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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Pierre Hamel et Marco Silvestro, “Mouvements urbains et démocratisation des politiques urbaines dans le contexte de la mondialisation”. Un article publié dans l'ouvrage sous la direction de Louis Guay, Pierre Ha-mel, Dominique Masson et Jean-Guy Vaillancourt, Mouvement sociaux et changements institutionnels. L'action collective à l'ère de la mondialisation. Chapitre 4, pp. 91-113. Québec: Les Presses de l'Université du Québec, 2005, 420 pp. Collection: Géographie contemporaine. [M Hamel, sociologue nous a accordé le 28 janvier 2008 son autorisation de diffuser électroniquement cet article dans Les Classiques des sciences sociales.]

Pierre Hamel et Marco Silvestro 

Mouvements urbains et démocratisation
des politiques urbaines
dans le contexte de la mondialisation
”. 

Un article publié dans l'ouvrage sous la direction de Louis Guay, Pierre Hamel, Dominique Masson et Jean-Guy Vaillancourt, Mouvement sociaux et changements institutionnels. L'action collective à l'ère de la mondialisation. Chapitre 4, pp. 91-113. Québec : Les Presses de l'Université du Québec, 2005, 420 pp. Collection : Géographie contemporaine.

 

Introduction
 
1. Développement local et enjeux institutionnels de l'action collective
2. La création des CDEC et les nouvelles stratégies des mouvements urbains
3. L'institutionnalisation des CDEC à Montréal
4. L'implantation des Centres Locaux de Développement et les nouveaux enjeux du développement local
 
Conclusion
Bibliographie

 

INTRODUCTION

 

À Montréal, l'action des mouvements urbains a joué un rôle de premier plan dans la modernisation de l'administration municipale, y inclus celui d'une démocratisation de la gestion publique, notamment en ce qui concerne la planification et les politiques urbaines. Dès les années 1960, ces acteurs ont attiré l'attention des médias, de la population et des pouvoirs publics sur le caractère rétrograde de la gestion effectuée à la vine de Montréal, dénonçant l'absence de transparence des décisions prises par les autorités municipales, notamment en matière de rénovation urbaine, et réclamant une participation des citoyens à sa gestion. 

Ces demandes et les mobilisations qui les ont portées ont conduit à transformer la culture civique urbaine. Elles n'ont pas pour autant démocratisé l'ensemble de la gestion municipale. C'est pourquoi, à partir du milieu des années 1980, les Corporations de développement économique communautaire (CDEC) se sont engagées sur le terrain du développement économique local. 

En associant les CDEC aux mouvements urbains, nous voulons éclairer la portée de leur action par rapport aux objectifs de démocratisation que formulaient les mouvements urbains des années 1960 et 1970. Pouvons-nous dire qu'elles parviennent à renouveler l'action collective de ces mouvements sur le terrain de la démocratie locale ? En acceptant d'établir des partenariats avec les pouvoirs publics, les milieux d'affaires et les syndicats réussissent-elles à préserver leur autonomie ? Comment interpréter leur action qui se déploie au sein des institutions ? 

Afin de répondre à ces questions, nous considérons l'évolution de l'action des CDEC dans le contexte urbain de Montréal en tenant compte des défis que représentent les changements récents sur le plan de leur financement. Avant de traiter de cet enjeu, il était nécessaire de dégager les principales caractéristiques de ces groupes, de leur évolution et du contexte politico-institutionnel à l'intérieur duquel s'inscrit leur action. Au préalable, nous situons l'action des CDEC en fonction d'un enjeu théorique majeur dans la conjoncture, celui de l'institutionnalisation de l'action collective.

 

1. Développement local et enjeux institutionnels
de l'action collective

 

À l'instar des autres mouvements sociaux, les mouvements urbains ne suivent pas un chemin tracé d'avance ou n'empruntent pas un cycle prévisible. Cela tient à la nature de l'action collective et à l'interaction qui prévaut entre facteurs internes et facteurs externes en ce qui a trait à la portée ou à l'impact de ces mouvements par rapport au changement social. Mais cela s'explique aussi par le fait que le changement social lui-même demeure difficile à évaluer. 

En outre, l'accroissement des ressources disponibles de même que l'émergence de nouvelles structures d'opportunité politique, qui peuvent éclairer après coup les conditions favorables à la mobilisation, relèvent de transformations économiques, sociales et politiques que les mouvements sociaux peuvent, certes, contribuer à produire, mais dont ils ne sont pas les seuls, voire les premiers responsables. Enfin, la nature même de l'action collective, son caractère ambivalent et souvent ambigu, caractéristique des mouvements sociaux contemporains (Hamel et Maheu, 2001), accroît l'incertitude pour les acteurs et alimente des stratégies individuelles et collectives difficiles à anticiper. 

En faisant appel à l'exemple de Montréal et en remontant au début des années 1960, on peut dire que personne n'avait entrevu la portée exacte des mouvements urbains tant par rapport à la démocratie locale qu'en ce qui concerne la démocratisation de la gestion publique. Ainsi, alors que plusieurs chercheurs soulignaient la faiblesse, sinon la disparition de ces mouvements dans de nombreux pays (Ceccarelli, 1982), au Québec et en particulier à Montréal, les acteurs de ces mouvements ont relancé leur action à partir des enjeux du développement urbain et local. C'est ce qui a donné lieu à la création des CDEC au milieu des années 1980. 

Même si les CDEC ne constituent qu'une forme organisationnelle particulière que les mouvements urbains ont empruntée à une époque donnée de leur histoire, celle-ci est révélatrice, d'un côté, de leur capacité d'adaptation et, de l'autre, de la transformation des enjeux économiques et urbains. À cet égard, on peut dire que les mouvements urbains sont révélateurs des nouveaux conflits qui marquent les rapports sociaux à l'espace et auxquels la classe politique n'est pas en mesure d'apporter des réponses satisfaisantes d'un point de vue social. 

Dans le contexte actuel de la mondialisation, la question du développement et celle de la qualité de vie ou du cadre bâti sont de plus en plus interreliées. Les exigences de compétitivité auxquelles doivent faire face les agglomérations urbaines, compte tenu des repositionnements en cours dans les hiérarchies urbaines internes et externes aux systèmes nationaux, mettent en cause les alliances passées entre les acteurs économiques et sociaux, produisant des effets inattendus sur le plan des inégalités sociales. Cela oblige les responsables économiques et politiques à revoir leurs stratégies de relance ou d'aide au développement tout comme cela engendre de nouvelles formes d'inégalités sociales dont nous comprenons encore mal les modalités d'expression. Donzelot et Jaillet (1997) parlent à ce sujet de sécession urbaine. Selon eux, la détérioration du tissu de protection sociale et surtout, le refus de la part des classes moyennes de soutenir les plus démunis de nos sociétés se répercutent aussi bien dans les formes quotidiennes de violence urbaine et les nouvelles formes de ségrégation spatiales - par exemple l'accès de plus en plus difficile aux zones urbaines centrales pour les couches populaires - que dans un renforcement de l'exclusion sociale. Dans cette perspective, le cercle vertueux de la compétitivité, de la qualité du cadre de vie et de la cohésion sociale serait sur le point d'être rompu d'une manière irrémédiable dans les grandes agglomérations urbaines. 

C'est contre cette menace que les mouvements urbains montréalais se sont mobilisés dans les années 1980 en élaborant un modèle d'intervention partenariale qui associait au développement local les acteurs publics et privés. Du même coup, les mouvements urbains introduisaient des préoccupations économiques dans la redéfinition de la démocratie locale, attirant l'attention des observateurs publics sur la détérioration des conditions économiques dans les quartiers populaires montréalais. De plus, ils établissaient un lien direct entre la détérioration urbaine, le désinvestissement économique, le dynamisme entrepreneurial et les possibilités d'emploi pour la population locale. Ce faisant, leur action remettait en question les « tranchées de la ville » (Katznelson, 1981) qui, par le passé, ont infléchi les politiques urbaines ayant pour effet de dissocier les luttes de classes dans l'usine et les luttes urbaines dans les quartiers. 

Plus que cela n'avait été le cas jusque-là, l'action des mouvements urbains dans le contexte montréalais s'est alors engagée sur le terrain institutionnel des politiques urbaines. En choisissant la voie du partenariat et d'un certain pragmatisme, qui tranchait avec le radicalisme des années 1970, les mouvements urbains ont exploré de nouvelles possibilités de négociation et d'entente avec les pouvoirs publics. Ils sont parvenus à revoir les anciens modèles de coopération entre le secteur public et le secteur communautaire afin d'accroître la marge de manoeuvre de ce dernier. Ils se sont engagés par la même occasion dans une redéfinition de leurs stratégies. 

À partir de cet exemple, on peut dire que les rapports entre les mouvements sociaux et les institutions sont différents de la description qu'en propose la sociologie classique. Dans ce cadre, les relations entre les acteurs et les systèmes d'action étaient appréhendées sous l'angle de processus continus de normalisation qui provenaient des mécanismes de rationalisation propres à la modernité, les institutions servant avant tout ici à réguler les conflits. Ce qui échappe à cette lecture nous apparaît pourtant de première importance. C'est que le champ institutionnel est soumis depuis quelques années à des restructurations dont nous ne pouvons saisir la portée qu'en revoyant nos modèles d'analyse (Hamel, Lustiger-Thaler et Maheu, 2000). 

Reprise à son compte par la sociologie des mouvements sociaux, la lecture classique des rapports entre les mouvements sociaux et les institutions vise à expliquer les « résistances produites par les acteurs à l'égard des identités qui leur [sont] imposées » (Lustiger-Thaler, Maheu et Hamel, 1998, p. 176). Elle tente de fournir à la fois une explication du changement social et des processus qui conduisent à la normalisation. Or, dans le contexte de la modernité avancée, comme en témoigne notamment depuis quelques années l'action des mouvements urbains, les rapports entre les acteurs et les institutions font appel à une autre configuration que celle décrite par l'approche classique. 

Ce qui prenait la forme d'une correspondance entre les acteurs et les institutions est remplacé par des rapports de non-correspondance reflétant une instabilité accrue des institutions qui sont marquées à la fois par un accroissement de l'individualisation des rapports sociaux et par une redéfinition des rapports entre la sphère publique et la sphère privée. La capacité de chacun de faire des choix, celle d'être reconnu dans son identité et, enfin, celle d'appartenir à un espace social donné constituent trois enjeux majeurs qui alimentent la redéfinition du champ institutionnel dans le cadre de la modernité avancée. Les hiérarchies stratifiées qui caractérisaient les institutions à une autre époque - attribuant aux acteurs sociaux des fonctions et un rôle convenus - cèdent la place à une « nouvelle culture politique » (Beck, 1992), faisant appel à des formes d'organisation réticulées, des processus décisionnels décentralisés et une participation plus grande des citoyens à la gestion des affaires publiques. Il en résulte une remise en question des institutions dans leur hiérarchie stratifiée qui passe moins par un affrontement direct que par des pratiques de résistance fragmentées et ambivalentes. Dès lors, on ne peut plus concevoir les mouvements sociaux et leurs acteurs dans un strict rapport d'extériorité aux institutions. Il faut plutôt parler d'expérimentation et de rapports conflictuels au sein des institutions. Aux rapports d'extériorité qui caractérisaient auparavant les relations entre les mouvements et les institutions, nous devons substituer des relations de type « expérientiel » : 

Actors accept to register their action inside networks of negotiation, even though they are aware that, most of the time, they will have to make some compromises. In so doing, they involve themselves in a new form of institutional experimentation process. What counts here is not a gain of a simple institutional transformation of the rules that orient action. From this viewpoint, we can no longer consider institutions as if they were simple receptacles of action. The unidimensional correspondence between actors and systems of action that seemed so obvious in traditional approaches has ended. Institutions are now more than ever dependant of the absorption of the external reflexivity and diversity of agents that frequent, and in their myriad ways, influence, subvert and contest them. At this level of analysis, institutions in late modernity are ambivalent regions, sites that actors have no choice but to engage and actively modify as points of social entry (Hamel, Lustiger-Thaler et Maheu, 2000, p. 263). 

On comprendra ici que le terrain institutionnel devient le lieu privilégié de la reconnaissance sociale, en même temps qu'il constitue un espace de débat public où s'expriment et se redéfinissent les rapports de domination, à partir de la possibilité, pour les acteurs sociaux, de manifester leur appartenance et de faire des choix qui engagent les finalités des institutions. Sur ce terrain, tant les acteurs dominés que les acteurs dominants comprennent que les enjeux institutionnels changent de nature. L'incertitude et la fragilité qui caractérisent le champ institutionnel favorisent de nouvelles formes de communication et d'échange, voire de coopération entre les acteurs sociaux. En même temps, cela ne signifie pas pour autant que la démocratisation de l'État ou les idéaux démocratiques qui étaient formulés par les nouveaux mouvements sociaux des années 1960 et 1970 aient été atteints, sauf que l'importance accrue des enjeux institutionnels, de même que le rôle central de la réflexivité et de la subjectivité dans le développement de la modernité avancée (Giddens, 1990) nous conduisent à revoir notre conception tant de l'exclusion sociale que de la démocratie. 

Depuis le milieu des années 1980, de diverses manières, les mouvements urbains ont exploré plusieurs facettes des changements institutionnels qui accompagnent la modernité avancée. S'ils sont parvenus à obtenir des gains importants, ceux-ci demeurent fragiles et méritent d'être examinés de près. C'est ce qu'il convient maintenant de considérer. 

Pour ce faire, nous avons choisi de considérer le cas des CDEC à Montréal. Il a été montré ailleurs (Hamel, 1991, 1995, 2000) que les CDEC ont été un lieu où se sont cristallisées de nouvelles stratégies pour les mouvements urbains à partir du milieu des années 1980. Vingt ans plus tard, qu'en est-il des CDEC et de leurs stratégies ? Se sont-elles adaptées aux exigences de la mondialisation et de la modernité avancée ? Quel modèle de solidarité (contrat social) proposent-elles ? Est-ce que leur action reflète encore les préoccupations des mouvements urbains ? Quels sont les gains que les CDEC ont obtenus en ce qui a trait à la démocratisation de la gestion sociale, voire au développement social et urbain ? 

 

2. La création des CDEC et les nouvelles
stratégies des mouvements urbains

 

Nées de l'initiative des acteurs du milieu communautaire et des mouvements urbains, les CDEC ont connu une institutionnalisation rapide et sont devenues des interlocuteurs privilégiés tant pour les deux paliers supérieurs de gouvernement que pour la ville de Montréal. Leur implantation et leur évolution dans le contexte montréalais correspondent à trois phases ou périodes distinctes (Fontan, Hamel, Morin et Shragge, 2004). A chacune de ces périodes, les promoteurs des CDEC ont poursuivi des objectifs semblables, à savoir la démocratisation de la gestion locale, la redéfinition des politiques publiques en fonction d'exigences d'insertion sociale et la relance économique de leur milieu. 

La première période, qui coïncide avec le « virage partenarial » que prennent les mouvements urbains au début des années 1980 (Hamel, 1991), démarre en 1984 avec l'émergence de la première CDEC dans le sud-ouest de la métropole. Cette première période se prolonge jusqu'à la fin des années 1980. 

La première CDEC est mise sur pied dans le sud-ouest de Montréal en 1984 alors que des acteurs sociaux et communautaires décident de s'engager dans une démarche d'enquête et de concertation autour des enjeux de la détérioration économique et sociale qui prévaut dans ce secteur. C'est ainsi que le Programme économique de Pointe-St-Charles (PEP) voit le jour en 1984. Des démarches similaires sont entreprises peu après dans deux autres quartiers ouvriers périphériques au centre-ville. Cela conduit à la mise sur pied de la CDEC Centre-Sud en 1985. La même année, dans Hochelaga-Maisonneuve, c'est le Programme Action/Revitalisation qui voit le jour. 

Ces trois organismes peuvent être associés aux mouvements urbains et aux luttes qui ont été menées dans ces quartiers ouvriers à partir du milieu des années 1960 autour des enjeux du logement social, de l'aménagement urbain et des conditions de vie. La décision de prolonger l'action sur le terrain économique peut être vue comme un approfondissement de la démocratie locale alors que ces trois quartiers sont plus fortement touchés que les autres quartiers populaires de Montréal par la désindustrialisation qui s'est amorcée dans les années 1970. Le pari des CDEC est de mettre à la disposition du milieu - à commencer par les travailleurs qui y résident - des ressources et un savoir-faire qui permettront aux acteurs locaux de rompre avec une position attentiste et de susciter des initiatives susceptibles de favoriser la renaissance économique, urbaine et sociale de ces quartiers. C'est ce qui correspond à l'enjeu d'un développement local tourné en priorité vers les résidents de ces quartiers. 

Investir le champ du développement économique ne fait toutefois pas l'unanimité parmi les acteurs du milieu communautaire et des mouvements urbains. A priori, le développement économique ne correspond pas aux valeurs sociales du milieu communautaire qui s'est intéressé avant tout, par le passé, au social. Ce milieu ayant lutté depuis le début des années 1960, parfois aux côtés du mouvement syndical, pour améliorer les mesures de protection sociale, voire l'ensemble des politiques sociales, incluant celles à portée urbaine, il ne va pas de soi de penser en termes de partenariat avec les entreprises, les milieux d'affaires, les secteurs financiers. Pour certains, il est préférable de miser sur une attitude conflictuelle face aux institutions publiques et privées, un point de vue que ne partagent pas les promoteurs des CDEC, qui pensent au contraire d'une manière pragmatique. Pour ces derniers, il est devenu nécessaire de mettre à la disposition des acteurs locaux des ressources financières, organisationnelles et institutionnelles afin de leur permettre de participer au développement local. 

Ce modèle des CDEC, qui n'est pas original en soi - il emprunte une bonne partie de ses principes organisationnels à des organismes similaires qui sont apparus à la fin des années 1960 dans plusieurs villes des États-Unis - s'est étendu à trois autres quartiers de Montréal à la fin des années 1980. Ainsi, trois autres CDEC sont apparues. Il s'agit du Centre de développement économique communautaire Grand-Plateau (CDEC Grand-Plateau), mis sur pied en 1987, du Carrefour économique communautaire Centre-nord (1988) et du Comité sur l'avenir économique de Rosemont, créé en 1989. Ces trois organismes prennent appui sur le modèle des trois premières CDEC, dont ils partagent les valeurs et la philosophie pragmatique et partenariale. En étant enracinées dans leurs quartiers respectifs, ces CDEC poursuivent une mission semblable aux trois premières, à savoir la relance économique et sociale de leur quartier en misant sur la concertation des différents acteurs du milieu et la mobilisation de ressources publiques et privées. 

La deuxième période de développement des CDEC remonte à 1990. La ville de Montréal est alors dirigée par le Rassemblement des citoyens et citoyennes de Montréal (RCM), qui entend jouer un rôle plus directif en matière de développement local que ne l'avait fait le parti du maire Drapeau. Dans un plan d'action déposé en 1990, la Ville de Montréal entend implanter le modèle des CDEC dans tous les arrondissements de la ville, à l'exception du centre-ville. Les deux nouvelles corporations créées se situent dans les arrondissements Côte-des-Neiges /Notre-Dame-de-Grâce (CDN/NDG, 1989) et Ahuntsic/Cartiervile (A/C, 1992). C'est à cause de l'administration municipale que le projet de CDEC dans Côte-des-Neiges/Notre-Dame-de-Grâce a abouti plus rapidement que celui d'Ahuntsic/Cartiervile. Pourtant, ce projet a été énoncé plus tôt par des organismes communautaires. C'est l'administration municipale qui l'a « mis sur la glace », ne jugeant pas le projet prioritaire. Moins de deux ans plus tard, toutefois, les acteurs du milieu - à savoir les gens du milieu communautaire, des syndicats, du milieu des affaires et, surtout, les élus locaux - sont revenus à la charge. Les trois paliers gouvernementaux (municipal, provincial et fédéral) ont alors accepté de financer le projet, à condition que ce soit la dernière CDEC à être implantée sur le territoire de Montréal. Ce qu'il faut noter aussi, c'est qu'au cours de cette deuxième période les limites territoriales des CDEC ont dû s'ajuster à celles des arrondissements que l'administration municipale a définis en regroupant certains quartiers. 

La troisième période coïncide avec une restructuration de l'intervention de l'État en matière de développement local à partir de la fin des années 1990. Deux nouvelles CDEC sont créées sur le territoire de la banlieue de Montréal alors qu'une autre CDEC vient compléter le tableau sur le territoire de la ville de Montréal. Ces CDEC sont : 1) Transaction pour l'emploi (Lachine/LaSalle) [1] ; 2) la CDEC Anjou/Montréal-Est [2] ; et 3) la Société de développement économique communautaire (SODEC) Pointe-aux-Trembles/Rivière-des-Prairies (sur le territoire d'un arrondissement de Montréal) [3]. Comme nous l'avons mentionné, deux de ces organismes sont situés en dehors des limites de la ville de Montréal [4]. Cela permet d'étendre la problématique du développement local à l'échelle de l'île, voire de commencer à réfléchir en termes métropolitains. En outre, en ce qui concerne la SODEC, celle-ci n'a pas bénéficié du soutien accordé aux autres CDEC. De plus, deux de ces CDEC, dont la SODEC, ne sont pas le résultat de mobilisations fortes dans leur milieu, semblables à celles qui ont donné présidé à la création des CDEC des deux premières générations. Dans le cas de la CDEC Transaction pour l'emploi, on peut dire que celle-ci s'avère très semblable aux CDEC de première et de seconde générations. Enfin, avec cette troisième période, on peut parler de la diffusion du modèle des CDEC - tel qu'il a été conçu dans les quartiers populaires montréalais au milieu des années 1980 -, mais aussi d'une certaine perte d'influence du modèle initial. 

L'analyse des parcours différents de ces CDEC de dernière génération, de même que ceux des CDEC implantées sur le territoire de Montréal, nous aidera à comprendre comment des organisations issues des mouvements sociaux ne suivent pas un chemin tracé d'avance. Comment expliquer que des organisations qui poursuivent un même objectif n'obtiennent pas des résultats similaires ? Pouvons-nous dire que c'est la fragmentation des luttes ou les différentes structures d'opportunité politique qui font la différence ? Quelle est l'importance des facteurs culturels ou de la qualité des réseaux sur lesquels l'action repose ? Enfin, est-ce que la qualité du leadership peut être un facteur décisif ? 

Dès leurs débuts, les CDEC se sont donné pour mission de repenser le développement local. Elles ont mis l'accent sur les valeurs des acteurs locaux. Elles ont fait la promotion de la démocratie locale. Elles ont tenté de favoriser l'insertion sociale des plus démunis. Si, au départ, leurs premières activités concernaient surtout la concertation entre acteurs publics et privés de même que l'établissement de relations et de liens entre le milieu communautaire et les gens d'affaires, elles ont aussi dû compter avec les ressources publiques. Par la suite, leurs activités se sont déployées sur de multiples terrains qui concernaient aussi bien la création d'emplois ou la formation que le soutien à l'économie sociale. En résumé, on peut dire aujourd'hui que les neuf CDEC de l'île de Montréal sont actives dans les domaines suivants : 

-   Les activités de développement du potentiel socio-économique, telles que la concertation locale, la planification et la promotion du territoire local.
 
-   Le développement et le soutien au développement de l'employabilité. Les CDEC font de plus en plus du soutien au développement de l'employabilité en contribuant au financement des organismes communautaires sur leur territoire qui sont actifs dans ce domaine. De plus, elles offrent des services de formation à la gestion d'organismes communautaires et d'entreprises de l'économie sociale, à l'intervention de type DELC.
 
-   Le soutien aux entreprises existantes et la promotion de l'entrepreneuriat, notamment la formation à la gestion d'entreprise, la rédaction de plans d'affaires, l'analyse de marché, le marketing, la recherche et le développement, la recherche de financement, la formation en milieu de travail, les stages en entreprises.
 
-   L'appui aux initiatives du milieu et aux projets spéciaux ainsi que l'aménagement du territoire. 

Un tel élargissement de leur mission ne s'est pas fait spontanément. C'est à la suite de multiples négociations avec les institutions gouvernementales et l'établissement de plusieurs compromis que les CDEC peuvent, aujourd'hui, qualifier leurs interventions de « cohérentes », « globales » et « intégrées » par rapport à la problématique du développement local. Toutefois, comme il a été mentionné précédemment, le processus d'institutionnalisation des CDEC demeure complexe et ambivalent. Il est nécessaire de voir de plus près comment leur action a pu contribuer à redéfinir les politiques publiques en matière de développement économique local et d'insertion sociale.

 

3. L'institutionnalisation des CDEC
à Montréal

 

Les CDEC ont toujours été soutenues par du financement public. Dès leur création, le PEP, le PAR H-M et la CDEC Centre-Sud ont obtenu de la part de l'Office de planification et de développement du Québec (OPDQ) une somme de 200 000 $ par CDEC pour leur fonctionnement et de 100 000 $ pour des investissements dans le milieu (la première entente était valable pour une période de quinze mois). Un second protocole de financement en 1987 fournissait 150 000 $ par année à chaque CDEC pour les trois années subséquentes. Ce montant a été révisé annuellement et séparément pour chaque CDEC. À cette époque, du point de vue gouvernemental, les CDEC étaient avant tout des projets expérimentaux de développement local. Entre-temps, la seconde génération de CDEC a vu le jour et les trois nouveaux organismes ont vivoté au départ avec des budgets minuscules (respectivement 50 000 $, 10 000 $ et 3 000 $ pour l'année 1989-1990) et des effectifs « prêtés » par les organismes communautaires qui les ont mis sur pied. 

Parallèlement à l'éclosion de cette seconde génération, la Ville de Montréal a élaboré un nouveau plan d'action pour le développement des quartiers montréalais, qu'elle a rendu public en février 1990 : Partenaires dans le développement économique des quartiers. Ce plan d'action reprend à son compte les conclusions de l'évaluation des CDEC commandée par l'OPDQ (Labonté, 1989), qui insistait sur la légitimité et la pertinence sociale des CDEC. Ce plan d'action de l'administration municipale a servi de base à un troisième protocole de financement, lequel sera accompagné de nouvelles conditions. Ce troisième protocole s'adresse aux cinq CDEC existantes en 1990, mais s'est étendu par la suite, en 1992 et 1993, aux deux dernières CDEC de la troisième génération. 

Ce protocole de financement correspond à une nouvelle étape dans le processus d'institutionnalisation des CDEC. Si, d'un côté, il permet à ces organisations de consolider leurs activités en assurant leur financement pendant une période de cinq ans, d'un autre côté il les assujettit à de multiples conditions. En effet, dans son plan d'action, la Ville de Montréal entend développer le modèle CDEC à son propre avantage. Pour ce faire, elle impose d'abord une restructuration des territoires sur la base des arrondissements plutôt que des quartiers. Certaines CDEC sont alors obligées de fusionner afin de respecter les exigences de gestion par arrondissement de la ville. Il ne doit pas y avoir plus d'une CDEC par arrondissement. 

L'exemple de la CDEC Grand-Plateau est instructif à cet égard. D'abord, la Ville impose à l'organisme de changer de dénomination et de redéfinir sa mission, car c'est la CDEC Centre-Sud (devenue Centre-Sud/ Plateau-Mont-Royal) qui est reconnue comme la CDEC de l'arrondissement. Elle prend alors le nom de Centre d'innovation en développement économique local (CIDEL Grand-Plateau) et tente de se définir avant tout comme une « initiative du milieu » (Morin, Latendresse et Parazelli, 1994, p. 113). Malgré tout, faute de financement et d'appuis institutionnels, le CIDEL se voit contraint de fusionner avec la CDEC Centre-Sud /PlateauMont-Royal en 1992, trahissant pour ainsi dire sa mission première. Cela permet d'illustrer certains effets « normalisateurs » qui découlent du jeu institutionnel, surtout que le CIDEL était considéré comme l'une des organisations communautaires qui misaient sur les dimensions communautaires et progressistes du développement local. Notons par ailleurs qu'en choisissant de se positionner à l'extérieur du champ institutionnel, au contraire des autres CDEC, le CIDEL réduisait de beaucoup sa marge de manoeuvre ou sa capacité de négocier et d'établir un compromis avec les décideurs gouvernementaux. 

Une autre condition accompagne le protocole établi par la Ville de Montréal. Il y est demandé que les CDEC respectent en tout temps leur nouveau territoire et entreprennent des activités de concertation pour s'y adapter et créer des réseaux à l'échelle de ce territoire. Cela oblige les CDEC à redéfinir leur identité à l'échelle de l'arrondissement, ce qui ne va pas sans causer plusieurs dissensions parmi les groupes qui appuient les CDEC (notamment dans le Sud-Ouest, territoire de l'une des plus anciennes CDEC de l'île). 

Sur un autre plan, l'administration municipale a ciblé Côte-des-Neiges/Notre-Dame-de-Grâce en tant qu'arrondissement prioritaire pour l'implantation d'une CDEC, mettant de côté par le fait même, du moins dans un premier temps, le projet qui existait à Ahuntsic-Cartierville. Côte-des-Neiges et Notre-Dame-de-Grâce sont des quartiers urbains dont la composition sociale et l'identité sont très différentes. Au départ, il n'existait pas de projet communautaire de CDEC dans ces quartiers. Ce sont les fonctionnaires montréalais qui ont jugé le dossier prioritaire et imposé en quelque sorte « par le haut » la mise sur pied d'une CDEC pour ces deux territoires. Cette CDEC a mis plus de huit ans à établir sa légitimité parmi les groupes communautaires des deux quartiers. En outre, dans Ahuntsic-Cartierville, les organismes communautaires qui portaient un projet de CDEC ont dû attendre plus de deux ans avant que celui-ci ne soit accepté. Ce n'est d'ailleurs qu'après avoir subi de multiples modifications que le projet de CDEC dans cet arrondissement a été approuvé. La même situation a prévalu avec le projet du Centre-Nord (arrondissement Villeray/St-Michel/Parc-Extension, qui regroupe deux des plus pauvres quartiers montréalais). Cela révèle une volonté manifeste de la part de l'administration municipale de baliser le modèle CDEC et de développer des outils destinés à contrôler leur développement. 

Cette panoplie d'exigences et de conditions imposées par l'administration municipale aux CDEC n'enchantait pas le milieu communautaire. Il y a vu une volonté de canaliser l'action communautaire en fonction des priorités de l'administration municipale tout en réduisant l'autonomie des groupes. De fait, les relations avec les bailleurs de fonds se sont révélées plus difficiles au fil des ans. 

En effet, il devient de plus en plus évident que les fonctionnaires des instances administratives d'où proviennent leurs subventions perçoivent davantage les CDEC comme des services de déconcentration de leurs propres politiques et programmes.
 
De fait, les CDEC semblent amenées progressivement à renoncer à leurs projets et initiatives pour gérer politiques et programmes gouvemementaux à moindres frais bien sûr, et sans disposer d'aucune marge de manoeuvre au niveau de l'orientation et des modalités d'implantation (CDEST, 1993, p. 1). 

Le protocole d'entente de 1990 signé entre, d'une part, l'administration municipale et le gouvernement du Québec et, d'autre part, les CDEC assurait du financement pour le fonctionnement des CDEC pour les cinq prochaines années de la part des trois paliers de gouvernement (Développement économique Canada étant le troisième partenaire du côté gouvernemental, bien que son rôle était moindre), Par cette entente, la Ville de Montréal entendait devenir le premier partenaire institutionnel des CDEC sans toutefois aspirer à devenir leur premier partenaire financier. De plus, malgré les craintes partagées par le milieu communautaire et les acteurs des mouvements urbains que les CDEC soient « récupérées »par les pouvoirs publics, celles-ci n'ont pas perdu leur capacité d'innovation et leur volonté de travailler à un développement local et communautaire qui tienne compte de la spécificité des milieux d'intervention. 

L'action des CDEC, qui s'inscrit dans l'évolution et la transformation des mouvements urbains montréalais, échappe à une lecture traditionnelle ou prévisible de l'institutionnalisation de l'action collective et des mouvements sociaux. Leur capacité d'intervenir auprès des pouvoirs publics et de négocier avec eux des ressources et un espace d'intervention - sans que leur action ne soit entièrement canalisée par ces pouvoirs - témoigne d'une ambivalence dans les rapports aux institutions que ne reconnaissent pas habituellement les analyses traditionnelles de l'action collective. 

Nous avons souligné plus haut que les CDEC se sont fait imposer des conditions sur le plan des limites territoriales par rapport à leur champ d'intervention. Il en a résulté certaines remises en question dans leurs rangs. On constate par ailleurs que si, dans l'ensemble, elles se sont assez bien ajustées au changement d'échelle territoriale et à l'extension de leur mission, elles sont restées intransigeantes en ce qui concerne le contrôle de la gestion locale des fonds disponibles pour assurer le développement économique communautaire et l'insertion sociale. L'autonomie locale demeure leur plus grand cheval de bataille et, à ce propos, les CDEC ont été capables d'obtenir des gains significatifs dès la fin des années 1980, même s'il a fallu des négociations acharnées et que les compromis établis se sont souvent révélés fragiles. 

On en veut pour exemple la mobilisation dans le Sud-Ouest de Montréal qui a conduit le Regroupement pour la relance économique et sociale du Sud-Ouest (RESO) [5] à faire des pressions auprès des pouvoirs publics pour obtenir à l'échelon local la gestion de certains programmes gouvernementaux visant à mieux répondre aux besoins de la population sur le territoire du Sud-Ouest. Leur démarche a porté ses fruits à partir de 1994, alors que le RESO a obtenu la gestion d'un projet pilote destiné à « expérimenter une nouvelle façon de gérer les fonds publics » (RESO, 1994, p. 4) et qui s'inscrivait en continuité avec l'action et l'approche de l'organisme. Ce projet pilote soutenu par des fonds fédéraux (Bureau fédéral de développement régional) et provinciaux (ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie) a permis de créer le Fonds de développement économique du Sud-Ouest (1,5 million de dollars sur trois ans). À l'aide de ce fonds, le RESO a pu consolider son équipe de soutien aux entreprises et engager du personnel supplémentaire. Le programme, axé sur l'entrepreneuriat, vise le développement de la petite et de la moyenne entreprise, le soutien et la consolidation d'entreprises existantes, de même que le travail autonome. 

De plus, en 1995, cette CDEC a créé RESO Investissement inc., une société de capital de risque dotée de 5 millions de dollars provenant des paliers supérieurs de gouvernement. Par rapport à ce projet, la CDEC agit en partenariat avec le Fonds de solidarité de la FTQ. Pendant cinq ans, le RESO a investi dans l'économie locale, risquant des capitaux dans des projets à portée locale et sociale que des investisseurs privés n'auraient jamais soutenus. 

Le modèle de gestion que le RESO est parvenu à négocier auprès des pouvoirs publics s'est étendu rapidement aux autres CDEC de Montréal. Ce modèle de gestion des fonds publics met en lumière un type particulier d'action que les intervenants des CDEC privilégient dans leurs relations institutionnelles. Il s'agit, en maintenant un contact régulier avec les divers partenaires, de négocier - souvent cas par cas - des moyens d'aménager les programmes publics existant dans le but de créer un « parcours intégré » pour les bénéficiaires. On peut penser à un parcours en développement de l'employabilité ou en démarrage d'entreprises, lequel devra aussi mettre à profit l'expertise de partenaires locaux, organismes communautaires ou entreprises. Ce modèle d'action accorde plus d'autonomie aux CDEC que ce qui prévaut dans le cas des relations « traditionnelles » avec les institutions publiques caractérisées par un rapport de subordination, alors que les décisions sont centralisées dans les mains des décideurs publics. 

Bien entendu, les CDEC n'ont que peu d'influence sur la détermination des plans d'action gouvernementaux. Elles ne parviennent que très difficilement - et souvent après coup – à influer sur le contenu et la mise en oeuvre des politiques publiques en matière de travail et de développement social. Ainsi, plusieurs événements extérieurs au milieu communautaire ont contribué, entre 1996 et 1998, à redéfinir les enjeux de l'action collective des CDEC. D'abord, en 1997 le gouvernement du Québec a convenu d'une entente avec son homologue fédéral relativement au développement de la main-d'œuvre afin de rapatrier des pouvoirs et des budgets au Québec. Dès lors, le gouvernement québécois est devenu le seul maître d'œuvre en matière de développement de la main-d'œuvre et de sécurité du revenu. L'année suivante (1998), il a entrepris une réforme de sa politique en matière de sécurité du revenu afin de développer sa Politique active du marché du travail et de regrouper les services publics à cet égard dans les nouveaux Centres locaux d'emploi (CLE), placés sous la responsabilité d'Emploi-Québec. Emploi-Québec et les CLE sont ainsi devenus les premiers interlocuteurs institutionnels du milieu communautaire et des CDEC pour les volets de développement de l'employabilité et de recherche d'emploi. 

Sur un autre plan, toujours en 1997, à l'échelon provincial, le ministère des Régions a élaboré une nouvelle politique de gestion du développement local qui s'intitulait Politique de soutien au développement local et régional. Cette politique a notamment donné naissance aux Centres locaux de développement (CLD), qui sont chargés de gérer les programmes d'aide au développement économique d'une manière décentralisée. Cette politique avait pour objectif de « mettre le citoyen au cœur de la restructuration des services », par le biais de programmes simples et souples dont les modalités précises doivent être élaborées à l'échelon local. Enfin, un troisième changement institutionnel important concerne la région de Montréal. En 1996 le gouvernement du Québec s'est engagé dans une réforme majeure de la région de Montréal. Un ministre d'État a été affecté à la Métropole. Ce dernier a entrepris une réforme de la planification et de la gestion de la région de Montréal dans le but de relancer le développement de l'agglomération et de renforcer Montréal à l'échelle continentale et internationale en tant que pôle urbain majeur. Ainsi, le ministère de la Métropole est devenu responsable, en 1997-1998, des CLD sur l'île de Montréal, alors que partout ailleurs dans la province, les CLD étaient sous la responsabilité du ministère des Régions. 

Ces réformes gouvernementales ouvrent la porte à une nouvelle configuration institutionnelle en ce qui a trait à la gestion des politiques urbaines et régionales sur l'île de Montréal alors que sont mises en relation les politiques de développement de la main-d'œuvre, les programmes d'insertion en emploi de même que les programmes de développement économique local. En établissant un lien entre les CLE d'une part, les CDEC et les CLD sur le territoire de Montréal d'autre part, le gouvernement du Québec entend changer les termes du débat : dorénavant, les structures décentralisées des CLE et déconcentrées des CLD doivent favoriser l'établissement d'une concertation élargie au sein des milieux locaux ainsi que l'établissement d'une vision intégrée du développement local.

 

4. L'implantation des Centres Locaux
de Développement et les nouveaux enjeux
du développement local

 

L'implantation des CLD sur l'île de Montréal nous permet de considérer de plus près tant les difficultés que les gains récents de l'action collective des mouvements urbains par rapport aux enjeux du développement local. Les acteurs communautaires et les CDEC ont défini une nouvelle problématique du développement local tournée vers des dimensions sociales et patrimoniales. De plus, ils ont mis à l'ordre du jour l'enjeu de la concertation et du partenariat en ce qui a trait au développement local et urbain. Ils ont attiré l'attention des instances gouvernementales, mais aussi celle des milieux d'affaires et des syndicats, sur l'urgence d'intervenir dans les quartiers urbains de Montréal les plus durement touchés par la crise du fordisme afin de créer des entreprises et des emplois et de stimuler une revitalisation économique, urbaine et sociale de ces quartiers. 

Un CLD [6] est constitué d'un « Comité des partenaires locaux ». Celui-ci rassemble des représentants des acteurs locaux concernés par le développement économique (syndicats et travailleurs, milieu communautaire, institutions financières et d'enseignement, milieu des affaires, élus locaux). De plus, le CLD a le mandat de produire un « plan local d'action concerté pour l'économie et l'emploi », incluant des politiques locales d'investissement et des objectifs précis qui doivent faire l'objet d'un processus d'approbation locale. Enfin, le CLD dispose de divers fonds gérés localement pour atteindre les objectifs de son plan d'action : le Fonds local d'investissement (FLI), réservé à la petite entreprise, « sans grande garantie de remboursement », et le Fonds d'économie sociale (FES). Il gère aussi deux programmes qui existaient déjà, le programme jeunes Promoteurs (JP) et le programme Soutien aux travailleurs autonomes (STA). La création des CLD sur l'île de Montréal a signifié l'injection, entre 1998 et 2001, d'une quinzaine de millions de dollars de fonds publics dans le développement économique local, dont plus de onze millions étaient réservés au seul territoire de la Ville de Montréal [7]. 

Cela dit, un premier indicateur nous permet de dire que l'action collective par le biais des CDEC a contribué à transformer les pratiques institutionnelles. Sur le plan de l'autonomie locale, les négociations du printemps 1998 entre les CDEC, le ministère des Affaires municipales et de la Métropole (MAMM) et la Ville de Montréal ont permis de dégager un compromis très avantageux pour les CDEC montréalaises. En effet, l'attribution de la totalité des mandats d'un CLD à des organismes communautaires - en l'occurrence les CDEC - constitue une exception. Les autres municipalités de l'île de Montréal ont préféré exercer un véritable contrôle du CLD de leur territoire, et ce malgré la présence d'une CDEC bien implantée dans certaines villes de la banlieue, comme c'était le cas à Lachine et LaSalle. 

L'exemple des administrations municipales de Lachine et LaSalle et de leur CDEC correspondante (Transaction pour l'emploi) constitue une bonne illustration a contrario de l'influence des CDEC montréalaises. En effet, alors que les liens institutionnels de celles-ci, leur expérience et leur légitimité leur ont permis de négocier l'acquisition des mandats CLD, les relations difficiles que la CDEC Transaction pour l'emploi entretenait avec Lachine et LaSalle n'ont pas permis d'en arriver à un compromis semblable. La CDEC aurait bien voulu obtenir le mandat complet du CLD de LaSalle, sur le modèle des CDEC de Montréal, mais la municipalité a décidé de conserver la direction du CLD et de sous-traiter certains mandats, tout en conservant la direction du Comité des partenaires locaux. Conséquemment la CDEC a obtenu les mandats d'effectuer le Plan local d'action concertée pour l'économie et l'emploi (PLACEE), d'offrir un guichet multiservices (qui existait déjà à la CDEC), de tenir le secrétariat permanent et de gérer le Fonds d'économie sociale. À Lachine, la CDEC n'a obtenu que le mandat de l'économie sociale, alors que le reste est demeuré sous la responsabilité de la municipalité. Selon plusieurs, les dirigeants politiques de LaSalle ont choisi d'exercer une emprise sur le CLD surtout pour des questions de visibilité politique. Cela traduit, par ailleurs, un désintéressement pour les enjeux du développement social. De plus, les mandats accordés à la CDEC ont été remis en doute et, en 2000-2001, lui ont été retirés presque en totalité (elle ne conserve que la gestion de l'économie sociale sur les deux territoires). 

Les choses se sont passées d'une manière différente à Anjou et Montréal-Est. Lors d'une des premières réunions du conseil d'administration du CLD, au mois de mai 1999, il a été décidé de confier l'exercice de la plupart des mandats CLD à la CDEC [8]. Selon le directeur de la CDEC, c'est grâce à la volonté des élus de travailler avec le milieu communautaire que la CDEC a pu naître [9]. Sans les budgets du CLD, elle n'aurait pu survivre longtemps, même si des demandes de financement avaient été acheminées au Secrétariat à l'action communautaire autonome du Québec (SACA). 

La CDEC Anjou/Montréal-Est fait figure d'exception parmi les CLD des municipalités de la banlieue de l'île de Montréal. Alors que dans la majorité des cas ces CLD sont orientés vers des préoccupations économiques et font la promotion d'un entrepreneuriat privé, la consolidation d'entreprise, voire l'aide aux grandes entreprises, la CDEC Anjou/ Montréal-Est tient un discours tourné vers des préoccupations sociales et communautaires. Ce n'est pas le cas avec les autres CLD, alors que l'attention accordée aux dimensions sociales et communautaires qui caractérisent les mouvements urbains y est au mieux des plus mitigée. L'exemple du Fonds consacré à l'économie sociale, qui répondait à une demande faite par le milieu communautaire lors du Sommet socio-économique du Québec de 1996, permet d'illustrer cette situation. En effet, concernant l'économie sociale, plusieurs représentants des CLD de l'île de Montréal avaient peu de choses à dire lorsque nous les avons interroges au cours de l'été 2000. Même dans le cas de la CDEC Anjou/ Montréal-Est, qui tenait un discours à consonance « communautaire », l'examen des ses réalisations et les propos tenus par ses employés ont révélé que les préoccupations communautaires en étaient souvent restées à l'état de vœux pieux. Plus de trois ans après le début formel des activités de l'organisme, on peut dire qu'il s'apparentait plus à un CLD qu'à une CDEC. Mais c'est la même situation qui prévalait à la SODEC Pointe-aux-Trembles/Rivière-des-Prairies. Cet organisme tenait un discours plus libéral que les autres CDEC implantées sur le territoire de la ville de Montréal. 

L'économie sociale, une préoccupation majeure pour les CDEC, n'est pas une nouveauté pour elles, contrairement aux CLD établis dans les municipalités de banlieue de l'île de Montréal. La création d'emplois socialement utiles, l'embauche locale, la formation et la réinsertion des travailleurs par le biais des entreprises d'insertion, la protection de l'environnement, l'accueil des immigrants, l'appui à l'établissement de coopératives d'habitation : ce sont là une série d'activités habituellement associées tant à l'économie sociale qu'à la justice sociale et dont les CDEC font la promotion depuis plusieurs années. Pour le directeur général de la CDEC Rosemont/Petite-Patrie, les CDEC - à cause de leur expérience et de leur capacité à mobiliser les forces vives de leur milieu - sont devenues des acteurs incontournables en matière d'économie sociale [10]. 

À cet égard toutefois, les discussions qui ont lieu au Comité régional d'économie sociale où siègent l'Inter-CDEC [11], les CLD de l'île de Montréal, le MAMM et d'autres acteurs régionaux montrent que de nombreuses divergences subsistent. Les CDEC ont proposé la création d'un fonds régional destiné à consolider les entreprises d'économie sociale, proposition à l'égard de laquelle les CLD de banlieue ont pris leurs distances, notamment parce que les municipalités de la banlieue de l'île de Montréal, néophytes dans le domaine, ne voient pas d'intérêt à la création d'un fonds de consolidation des entreprises qui profiterait en priorité aux CDEC et aux projets de la ville-centre. 

Il reste que sur un autre plan, le mandat CLD a été assez bien accepté par les CDEC. Dans les faits, la plupart exerçaient déjà certaines des activités que vient confirmer le modèle de gestion adopté pour le CLD de Montréal. Celui-ci introduit un financement récurrent et une certaine souplesse qui va permettre de créer à l'échelon local, à l'aide d'autres services existants, un véritable parcours intégré de développement de l'entrepreneuriat allant de la formation au démarrage d'entreprise, jusqu'au financement du projet une fois qu'il est conçu, vérifié et approuvé. Une fois mise sur pied, l'entreprise peut bénéficier de services de soutien. Dès lors, on peut dire que le mandat CLD vient renforcer la capacité d'intervention locale et la légitimité des CDEC, tout en restant assez souple pour permettre l'innovation et la création de nouvelles pratiques dans le domaine du développement économique local. 

En résumé, on peut dire que le mandat CLD a été assez bien accepté par les CDEC de la ville de Montréal. Cependant si ce mandat permet aux CDEC de poursuivre et d'élargir leur action, il restreint par ailleurs leur marge de manoeuvre. Nous avons souligné plus haut que l'autonomie locale constituait un enjeu majeur de la vision qu'avaient les CDEC de l'action collective au milieu des années 1980. Or, dès 1990, les organismes ont accepté des conditions qui restreignaient cette autonomie. Les CDEC ont fait un choix stratégique afin de passer de l'état de « projet pilote » à celui d'organisme pleinement reconnu par les différents paliers gouvernementaux. En 1998, lors de la négociation des conditions de création des CLD sur l'île de Montréal, les CDEC ont opté à nouveau pour une position semblable. Elles en sont venues à la conclusion que si elles n'acceptaient pas le mandat CLD et les contraintes rattachées à ce mandat, le gouvernement du Québec ferait fi de leurs objections et créerait des organismes CLD parallèles aux CDEC. Dans ce cas de figure, les CDEC se seraient vues peu à peu marginalisées par les pouvoirs publics et leur capacité d'action se serait peu à peu affaiblie. 

Par contre, en acceptant le mandat CLD, les CDEC ont dû respecter les exigences découlant d'un nouveau financement public et s'adapter à un conseil d'administration (le Comité des partenaires locaux) qui intègre des représentants des paliers gouvernementaux municipal et provincial. Par conséquent, elles ont ravivé une vieille querelle qui prévaut entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec. L’organisme fédéral Développement économique Canada a remis en question sa contribution financière aux CDEC. Il a même demandé à celles-ci l'autorisation de déléguer un représentant à leur conseil d'administration, ce que la plupart ont refusé. 

Au cours des ans, les CDEC ont peu à peu accepté de rendre compte de leurs interventions à leurs bailleurs de fonds, dans les termes et le format que ceux-ci prescrivent. Si certains directeurs généraux de CDEC justifient cela par une obligation de transparence dans la gestion de fonds publics, d'autres n'hésitent pas à avouer que, sans compter l'alourdissement des tâches qui en résulte, cela entraîne un contrôle de leurs actions par les fonctionnaires. Leur champ possible d'action et d'intervention s'en trouve réduit d'autant. Dans ce contexte, il n'est pas surprenant de constater que certaines CDEC se trouvent dans l'obligation d'effectuer une « étude de marché »pour solliciter des fonds concernant un nouveau service qu'elles veulent offrir. 

 

CONCLUSION

 

La transformation des CDEC à Montréal dans leurs relations aux pouvoirs publics et aux mouvements urbains met en lumière l'ambivalence de leur action. Au fur et à mesure que les modes institués de gestion du développement local se sont adaptés aux transformations économiques provoquées par la mondialisation, les CDEC ont dû revoir les alliances passées avec les pouvoirs publics. L’espace institutionnel à l'intérieur duquel les CDEC évoluaient et qu'elles avaient en partie contribué à façonner, à l'intersection des administrations publiques et de la société civile, a été soumis à de nouvelles exigences d'imputabilité qui ont mis en cause leur indépendance et leur engagement en faveur d'un développement local tourné en priorité vers le social et le communautaire. Elles ont dû alors composer avec des contraintes de plus en plus fortes d'un point politique et administratif. C'est ce qui a conduit nombre d'entre elles à subordonner leur action aux priorités de l'État. Par conséquent, il nous faut établir un bilan mitigé de l'institutionnalisation des CDEC. Il est vrai qu'elles ont réussi à faire changer les pratiques institutionnelles en matière de développement local dans le sens d'une plus grande déconcentration et d'une autonomie accrue des acteurs communautaires sur ce terrain. Il n'en reste pas moins cependant que les administrations publiques ne sont pas disposées à leur laisser le champ libre. Il en résulte un espace public d'affrontement et de négociation où l'enjeu principal demeure celui d'une redéfinition des rapports entre l'État et la société civile. Le point de vue pragmatique adopté par les CDEC au départ a forcé les partenaires publics à revoir leurs politiques d'aide au développement local et urbain. Les ressources mises à la disposition des CDEC ont conduit ces dernières années les pouvoirs publics à revoir les protocoles qui ont été mis en place à la fin des années 1980 et au début des années 1990. Le développement local ne peut plus se négocier exclusivement sur la base des quartiers urbains ou des arrondissements. Il prend place de plus en plus à une échelle métropolitaine, sans compter qu'il remet en question la formulation de plusieurs politiques sectorielles en provenance des trois paliers gouvernementaux. Les CDEC n'ont pas moins réitéré des principes d'inclusion sociale, de justice et de responsabilité publique en matière de développement local, des valeurs qui deviennent de plus en plus controversées au fur et à mesure que l'idéologie néolibérale influence la régulation des marchés. 

 

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[1]    En 1989, le comité interorganismes du Sud-Ouest voit le jour et se donne trois priorités : travailler à la prévention psychosociale, améliorer les services pour l'insertion des immigrants et améliorer la préparation et l'insertion des sans-emploi sur le marché du travail. Cela mènera à la création de trois organismes, dont la CDEC en 1992, relativement à la troisième priorité. L’organisme a peu à peu développé ses activités et offre aujourd'hui des services en employabilité et en développement de l'entrepreneuriat et des entreprises, en plus d'animer la concertation locale et de produire des études et des analyses sur le territoire qui le concerne. Son financement est assuré par Développement économique Canada, le MAMM, Emploi-Québec et depuis peu, par une partie des fonds des CLD Lachine et LaSalle.

[2]    Mise sur pied en 1995, mais dont les activités n'ont pas débuté avant 1997.

[3]    L’idée de la SODEC a été élaborée dès le début des années 1990, mais le projet n'a pu voir le jour avant 1996, notamment parce que le parti au pouvoir à Montréal ne considérait pas le projet pertinent. L'organisme a réellement commencé ses activités après 1998 et le protocole d'entente sur les Centres locaux de développement à Montréal.

[4]    Nous parlons ici des anciennes limites de la ville de Montréal, avant la restructuration effective depuis le 1er janvier 2002.

[5]    Le RESO provient de l'élargissement du mandat et du territoire du PEP, en 1989-1990. Contrairement à ce qui a été dit plus haut sur le plan de développement de la Vine de Montréal qui oblige les CDEC à respecter les limites des arrondissements, le Sud-Ouest s'est lui-même donné comme mandat à travers le RESO, d'effectuer la relance économique de l'arrondissement ce qui ne s'est pas fait sans heurts. En effet, plusieurs groupes communautaires membres du PEP demeuraient réticents à l'élargissement de la mission et du territoire de la CDEC.

[6]    Le détail du mandat des CLD se retrouve à l'article 13 de la loi 171, Loi sur le ministère des Régions, 1997. Il y en a sept sur l'île de Montréal, dont le plus important couvre le territoire de la ville de Montréal.

[7]    Un montant de 5 089 796 $ versé par le MAMM pour assurer le fonctionnement, dont 67% étaient versés aux CDEC, à la SODEC et à la SDEVM. Un montant de 5 632 519 $ versé par le MAMM pour les fonds destinés aux clients du CLD, soit : le Fonds d'économie sociale : 2 011 436 $ (35,7%) ; le Fonds local d'investissement : partie subventions (jeunes promoteurs) : 877 044 $ (15,6%), partie prêts : 2 744 039 $ (48,7%). D'autre part, sans être versée au CLD, une somme de 830 000 $ en provenance de la Ville de Montréal était incluse dans l'entente de juin 1998, comme engagement de la Ville dans la poursuite de son soutien financier aux CDEC (CLD Montréal, 1999, p. 6).

[8]    Seul le FLI est géré conjointement avec le commissariat industriel de la ville d'Anjou.

[9]    Entretien avec le directeur général de la CDEC Anjou/Montréal-Est, juillet 2000.

[10]   Entretien avec le directeur général de la CDEC Rosemont/Petite-Patrie, juin 2000.

[11]   L'Inter-CDEC est une table de concertation qui rassemble les directeurs généraux de chaque CDEC de la ville-centre, ce qui exclut les CDEC comme Anjou/Montréal-Est et Lachine/LaSalle.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le jeudi 28 février 2008 12:17
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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