Une édition électronique réalisée à partir du livre de M. Jacques Henripin, Naître ou ne pas être. Québec, Institut québécois de recherche sur la culture (IQRC), 1989, 141 pp. Collection: Diagnostic, no 10. [Autorisation accordée par l’auteur, démographe et professeur retraité du département de démographie de l’Université de Montréal, le 13 août 2004, de diffuser toutes ses publications.]

Avant-propos

Du point de vue de la société, les enfants sont aussi nécessaires que la nourriture pour les individus. À cet égard, le monde industrialisé manifeste une défaillance qui devrait inquiéter, pour peu qu'elle perdure.

Les Québécois, tout en participant à ce mouvement, ont parcouru un chemin un peu déconcertant: après avoir fait des prouesses d'abondance, ils sont maintenant à classer parmi ceux qui souffrent le plus de sous-fécondité. Tous: Anglais, Français et autres.

C'est de cette aventure qu'il s'agit dans ce livre. Les deux premiers chapitres servent de fondations: on y estime le potentiel humain en matière de procréation, son usage et l'on raccorde la natalité au fonctionnement «organique», pourrait-on dire, de la population. Le chapitre 3 évoque deux siècles d'abondance; le quatrième retrace la chute du dernier siècle, qui se termine par la flambée du baby-boom, puis l'effondrement récent.

C'est dans le cadre de l'ensemble du monde industrialisé qu'il faut essayer de comprendre cette évolution, puisque tous les pays riches, instruits, technicisés, motorisés, ont suivi à peu près le même chemin et souffrent de la même déficience. Ce sera l'objet des chapitres 5 et 6, où nous rapporterons succinctement les vues de quelques grands interprètes de cette révolution. Le chapitre 7 expose les conséquences collectives les plus importantes du maintien éventuel d'une fécondité aussi chétive. Cela appelle un redressement: les chapitres 8 et 9 examinent les stratégies qu'on peut envisager.

On ne fait pas de la démographie - pas plus que de la cosmologie - sans mesurer au moins quelque peu. Mais nous avons tâché d'élaguer le plus possible, en ne retenant que les éléments numériques qui paraissaient essentiels. Le lecteur peu rompu à la manipulation des nombres peut se rassurer: rien, dans les pages qui suivent, ne dépasse les quatre opérations simples... et l'on n'y aura recours qu'avec la plus grande parcimonie, principalement dans les deux premiers chapitres.

Et pour tout confesser, l'auteur peut bien avouer qu'il a tout fait pour montrer qu'on peut faire de la démographie ... presque en s'amusant.

Cela implique qu'il n'a pas toujours gardé la froideur du géomètre et la circonspection d'un juge dont dépend la vie d'un accusé. On peut décrire les faits en gardant ces attitudes fort respectables, mais pour essayer de les expliquer et d'en présenter les conséquences, il faut déjà un peu de goût pour l'aventure. Et quand on aborde les aspects politiques, on est alors presque dans la polémique.

Les chapitres de ce livre ont donc un ton variable, suivant les aspects abordés. L'auteur espère que le lecteur n'en sera pas gêné.