RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir du texte de Micheline Labelle, Qu’est-ce que l’intégration dans le contexte de la mondialisation ?Conférence d’ouverture du colloque. In ouvrage sous la direction de Rachad ANTONIUS et Amany Fouad Salib, Colloque sur l’immigration à Laval. De l’accueil à l’intégration : diagnostic, parcours et expériences. Actes du colloque du 14 octobre 2014, Carrefour d’intercultures de Laval (CIL). Montréal: Centre de recherche sur l’immigration, l’ethnicité et la citoyenneté, UQÀM, Les Cahiers du CRIEC, no 38, septembre 2015, pp. 9-20. 85 pp. [L'auteure nous a accordé le 13 novembre 2015 son autorisation de diffuser électroniquement cette publication dans Les Classiques des sciences sociales.]

[9]

Colloque sur l’immigration à Laval.
De l’accueil à l’intégration :
diagnostic, parcours et expériences.


Conférence d'ouverture :

Qu'est-ce que l'intégration dans le contexte
de la mondialisation ?


Micheline Labelle

Professeure associée, Département de sociologie, UQAM ;
Fondatrice de la Chaire de recherche en immigration, ethnicité
et citoyenneté et Titulaire (2008-2014).

Introduction

1. Des définitions variables

1.1. Une définition politique de l'État québécois
1.2. Une définition politique de l'État français :
1.3. Une définition académique française de l'intégration
1.4. Une définition du mouvement communautaire

2. Les dimensions de l'intégration

2.1. La dimension linguistique et culturelle de l'intégration
2.2. La dimension économique de l'intégration
2.3. La dimension sociale, civique et politique de l'intégration

3. Les facteurs macro sociologiques qui favorisent ou font obstacle à l'intégration

3.1. La structure du marché du travail et la conjoncture économique
3.2. Le rôle de l'État québécois
3.3. La citoyenneté et les questions d'allégeance
3.4. Le modèle d'intégration canadien : le multiculturalisme
3.5. Le modèle d'intégration québécois : l'interculturalisme
3.6. Le rôle des associations subventionnées par l'État québécois

4. Les obstacles à l'intégration

4.1. Les expériences et les projets individuels
4.2. L'accès aux services d'accueil et d'insertion économique
4.3. Le racisme et les discriminations

Références


INTRODUCTION

Le Québec a un des plus hauts taux d'immigration au monde. Un immense progrès a été fait en matière d'intégration, de relations interculturelles et de perspectives citoyennes, depuis la Révolution tranquille.

Selon l’Enquête nationale auprès des ménages de 2011, la population totale du Québec se chiffrait à 7 903 001 personnes, dont 12% étaient nées à l'étranger. En comparaison, la proportion d'immigrés au Canada est de 20,6% et de 12% aux États-Unis. On dénombre au Québec 150 langues et plus de 200 religions. L'islam est en nette progression, mais les musulmans ne représentent que 1,5% de la population. La part des nouveau-nés au Québec dont au moins l'un des parents est né à l'étranger est de 29,4% en 2013 contre 14,6% en 1990 (Québec, MIDI, 2014 d, e).

Le poids démographique du Québec décroît selon une tendance lourde. Alors qu'il rassemblait 32,3% de la population canadienne en 1871, le Québec ne représente plus que 23,2% en 2010. On prévoit un poids de 17% en l'an 2050, compte tenu de deux facteurs : la très forte dénatalité des francophones et des anglophones du Québec et la propension des immigrants à s'établir davantage au Canada anglais.

Toujours selon l’Enquête nationale auprès des ménages de 2011, la proportion de la population du Québec appartenant à une « minorité visible », selon la classification officielle, est de 11%. Les groupes les plus importants, selon la catégorisation adoptée, sont les Noirs (28,7% de l'ensemble des minorités visibles), les Arabes (19,6%) et les Latino-Américains (13,7%). La connaissance du français par les anglophones et les allophones (personnes n'ayant ni le français ni l'anglais comme langue maternelle) progresse : 50% en 1971 ; 70,7% en 1991 ; 75,5% en 2001 et 79,2% en 2011.

Sur le plan sociologique, il s'agit d'une population hétérogène, dont les qualifications professionnelles, les ressources et l'expérience de travail sont très diversifiées, comme dans le reste de l'Amérique du Nord. Entre 2006 et 2010, les principaux pays d'origine des immigrants ont été l'Algérie, le Maroc, la France, la Chine, la Colombie, Haïti, le Liban, les Philippines, la Roumanie et le Mexique.

La région métropolitaine de Montréal (RMM) continue de regrouper la grande majorité des immigrés résidant au Québec, soit 86,5%. La part de la population immigrée dans la population de la RMM au total est de 29, 6%, celle de la ville de Laval est de 24,6%, celle de Longueuil de 17,8% et celle des autres régions, de 3,8% (Québec, MIDI, 2014d).

Depuis la création du ministère de l'Immigration en 1968, la politique d'immigration et la politique d'intégration témoignent de l'ouverture du Québec sur le monde. Cependant, le Québec subit les contrecoups de l'air du temps qui caractérise les années 2000 : effets pervers de la mondialisation, néo­conservatisme et augmentation des extrêmes-droites, augmentation du chômage, des inégalités et des discriminations, résurgence des intégrismes religieux et du racisme. L'État québécois, ainsi que les villes et les municipalités, font donc face à de nombreux et nouveaux défis en matière d'intégration et d'aménagement de la diversité ethnoculturelle et religieuse.

Il existe diverses définitions de l'intégration et elles ne font pas consensus. Elles varient selon les contextes historiques et nationaux particuliers. Les États-Unis, le Canada, la France, l'Allemagne, le Québec, les [10] États-Unis, la Suède privilégient des modèles d'intégration différents, même si l'on peut repérer des convergences. [1]

Le discours sociologique et politique de l'intégration comporte des éléments qui sont à la fois descriptifs et normatifs, empiriques et idéologiques, ethnographiques et ethnocentriques (Rumbault, 1998). Certains spécialistes préfèrent parler d'incorporation ou d'assimilation segmentée. C'est le cas du sociologue Alejandro Portes qui a développé une théorie originale de l'incorporation différenciée des immigrants et des minorités ethnoculturelles et racisées dans la société américaine. Ce théoricien démontre que les transformations de l'immigration internationale provenant d'Afrique, d'Asie, d'Amérique latine, caractérisée par une polarisation très grande en termes de revenu, d'éducation et de formation professionnelle, induisent plusieurs modes d'incorporation dans les segments du marché du travail (marché primaire, secondaire, enclaves et niches ethniques, etc.). Ces modes d'incorporation induisent des formes différentes de vie, de résidence et d'appartenance dans la société américaine.

D'autres auteurs contestent l'interprétation des indicateurs utilisés pour prétendre mesurer l'intégration. Par exemple, j'ai critiqué les conclusions douteuses du philosophe Will Kymlicka qui se servait d'indicateurs comme la connaissance des langues officielles, l'adoption d'une identité canadienne et l'acquisition de la citoyenneté pour faire la preuve que le multiculturalisme canadien est efficient (Labelle et Marhraoui, 2001).

Si certains comme Dominique Schnapper tentent de réhabiliter le concept en considérant qu'il porte à la fois sur l'intégration des individus et sur l'intégration de la société, en dépit de son ambigüité (Schnapper, 2007), d'autres s'en distancient. Ainsi le sociologue Michel Wieviorka (2014) estimait récemment que l'intégration, une notion essentielle de la sociologie classique depuis Durkheim, est une catégorie utilisée dans le discours politique lorsque la société fait face à des problèmes sociaux majeurs, et qu'il a, à cet égard, une fonction répressive. Le sociologue considère qu'elle n'a plus la même pertinence analytique à l'époque de la mondialisation actuelle et du transnationalisme et qu'il faut se détacher de ce qu'on appelle « le nationalisme méthodologique », soit une vision centrée sur la société et l'État-nation. J'ai moi-même des réserves sur le sujet et suis davantage inspirée par les paradigmes de la citoyenneté et du transnationalisme. Mais ce thème est développé ailleurs dans mes autres travaux.

Plus récemment, sous l'influence du Conseil de l'Europe, l'effet de mode de l'inclusion tend à s'imposer, à supplanter ou à s'articuler à la notion d'intégration. Mais quelles que soient les définitions, toutes visent à s'attaquer aux ghettos communautaires et aux replis identitaires.

Dans les deux premières parties de ce texte, je présenterai quelques définitions de l'intégration et commenterai les dimensions opérationnelles classiques de ce concept. Une troisième section concerne les facteurs macrosociologiques qui contribuent ou non à l'intégration/inclusion dans la société québécoise. Je terminerai en commentant les principaux obstacles à l'intégration. Ce texte se veut une introduction vulgarisée à un concept qui a toujours fait débat dans le domaine de la sociologie et qui se décline différemment selon les options théoriques et politiques que l'on privilégie.

[11]

1. Des définitions variables

1.1. Une définition politique de l'État québécois

Une définition de l'intégration accompagne le document Au Québec pour bâtir ensemble. Enoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration de 1990 :

L'intégration est un processus d'adaptation à long terme, multidimensionnel et distinct de l'assimilation. Ce processus, dans lequel la maîtrise de la langue d'accueil joue un rôle essentiel, n'est achevé que lorsque l'immigrant ou ses descendants participent pleinement à l'ensemble de la vie collective de la société d'accueil et ont développé un sentiment d'appartenance à son égard (Québec, MCCI, 1990a, p. 16).

Commentaire : La perspective québécoise de l'intégration à laquelle on se réfère depuis n'est pas très précise. Elle fait ressortir l'importance de la connaissance de la langue et du sentiment d'appartenance à la société d'accueil.

1.2. Une définition politique de l'État français :

Plus que la simple insertion matérielle des immigrés dans la société d'accueil, et moins que l'assimilation souvent entendue comme l'abandon de la plupart des spécificités culturelles liées à l'origine, l'intégration reste un concept sinon contesté, du moins mal compris. Il désigne un processus qui « demande un effort réciproque [à l'immigré et à la société du pays d'accueil], une ouverture à la diversité qui est un enrichissement mais aussi une adhésion et une volonté responsable pour garantir et construire une culture démocratique commune » (Rapport du Haut Conseil de l'Intégration, 2011, p. 10).

1.3. Une définition académique française de l'intégration

Selon la sociologue Dominique Schnapper :

« Par définition, quelle que soit l'idéologie nationale, la nation se constitue par un processus d'intégration continu. La politique dite d'intégration n'est pas un choix parmi d'autres possibles, mais elle est un fait et une nécessité. L'intégration comme processus, est et a toujours été génératif de la nation, quelles qu'en soient les justifications idéologiques. Parce que la nation ne peut manquer d'allier à son action intégratrice une idéologie » (Schnapper, 1991, p.81).

L'intégration désigne « Les divers processus par lesquels les immigrés comme l'ensemble de la population réunie dans une entité nationale participent à la vie sociale. L'intégration des immigrés est un cas particulier de l'intégration nationale, même si, bien entendu, elle a des caractéristiques spécifiques et ne se confond pas avec celle des populations régionales ou celle des marginaux » (Schnapper, 1991, p. 99).

Commentaire : Cette perspective a le mérite de montrer que l'intégration des nouveaux arrivants et des minorités est un cas particulier de l'intégration nationale. Mais la définition ne tient pas compte des obstacles structurels que constituent les inégalités et les discriminations dans ce processus.

Dominique Schnapper se demandait dans La Relation à l’Autre comment intégrer les immigrés « ...alors qu'eux-mêmes prennent conscience de leur identité collective et de leur solidarité par-delà les frontières nationales, et que signifie le projet de les intégrer ? Faut-il viser une intégration unique ou pluraliste ? La reconnaissance formelle de sous-cultures à l'intérieur des pays européens est-elle favorable à l'intégration ? Faut-il encourager leur maintien par des politiques publiques, au plan local ou national ? » (Schnapper, 1998, p.409).

Cette interrogation semble assez éloignée des perspectives canadiennes et québécoises où la reconnaissance formelle de sous-cultures ou de communautés culturelles est acquise dans le discours de l'État, que celui-ci [12] porte sur le multiculturalisme canadien ou sur l'interculturalisme québécois, et ce, en dépit des critiques que beaucoup de citoyens d'origines diverses partagent à ce sujet.

1.4. Une définition
du mouvement communautaire


La plate-forme Cap sur l'intégration de la Table de concertation des organismes au service des personnes immigrantes et réfugiées (TCRI) présente l'intégration des personnes réfugiées et immigrantes comme étant un processus complexe et multidimensionnel (linguistique, économique, social, culturel, politique et religieux), bidirectionnel (engage les personnes réfugiées et immigrantes ainsi que les membres et institutions de la société d'accueil), graduel (se fait par étape selon le rythme des individus) et continu. La plate-forme propose des indicateurs d'intégration. Certains sont objectifs : accessibilité aux services, compétence linguistique, accès à l'emploi, participation citoyenne. D'autres sont subjectifs : autonomie, reconnaissance, sentiment d'appartenance (TCRI, 2005).

Commentaire : Cette vision a le mérite de souligner la complexité et le caractère multidimensionnel du processus d'intégration. Elle insiste sur les connaissances linguistiques, l'intégration économique et la participation citoyenne. Elle distingue les critères objectifs et subjectifs de l'intégration.

2. Les dimensions de l'intégration

Dans les théories sociologiques traditionnelles sur l'immigration et l'ethnicité ou la diversité, on distingue diverses dimensions de l'intégration, mais je le souligne, elles sont toutes sujettes à des interprétations critiques et divergentes.

2.1. La dimension linguistique
et culturelle de l'intégration
 [2]

On considère qu'il y a intégration ou assimilation linguistique lorsque les nouveaux arrivants et/ou les minorités démographiques maîtrisent la langue de la société d'accueil ; ici, la langue française, langue officielle et commune du Québec. Et il y aurait intégration culturelle lorsqu'il y a changements dans les mœurs ou les façons de faire. Quant à l'intégration ou mixité culturelle elle est moins conflictuelle chez les immigrants dont le statut d'entrée est volontaire, et encore... Dans le cas de descendants de minorités coloniales et racisées, dans celui des réfugiés et des demandeurs d'asile, les processus d'intégration/incorporation sont beaucoup plus complexes, à tous les points de vue.

Les éléments de la culture matérielle font rapidement l'objet d'emprunts. Ainsi, on adopte facilement les modèles de consommation, alors que l'on ne se détache pas aisément des attitudes et des pratiques face à l'accouchement, à la douleur et à la mort, comme on résiste à adopter des modèles qui concernent les valeurs, les rapports parents-enfants, les rapports hommes-femmes, ou encore le traitement des personnes âgées. Ce constat explique le choc culturel vécu par les nouveaux arrivants et les intervenants sociaux placés devant des situations qu'ils peinent à comprendre.

2.2. La dimension économique de l'intégration [3]

Il y a intégration économique lorsqu'il y a participation active au marché du travail et que le travail accompli est en phase avec les compétences acquises et la reconnaissance des diplômes. Dans le cas contraire, la déqualification ou le chômage constituent un obstacle à l'intégration. Sur le plan économique, l'immigration contribue à combler les lacunes du marché du travail, accroître le capital humain, répondre aux besoins des régions, générer de l'investissement, accroître les flux de commerce, modifier la structure [13] par âge, accroître la flexibilité de la main d'œuvre et profiter de rendements croissants à l'échelle (Labelle et al., 2007, p. 23).

Au Québec, ce sont historiquement des objectifs d'ordre démographique et linguistique qui ont incité le gouvernement à s'impliquer activement dans le dossier de l'immigration. La dimension économique de l'intégration est déterminante : « Une intégration économique réussie est le facteur principal du développement des personnes et des communautés. Elle conditionne la capacité des personnes à accéder aux services dont elles ont besoin, à avoir une bonne qualité de vie, à participer à la vie sociale et politique et à développer un sentiment d'appartenance à leur milieu » (Québec, MICC, 2006, p. 50).

Oublier ce fait et mettre l'accent exclusivement sur la dimension culturelle revient à négliger les véritables obstacles à l'intégration qui constituent un terreau fertile pour l'adoption de postures antagonistes face à la société québécoise.

2.3. La dimension sociale,
civique et politique de l'intégration


L'intégration sociale requiert la possibilité d'interactions entre personnes de différentes origines, dans des réseaux informels comme les réseaux d'amis, de voisinage, des activités de jumelage, etc. Elle se fait encore dans des réseaux formels ou structurés comme les syndicats, les clubs sportifs, les institutions publiques (comités de parents dans les écoles, comités des usagers dans les CLSC, tables de concertation dans les arrondissements et les quartiers, etc.). Dans cette perspective, l'enclave communautaire peut avoir un effet d'entrave à la participation et au dialogue au sein de la communauté politique.

L'intégration civique et politique signifie que les citoyens de toutes origines puissent participer dans les affaires publiques de la société d'accueil ; le vote, l'engagement dans les partis politiques nationaux, municipaux, les mouvements sociaux, la présence dans les instances municipales, etc. Cet engagement n'empêche en rien la participation dans les dossiers et débats concernant le pays d'origine, par le biais des réseaux transnationaux des immigrants. Dans la littérature spécialisée, on considère que l'acquisition de la citoyenneté du pays d'accueil est un indicateur d'intégration, mais ce n'est pas nécessairement le cas ; surtout lorsqu'on en a une conception strictement utilitaire. L'adoption d'une identité citoyenne, par opposition à une identité ethnique ou racisée exclusive, est vue également comme un indicateur d'intégration. Là encore, les options identitaires varient selon les expériences positives ou négatives vécues en situation d'immigration.

Commentaire : Je viens d'énumérer un certain nombre de dimensions classiques de l'intégration. Mais il faut savoir que toutes sont sujettes à réinterprétation.

Par exemple, selon le philosophe Will Kymlicka, l'intégration civique des immigrants et des groupes ethniques est réussie quand il n'y a pas de conflit de valeurs ou de pouvoir sur des questions politiques avec la population de la société d'accueil et que les immigrants adoptent la citoyenneté canadienne. C'est donc dire que de critiquer la politique extérieure du Canada pourrait signifier un sentiment d'appartenance moins solide !

L'adoption de la citoyenneté du pays d'accueil est-elle nécessairement un signe d'intégration réussie ? Le cas analysé par le sociologue américain Ruben Rumbault a fait la preuve que l'on peut invalider l'argument de Kymlicka. Dans les années 1990, le projet de Loi 187 adopté en Californie visait à éliminer l'accès aux services sociaux et de santé pour les immigrants illégaux, à interdire l'accès à l'enseignement public pour leurs enfants, et éventuellement à les expulser des États-Unis. À la suite de l'adoption de la Loi, il y a eu un afflux spectaculaire de demandes de naturalisation de la part des résidents originaires d'Amérique latine, en particulier du Mexique. La réponse du gouvernement mexicain a d'ailleurs été d'autoriser la double citoyenneté pour permettre aux personnes d'origine mexicaine de maintenir leurs droits, ce qui a eu pour effet de renforcer la double appartenance et la double identité citoyenne (dans Labelle et Marhraoui, 2001). [14] Rumbault fournit plusieurs exemples pour démontrer que l'on peut interpréter différemment les mêmes indicateurs d'intégration, ce qu'il désigne comme les paradoxes de l'intégration.

Plus récentes, les théories de la citoyenneté et du transnationalisme ouvrent des pistes d'analyse novatrices. Elles permettent d'articuler les droits et les devoirs, l'appartenance et l'identité dans une communauté politique et territoriale particulière, tout en prenant en compte la dimension transnationale de l'incorporation (Labelle et Salée, 2001 ; Labelle, Couture et Remiggi, 2012).

Abordons maintenant les facteurs macrosociologiques susceptibles d'influer sur l'intégration individuelle.

3. Les facteurs macro sociologiques qui favorisent
ou font obstacle à l'intégration


3.1. La structure du marché du travail
et la conjoncture économique


Je n'élaborerai pas sur ce sujet puisqu'il fait l'objet du texte de monsieur Kamel Beji. Je veux seulement souligner que le taux de chômage des immigrants varie selon les cycles économiques d'expansion et de crise. Ainsi, aux recensements de 1981-1991-2001, le taux de chômage des immigrants était inférieur à celui de la population née au Québec. La main-d'œuvre immigrée présentait au recensement de 1981 un profil d'ensemble plus favorable que celui de la population née au Québec. Elle se caractérisait par un taux d'activité plus élevé, un taux de chômage plus faible (8% contre 11% en 1981) et des salaires et revenus plus élevés (de 9% et 11% respectivement) (Labelle et al., 2007, p. 23). Les choses ont changé depuis. L'économie globale a produit des effets désastreux dans plusieurs pays du monde. Depuis les années 1980, on observe une détérioration prononcée de la situation économique des nouveaux arrivants. Cette tendance se traduit par un écart grandissant entre les groupes racisés et les groupes d'origine européenne. Ceci constitue un enjeu de société majeur dans tous les pays.

3.2. Le rôle de l'État québécois

Le Québec est reconnu comme une nation qui fait partie de la fédération canadienne. Comme dans les cas écossais et catalan, les deux niveaux de gouvernement ne partagent pas nécessairement les mêmes objectifs en matière d'immigration et d'intégration.

L'immigration étant un domaine de compétence partagée entre le gouvernement fédéral et les provinces, le Québec n'a donc pas les pleins pouvoirs et ceci a un impact sur l'intégration des nouveaux arrivants dans la société québécoise. En 1991, une entente a été conclue entre les deux ordres de gouvernement, l’Accord Canada-Québec relatif à l'immigration et à l'admission temporaire des aubains. Cet accord définit les responsabilités qui incombent respectivement aux gouvernements québécois et canadien (Québec, MICC, 2011, p. 3 ; Québec, MIDI, 2014c).

Le gouvernement fédéral demeure responsable de l'admission des immigrants sur le territoire canadien, des volumes d'immigration pour le Canada en prenant en compte la planification du gouvernement québécois, des critères et des conditions de séjour (durée, autorisation de travail et d'études) et des critères d'interdiction de territoire (raisons de santé, de sécurité, de criminalité). Il définit les normes générales de traitement et les catégories générales d'immigration. Il détermine les catégories de la famille et les responsabilités financières du parrainage. Il est le seul responsable du traitement des demandes d'asile faites sur le territoire canadien. Enfin, il définit et accorde la citoyenneté.

Le Québec a pour sa part obtenu la responsabilité exclusive dans trois domaines relatifs à l'immigration permanente : 1) le volume d'immigrants souhaité ; 2) la sélection des candidats qui veulent s'établir sur son territoire (à l'exception des demandeurs de statut de réfugié et des membres de la catégorie du regroupement familial) ; 3) la gestion et le suivi des engagements de parrainage ainsi que leur durée. Par ailleurs, en matière d'immigration temporaire, le consentement du Québec est requis en ce qui concerne : 1) l'octroi de permis de travail ; 2) la remise de permis d'études et l'admission des étudiants étrangers, sauf [15] lorsque ces derniers participent à un programme canadien d'assistance aux pays en voie de développement ; 3) l'autorisation donnée à un visiteur de se rendre au Québec pour y recevoir des traitements médicaux.

3.3. La citoyenneté et les questions d'allégeance

Un autre champ d'intervention concerne la citoyenneté. L'idée de citoyenneté ne se réduit pas au statut juridique et à la détention d'un passeport. Elle implique également des aspects qui concernent les représentations symboliques de l'identité nationale et les modes d'appartenance à la communauté politique. Ici aussi, il y a contradiction entre les deux paliers de gouvernement, et ceci ajoute à la confusion des immigrants.

L'article 15 du Règlement sur la citoyenneté concerne la procédure à suivre pour faire la demande (certificat de naissance, pièces justificatives, etc.) et énonce les conditions d'obtention de la citoyenneté (un examen écrit ou une entrevue). L'évaluation se base sur deux critères fondamentaux : 1) la connaissance du Canada ainsi que les droits et responsabilités liés à la citoyenneté ; et 2) la connaissance suffisante du français ou de l'anglais. Les candidats adultes qui ont 55 ans ou plus n'ont pas besoin de passer l'examen pour la citoyenneté (Canada, 201 la, p. 6). Le candidat doit avoir une connaissance suffisante des principales caractéristiques de l'histoire politique et militaire, de l'histoire culturelle et sociale, de la géographie physique et politique et du système politique canadien en tant que monarchie constitutionnelle (idem, p. 64).

Au cours de la cérémonie d'attribution, le candidat doit prêter un serment d'allégeance :

« Je jure (ou j'affirme solennellement) que je serai fidèle et porterai sincère allégeance à Sa Majesté la Reine Elizabeth Deux, Reine du Canada, à ses héritiers et successeurs, que j'observerai fidèlement les lois du Canada et que je remplirai loyalement mes obligations de citoyen canadien » (Canada, 201 la, p. 2).

Le guide Découvrir le Canada commente le serment d'allégeance à la Reine :

Au Canada, nous jurons notre fidélité à une personne humaine qui nous représente tous, plutôt que de nous engager à servir un document, une oriflamme ou un territoire. Dans notre monarchie constitutionnelle, la souveraine (reine ou roi) symbolise à la fois notre Constitution, notre drapeau et notre pays. C'est un principe d'une remarquable simplicité, mais également d'une grande signification : la souveraine personnifie le Canada tout comme le Canada personnifie la souveraine (Canada, 2011b, p. 2).



3.4. Le modèle d'intégration canadien :
le multiculturalisme


Le modèle d'intégration est celui du multiculturalisme. Il s'appuie sur une politique publique adoptée par le gouvernement fédéral en 1971. Selon ce modèle, il n'y pas deux peuples fondateurs, deux nations, mais toutes les cultures sont égales, dans le contexte du bilinguisme officiel.

Beaucoup de choses ont été dites et écrites pour expliquer la différence entre le multiculturalisme canadien et l'interculturalisme québécois. D'entrée de jeu, il faut souligner que tous les gouvernements du Québec, quel que soit le parti politique au pouvoir, ont rejeté la politique fédérale du multiculturalisme, au nom de la protection du français, langue officielle du Québec, et des caractéristiques politiques et culturelles de la nation québécoise qui représente moins de 25% de la population canadienne. Une large partie des intellectuels québécois considèrent que ces deux modèles d'intégration se font concurrence et sont source de confusion pour les nouveaux arrivants (Labelle, 2008 ; Labelle et Rocher, 2011).

[16]

3.5. Le modèle d'intégration québécois :
l'interculturalisme


Le modèle d'intégration québécois a été graduellement élaboré dans le cadre de plusieurs énoncés et plans d'action. Le premier Plan d'action du gouvernement du Québec à l'intention des communautés culturelles Autant de façons d'être Québécois fut dévoilé en 1981 dans un contexte post-référendaire sur la souveraineté du Québec (Québec, MCCI, 1981). Il visait à assurer le maintien et le développement des « communautés culturelles », à sensibiliser les Québécois à leur apport au patrimoine commun et à favoriser leur intégration au sein des institutions publiques, notamment par l'accès à l'emploi. Il propose un modèle différent de celui du creuset américain, du multiculturalisme canadien ou de l'assimilation à la française, soit celui de la « convergence culturelle ». Le Québec y est défini comme une nation à caractère français. La culture québécoise et française devrait être un foyer de convergence des cultures des minorités que le gouvernement du Québec entend pourtant maintenir « originales et vivantes partout où elles s'expriment ». Il insiste sur le rapprochement interculturel.

L'Énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration Au Québec pour bâtir ensemble (Québec, MICC, 1990) propose un projet d'intégration des immigrants et des « communautés culturelles » axé sur l'idée de contrat moral et de culture publique commune.

Rappelons les trois principes qui figurent dans l'Enoncé de politique de 1990 : « le Québec est une société distincte (maintenant on dit une nation) dont le français est la langue commune de la vie publique et il s'attend à ce que l'immigrant conjugue ses efforts aux siens pour maintenir et développer ce trait distinctif ; le Québec est une société démocratique fondée sur la pleine participation de tous ses membres, il combat la discrimination et s'attend à l'implication des nouveaux citoyens dans tous les secteurs de la vie sociale ; le Québec est pluraliste et ouvert aux apports de sources diverses et s'attend à ce que les nouveaux arrivants contribuent à l'enrichissement commun dans le respect des valeurs démocratiques à travers l'échange intercommunautaire » (idem).

En 2008, le gouvernement a rendu publique La diversité : une valeur ajoutée. Politique gouvernementale pour favoriser la participation de tous à l'essor du Québec, accompagnée d'un plan d'action quinquennal (Québec, MICC, 2008a). Cette politique vise la lutte contre le racisme, le rapprochement interculturel et l'accès à l'égalité. Elle s'accompagne d'une Déclaration portant sur les valeurs communes de la société québécoise à faire signer dans la demande de certificat de sélection du Québec. La Déclaration énumère les valeurs énoncées dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec : « le Québec est une société libre et démocratique ; les pouvoirs politiques et religieux au Québec sont séparés ; le Québec est une société pluraliste ; la société québécoise est basée sur la primauté du droit ; les femmes et les hommes ont les mêmes droits ; l'exercice des droits et libertés de la personne doit se faire dans le respect de ceux d'autrui et du bien-être général ». Elle souligne aussi que la société québécoise est régie par la Charte de la langue française qui fait du français la seule langue officielle du Québec (Québec, MICC, 2008b).

Le guide Apprendre le Québec à l'intention des nouveaux immigrants les informe clairement des valeurs et des fondements non négociables de la société québécoise. En voici des extraits : « L'état est laïque. L'indépendance des pouvoirs politiques et religieux est une valeur fondamentale de la société québécoise », « Tous les Québécois, natifs ou immigrés, ont le droit de choisir librement leur style de vie, leurs valeurs, leurs opinions et leur religion. Tous ont la responsabilité de respecter toutes les lois, même si celles-ci s'avèrent incompatibles avec leur religion ou leurs valeurs personnelles. », « L'homme et la femme sont égaux ; ils ont les mêmes responsabilités et jouissent des mêmes droits, tant dans les affaires publiques que dans la vie privée. », « Le français représente non seulement un outil de communication essentiel, mais aussi un symbole commun d'appartenance à la société québécoise et de dialogue interculturel » (TCRI, 2007). En 2014, un décret modifie le nom du MICC pour celui de ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion (MIDI). Le gouvernement amorce les travaux interministériels visant à doter le Québec d'une nouvelle politique publique qui remplacera l’Énoncé de 1990. À cette fin, la Commission des relations avec les citoyens du gouvernement du Québec procédera à des consultations et tiendra des [17] auditions publiques sur le cahier intitulé Vers une nouvelle politique québécoise en matière d'immigration, de diversité et d'inclusion en 2015. Cette consultation portera sur les fondements, les choix de société et les principes directeurs qui devront guider la nouvelle politique.

Ces politiques d'immigration et d'intégration/inclusion varient selon les gouvernements au pouvoir. Il en va de même de la catégorisation étatique adoptée. Ces facteurs ont à mon avis un effet nocif sur la cohérence et la continuité des orientations et des pratiques de l'État aussi bien au niveau national, qu'au niveau des municipalités. Car le discours est normatif, souvent éthéré et manque de clarté et de simplicité.

3.6. Le rôle des associations
subventionnées par l'État québécois


Les associations à identité ethnique, racisée ou religieuse facilitent en principe l'accueil et l'adaptation immédiate des immigrants, et à moyen terme leur intégration. Mais elles font également l'objet d'un vaste débat dans la littérature spécialisée. Quel modèle d'intégration proposent-elles ? Leurs orientations visent-elles le rapprochement interculturel ou le repli communautaire ? La perpétuation de l'ethnicité ou la dynamique de la citoyenneté ?

4. Les obstacles à l'intégration

Les obstacles à l'intégration sont considérables en dépit du discours normatif de l'État et des spécialistes du monde universitaire. Je m'arrêterai ici à quelques types seulement.

4.1. Les expériences
et les projets individuels


Pour certains immigrants, l'intégration ne se fait jamais pour différentes raisons. Soit qu'ils sont de passage (les investisseurs et les entrepreneurs qui résident six mois par année dans leur pays d'origine), soit qu'ils rencontrent trop d'obstacles sur le marché du travail (non reconnaissance des diplômes et des qualifications, exploitation dans les milieux de travail, arbitraire patronal, discrimination, absence de syndicalisation), soit qu'ils refusent carrément de s'intégrer parce qu'ils n'acceptent pas les mœurs, les valeurs ou même les lois de la société d'accueil.

4.2. L'accès aux services d'accueil
et d'insertion économique


L'État québécois est responsable des services d'accueil et d'insertion économique et linguistique offerts aux résidents permanents. Une compensation financière est versée pour que le Québec puisse prendre en charge ces responsabilités. Or en 2007, la Table de concertation au service des personnes réfugiées et immigrantes faisait déjà un constat sévère des services offerts.

Selon la TCRI,

Les politiques et programmes du Québec en matière d'immigration ont longtemps été à l'avant-garde à l'égard du reste du Canada et du monde occidental. Ce n'est plus vrai alors que le gouvernement fédéral investit massivement dans des programmes d'intégration, d'éducation et de sensibilisation notamment en matière interculturelle et de lutte contre le racisme. Pire, le choix qu'a fait le gouvernement du Québec de désinvestir en 2004-2005 dans les programmes d'intégration affecte considérablement l'offre de services qui ne répond plus aux besoins des nouveaux arrivants que le Québec souhaite pourtant accueillir en plus grand nombre chaque année. Ce choix politique est difficile à comprendre puisque, depuis 1991, le gouvernement du Québec reçoit un transfert fédéral pour financer les activités et programmes liés à l'accueil et l'établissement des personnes immigrantes. À titre indicatif, pour l'exercice 2006- 2007, le gouvernement du Québec a reçu 197 600 000$ alors que les dépenses vouées au programme d'intégration du Ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles sont estimées à 100 000 000 $. Le Québec a les moyens d'assurer une intégration réussie et harmonieuse des nouveaux arrivants, il n'a qu'à investir en totalité l'enveloppe budgétaire de l'entente qu'il reçoit du fédéral pour développer et bonifier les programmes d'intégration et d'employabilité sur l'ensemble du territoire québécois.

[18]

[...] L'accueil, l'établissement et l'intégration des nouveaux arrivants est une étape non seulement fondamentale dans le cheminement d'une personne immigrante, mais aussi celle qui influencera tout son processus d'adaptation à son nouveau milieu de vie. Au Québec, des centaines d'organismes communautaires œuvrent auprès de cette population aux niveaux de l'entraide, des services de première ligne, des services en employabilité, du logement, de la francisation et du rapprochement interculturel. Une partie de ces organismes reçoit un soutien financier de la part du MICC pour offrir des services à ces personnes dans le cadre du Programme d'accompagnement des nouveaux arrivants (PANA) (TCRI, 2007, p.6).

Lors des audiences publiques organisées par la Commission de la citoyenneté des relations avec les citoyens en vue d'une nouvelle politique québécoise, on pourra constater si ce diagnostic de la TCRI a changé.

4.3. Le racisme et les discriminations [4]

Citons encore une fois la TCRI :

« Nous ne pouvons traiter de l'interculturalisme sans aborder les phénomènes complexes et sensibles que sont le racisme et la discrimination. Les organismes qui œuvrent auprès des personnes réfugiées et immigrantes en sont témoins quotidiennement et constatent que ces problèmes touchent toutes les sphères de la société et qu'ils doivent être combattus de manière concertée par l'ensemble des acteurs de l'État de manière transversale et sur tout le territoire, notamment dans les régions qui sont peu confrontées à la diversité culturelle et à l'immigration » (2007, p.6).

Le racisme s'exprime de différentes manières : par des préjugés, des pratiques discriminatoires, de la violence et des crimes haineux (Labelle, 2011). Il atteint tous les secteurs de la vie en société. Comme le sexisme, il humilie les personnes, produit un sentiment de rejet et d'exclusion, et les pousse à adopter une identité adversariale face à société dans laquelle ils vivent.

L'État québécois et les municipalités ont beaucoup à faire en ce domaine. D'une part, le gouvernement du Québec doit renouveler et faire connaître sa politique de lutte contre le racisme, adoptée en 2008. D'autre part, les municipalités comme Laval auraient intérêt à adhérer à la Coalition canadienne des municipalités contre le racisme et les discriminations (62 villes canadiennes à ce jour) et à s'inspirer de son Guide de bonnes pratiques à adopter (Commission canadienne pour l'UNESCO, 2012).

Par ailleurs, on tient généralement pour acquis que le racisme provient essentiellement de la majorité démographique au Québec. C'est passer sous silence les préjugés et les pratiques discriminatoires à caractère raciste qui existent également au sein des minorités et qui visent soit la majorité francophone, soit d'autres minorités, soit des segments internes d'une même minorité. Il faut souligner que les idéologies racistes et sexistes, à des degrés divers, sont un fléau dans le système mondial. Elles sont en recrudescence en période de crise économique et elles varient selon les enjeux conflictuels entre les groupes sociaux.

Enfin, il faut rappeler que la majorité dans une société n'est pas un bloc homogène. Il en va de même des minorités ethnoculturelles, racisées et religieuses. À cet égard, je considère que beaucoup reste à faire au Québec pour déconstruire une opposition convenue et figée entre majorité et minorités, opposition récurrente qui nuit au débat démocratique sur les grands enjeux de société.

[19]

Références

Canada (201 la). Loi sur la citoyenneté, L.R.C., 1985, ch. C-29, Ottawa : ministère de la Justice, à jour le 9 avril 2011. http://laws-lois.justice.gc.ca/PDF/C-29.pdf (consulté le 20 juillet 2011).

Canada (201 lb). Découvrir le Canada. Les droits et responsabilités liées à la citoyenneté, Ottawa : Sa Majesté la reine du chef du Canada, représentée par le ministre de la Citoyenneté et Immigration Canada.

Commission canadienne pour l'UNESCO (2012) Coalition canadienne des municipalités contre le racisme et les discriminations. Guide pratique à l'intention des municipalités, des organisations et des citoyens : Unesco. (consulté le 11 décembre 2014). PDF.

Haut Conseil de l'Intégration (2011). La France sait-elle encore intégrer les immigrés ?, Rapport au Premier Ministre, 11 avril, La Documentation française. (consulté le 11 décembre 2014).

Labelle M. « Politique d'immigration du Québec », L'Encyclopédie canadienne, Toronto, Historica Canada, 2006 (mise à jour janvier 2015), en ligne, Historica Canada.

Labelle M. (2011). Racisme et antiracisme. Discours et déclinaisons, Québec, Presses de l'Université du Québec, 212p.

Labelle M. (2008). « Les intellectuels québécois face au multiculturalisme : hétérogénéité des approches et des projets politiques », Canadian Ethnic Studies, vol. 40, n° 1-2, p. 33-56.

Labelle M. et D. Salée (2001). « Immigrant and Minority Representations of Citizenship in Québec », dans T. A. Aleinikoff et D. Klusmeyer (dir.), Citizenship Today. Global Perspectives and Practices, Washington, Carnegie Endowment for International Peace, p. 278-315.

Labelle M. et F. Rocher (2011). « Les limites indépassables de l'interculturalisme en contexte canadien : un chemin semé d'embûches », dans G. Bouchard et al. (dir.), L'interculturalisme. Dialogue Québec-Europe, Montréal, Actes du symposium international sur l'interculturalisme, 25-27 mai 2011, 16p.

Labelle M. et A. Marhraoui (2001). « Intégration et multiculturalisme : discours et paradoxes », dans Y. Resch (dir.), Définir l'intégration, Actes du colloque de l'Association internationale d'études québécoises (AIEQ) et Institut d'Études politiques, Montréal, XYZ éditeur, p. 19-31.

Labelle M., J. Couture et F. W. Remiggi (dir.) (2012). La communauté politique en question. Regards croisés sur l'immigration, la citoyenneté, la diversité et le pouvoir, Québec, Presses de l'Université du Québec, 375p.

Labelle M., A.-M. Field et J.-C. Icart (2007). Les dimensions d'intégration des immigrants, des minorités ethnoculturelles et des groupes racisés au Québec, Rapport présenté à la Commission de consultation sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences culturelles, Montréal, Chaire de recherche en immigration, ethnicité et citoyenneté, Université du Québec à Montréal, 31 août, 145p.

Québec, Ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion (2014a). Vers une nouvelle politique québécoise en matière d'immigration, de diversité et d'inclusion. Document synthèse, Québec, Gouvernement du Québec, Consultation publique 2015.

Québec, Ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion (2014b). Vers une nouvelle politique québécoise en matière d'immigration, de diversité et d'inclusion. Cahier de consultation, Québec, Gouvernement du Québec, Consultation publique 2015.

Québec, Ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion (2014c). L'immigration au Québec. Le rôle du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion et de ses partenaires, Document de référence, Québec, Gouvernement du Québec, Consultation publique 2015.

Québec, Ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion (2014d). Recueil de statistiques sur l'immigration et la diversité au Québec. Québec, Gouvernement du Québec, Consultation publique 2015.

[20]

Québec, Ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion (2014e). Fiche synthèse sur l'immigration et la diversité ethnoculturelle au Québec. Québec, Gouvernement du Québec, Direction de la recherche et de l'analyse prospective.

Québec, ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles (2011). L'immigration au Québec. Consultation 2011-2015, Québec, Gouvernement du Québec.

Québec, Ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles (2008a). La diversité : une valeur ajoutée. Politique gouvernementale pour favoriser la participation de tous à l'essor du Québec, Montréal, Direction des affaires publiques et des communications du Ministère de l'immigration et des communautés culturelles.

Québec, Ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles (2008b). Pour enrichir le Québec - Affirmer les valeurs communes de la société québécoise. Mesures pour renforcer l'action du Québec en matière d'intégration des immigrants, Montréal, Direction des affaires publiques et des communications du Ministère de l'Immigration et des communautés culturelles.

Québec. Ministère des Communautés culturelles et de l'immigration (MCCI) (1990a). Au Québec pour bâtir ensemble. Énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration, Montréal, Direction des communications.

Québec. Ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration (MCCI) (1990b). L'intégration des immigrants et des Québécois des communautés culturelles : document de réflexion et d'orientation, Montréal, Direction des communications.

Québec. Ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles (MICC) (2006). Rapport du Groupe de travail sur la pleine participation à la société québécoise des communautés noires, Montréal, Direction des affaires publiques et des communications.

Québec, Ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration (1981). Autant de façons d'être Québécois. Plan d'action à l'intention des communautés culturelles, Montréal, Direction des communications.

Rumbault R. G., « Paradoxes and Orthodoxies of Assimilation », Sociological Perspectives, 1997, vol. 40, no. 3, pp. 483-511.

Schnapper D. (1998). La relation à l'Autre. Au cœur de la pensée sociologique, Paris, Gallimard.

Schnapper D. (1991). La France de l'intégration, Paris, Gallimard.

Schnapper D. (2007). Qu'est-ce que l'intégration ? Paris, Gallimard.

Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI) (2007). Pour des accommodements réciproques, Mémoire présenté à la Commission Bouchard-Taylor, Montréal.

Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI) (2005). Cap sur l'intégration, Montréal, TCRI, site web. (consulté le 12 septembre 2006).

Wieviorka, M. (2014). « A Critique of Integration », Identities : Global Studies in Culture and Power, vol. 21, no. 6, pp. 633-641.



[1] Dans ce texte, je reprendrai de larges extraits du rapport sur les dimensions de l'intégration que j'ai soumis à la Commission gouvernementale de consultation sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences culturelles (Bouchard Taylor) (Labelle et al., 2007) et de différents articles sur le sujet dont on trouvera les références en bibliographie.  URL.

[2] Pour des données sur les dimensions de l'intégration, voir le rapport sur l'intégration soumis à la Commission Bouchard-Taylor, section 4, p.67-76 (Labelle et al., 2007).

[3] Pour des données sur l'intégration économique, voir le cahier de consultation Vers une politique québécoise en matière d'immigration, de diversité et d'inclusion (Québec, MIDI, 2014).

[4] Voir les données dans mon rapport pour la Commission Bouchard-Taylor (Labelle et al., 2007, p.77-92).



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le samedi 8 octobre 2016 10:23
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref