, se traduit mieux par la notion de rationalité subjective que par l'idée de nationalisme. Par rationalité subjective, nous entendons l'intériorisation par les citoyens des éléments rationnels d'une transformation caractérisée par un projet d'auto-institution du politique. En d'autres mots, il ne s'agit pas de l'expression d'une identité culturelle préexistante mais de la prise en considération par le citoyen du Québec d'une rationalité qui commande des réaménagements majeurs du système politique.

[50]

Les conséquences concrètes de la prédominance de cette rationalité sont que les transformations projetées relèvent d'abord d'un imaginaire étatique au détriment d'une ferveur au sujet de l'identité. Si ce désir d'auto-institution de l'État n'est qu'un volet de l'expression démocratique et s'il est vrai qu'il devra être suivi, en cours de transition, par l'autonomisation de la société civile, il demeure que cette rationalité favorise la mise en place d'une culture politique centrée sur le droit. C'est à ce titre d'ailleurs que le cas québécois est spécifique dans la mesure où il conjugue l'idée d'une subjectivité politique plus affranchie en même temps qu'il respecte les enjeux propres aux grands ensembles.

En effet, toute population, en démocratie accomplie, tout ensemble constitué, est sollicité par cette auto-institution de structures propres (réformes constitutionnelles, appartenance à de grands ensembles, débats sur la démocratie, etc.). Par exemple, la formation d'une identité européenne est typique d'une telle constitution en sujet rationnel. Car au stade de la formation des grands ensembles, ce qui justifie l'imposition de la rationalité sur la formation du sujet, c'est justement le caractère post-national de cette subjectivité politique. Ou bien la nation historique est déjà constituée comme sujet et sa cohésion est garantie par l'État, ou bien la nation est une figure transitoire et, pour devenir un sujet politique, elle doit se consolider en s'appuyant sur la citoyenneté, qui repose sur l'universel, par définition un produit de la raison. C'est pourquoi la rationalité préside à cette logique « ensembliste », sans quoi le mouvement d'auto-institution serait convié à une dérive passéiste, ethnocentriste ou romantique, sur le modèle des nationalismes qui ont pris tristement la relève depuis l'éclatement de l'empire soviétique.

Qu'en est-il donc du Québec ? Trois rationalités objectives et subjectives internes peuvent le définir. Le mouvement de rationalisation et de légitimation de la souveraineté du Québec repose a) sur une logique de substitution du modèle de coopération inter-étatique (association d'États souverains) au modèle fédéral (dédoublements politico-administratifs) ; b) sur la valorisation de l'espace québécois de représentation démocratique par rapport à l'espace canadien : le lien contractuel entre le peuple-citoyen et l'État souverain projeté ne reconnaît pas la légitimité de l'État canadien et veut poser autrement les termes de la reconnaissance symbolique et en redéfinir les limites ; et c) sur la primauté du politique sur l'économique : à l'heure des grands ensembles, la souveraineté n'est pas une idéologie de l'exclusion culturelle, elle devient ici le processus de rationalisation du politique pour créer de meilleures conditions à l'économique (au social, au culturel, etc.). Ce processus de symbolisation (« voici mon État, voici mes institutions ») est par essence le fondement de l'acte démocratique. Il importe de s'interroger de la même manière sur la signification des conditions externes de cette nouvelle souveraineté.


LA SOUVERAINETÉ COMME
RATIONALITÉ OBJECTIVE EXTERNE


Les liens de coopération et d'interdépendance avec les États-partenaires voisins, liés à la subjectivité de droit, représenteront une responsabilité directe de l'État du Québec, reconnu comme légitime par les autres États. Le déplacement du droit interne [51] fédératif vers le droit externe inter-étatique traduit une nouvelle force politique : il ne s'agit pas seulement de se reconnaître soi-même dans ses institutions mais d'être reconnu par les autres. Là s'exprime de nouveau la volonté de favoriser la primauté du politique sur l'économique, en associant le mouvement d'intégration continentale à ce rapport de force obtenu par la souveraineté. Le Québec, en devenant souverain, impose l'État comme lieu de l'interdépendance, de la solidarité communautaire comme de l'autonomie juridico-politique. C'est le secrétaire général des Nations Unies, Boutros Boutros-Ghali, qui définit la souveraineté comme « l'art de rendre égales des puissances inégales » (Legaré, 1992, p. 151). C'est dans cet esprit que la démarche souverainiste du Québec exprime une volonté rationnelle d'établir un nouveau cadre de légitimité, informé par des relations inter-étatiques soumises à un nouveau code de juridiction et à l'espace politique québécois en tant qu'État.

Cette revendication se fait à l'intérieur des nouvelles tendances à la formation de régionalismes politiques. L'importance croissante des modèles de coopération et d'intégration sous la forme de grands ensembles, tout comme le modèle de confédération à l'européenne (Union européenne), pèse sur l'évolution du Québec. L'enjeu est de taille, car il stipule que les États unissent leurs compétences sur certaines questions et décident conjointement. Dans un tel contexte, que signifie accéder à la souveraineté ? Celle-ci n'est-elle pas une notion dépassée ? Rappelons-le, la souveraineté est d'abord, sur le plan interne, un contrat dans lequel le peuple exprime qu'il se reconnaît dans ses institutions ; sur le plan externe, c'est ensuite la reconnaissance de cet État par les autres États en tant que sujet de droit international. Le fait qu'un État délègue l'exercice de certaines de ses prérogatives à des instances qu'il gère avec d'autres États est un problème d'une tout autre nature. Pourtant, ces questions agitent les interprétations de l'enjeu souverainiste et il faut s'y attarder. Les glissements dans les liens de pouvoir qui vont des États vers les instances communautaires entraînent-ils une déperdition de sens pour l'État et pour la souveraineté ?

Une question de départ à ce sujet consiste à se demander, par exemple, si le modèle de formation de l'Europe communautaire, amorcé par le traité de Rome en 1957, a conduit à la formation d'une sorte de nouvel État formé par l'Europe des Douze. Pourtant, le partage de compétences convenu entre les États de l'Europe des Douze ne constitue pas en soi un nouvel État pour des raisons indiscutables. La souveraineté de l'État, du point de vue du droit, repose sur trois conditions : la capacité juridique, pleine et entière, de faire des lois, de signer des traités et de prélever des impôts. Cette capacité juridique reste le principe de chacun des États qui composent l'Europe, au-delà de la formation de l'Union européenne, et le partage de compétences y est d'abord limité puis subordonné à la volonté des parlements nationaux. Inutile de parler ici de conception traditionnelle de la souveraineté. Aux yeux du droit international, la souveraineté demeure un attribut de l'État qui seul peut en disposer, et, sur le plan politique, elle tire sa légitimité du fait qu'elle est reconnue par le citoyen.

Qu'est-ce donc alors que ce qui est appelé de façon équivoque la souveraineté partagée ? C'est cette capacité (juridique) interne et externe dont dispose un État souverain au sens fort (on le sait, le Québec fédéré ne dispose d'aucune souveraineté car le Québec n'a pas et n'aura jamais au sein du fédéralisme d'existence juridique au sens du droit international). À partir de cette capacité juridique, les représentants d'États [52] souverains, comme c'est une tendance actuelle, peuvent décider, avec d'autres États, d'étendre certains champs de compétences de l'État à des domaines qu'ils gèrent ensemble, à l'intérieur des limites prescrites par les constitutions de ces États et donc soumises à la juridiction des parlements nationaux. C'est par exemple le cas, au sein de l'Union européenne, du domaine monétaire, des compétences économiques et de certaines juridictions sociales ou encore de questions de sécurité. Ce partage de compétences entre des États n'affecte pas le caractère souverain de ces États ; il en est même la condition. C'est pourquoi ces États continuent d'être membres à part entière de l'Organisation des Nations Unies. La souveraineté, au sens du droit, est la condition préalable des accords qu'ils signent entre eux.

On ajoutera que ces accords ont par nature des limites reposant sur la souveraineté de ces États telles que les imposent les règles de l'unanimité, de la subsidiarité ou de la majorité qualifiée. Ces règles, proposées pour adoption aux parlements nationaux, ont précisément pour objet de fixer les limites des champs d'application de ces compétences. Les auteurs de telles ententes sont des États au plein sens du terme, c'est-à-dire des sujets de droit international qui disposent de la pleine capacité juridique en matière de législation internationale et qui ne peuvent pas être confondus avec des provinces fédérées, comme le Québec, ou avec des régions infra-étatiques du type des landers allemands.

La souveraineté reste donc une capacité juridique qui repose sur un principe fondateur : cette capacité est conférée à l'État par la légitimité du processus démocratique, par la volonté du citoyen, puis, ensuite, reconnue comme légitime par les autres États. C'est la volonté du citoyen qui donne à la souveraineté de l'État sa légitimité et son fondement. C'est pourquoi tout partage de compétences entre plusieurs États souverains doit faire l'objet d'un recours au citoyen, car c'est ce dernier, selon la constitution des États démocratiques, qui est le véritable dépositaire de la souveraineté.

C'est dans ce contexte qu'il faut interpréter la véritable problématique démocratique à l'œuvre dans les formations communautaires, bien au-delà de leur seul cadre inter-étatique, en vue de mieux saisir la volonté souverainiste du Québec. En effet, si on prend le cas de l'Europe, on voit que deux visions de la politique s'affrontent qui sont en fait deux conceptions opposées de la démocratie. L'une est purement technocratique et tend à diminuer le rôle des États alors que l'autre, au contraire, repose sur la vitalité des débats qui traversent ceux-ci.

La diversité des interprétations vient aussi du fait que l'Union européenne relève d'une forme politique sui generis, ce qui signifie que ses institutions ont été mises en place sans se mouler sur aucun modèle préalable. L'Europe des Douze, issue du traité de Rome de 1957, est une fabrication empirique et l'accord de Maastricht a formalisé une adaptation graduelle des lois et des institutions à des états de fait. Cette adaptation, au cas par cas, de la Communauté européenne, rendue possible par les pouvoirs d'une de ses instances suprêmes, la Cour de justice, a en effet débordé des cadres de la légitimité démocratique, soit des parlements élus des États nationaux. En dernière instance, pour que le traité de Maastricht soit juridiquement valide, il a donc dû être sanctionné par les parlements nationaux. Ainsi, le traité de l'Union européenne, s'il étend les domaines d'une coopération souhaitable et d'une intégration économique poussée, n'a pas pour caractéristique de dissoudre ce qui demeure l'espace premier de la légitimité démocratique, [53] les États et leur souveraineté. L'article F. 1 du traité le dit bien : « L'Union respecte l'identité nationale de ses États membres, dont les systèmes de gouvernement sont fondés sur les principes démocratiques. »


SOUVERAINETÉ
ET ESPACE DÉMOCRATIQUE


La tendance à la formation de grands ensembles, comme c'est le cas pour l'Union européenne, amène à se demander ce que signifie l'aspiration souverainiste dans un tel contexte. La souveraineté du Québec, outre le fait de correspondre à un choix de société, est-elle, elle aussi, conforme à la logique et à la rationalité des processus de formation de grands ensembles ? Quelle est alors la fonction spécifique de cette souveraineté, à la fois porteuse d'une signification démocratique et compatible avec la mise en place de communautés d'intérêts et de structures qui associent plusieurs États ? Certes, de nombreuses distinctions interdisent de confondre totalement la construction de l'Europe et le continentalisme nord-américain. Mais, on le remarque, le processus européen, amorcé depuis quarante ans, recoupe quelques-unes des tendances de la dynamique spécifique nord-américaine telles la libéralisation des échanges et la nécessité de partager des intérêts communs sur les plans tant géostratégique et social qu'économique. Cependant, comme pour l'Europe, ces intérêts politiques entre partenaires nord-américains doivent être évalués à la lumière d'une histoire plus pacifique, tout comme à celle des intérêts et des volontés propres de chacun des États faisant partie de cette association.

Les dimensions actuelles de l'Europe des Douze, structurelles et conjoncturelles, externes et internes, fournissent en effet des voies utiles à la réflexion sur le mouvement souverainiste du Québec. Il importe à cet égard d'examiner quelques-uns des éléments que sont les liens entre le fédéralisme, l'État et la souveraineté. En effet, la problématique de la nouvelle Union européenne met en scène trois thèmes privilégiés ici par les débats politiques. Le premier rejoint tout d'abord l'actualité du débat autour du fédéralisme. Le fédéralisme est en effet une notion souvent utilisée pour décrire les nouvelles structures de coopération entre les États de la Communauté. Mais ce néo-fédéralisme est bien éloigné du fédéralisme canadien dans la mesure où, comme le précise Maurice Duverger : « On a tort d'abuser du concept de fédéralisme pour décrire la Communauté ou de comparer ce fédéralisme à celui des États-Unis, etc. [...]. Disons, pour l'instant, que la C.E. évolue vers un néo-fédéralisme, c'est-à-dire une forme originale et unique de gouvernement entre les États. Il s'agit d'un néo-fédéralisme d'abord parce que cette communauté unit des États préexistants, qui sont distincts puisqu'ils ont chacun leur histoire, une culture, une langue, une tradition qui leur donnent une personnalité à laquelle aucun d'eux n'est disposé à renoncer [...]. On voit bien les conséquences de cette caractéristique essentielle : il y a une différence fondamentale entre une fédération qui accompagne un seul et même État-nation (comme le fait le système fédéral canadien) et une fédération constituée par des États-nations divers qui lui préexistent. » (Duverger dans Legaré, 1992, p. 23-24-25).

[54]

Le second thème, nœud de la problématique européenne, est celui de l'État. Au sein de l'Union européenne, jusqu'à quel point les transferts de compétences vers la Communauté modifient-ils le rôle de l'État ? Sur quoi s'appuiera dès lors le lien de ce nouvel État avec la société et la nation ? Ces questions s'ingèrent aussi dans la problématique du futur État souverain. Y répondre exige que l'on distingue deux définitions de l'État. La première définition réduit l'État à une série de compétences que l'ordre juridique ou constitutionnel permet de partager avec d'autres instances, que ce soit par le haut ou par le bas, soit au niveau inter-étatique (ou super-étatique) ou infra-étatique. L'État, selon cette représentation, ne désigne de façon empirique que cet ensemble de compétences et devient ainsi, comme ce fut le cas au sein de la Communauté européenne, largement tributaire des émanations de la Cour de justice, gouvernement des juges.

La seconde conception de l'État va plus loin. Sans exclure les compétences et les autres dimensions empiriques, elle désigne plutôt les relations de pouvoir qu'entretiennent les forces politiques avec les divers ensembles d'une société donnée. L'État est donc, selon cette conception, un rapport à la nation et aux diverses forces sociales qui la constituent.

Ces deux définitions de l'État ont été et sont encore à l'œuvre dans les transformations de l'Europe communautaire. Elles s'opposent aussi dans les débats autour de la souveraineté du Québec. Certains y verront un nouveau ressort pour l'État dans la mesure où la nouvelle Union européenne fait appel à l'engagement des parlements nationaux et sollicite une citoyenneté plus dynamique. Que ce soit parce que la conception technocratique de l'État prédomine et réduit le rôle de la citoyenneté ou que la conception démocratique prévale et lui accorde plus d'importance, dans les deux cas, la nouvelle configuration du rôle de l'État met au premier plan un questionnement sur la souveraineté. Selon la conception de l'État qui est retenue, la souveraineté perd ou gagne en signification. Par ricochet, à travers la souveraineté, c'est en effet la démocratie qui ressort plus que jamais comme troisième axe de la problématique des grands ensembles.

En effet, les rapports qui unissent l'État et la souveraineté, mis en relief dans le débat soulevé autour de l'Union européenne, par exemple, s'éclairent différemment selon qu'ils traduisent la présence ou l'absence de liens avec les forces vives de la société, avec la ou les nations, bref avec la formation d'un sujet politique susceptible de se reconnaître dans ces structures et ces institutions et à travers les lois qui en émergent. La démocratie, comme condition d'auto-institution imaginaire du politique, se situe au cœur de la problématique des grands ensembles.

• • •

Dans ce texte, nous nous sommes interrogés sur le lien entre la nation et l'État, lien qui passe de façon obligée par la citoyenneté. La nation consensuelle (appuyée sur un principe civique), formée à travers l'État, est le relais sur lequel s'appuie la subjectivité démocratique. La souveraineté de l'État constitue l'espace de légitimation ou, mieux, de reconnaissance de cette subjectivité. C'est à partir de ces paramètres qu'on peut interpréter la transition historique qui a lieu au Québec. Les principales lignes de [55] force qui définissent le mouvement souverainiste du Québec peuvent se résumer comme suit :

1) Dans les liens entre le citoyen, l'État et la nation québécoise, c'est la citoyenneté qui conditionne la nation et lui assure son caractère électif. Cette nation désigne la communauté de tous ceux qui résident au Québec et consentent à vivre ensemble. Dans la perspective du rapport à un nouvel État, cette nation doit subir un processus de transformation vers la nation politique. Les citoyens qui la composent seront égaux en droits par l'État qui préside au développement des intérêts de la nouvelle communauté nationale. Cette communauté disposera de l'État comme relais dans toutes ses relations avec d'autres communautés, supra-étatiques ou inter-étatiques.

2) Cette communauté nationale, réunie autour de la citoyenneté et fondée sur celle-ci, si elle est un acteur légitime dans la reconnaissance interne de la souveraineté et de ses institutions ainsi que dans les liens entre l'État et la société, ne devient pas pour autant un facteur d'assimilation. En effet, la notion d'État-nation chargée de traduire des liens organiques entre l'État et un référent national par l'assimilation des communautés culturelles minoritaires est par définition conservatrice parce qu'elle est associée à une conception nostalgique et dépassée de la nation. En effet, le pluralisme et la composition socio-culturelle du Québec actuel fondent la suprématie du lien politico-juridique sur le lien culturel et excluent le caractère répressif de l'État-nation. Le véritable État-nation est d'ailleurs un cas d'espèce plutôt exceptionnel. Ce que l'on trouve surtout aujourd'hui, ce sont des États articulés à des nations dont le procès de formation accompagne, déborde, tout autant qu'il peut recouper les limites de l'État. L'État sert à consolider le lien national et à garantir son caractère électif dans la distance garantie par le principe de citoyenneté. Les questions d'identité, de langue et de culture appartiennent aux liens que la nation entretient avec la ou les communautés qui la constituent, liens appuyés encore une fois sur la citoyenneté. Il est légitime de penser que la communauté francophone estime que ses intérêts seront mieux protégés dans un État souverain. La communauté anglophone est aussi en droit d'attendre la protection de ses propres intérêts de même que le sont les nations autochtones. C'est dans ce sens que la nation devient un sujet politique consensuel recouvert par la citoyenneté dans le relais entre les institutions parlementaires, la constitution et les instances inter-étatiques.

3) La souveraineté politique a donc pour principale signification d'assurer à une communauté d'intérêts divers, définie comme communauté nationale, que l'État qui la représente est légitimement reconnu par tous les citoyens. Cette reconnaissance symbolique est au centre de la souveraineté. Tous, sujets politiques, internes et externes, reconnaissent la légitimité de cet État : correspondance entre la citoyenneté et la subjectivité au sens du droit international. Ces deux faces de la reconnaissance sont indissociables dans la définition de la souveraineté. C'est vers une telle correspondance que tend la volonté souverainiste du Québec. Elle implique un déplacement dans la nature des liens entre les États qui lui font face, le Canada d'abord, les États-Unis, le Mexique et d'autres États qui composeront ultérieurement la communauté régionale des États américains. La souveraineté du Québec actualise le processus de légitimation démocratique dans la mesure où elle est la création d'un sujet politique en voie d'auto-institution. Elle implique aussi un lien de cohésion entre la nation, l'État et tous les ensembles de citoyens. Elle suppose, après la déclaration de souveraineté obtenue par la voie populaire, [56] la formation d'une nouvelle nation, consensuelle et politique. Cette communauté nationale sera légitime au sein d'une communauté plus large, inter-étatique, qui suscite une reformulation des enjeux suivants : elle fait appel aux médiations qui sous-tendent les liens entre le citoyen, l'État et la communauté régionale. Elle sollicite aussi l'autonomie de la nation dans son rapport à l'État. Celle-ci demeure un acteur démocratique dans le relais qui associe les parlements nationaux et les structures communautaires. L'État et la souveraineté y sont donc les repères démocratiques par excellence qui permettent les assises de la citoyenneté québécoise à l'intérieur des structures nationales. C'est là aussi la signification de la souveraineté québécoise et grâce à son histoire, à sa complexité et à sa spécificité culturelle, une de ses contributions aux débats démocratiques de la vaste communauté nord-américaine. C'est enfin une possibilité d'approfondissement de l'autonomie de la société québécoise vis-à-vis de l'État, condition de toute saine démocratie.


BIBLIOGRAPHIE

ANDERSON, Benedict, 1983, Imagined Communities. Reflections on the Origin and Spread of Nationalism, Londres, Verso.

BARRY, Brian, 1983, « Self government revisited » dans The Nature of Political Theory, Oxford, Clarendon Press, p. 121-154.

BARRY, Brian, 1987, « Nationalism » dans David MILLER et al. (dir.), The Blackwell Encyclopaedia of Political Thought, Oxford, Blackwell, p. 352-354.

BÉLANGER, Yves et Dorval BRUNELLE (dir.), 1988, L’Ère des Libéraux. Le pouvoir fédéral de 1963 à 1984, Montréal, les Presses de l'Université du Québec. [Livre en préparation dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

BERGERON, Gérard, 1990, Quand Tocqueville et Siegfried nous observaient, Montréal, les Presses de l'Université du Québec. [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

BERGERON, Gérard et Réjean PELLETIER (dir.), 1980, L'État du Québec en devenir, Montréal, Boréal.

BERNIER, Gérald et Robert BOILY, 1987, Le Québec en chiffres de 1850 à nos jours, Montréal, Association canadienne-française pour l'avancement des sciences.

BIRNBAUM, Pierre et Jean LECA, 1986, « L'individu-citoyen dans le christianisme occidental » dans Sur l'individualisme, Paris, les Presses de la Fondation nationale des Sciences politiques.

BROSSARD, Jacques, 1976, L'Accession à la souveraineté et le cas du Québec, Montréal, les Presses de l'Université de Montréal.

CALDWELL, Gary et Eric WADDELL (dir.), 1982, Les anglophones du Québec de majoritaires à minoritaires, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture.

CHATTERJEE, Partha, 1986, Nationalist Thought and the Colonial World. A Derivative Discourse, Londres, Zed Books.

CHEVALLIER, Jacques, 1980, « L'État-Nation » dans Revue du Droit public et de la Science politique, no 5, p. 1271-1320.

COHEN-TANUGI, Laurent, 1992, L'Europe en danger, Paris, Fayard.

COLAS, Dominique, 1992, Le Glaive et le Fléau. Généalogie du fanatisme et de la société civile, Paris, Grasset.

[57]

COLEMAN, William, 1984, The Independence Movement in Quebec, 1945-1980, Toronto, University of Toronto Press.

COLLIARD, Claude-Albert, 1982, « État et Nation. Variations modernes sur un thème classique » dans Études en l'honneur de Louis Hamon, Paris, Economica.

COMEAU, Robert, Michel LÉVESQUE et Yves BÉLANGER (dir.), 1991, Daniel Johnson, Rêve d'égalité et projet d'indépendance, Montréal, les Presses de l'Université du Québec.

COMEAU, Robert (dir.), 1989, Jean Lesage et l'éveil d'une nation, Montréal, les Presses de l'Université du Québec.

COMMISSION D'ÉTUDES DES QUESTIONS AFFÉRENTES À L'ACCESSION DU QUEBEC À LA SOUVERAINETÉ, 1992, Projet de rapport, Québec, Assemblée nationale.

DE BAECQUE, Antoine, 1991, Une histoire de la démocratie en Europe, Paris, Le Monde, (Collection « La mémoire du monde »).

DELANNOI, Gil et Pierre-André TAGUIEFF, 1991, Théories du nationalisme. Nation, nationalité et ethnicité, Paris, Kimé.

DELPÉRÉE, François, 1990, « Le nouvel État belge » dans Pouvoirs, no 54, p. 111-117.

DENIS, Roch (dir.), 1990, Québec : dix ans de crise constitutionnelle, Montréal, VLB.

DIETZ, Mary, 1989, « Patriotism », dans Terence BALL et al. (dir.), Political Innovation and Conceptual Change, Cambridge, Cambridge University Press, p. 176-193.

DUFOUR, Christian, 1989, Le Défi québécois, Montréal, l'Hexagone.

DUFOUR, Christian, 1992, La Rupture tranquille, Montréal, Boréal.

DUMONT, Fernand, 1993, Genèse de la société québécoise, Montréal, Boréal.

DUMONT, Louis, 1990, « Sur l'idéologie politique française », Paris, Le Débat.

FAYE, Jean-Pierre, 1992, L'Europe unie. Les philosophes et l'Europe, Paris, Gallimard, Arcades.

FERRY, Jean-Marc et Paul THIBAUD, 1992, Discussion sur l'Europe, Paris, Calmann-Lévy.

FROMONT, Michel, 1977, « L'évolution du fédéralisme allemand depuis 1949 » dans Mélanges offerts à G. Burdeau, Paris, Librairie générale de droit et de jurisprudence.

GAGNON, Alain-G. et Mary Beth MONTCALM, 1992, Québec : au-delà de la Révolution tranquille, Montréal, VLB.

GAGNON, Alain-G. et François ROCHER (dir.), 1992, Répliques aux détracteurs de la souveraineté du Québec, Montréal, VLB.

GAGNON, Alain-G. et Daniel TURP (dir.), 1992, Objections de vingt spécialistes aux offres fédérales, Montréal, Albert Saint-Martin.

GELLNER, Ernest, 1983, Nations and nationalism, Ithaca, Cornell University Press.

GELLNER, Ernest, 1987, Culture, Identity and Politics, Cambridge, Cambridge University Press.

GIORDAN, Henri, 1982, Démocratie culturelle et droit à la différence, Paris.

GIRARDET, Raoul, 1983, « Point » dans Le Nationalisme français, Paris, Le Seuil.

[58]

GREWE-LEYMARIE, Constance, 1982, « Bilan et perspectives du fédéralisme » dans Pouvoirs, no 22, p. 29-40.

GROUPEMENT POUR LES DROITS DES MINORITÉS, 1985, Les Minorités à l'âge de l'État-nation, Paris, Fayard.

GUINDON, Hubert, 1990, Tradition, modernité et aspiration nationale de la société québécoise, Montréal, Albert Saint-Martin. [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

GUIOMAR, Jean-Yves, 1990, La Nation entre l'histoire et la raison, Paris, La Découverte, Armillaire.

HABERMAS, Jürgen, 1992, « Citoyenneté et identité nationale » dans L'Europe au soir du siècle, Paris, Esprit, p. 39-59.

HOBSBAWM, Eric-John, 1990, Nations and Nationalism since 1780. Programme, Myth, Realily, Cambridge, Cambridge University Press.

HUON DE KERMADEC, Jean-Marie, 1982, « La persistance de la crise du fédéralisme canadien » dans Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger, no 6, p. 1601-1626.

JOHNSON, Daniel, 1990, Égalité ou indépendance. 25 ans plus tard à l'heure du Lac Meech, Montréal, VLB.

KARTVELI, S., 1988, « Le nationalisme contre les nationalités », Pouvoirs, no 45, p. 65-87.

KEDOURIE, Elie, 1993, Nationalism, Oxford et Cambridge, Blackwell.

KNAPP, Blaise, 1987, « Confédération et cantons » dans Pouvoirs, no 43, p. 31-47.

L'ABBÉ SIEYÈS, 1982, Qu'est-ce que le Tiers-État ? Paris, les Presses Universitaires de France.

LAFOREST, Guy, 1992, Trudeau et la fin d'un rêve canadien, Québec, Septentrion.

LAMONDE, Yvan et Esther TRÉPANIER, 1986, L'Avènement de la modernité culturelle au Québec, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture.

LANDRY, Bernard, 1987, Le sens du libre-échange. Commerce sans frontières, Montréal, Québec/Amérique.

LANGLOIS, Simon (dir.), 1990, La Société québécoise en tendances, 1960-1990, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture.

LEGARÉ, Anne et Nicole MORF, 1989, La société distincte de l'État. Québec-Canada, 1930-1980, Montréal, Hurtubise HMH. [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

LEGARÉ, Anne, 1991, « Symbolique de la nation et figures du politique : héritage et discontinuité » dans La Révolution française au Canada français, Ottawa, les Presses de l'Université d'Ottawa, p. 67-85.

LEGARÉ, Anne, 1992, La souveraineté est-elle dépassée ? Entretiens avec des parlementaires et intellectuels français sur l'Europe actuelle, Montréal, Boréal. [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

LEGAULT, Josée, 1992, L'invention d'une minorité. Les Anglo-Québécois, Montréal, Boréal.

LINTEAU, Paul-André, René DUROCHER et Jean-Claude ROBERT, 1979, Histoire du Québec contemporain. De la Confédération à la crise, Montréal, Boréal Express.

MADIRAN, Jean, 1979, Les quatre ou cinq États confédérés, Paris, Itinéraires, numéro spécial hors série.

MAIRET, Gérard, 1989, Discours d'Europe, Paris, La Découverte, Agalura.

[59]

McROBERTS, Kenneth, 1991, English Canada and Québec : avoiding the Issue, Toronto, York University.

MICHELAT, Guy et Jean-Pierre THOMAS, 1962, Dimensions du nationalisme, Paris, Armand Colin.

MINORITÉS, octobre 1991, « Quelles chances pour l'Europe » dans L'Événement européen, Paris, Seuil.

MORIN, Jacques-Yvan, 1992, conférence prononcée à l'Assemblée nationale, Paris, Association Paris-Québec.

MORIN, Michel, 1992, Souveraineté de l'individu, Montréal, Les Herbes rouges.

NICOLET, Claude, 1982, L'Idée républicaine en France, Paris, Gallimard.

POMIAN, Krzysztof, 1990, L'Europe et ses nations, Paris, Gallimard, Le Débat.

POULAT, Émile, 1987, Liberté, laïcité. La guerre des deux France et le principe de la modernité, Paris, Cerf/Cujas.

RENAN, Ernest, 1992, Qu'est-ce-qu'une Nation ?, Paris, Presses Pocket. [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

RIALS, Stéphane, 1986, Destin du fédéralisme, Paris, Institut La Boétie, Librairie générale du droit et de jurisprudence.

THORNBERRY, Patrick, 1989, « Self-determination, minorities, human rights : a review of international instruments » dans International and Comparative Law Quarterly, p. 867-889.

UNIVERSITÉ DE ROUEN, 1993, Nations, nationalisme, transitions, XVI-XXe siècles. Paris, Terrains, Éditions Sociales, p. 299-345.

WEIBEL, Ernest, 1987, « Les institutions et la diversité culturelle, » dans Pouvoirs, no 43, p. 17-30.


[16]

NOTES SUR
LES COLLABORATEURS


Anne Legaré

Docteure en sociologie politique, Anne Legaré est professeure au département de science politique à l'Université du Québec à Montréal (UQAM) depuis 1975. Elle a été directrice d'études associée à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales à Paris et maître de conférence à l'Université de Picardie. Ses cours et ses travaux actuels portent sur la démocratie. Elle a publié de nombreux ouvrages, dont Le Québec : la question nationale (1979), La société distincte de l'État : Québec-Canada, 1930-1980 (1989) et La Souveraineté est-elle dépassée ? (1992).



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le mardi 1 janvier 2013 8:22
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie retraité du Cégep de Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref