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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Jean-Guy Lacroix, La culture, les communications et l'identité dans la question du Québec” (1995)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir du texte de Jean-Guy Lacroix, La culture, les communications et l'identité dans la question du Québec”. Un article publié dans la revue Cahiers de recherche sociologique, no 25, 1995, pp.247 à 298. Montréal: Département de sociologie, Université du Québec à Montréal.

Introduction

Ce texte [1] cherche à dégager le rôle central de la culture, des industries culturelles et des communications médiatiques dans le mouvement socio-historique de production et de reproduction de la société québécoise. Plus précisément, il souligne le rapport dialectique - dans le processus de reproduction de celle-ci en tant que société spécifique et distincte - entre les conditions objectives et les conditions subjectives d'action sociale et de production du sens. 

La construction de l'identité et du sentiment d'appartenance à une collectivité spécifique, quelle que soit son aire spatio-temporelle d'existence et de reproduction, et l'inscription, quelle qu'elle soit, de cette construction dans le mouvement de l'histoire ne relèvent aucunement d'une linéarité nécessaire et irréversible. Elles tiennent au contraire d'un mouvement de structuration progressive relevant d'une alternance entre, d'une part, des moments de mise en place de structures qui deviennent des conditions objectives de l'action sociale, moments qui font appel à la conscience sociale aiguë de l'identité, de l'appartenance au Nous, et, d'autre part, des moments de reproduction lente, au «fil des jours», qui ne font pas appel à une telle conscience de l'appartenance, mais qui s'appuient sur les institutions déjà en place et qui donnent au quotidien l'allure de la normalité familière, parce que les acteurs sociaux ont intégré ces conditions objectives de l'action sociale, qu'ils y ont été socialisés. Les seconds renvoient à une sorte d'écoulement socio-temporel continu conditionné par les structures en place et qui, chaque jour, reproduit celles-ci. Les premiers, par contre, constituent en quelque sorte des «goulots» de l'histoire des sociétés où l'action sociale établit des structures, des institutions, un cadre de régulation. Il en résultera une reproduction élargie des structures en place et de la dynamique sociale spécifique à une société, ou une réorientation dans une direction différente, voire opposée, par rapport à la « tendance » dominante du mouvement socio-historique jusqu'à ce moment. 

L'objet de ce texte est d'analyser l'enjeu socio‑historico‑politique de l'actuel contexte référendaire au Québec, c'est-à-dire de faire ressortir comment il constitue un moment de rupture en regard de l'histoire passée et de l'histoire à faire. Je veux en effet démontrer que la conjoncture référendaire forme, comme l'ont fait des moments semblables dans l'histoire de la société québécoise, un «instant» socio‑historique d'ambivalence entre la reproduction élargie de la société civile québécoise en tant que société distincte et la contraction ou déstructuration institutionnelle de sa spécificité; l'ampleur et le rythme autant de la reproduction élargie que de la contraction‑déstructuration institutionnelle dépendent de la capacité de cette société à mettre en place le premier terme de l'alternative ou à freiner le second. 

Je suis tout à fait conscient qu'une telle entreprise n'est pas sans soulever des difficultés importantes d'ordre épistémologique. Face à un tel sujet dans un tel contexte, le chercheur est interpellé non seulement comme expert, mais aussi, et inévitablement, à titre de sujet social porteur d'un sens socio-historique, en tant que citoyen partageant une identité et ayant un sentiment d'appartenance. Dans une telle situation, l'écart, le recul, nécessaire à tout travail de réflexion intellectuelle, scientifique, autant que culturelle d'ailleurs, à la théorisation, est loin d'être simple. 

Pourtant, la conjoncture laisse peu de possibilités. Il faut choisir entre se cantonner dans le silence, ce qui trop souvent équivaut à une véritable défaite de la pensée, et affronter la difficulté en prenant les précautions nécessaires afin d'éviter que le «parti pris» de l'identité et de l'appartenance ne surdétermine l'analyse. C'est la raison pour laquelle je me suis contraint à adopter une approche théorique rigoureuse et à demeurer le plus près possible des faits de structuration. 

Un tel objectif et la prudence à laquelle il invite impliquent qu'on tienne compte d'un ensemble d'aspects interreliés, d'où une certaine complexité du texte. Toutefois, vu l'espace rédactionnel autorisé par la forme «article», il a été impossible de traiter de façon extensive chacune des multiples dimensions du problème. Aussi ai‑je dû réduire dans chaque cas l'argumentaire à l'essentiel, pour en arriver au cheminement suivant: la première section s'intéresse, dans une perspective théorique très sommaire, à l'apport de la culture et de l'idéologie à la reproduction de l'identité; la deuxième applique cette esquisse théorique à l'examen du rôle historique de la culture des Québécois francophones dans la fragmentation de l'«unité» canadienne; la troisième section revient à la théorie pour étudier le rapport entre, d'un côté, l'accumulation et l'invention et, de l'autre, la mise en place d'institutions pour montrer ensuite en quoi l'articu­lation spécifique du cadre institutionnel québécois est aujourd'hui remise en question; la quatrième section fait successivement appel à la théorie sociologique des communications et à l'histoire pour analyser la contribution des médias, en tant qu'élément moteur du développement culturel contemporain, à la production et à la reproduction de l'identité québécoise ; la cinquième étudie les contre-tendances à la reproduction élargie de la société québécoise et s'attache à repérer les conditions objectives produisant l'ambivalence chez les Québécois francophones au chapitre de l'action subjective dans le champ politique; la sixième section s'intéresse à l'interaction entre le mouvement d'internationalisation-globalisation et les souveraine­tés nationales; les septième et huitième sections élaborent sur la nécessité, pour les sociétés contemporaines désireuses d'entrer de façon constructive dans le troisième millénaire, de se doter d'une politique d'ensemble autocentrée et internationaliste en matière de développement culturel, et sur la forme qu'une telle politique devrait revêtir au Québec; finalement, la dernière partie porte sur la question de la langue.


[1] D'entrée de jeu, je veux signaler que les idées développées dans ce texte sont très substantiellement tributaires des travaux menés depuis dix ans avec Gaëtan Tremblay, co-directeur du Groupe de recherche sur les industries culturelles et l'informatisation sociale (GRICIS). Tremblay aurait pu tout aussi bien que moi écrire ce texte. Plusieurs des idées qu'il renferme lui appartiennent d'ailleurs. Cependant, je demeure le seul responsable des erreurs que ce texte pourrait contenir.


Retour au texte de l'auteur, Pierre Mackay, département des sciences juridiques, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 13 août 2006 17:15
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur au Cégep de Chicoutimi.
 



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