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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Georges Gusdorf, L’EXPÉRIENCE HUMAINE DU SACRIFICE. (1948)
Note liminaire


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Georges Gusdorf, L’EXPÉRIENCE HUMAINE DU SACRIFICE. Paris: Les Presses universitaires de France, 1re édition, 1948, 276 pp. Collection: “Bibliothèque de philosophie contemporaine.” Une édition numérique réalisée par Pierre Patenaude, bénévole, professeur de français à la retraite et écrivain, Chambord, Lac—St-Jean. [Autorisation des ayant-droit le 2 février 2013 de diffuser l'oeuvre de l'auteur dans Les Classiques des sciences sociales.]

[vii]

L’EXPÉRIENCE HUMAINE DU SACRIFICE.

Note liminaire

Le problème du sacrifice se pose dans divers domaines de l'expérience humaine, dont chacun appellerait une étude approfondie. Le rôle du sacrifice parait immense dans les différentes religions. La morale trouve dans le sacrifice une de ses attitudes maîtresses. L'idée de sacrifice intervient souvent dans la conduite et les délires des malades mentaux. Chacune de ces acceptions d'une même affirmation de la personne pose des problèmes particuliers. Sociologie, théologie, morale, psychopathologie se sont plus ou moins préoccupées de la question.

Le but de cet essai ne saurait être d'aborder tous les aspects techniques de la question, et de résoudre tous les problèmes particuliers qui se rencontrent dans telle ou telle province du savoir. Nous ne pouvons prétendre rouvrir, par exemple, après Frazer, Durkheim et bien d'autres, le débat sur les rapports du totémisme et du sacrifice primitif. De même, l'interprétation du sacrifice par les diverses théologies chrétiennes, et l'opposition des points de vue, demeurent en dehors de notre compétence. Notre effort vise seulement à faire apparaître l'unité de l'expérience ici en jeu. Il y a dans le sacrifice une affirmation fondamentale de l'homme, un exercice de la personne, dont les caractères anthropologiques essentiels se retrouvent les mêmes quel que soit le système d'expression employé. Nous avons essayé de retrouver l'unité du sacrifice, en dégageant les principales lignes de force selon lesquelles il se réalise au sein de la vie personnelle. Non point travail d'érudit épuisant les documents, mais tentative pour mettre au point une interprétation générale qui puisse servir de point de départ à la méditation de chacun.

Une réflexion sur la signification religieuse du sacrifice nous fit apparaître que pour comprendre cette expérience paradoxale, il fallait remonter par une analyse régressive jusqu'à des formes très élémentaires de la possession. Une sorte de méthode archéologique appliquée à la vie spirituelle permettant de mettre au jour la structure du sacrifice, qui se définissait alors comme une expérience limite de l'avoir aux confins de l’être. Ainsi s'établissait une correspondance, [viii] un échange de l'avoir à l'être ; l'avoir se négocie ou plutôt se sublime en être. Moment dialectique où l'être se trouve atteint par le renoncement de l'avoir, l'équilibre de l'un à l'autre répondant à une mesure particulière, cadence et rythme, justice et justesse, mettant en œuvre un certain sens d'exactitude intime. La loi de correspondance en jeu ici paraît être une règle immanente dont les directives s'étendent à toute l'activité humaine. Par delà le domaine religieux où nous l'avons mise au jour, cette structure formule un schéma a priori définissant l'une des plus constantes formes d'affirmation de la vie personnelle. La description sociologique et la phénoménologie permettent de retrouver l'une des articulations maîtresses selon lesquelles s'exerce chaque destinée. Dans son mouvement, l'homme se recherche en se donnant et parfois se trouve en se créant, fût-ce au prix de sa vie.

Le dernier mot du drame personnel demeure d'ailleurs réservé. La réponse, s'il en est une, n'appartient pas au philosophe, au théoricien. Seul la peut connaître celui qui s'est engagé tout entier à sa recherche, celui qui s'est fait lui-même l'enjeu de la partie. Lumières sur l'existence, mais qui ne sauraient prétendre dissiper cette pénombre où se jouent les engagements décisifs de chaque destinée. Comme le disait un mystique de l’Islam : « Celui-là seul revient qui n'a pas achevé la route ; aucun de ceux qui sont arrivés n'est revenu ».

La méthode employée s'efforce de concilier la description phénoménologique, l'effort pour retrouver du dedans la situation de l'homme qui sacrifie, — et l'analyse génétique, attachée à retrouver à travers les diverses formes, historiques et sociologiques, de l'expérience, l'unité des structures fondamentales qui s'y affirment. On ne peut pas vraiment comprendre sans expliquer, de même que l'on ne peut expliquer si l'on ne comprend pas. Les deux points de vue, loin de s'opposer, paraissent bien plutôt complémentaires.

Ce travail, entrepris en captivité, doit beaucoup aux suggestions de M. Bachelard, — ainsi qu’à l'amitié de Georges Daumézon.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le vendredi 29 juillet 2016 8:56
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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