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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Sílvio Marcus de Souza Correa et Camil Girard, “La circulation des personnes dans le cadre des alliances franco-amérindiennes: le don, l’adoption et l’enlèvement au Brésil et au Canada XVe-XVIIe siècles.” Version remaniée en janvier 2019 d’un article publié dans la revue Littoral, Edition du GRÉNOC, Groupe de recherche sur l’écriture nord-côtière, Cégep Sept-Iles, Québec-Canada, no 1, Automne 2006, pp. 27-40. [Autorisation formelle accordée conjointement par Camil Girard, historien à l’Université du Québec à Chicoutimi le 9 septembre 2019 de diffuser en libre ac-cès à tous ce texte dans Les Classiques des sciences sociales.]

Sílvio Marcus de Souza Correa
et Camil Girard


La circulation des personnes
dans le cadre des alliances franco-amérindiennes :
le don, l’adoption et l’enlèvement
au Brésil et au Canada XVe-XVIIe siècles
.” *

Version remaniée en janvier 2019 d’un article publié dans la revue Littoral, Edition du GRÉNOC, Groupe de recherche sur l’écriture nord-côtière, Cégep Sept-Iles, Québec-Canada, no 1, Automne 2006, pp. 27-40.

Introduction

1. La mise en contexte des alliances au Nouveau Monde
2. Le troc et la circulation plus ou moins volontaire des personnes dans le cadre des alliances
3. Le don ou l’échange des femmes dans le cadre des alliances
4. L’adoption dans le cadre des alliances

Conclusion
Bibliographie


Introduction

Depuis le premier voyage de Cristován Colón au Nouveau Monde les Amérindiens sont devenus une présence exotique constante dans le paysage portuaire de Séville, Lisbonne, Saint-Malo et d’autres villes européennes. Selon la relation du voyage du capitaine normand Gonneville « c’est coutume à ceux qui parviennent à nouvelles terres des Indes, d’en amener à Chrétienneté aucuns Indiens ». [1] Cette présence ne représentait pas seulement la preuve d’une découverte sur laquelle il y avait encore des doutes au début du XVIe siècle, mais aussi une source d’information. Cela a renforcé l’intérêt de certains états, de l’Église et de milliers d’aventuriers pour le Nouveau Monde. À l’époque des premiers Empires modernes, la présence des Amérindiens dans quelques villes européennes s’enrobait d’une représentation symbolique. Le domaine politique, économique et culturel de l’Europe s’étendait. L’occidentalisation du monde débutait. 

Nombreux sont aussi les Européens qui trouvent un refuge au Nouveau Monde. Adoptés par les Amérindiens, quelques-uns parmi eux ont été des intervenants importants dans les alliances franco-amérindiennes au Brésil et au Canada. Connaisseurs de deux mondes, les truchements (intermédiaires ou interprètes) d’origine française et amérindienne ont été des acteurs incontournables dans les relations franco-amérindiennes au Nouveau Monde.

Dans ce texte, nous nous proposons d’analyser la place que joue la circulation des personnes dans le cadre d’alliances franco-amérindiennes. À travers la circulation des personnes, nous pensons que les rapports franco-amérindiens qui se mettent en place s’inscrivent dans des protocoles d’alliances interculturelles qui se dessinent dès 1504 entre Français et Carijós sur le littoral sud du Brésil (Perrone-Moysés, 1995), en 1557 entre Français et Tupinambas de la France Antarctique (Lestringant, 1999), en 1603 entre Français et Montagnais à Tadoussac (Girard, Gagné, 1995 ; D’avignon, 2006) et en 1613, entre Français et Tupinambas de la Nouvelle-France Équinoxiale (Daher, 2002a).

Il va sans dire qu’il y a eu au cours des dernières années des efforts de renouvellement de l’historiographie, notamment au Canada (Girard et Gagné, 1995 ; Girard et D’Avignon, 2005, D’Avignon, 2006 ; Beaulieu 2003 ; Vincent 1997 et 2002 ; Havard, 1992 ; Jennings, 1995). Le caractère indispensable des alliés amérindiens apparaît comme élément central d’une forme particulière de colonisation française au Nouveau Monde. À cet égard, les propos de Lestringant sur l’échec des la colonisation française en Amérique montrent plutôt les enjeux religieux et politiques qui se jouent pour la France en Amérique. Ce spécialiste précise : “C’est surtout le mode de colonisation, marginal et lacunaire, reposant en outre sur l’alliance toujours précaire des Indiens, qui sera cause de la fragilité persistante des établissements français d’Amérique. Le primat de l’économie de traite sur la mise en culture des sols se conjugue à une immigration très faible en provenance de l’Europe, pour constituer, face aux empires portugais et espagnol, nourris d’afflux constant de colons et d’esclaves, un handicap définitif. » (Lestringant, 1999, p. 28).

Dans cette perspective, les alliances autochtones apparaissent comme la conséquence d’un échec de la colonisation. Cependant, ces alliances sont au centre des nouveaux rapports qui se sont tissés en Amérique lors des premiers contacts. Même au Mexique, Cortés rappelle souvent que le poids du nombre est compensé par un accueil relativement bienveillant des Indiens, du moins, lors des premières rencontres. Ainsi, lorsque les Espagnols conquièrent Mexico avec l’appui de Cortès, il y a eu nécessité de s’allier avec des peuples autochtones. (Montandon, 2004, p. 1113) Par la suite, la gestion partagée des territoires, des populations européennes et indiennes et de leurs ressources reste au centre de la responsabilité de fiduciaire qui incombe à la Couronne, qu’elle soit espagnole, portugaise, française ou autre en Amérique. Dans le cas plus précis de la France, nous irions même jusqu’à émettre l’hypothèse que le concept des alliances interculturelles, loin de montrer l’échec de la colonisation française en Amérique, montre plutôt une réalité complexe où la France s’allie formellement avec les nations autochtones pour faire commerce et revendiquer certains droits sur le territoire indien. Ces rapports particuliers marquent les rencontres des cultures en Amérique. Si tant est que la reconnaissance des droits des Peuples autochtones d’Amérique impose de revoir leurs premiers contacts avec les Européens, une réflexion sur les alliances peut contribuer à cette révision. S’agissant des alliances interculturelles, se reposent les questions fondamentales liées aux gouvernements autochtones et à la gestion partagée des territoires indiens et des ressources, selon les modes d’utilisation des territoires par les Européens et surtout par les Indiens.

Trois niveaux d’analyse serviront à appuyer notre démonstration. Tout d’abord, nous tenterons de mettre en lumière la dynamique des alliances franco-amérindiennes dont l’adoption et la circulation des personnes s’inscrivaient dans l’univers symbolique européen et amérindien depuis les premières rencontres. Les échanges de produits et la circulation des personnes seront ensuite envisagés comme conséquences de la rencontre de ces univers symboliques. Enfin, nous porterons notre attention sur l’adoption comme un fait parfois préalable à quelques alliances franco-amérindiennes au Brésil et au Canada.

Cet article cherche à mieux comprendre les alliances au plan anthropologique et historique, le don et l’échange se manifestant par la circulation des personnes et l’échanges de produits. De telles alliances restent des formes de traités interculturels qui ont servi à des fins politiques pour la guerre, le commerce et la gestion des territoires en Amérique. Dans le cas des alliances franco-amérindiennes, celles-ci ont été scellées à partir de protocoles complexes dont la circulation des personnes est une composante. La manière de préparer les rencontres, le rôle de chacun des acteurs et en particulier des interprètes (truchements), des chefs ou des représentants des nations (indiennes et européennes), les rituels afférents aux alliances qui sont précédées par le pétunage (fumer en discutant), les harangues, l’échange de présents, les danses, les chants et les repas qui ont lieu en territoire indien d’accueil, voillà autant de composantes qui contribuent à sceller des alliances franco-amérindiennes au Brésil et au Canada. Nous nous proposons d’analyser dans un prochain article sur les tabagies, le cadre des rencontres et alliances interculturelles au Nouveau Monde.

Dans la suite des alliances, la circulation des personnes reste un élément important surtout dans les conflits armés où les alliés se liguent pour des guerres contre des ennemis communs. Il faut souligner que dans plusieurs discours et harangues de morubixabas et même de quelques truchements français de la France Equinoxiale comme celui de des Vaux (Abbeville, 1975, p.84), le but d’une alliance avec le Français pour venir en aide contre les ennemis était explicite. [2] Ainsi, si le commerce apparaît pour les Européens comme une des principales raisons pour s’allier aux peuples autochtones, il va sans dire que pour les peuples autochtones, ces alliances s’inscrivent dans une culture du don et d’accueil, dont la circulation des personnes constitue un élément important mais non exclusif. Cependant, dans les cultures autochtones, le don précède l’alliance parce qu’il constitue le fondement intrinsèque d’une réciprocité qui le sous-tend.

En nous appuyant sur les récits de voyage et sur d’autres sources historiques, cet article tente de montrer l’importance de la circulation des personnes en dehors de leur groupe d’origine dans le cadre de dynamiques interculturelles qui s’établissent dans les relations franco-amérindiennes lors des premiers contacts. L’échange de personnes et l’adoption des jeunes hommes et jeunes filles ont été courants dans les relations franco-amérindiennes. Pourtant, l’historiographie française et portugaise relèvent largement d’une vision diplomatique et politique de ces alliances qui ne prend pas suffisamment en compte cette circulation des personnes et ces conséquences pour les groupes concernés.

1. La mise en contexte des alliances
au Nouveau Monde


Dans la langue portugaise le mot aliança apparaît dans un manuscrit pour la première fois au XVe siècle. L’alliance s’inscrit dans le contexte des premières navigations dans l’Atlantique, de la Reconquista dont la chute de Granada représente la fin du pouvoir musulman dans la Peninsule ibérique et de la découverte du Nouveau Monde par Cristóvan Colón en 1492.  Dans la tradition judaïco-chrétienne, la première alliance a été scellée par Dieu et les hommes. La mise en contexte nous permet de mieux comprendre la mission de catéchèse, prétendue par les Européens dans leurs alliances au Nouveau Monde. Dans le cas brésilien, les alliances luso-amérindiennes ont été vitales pour le succès de l’entreprise coloniale portugaise. Même si la couronne portugaise défendait l’esclavage des Indiens de l’Amérique portugaise, elle leur donnait le statut des sujets. Malgré les alliances, l’évangélisation s’imposait aux Alliés, parfois aussi la corvée, en échange d’armes, de protection ou d’aide militaire. Aux ennemis, les Portugais menaient la guerra justa et réduisaient à l’esclavage les prisonniers de guerre. Malgré l’ethnocentrisme luso-chrétien, les colons portugais se sont vite adaptés aux moeurs des Indiens alliés. Le métissage biologique et culturel était une composante fondamentale du succès de l’entreprise portugaise dans les Tropiques. D’ailleurs, il ne faut pas oublier que les Portugais étaient un peuple métis et cela a beaucoup aidé à la formation du « monde lusotropical », pour employer une expression du sociologue Gilberto Freyre. Selon l’historien Sérgio Buarque de Holanda (1995, p. 57), les Portugais ont su « s’africaniser » en Afrique et « se brésilianiser » au Brésil.

Les Portugais seront alors les premiers Européens à établir des alliances avec des peuples d’autres continents depuis les premiers voyages outre-mer à l’époque de l’Infant Dom Henrique. Selon un des premiers récits de l’Afrique noire, le chroniqueur de la couronne portugaise, Zurara, écrit que les navigateurs, sous les services de l’Infant Dom Henrique, avaient pour mission de prendre des renseignements sur l’existence des peuples chrétiens au-delà du Cap Bojador, sur l’influence des Maures dans les terres lointaines et sur les possibilités d’alliance avec les peuples païens (Zurara, 1989, pp.172-173).

L’esprit d’alliance avec les peuples païens était présent dans le premier récit de voyage portugais au Brésil. Selon la lettre de Pero Vaz de Caminha à El-Rei Dom Manuel, datée du 1er mai de 1500, les Indiens pourraient être des alliés potentiels des Portugais. Caminha lui-même était persuadé que si El-Rei enverrait quelqu’un pour demeurer parmi ces gens-là, ils seraient tous « façonnés selon les désirs de Votre Altesse ». Caminha fait aussi savoir que deux proscrits resteraient avec eux. L’abandon de deux étrangers chez les Amérindiens s’est produit après avoir planté une croix en bois (dont les armes et la devise du roi portugais étaient fixées par des clous) et célébré une messe le 1er mai de 1500. La description de Caminha de ses événements laisse inférer une volonté d’alliance tacite. Il s’agirait là de la première manifestation d’une forme d’alliance luso-amérindienne. [3]

=tablissements fran=ais

La « découverte » du Brésil par les Portugais s’inscrit dans le deuxième voyage aux Indes où le capitaine Pedro Alvares Cabral avait pour mission diplomatique de sceller une alliance avec le samorim de Calicute et avec quelques éventuels petits royaumes en Afrique et aux Indes. Le but diplomatique de cette entreprise portugaise se dégage dans deux lettres du roi D. Manuel : la lettre patente  à Pedro Alvares Cabral et la lettre de D. Manuel au roi de Calicute (Magalhães e Miranda, 1999).

Quatre ans après l’érection de la croix portugaise sur une plage brésilienne, ce sont les Français qui dressent la leur. Au jour de la « grande Pâque » de 1504, le capitaine normand Binot Paulmier de Gonneville ordonnait de planter une croix avec l’inscription suivante : HIC SACRA PALMARIUS POSUIT GONIVILLA BINOTUS ; GREX SOCIUS PARITER, NEUSTRAQUE PROGENIES. Par ce geste hautement symbolique, ledit capitaine normand associait les Carijós à sa lignée normande (Perrone-Moysés, 1995, p. 24). Il s’agit là de la première manifestation d’une volonté d’alliance franco-amérindienne, même si la Relation de Gonneville laisse supposer que les Français fréquentaient déjà la côte brésilienne. Selon l’historienne brésilienne Perrone-Moysés (1995, p.66), « le texte inscrit sur la croix est riche de sens. Il ne témoigne pas d’une prise de possession de la terre, mais d’un contrat d’association signé par les Normands et les indigènes, un traité d’alliance.» Pourtant, l’alliance luso-amérindienne de 1500 et l’alliance franco-amérindienne de 1504 au Brésil doivent être distinguées une de l’autre, malgré la ressemblance de leur protocole catholique.

Il faut souligner que le destinataire de la lettre de Pero Vaz de Caminha était El-Rei en personne ; ceux de la relation de Gonneville étaient « les gens du Roi » [4]. Si les Portugais ont baptisé la nouvelle terre et planté une croix pour signifier une prise de possession du territoire, les Français ont plutôt envisagé une simple alliance avec les Carijós. La croix dressée par le Français Gonneville n’aurait pas eu la même signification et les mêmes conséquences que les croix françaises érigées par la suite en 1534 au Canada, en 1557 à Rio de Janeiro (France Antarctique) et en 1613 à Saint-Louis (France Équinoxiale). Pour Perrone-Moysés (1995, p. 66-67), « les premiers commerçants français arrivés au Brésil n’avaient pas l’intention de s’installer dans ce pays pour coloniser. Ils cherchaient à établir de bonnes relations avec ses habitants, pour faire avec eux des affaires, dans l’immédiat comme à l’avenir. Ils ne baptisent donc pas la nouvelle terre, et le nom du roi de France ne figure pas sur la croix en qualité de maître des lieux [...] Par la suite au Canada, les croix indiquent nettement que l’on prend possession du territoire. La première, plantée en 1534, présente un écusson qui comporte trois fleurs de lys et l’inscription ‘Vive le Roi de France’ ».

Mais les alliances interculturelles au Nouveau Monde étaient aussi instables que les alliances et les traités entre les Français et leurs confrères européens. Le théâtre de la guerre en Europe a beaucoup influencé les alliances au Nouveau Monde. Face à la guerre contre l’Espagne de Charles Quint, par exemple, Jacques Cartier  tarde à retourner au Canada et ne peut pas tenir sa promesse de ramener l’agouhanna Donnacona dans le délai promis. [5] La présence du chef Donnacona en France et la lettre de commission de François I à Jacques Cartier pour entreprendre un troisième voyage au Canada (1540), intriguent les espions espagnols et portugais qui craignent une offensive française contre les domaines sous l’influence espagnole ou portugaise au Nouveau Monde (Bideaux, 1986, p. 22 ss). Mais le roi du Portugal, Jean III demeure réticent face à la pression espagnole pour empêcher le départ de Jacques Cartier. Il faut souligner que les rois espagnols avaient de quoi se faire du souci au cours du XVIe siècle, car la Conquista menée au Mexique et au Pérou avait provoqué plusieurs critiques contre son Empire, notamment par des Huguenots comme Jean de Léry et Urbain Chauveton. [6]

Même après la bule Sublimis Deus du Pape Paul III, les Espagnols n’ont pas toujours reconnu les droits des Amérindiens. Les Conquistadores espagnols ont pourtant, eux aussi, dû s’allier avec des peuples autochtones dès les premières rencontres au Nouveau Monde[7] Rappelons que les Tlaxcaltèques, alliés des Espagnols, ont profité pendant de nombreuses années de privilèges que leur conféraient leurs alliances avec les Espagnol : absence d’impôts, nomination à des postes clés dans l’administration (Todorov, 1982 p. 73-79 ; Encinas, 1596, vol 4, pp. 331 ss). Dans ce contexte, l’arrivée des Français pouvait ébranler le domaine espagnol et portugais au Nouveau Monde. Si la France Antarctique représentait un danger majeur pour l’intégrité de l’Amérique portugaise, la France Équinoxiale gênait les couronnes ibériques fusionnées entre 1580 et 1640.

La fondation de la France Antarctique sur une île dans la baie de Rio de Janeiro mettait en danger l’unité territoriale de l’Amérique portugaise, car elle pouvait la couper en deux. Il ne s’agissait plus de Français hasardeux qui arrivaient, remplissaient leurs vaisseaux et partaient, mais d’une colonie de calvinistes soutenue par le Roi français ! Le risque d’une alliance entre les cannibales et les hérétiques français était un véritable cauchemar pour les jésuites chargés de l’évangélisation des Indiens en Amérique portugaise. D’ailleurs, des milliers de soldats sous le commando de Estácio de Sá ont été recrutés chez les Indiens de la Reducción de São Paulo. Sans eux, les Portugais n’auraient pas pu mettre fin à la France Antarctique. [8] Mais quelques truchements et coureurs des bois, souvent d’origine normande, ont entretenu une résistance contre les Portugais durant quinze années encore (Lestringant, 1998, p.143).

Selon Lestringant, un complot de truchements contre Villegagnon, le vice-roi de la France Antarctique,  a été déjoué en février de 1556. Le chef des rebelles s’est enfuit chez les Indiens, qu’il a dressés contre la colonie. Voici qui prouve qu’une alliance entre les Indiens et les Français prédominait sur l’isolement de la colonie française. Malgré l’échec de la France Antarctique, la couronne française ne semblait pas abandonner son projet d’une colonie au Brésil. Ainsi, la France Équinoxiale a vu le jour quelques années après que Samuel Champlain et François Gravé du Pont ont scellé la première alliance interculturelle au Canada. De l’alliance de Tadoussac de 1603 jusqu’à la Grande Paix de Montréal en 1701, les relations interculturelles franco-amérindiennes ont été marquées par la circulation des personnes. Si les Français ont enlevé moins d’Amérindiens et accepté moins de filles et garçons comme présent pendant le XVIIe siècle, la circulation volontaire des personnes a augmenté puisque la connaissance réciproque s’élargissait parmi les alliés, de même que la confiance, et la présence française se faisait plus régulière qu’un siècle auparavant.

2. Le troc et la circulation plus ou moins volontaire
des personnes dans le cadre des alliances


Le jeune Essoméricq, fils d’un cacique Carijó, a été probablement un des premiers Amérindiens du Brésil à débarquer dans un port français. Amené par le capitaine normand Paulmier de Gonneville, il quitta le Brésil en 1504. [9] Selon la Relation de Gonneville (Perrone-Moysés, 1995), on peut croire que le cacique Carijó avait autorisé le voyage de son fils dans le but de prendre connaissance de la technologie du fer, notamment pour forger des armes. Mais ni tous les Amérindiens allaient volontiers en France et dans le cadre des échanges. D’autres Amérindiens ont été même enlevés : En 1509, le capitaine Thomas Aubert revient à Rouen avec sept Indiens de Terre-Neuve et au cours de ses voyages, Jacques Cartier rentre à Saint-Malo avec au moins dix Indiens du Canada. (Bideaux, 1986, p. 410) Entre la France, le Canada et le Brésil, les vaisseaux bretons et normands ont transporté plusieurs Amérindiens pendant le XVIe siècle. Qu’ils soient enlevés ou qu’ils agissent de plein gré, ces voyageurs ont enduré un long voyage dont quelques-uns comme Essoméricq et Donnacona ne sont jamais revenus. En outre, les voyages des Amérindiens démontrent bien la dynamique des relations interculturelles dont la circulation des marchandises et des personnes était fondamentale pour sceller les alliances. Don, adoption et enlèvement s’inscrivent donc dans le cadre des premières rencontres franco-amérindiennes au Brésil et au Canada.

Selon le récit du premier voyage de Jacques Cartier au Canada, la rencontre franco-amérindienne s’est déroulée à partir des expériences menées en terre du Brésil. Concernent les relations interculturelles au Canada, Dickason (1984) soutient la thèse de l’influence de l’expérience française au Brésil jusqu’au début du XVIIe siècle. Il faut souligner que depuis la fin du XVe siècle, les Français faisaient le troc avec les Indiens du Brésil. Selon la relation du voyage du capitaine Paulmier de Gonneville (1503/1504) “depuis quelques années déjà, les Dieppois, les Malouins et autres Normands et Bretons vont chercher du bois à teindre en rouge, coton, guenons et perroquets et autres denrées…”.

Les cas d’enlèvements sont plus explicites dans les deux premiers voyages de Jacques Cartier au Canada. La circulation plus ou moins volontaire des Indiens était sans doute une pratique assez connue des marins bretons et normands qui fréquentaient la côte brésilienne. [10] Aussi la rencontre franco-amérindienne au Canada n’est pas une nouveauté ni pour Jacques Cartier et son équipage ni pour les Amérindiens, puisque les Bretons, les Basques et les Portugais faisaient déjà la pêche sur les côtes de Terre-Neuve et du Labrador. Mais si plusieurs marins connaissaient déjà les contrées, d’autres ont participé à des expéditions au Brésil. Cela permet aux Français un transfert de connaissances sur l’échelle des valeurs pour les échanges puisque les produits échangés avec les Tupinambás et les Carijós étaient les mêmes que ceux échangés avec les peuples algonquiens ou iroquoiens. Selon l’échelle de valeurs et les besoins liés aux activités pratiquées dans des milieux géographiques différents, les échanges comprenaient : les haches et les hachettes, suivis des couteaux et hameçons, les couvertures, certains produits alimentaires et des objets de culte ou des décorations. Pour les femmes indiennes, les Français donnaient plutôt des verroteries, des peignes et de petites cloches. Quelques bonnets rouges et seaux d’airain étaient offerts dans des occasions particulières. De la part des Amérindiens, les cadeaux étaient plutôt des parures comme colliers d’esnoguy et quelques denrées. Quelques épices étaient chères aux Français, mais leur intérêt était plus ciblé : or, argent et pierres précieuses. Par défaut des telles mines, la pêcherie et la pelleterie vont combler la convoitise française au Canada du XVIe au XVIIe siècles. (Léry, 1994, 226 ss, 304 ss ; Girard, Perron, 1995, p. 99 ss)

La circulation des cadeaux se fait depuis la première rencontre de même que la circulation des personnes. Une comparaison entre le récit de Pero Vaz de Caminha lors de la rencontre des Portugais et les Indiens du Brésil en 1500 et la relation du voyage du capitaine normand Gonneville en 1503/04 démontre que les « babioles » offertes par les Portugais et les Français étaient semblables et s’inscrivaient dans la même échelle de valeurs marchandes.

Les relations de voyage de Jacques Cartier au Canada montrent que cette échelle a été altérée puisque les Iroquois ont imposé, dès son deuxième voyage, d’autres valeurs dont la circulation des personnes vient initier des alliances qui permettent l’échange. En somme, pour les autochtones, les échanges de produits sont plutôt les conséquences d’échanges de personnes qui viennent sceller des alliances formelles qui elles, permettent d’autres types d’échanges. Rappelons que Cartier aurait ramené en France une dizaine d’autochtones. (Bideaux, p. 193, 410) L’épouse de Cartier aurait été marraine d’un jeune brésilien baptisé le 31 juillet 1528, ce qui montre certains liens de la famille Cartier avec le Brésil (Bideaux, 1986, p. 13). Avant son premier voyage comme pilote de sa Majesté, Jacques Cartier aurait été présenté au Roi François I, comme un navigateur qui aurait déjà fréquenté le Brésil et Terre-Neuve. Le spécialiste Bideaux (1986, p. 13) reste sceptique concernant les voyages de Cartier au Brésil. Cependant, il estime, à l’instar de Trudel, qu’il serait plutôt surpenant que Cartier n’ait jamais fréquenté Terre-Neuve avant de venir de manière plus officielle au Canada. Samuel Champlain aurait probablement séjourné au Mexique. (Litalien, Vaugeois, 2004, 63 ss).

Les deux fils de Donnacona qui ont séjourné en France lors du retour du premier voyage au Canada de Jacques Cartier, Taignoagny et Domagaya, auraient signifié aux Indiens qui amenaient du poisson frais aux marins que ce qu’on leur offrait en échange (couteaux, chapelets...) n’avait guère de valeur et qu’ils devraient exiger davantage. Au XVIe siècle des nouveaux produits comme les vêtements, les armes et boissons alcoolisées ont été introduits dans les échanges et ils en ont même remplacés d’autres. [11]

Dès le XVIe siècle, le bois du Brésil est très recherché par les navires européens (Léry, 1994, p. 306 ss) Dans ce nouveau commerce, les Tupinambas coupent eux-mêmes le bois qu’ils échangent avec les navigateurs français ou portugais qui fréquentent les côtes de manière régulière.

« Les sauvages doncques, moyennant quelques robbes de frize, chemises de toile, chapeaux, cousteaux et autres marchandises qu’on leur baille, non seulement avec les coignées, coings de fer, et autres ferremens que les François et autres de par-deça leur donnent, coupent, scient, fendent, mettent par quartiers et arrondissent ce bois de Brésil, mais aussi le portent sur leurs espaules toutes nues, voire le plus souvent d’une ou deux lieues loin… Je di (sic) expressément que les sauvages, depuis que les François et Portugais frequentent en leur pays, coupent leur bois de Bresil : car auparavant ainsi que j’ai entendu des vieillards, ils n’avoyent presque aucune industrie d’abbatre un arbre, sinon mettre le feu au pied. » (Léry, 1994, pp, 308-309)

Au début du XVIIe siècle, les échanges avec les Tupinambas au Maragnan avaient aussi changé selon le Brief Recueil dont Pezieu expose la nécessité « de marchandises pour se dilater & trafficquer avec eux » et voici selon lui la hâte du retour de Razzily. « [...] croyons d’avoir tant de marchandises que nous avons apporté, que de celles dont M. du Manoir nous a accomodé suffisament, pour traiter & entretenir ce peuple, jusques au retour dudit sieurde Razilly. J’ay desja fait amitié avec les principaux d’entre-eux: mais li m’en coustrea des casaques, commençans desja à prendre goust à se vestir. » [12]

Le capucin Yvres d’Evreux (1985, p.195) nous renseigne sur les marchandises convoitées par les Tupinambas de la France Equinoxiale: “... ayez force couteaux à manche de bois dont usent les bouchers [...], des ciseaux de malle en quantité, force peignes, miroirs, grains de verre de couleur pers qu’ils appellent rassade, serpes, haches, couperets, des chapeaux de petit prix, des manteaux, chemises, haut-de-chausses de friperie, de vieilles épées et qrquebuses de peu de coût. Ils font grand cas de tout ceci, et vous aurez le moyen d’avoir d’eux des esclaves et de bonnes marchandises.”

Dans le cadre d’une alliance interculturelle, la valeur des marchandises échangées peut varier selon les groupes concernés. Il est probable que chaque groupe se prenait pour celui qui savait tirer le meilleur avantage de l’échange. Voici la polysémie d’une dynamique de l’échange puisque la grille culturelle de chaque groupe confère des valeurs différenciées aux objets marchands. Il faut donc faire attention à l’écart différentiel entre les cultures dont parle Lévi-Strauss (1987, p.76) puisque « la véritable contribution des cultures ne consiste pas dans la liste de leurs inventions particulières, mais dans l’écart différentiel qu’elles offrent entre elles.”

Concernant l’extraction du bois-rouge au Brésil, André Thevet (1997, p.227) a jugé cette activité peu rentable pour les Indiens qui coupent le bois et chargent les bateaux. “[...] les sauvages du pays le coupent et dépècent eux-mêmes, et aucunes fois le portent de trois ou quatre lieues jusques aux navires ; je vous laisse à penser à quelle peine, et ce pour appétit de gagner quelque pauvre accoutrement de méchante doublure ou quelque chemise.”

L’inégalité des échanges était aussi perçue par les Français, concernant les objets qui pouvaient servir de monnaie d’échange. Selon le récit du deuxième voyage de Jacques Cartier, les Iroquois possèdent une monnaie d’échange qui étonne beaucoup les Français. Il s’agit d’une sorte de coquillage dont ils usent comme les Français font « de l’or et de l’argent » et qu’ils considèrent comme la chose la plus précieuse au monde. Jacques Cartier et son équipage ont peu d’intérêt pour ces colliers d’esnoguy[13] Ils ne s’intéressent point aux esnoguy. Rien de comparable à la convoitise causée dans le commerce atlantique par le cauri africain et le zimbo brésilien. D’ailleurs, le coquillage zimbo était ramassé sur certaines plages dans le sud de la Bahia (Brésil) et utilisé comme monnaie pour la traite d’esclaves. Son introduction dans le marché africain a perturbé le monopole royal dans la région d’Angola et brisé le monopole portugais au Brésil puisque le zimbo n’était pas taxé. [14]

Si l’esnoguy pour les Iroquois du Canada avait une grande valeur dont les Français avait du mal à évaluer, une pierre précieuse fort estimée chez les Tupinambás du Brésil a quand même réveillé la convoitise des Français. S’agissant de cette pierre de couleur verte, le capucin d’Evreux (1985, p. 60) affirme que « les Tupinambos et les Tapouis font grand cas. » Lui-même raconte la réponse d’un indien quand il lui a demandé ce qu’il voulait contre la pierre verte qu’il portait : « Donne-moi un navire de France plein de haches, serpes, habits, épées et arquebuses. »

Il y a aussi des produits auxquels les Tupinambas ne donnaient aucune valeur et que les Français estimaient énormément. Mais face à la convoitise des Français pour l’ambre gris, les Tupinambas ont commencé à le ramasser sur les plages du nord du Brésil. Selon Yves d’Evreux (1985, p.139), les Tupinambas sont devenus « cupides de cette matière, non parce qu’ils en font cas mais parce qu’ils voient que les Français la recherchent avec grand soin ». Son manque de valeur pour les Tupinambas peut être saisi par son nom tupi «pirapoty », autrement dit, fiente de poissons, « car ils ont opinion que cet ambre gris n’est autre chose que l’excrément des baleines, ou d’autres semblables gros poissons [...] »

Le commerce du bois-rouge, la pêche côtière, le coton, le piment, les oiseaux et les animaux à fourrures ou les animaux exotiques, l’ambre gris, et autres produits naturels ont toujours été considérés dans l’historiographie par rapport à la valeur que les Européens leur donnaient. On a peu étudié leur valeur pour les Amérindiens. En outre, l’historiographie n’accorde pas d’importance aux haches, hachettes, serpes, couteaux, ciseaux, chaudron en cuivre et seaux d’airain. En fait, c’est par une meilleure compréhension de la dynamique des échanges que l’on pourra comprendre le fondement des alliances. Par exemple, lorsque les Montagnais s’allient pour faire le commerce des fourrures avec Champlain sur les bords de Tadoussac en 1603, les parties scellaient une alliance durable. [15]  En dépit de l’ethnocentrisme de chaque groupe concerné, les alliances étaient scellées, car les Européens et les Amérindiens croyaient pouvoir en profiter chacun à leur manière.

Au Brésil, à partir du XVIe siècle, les alliances franco-amérindiennes ne cessent d’être remises en cause. [16] Mais les alliances démontrent que la force du partenaire était convoitée pour atteindre leurs objectifs autant pour établir la paix que faire la guerre contre un ennemi commun. L’échange en tant que moyen de sceller une alliance est devenu sa propre finalité. Le troc et l’alliance sont donc les deux faces d’une même médaille. [17]

Au Canada, nous pouvons constater dans les relations de Jacques Cartier que celui-ci n’a pas su profiter de certaines situations pour sceller des alliances avec les Iroquois de Stadaconé et Hochelaga. À Stadaconé, Jacques Cartier n’arrive pas à gérer la crise provoquée par sa décision d’aller à Hochelanga. Les Iroquois de Stadaconé ne veulent pas que les Français partent vers Hochelaga. L’agouhnna Donnacona fait appel à un dernier recours pour retenir les Français. Après une harangue, il a présenté au capitaine malouin une fillette d’une douzaine d’années et deux garçons. Taignoagy avait expliqué à Cartier que la fille était la soeur d’agouhnna Donnacona et l’un des garçons était son frère. [18] Avec dédain, Cartier menace de refuser les cadeaux puisqu’il a fait savoir que rien ne lui empêcherait d’aller à Hochelaga. L’autre truchement, Domagaya, intervient et Cartier accepte enfin le présent. Mais, peu eprès, il laisse la petite fille s’échapper et, après sa capture et son renvoi au capitaine malouin, il refusera à nouveau de l’accueillir. Malgré qu’il sache que Donnacona lui a présenté la petite fille dans le but explicite de sceller une alliance, Cartier écrit lui-même que les Iroquois ont poussé « troys criz en signe de joye et alliance », (Bideaux, 1986, 142) le capitaine malouin ignore le système de parenté des Iroquois et les éléments d’échanges de personnes dans le processus d’élaboration des alliances. Cartier refuse l’alliance parce qu’il désire se rendre à Hochelaga malgré le refus de ses hôtes. Cartier refuse le don qui scellerait l’alliance. En fait, le don crée un lien social par trois obligations: donner, recevoir, rendre.

Dans son Essai sur le Don, Marcel Mauss (1923/1924, p. 150) écrit:

Dans les économies et dans les droits qui ont précédé les nôtres, on ne constate pour ainsi dire jamais de simples échanges de biens, de richesses et de produits au cours d'un marché passé entre les individus. D'abord, ce ne sont pas des individus, ce sont des collectivités qui s'obligent mutuellement, échangent et contractent; les personnes présentes au contrat sont des personnes morales: clans, tribus, familles, qui s'affrontent et s'opposent soit en groupes se faisant face sur le terrain même, soit par l'intermédiaire de leurs chefs, soit de ces deux façons à la fois. De plus, ce qu'ils échangent, ce ne sont pas exclusivement des biens et des richesses, des meubles et des immeubles, des choses utiles économiquement. Ce sont avant tout des politesses, des festins, des rites, des services militaires, des femmes, des enfants, des danses, des fêtes, des foires dont le marché n'est qu'un des moments et où la circulation des richesses n'est qu'un des termes d'un contrat beaucoup plus général et beaucoup plus permanent."

Les échanges entre Français et Amérindiens ne s’inscrivent pas tout à fait dans le modèle proposé par Mauss. Encore faudrait-il mieux étudier ces questions autour des alliances entre marchands français et les peuples autochtones avec qui les échanges se sont faits. Par ailleurs, Lévi-Strauss avait perçu l’erreur de Mauss lorsque ce dernier n’a pas su percevoir le fait que, au-delà de la chose échangée, c’est l’échange qui "constitue le phénomène primitif, et non les opérations discrètes en lesquelles la vie sociale les décompose." En d’autres termes, l’échange lui-même reste au centre des alliances qui scellent un contrat qui assure une certaine permanence et continuité signifiées par l’échange mais aussi confirmées par celui-ci. [19]

Il est fort probable que les Iroquois de Stadaconé aient pris la fermeté du propos de Cartier qui désire toujours se rendre à Hochelaga sans leur accord comme un geste de mépris de sa part. En refusant d’accueillir les enfants, il refuse l’alliance offerte. La situation va encore s’empirer lors de son retour à Stadaconé. Cartier enlèvera l’agouhnna Donnacona et l’amènera en France d’où il ne reviendra jamais. (Bideaux, 1986, p. 188-195) Dans Les Relations il est clair que le retour de Donnacona et d’autres Indiens enlevés par Cartier est attendu dans un délai de douze lunes. En donnant des cadeaux à Jacques Cartier, quelques femmes lui ont montré par signes et paroles «qu’il retournast et amenast ledict Donnacona et aultres ilz luy feroient plusieurs presens. Lors chacune d’icelles donna audict cappitaine ung collier d’esnoguy [...] » (Bideaux, 1986, p. 181).

Malgré lui, Cartier n’a pas pu tenir sa promesse et l’hostilité qu’il rencontre lors de son troisième voyage s’inscrit dans un cadre de méfiance réciproque. Le capitaine malouin a commis quelques fautes diplomatiques lors de son deuxième voyage au Canada, notamment lors de sa première rencontre avec les Iroquois d’Hochelaga. Lors de sa visite à Hochelaga, il a refusé fermement de prendre le repas avec les Iroquois puisque ses compagnons aimaient la cuisine salée à point et leurs hôtes avaient les vivres « sans aucun goût de sel ». Selon le jésuite Paul Lejeune, « c’est faire une espèce d’affront à un Sauvage, de refuser les morceaux qu’il présente. » [20]  Si cette remarque sur la culture des Montagnais vaut aussi pour les Iroquois, alors, Cartier et ses compagnons devaient faire bonne chère s’ils voulaient sceller une alliance avec les Iroquois de Hochelaga. Dans ce contexte, aucune alliance n’a découlé des rencontres interculturelles dont Cartier était un des principaux protagonistes. Sous ce rapport, Cartier se comporte comme un conquérant à la recherche d’or.

À partir de 1603, Champlain qui a pour mandat du roi de sceller des alliances, comprend bien l’importance de la circulation des personnes dans les relations qu’il entretient avec les nations alliées. Les deux jeunes autochtones qui ont fait un séjour en France agissent comme interprète lors des rencontres qui scellent la première alliance de 1603. (Champlain, I, p. 70)

Rappelons aussi que les Récollets formaient des jeunes autochtones en France encore en 1627. En 1629, Champlain rapporte que les Jésuites avaient éduqué en France le jeune Huron, Louis Amantacha qui agit comme truchement. (Champlain, III, 1973, p. 1121 et 1251)

La première alliance interculturelle franco-amérindienne au Canada a été celle décrite par Samuel Champlain en 1603. Il faut souligner qu’une première période des alliances franco-amérindiennes au Canada (1603-1760) est marquée par une « souveraineté partagée » (Girard, 2005). À l’exception du traité franco-iroquois de 1624, une brève revue historiographique sur les alliances franco-amérindiennes en Nouvelle France nous permet de constater qu’elles étaient plus nombreuses et prospères que celles établies entre Français et Amérindiens au Brésil. (D’Avignon, 2006, Havard, 2001 ; Beaulieu, 2003 ; Savoie, 2003 ; Girard, 2005) Cela renforce aussi notre avis que les échanges en Nouvelle-France ont été mieux organisés que ceux pratiqués au Brésil.

Pour sa part, l’historienne brésilienne Andréa Daher (2002b) soutient que les échanges entre Français et Tupinambás ont été très rentables jusqu’au début du XVIIe siècle et plus avantageux que celui fait au Canada. Pour soutenir cette affirmation, elle renvoit à un manuscrit anonyme conservé à Turim : “Plusieurs qui auaient suivi Poutrincourt au Canada ou ils n’auraient rien d’autre de quoi trafiquer que des castors et des fourrures, prirent ce parti comme plus apparent.” [21] Sans compter la pêcherie en Terre-Neuve et Labrador qui attirait beaucoup de Français, notamment des Bretons, le commerce de la fourrure s’est développé davantage à partir de 1580. Entre 1574 et 1603, des inventaires démontrent que plus de cent soixante navires normands se seraient engagés pour les Terres neuves et le Canada. [22] Pour presque la même période, le Havre en aurait armé la moitié (80) pour le Brésil (Labourdete, 1998, p. 249 ; Bréard, 1889, p. 12 ss).

Fait à souligner, malgré l’hégémonie de l’Angleterre sur les mers, en 1591, des pêcheurs des Iles anglaises de la Manche viennent à Saint-Malo pour obtenir des passeports de pêche pour Terre-Neuve. Ces permis leur sont refusés. [23] Les récits de Champlain montrent aussi que la Nouvelle-France apparaît plus avantageuse que la France Equinoxiale au début du XVIIe siècle. Au-delà de la trappe aux castors, Champlain présente à la chambre du commerce, le potentiel économique que représente la Nouvelle-France et la fondation de la Compagnie de Cent-Associés vient confirmer l’intérêt commercial de la France au Canada, au détriment du Brésil.

Malgré les écarts et les différences de la durée de l’expérience française et, par conséquent, du profit économique emporté par la France Antarctique, la France Equinoxiale et la Nouvelle France, la circulation des personnes a été incontournable pour le troc et pour les alliances. Pour la France Antarctique, Thevet (1997, p.176-177) donne quelques conseils pour y trafiquer en mettant en garde celui qui veut faire des négoces avec les Indiens, car « pour tirer quelque chose qui leur agrée des étrangers, savent si bien flatter qu’il est malaisé de les pouvoir éconduire. [...] bref, ils vous recherchent entièrement, et ne leur faut rien refuser, autrement vous n’en auriez service, grâce,  ni amitié quelconque, vrai est qu’ils vous rendent vos hardes. »

Pour la France Equinoxiale, le capucin Yves d’Evreux (1985, p.196) a une vision plus généreuse de l’accueil des Tupinambas que  celle de Thévet. « S’il y a nation au monde portée à faire bon accueil à ses amis nouvellement arrivés, à les recevoir dans les maisons pour les traiter aussi bien que possible, les Tapinambos envers les Français doivent tenir le premier rang ». Pourtant, le capucin avertit plus loin: « Mais prennez garde de ne donner pas tant au commencement, que vous ne les teniez toujours en haleine, leur présentant de mois en mois quelque chosette (d’Evreux, 1985, p.199).

L’étude des relations interculturelles franco-amérindiennes au Brésil, montrent toute la complexité des alliances qui découlent d’une relation d’hospitalité préalable à l’arrivée des Français, mais qui a été aménagé pour ceux-là. Cela ne veut pas dire que les Français n’ont pas du s’adapter à l’ethos tupi, de l’hospitalité. Le passage suivant démontre que les Français connaissaient très bien la dynamique culturelle chez les Tupinambas et qu’ils essaient d’en profiter.

« Les Français imitent en ce point les Sauvages et sont bien reçus par eux : car ceux qui demeurent au fort demandent congé d’aller par les villages, faire une promenade et bonne chère. Les Sauvages qui savent cela vont à la chasse et donnent à ces promeneurs (moyennant quelques marchandises) deux ou trois bons repas, après lesquels il faut aller ailleurs, autrement vous n’aurez que de l’ordinaire. Les Français sont si bien formés à cela qu’après avoir fait deux ou trois bons repas en un village ils sautent en l’autre, et ainsi, faisant le tour de l’île ou des provinces de Tapouitapere et de Comma, ils reprennent leur force et se réconfortent. Les Français qui sont logés par compérage en ces villages ne sont pas trop aises de telles promenades, parce qu’il y a alors quelque chose de bon, ce n’est pas pour eux mais pour les passants, le naturel du Sauvage étant de donner tout le meilleur qu’ils ont aux arrivants [...] » (d’Evreux, 1985, p.113)

Si pour accueillir les Européens, les groupes Tupi ont aménagé leur relation d’hospitalité coutumière parmi eux, il va sans dire que la manière d’échanger entre les groupes Tupi elle aussi a été étendue au commerce avec les Européens. Selon Thevet (1997, p.185) : « Combien qu’en Amérique y ait diversité de peuples, sauvages néanmoins, mais de diverses ligues et factions, coutumiers de faire guerre les uns contre les autres, toutefois ils ne laissent de trafiquer, tant entre eux qu’avec les étrangers (spécialement ceux qui sont près de la mer) de telles choses que porte le pays. »

3. Le don ou l’échange des femmes
dans le cadre des alliances


Nous avons déjà mentionné que la dynamique des échanges entre Français et Amérindiens au Canada et au Brésil a été accompagnée d’une circulation des personnes. Par le don, l’adoption, l’enlèvement ou le don des filles, les Français et les Amérindiens ont pu se connaître un peu mieux pendant les XVIe et XVIIe siècles. Depuis les premières rencontres entre Français et Amérindiens, on connaît la circulation des femmes. Elle s’inscrit dans la logique du don et du contredon puisque les Amérindiens avaient pour usage de donner « des présents au père ou parents de la fille qu’ils auront épousée »[24] En donnant leurs filles aux Français, les Amérindiens espéraient recevoir le contredon. Cartier semble au fait de ces aspects liés à la circulation des femmes.

Mais si l’expérience française auprès des Amérindiens s’accumule, elle n’empêche pas les malentendus. Lors de la rencontre de Jacques Cartier avec un grand seigneur du pays « en un lieu nommé Achelacy qui est un détroit dudit fleuve, fort rapide et dangereux », ce dernier offre à Cartier deux de ses enfants : une fillette de huit ou neuf ans et un garçon de deux ou trois ans. Cartier n’accepte de garder que la fillette, car le garçon était trop petit pour endurer le voyage. Refus dont les sources ne nous offrent que peu de matière à interprétation sur la réaction des Amérindiens.

À Stadaconé, Jacques Cartier avait déjà refusé une jeune fille, présent de l’agouhnna Donnacona. Après sa résistance à accepter le présent, Cartier a laissé la petite fille s’échapper et après il l’a refusé encore une fois. On peut supposer qu’il n’a pas su profiter de l’occasion pour sceller une alliance avec Donnacona. L’asymétrie du don et du contredon a rendu la relation franco-amérindienne plus difficile et la tension augmentera lors du troisième voyage de Cartier. L’ambiance assez tendue n’empêche pas Jacques Cartier d’avoir une connaissance sur la circulation interne des femmes chez les Amérindiens, même si celle-ci est déformée par son ethnocentrisme.  (Bideaux, 1986, p. 163-164) « Ilz gardent l’ordre de mariaige fors que les hommes prennent deux ou troys femmes. [...] Ilz ont une aultre coustume fort mauvaise de leurs filles car despuis qu’elles sont d’aige (n.a. äge) d’aller à l’homme elles sont toutes mises en une maison de bordeau habandonneez à tout le monde qui en veult jusques ad ce qu’elles ayent treuvé leur party. » (Bideaux, p. 160-161)

Pour sa part, Champlain (1993, p. 112) remarque : « ils ont aussi une forme de mariage, qui est que quand une fille est en l’âge de quatorze ou quinze ans, elle aura plusieurs serviteurs et amis et aura compagnie avec tous ceux que bon lui semblera ; puis au bout de quelque cinq ou six ans, elle prendra lequel il lui plaira pour son mari, et ils vivront ainsi ensemble, s’ils n’ont pas d’enfants, l’homme se pourra démarier et prendre une autre femme, disant que la sienne ne vaut rien : ainsi les filles sont plus libre que les femmes. Or depuis qu’elles sont mariées, elles sont chastes, et leurs maris sont la plupart jaloux, lesquels donnent des présents au père ou parents de la fille qu’ils auront épousée. » Dans le cas des alliances scellées parmi les peuples algonquiens, les femmes ne semblent pas jouer un rôle très important. Chez les peuples iroquiens, leur rôle est mieux connu du moins dans les guerres et dans les stratégies concernant le traitement des prisonniers qui sont parfois tués ou adoptés. [25]

Au Brésil, le don des filles Tupinambas aux Français était connu depuis longtemps, même s’il était défendu en France Antarctique et en France Équinoxiale. [26] Plusieurs Français, qui habitaient parmi les Indiens, n’ont pas suivis les ordonnances ni du Seigneur Villegagnon en France Antarctique ni du Seigneur la Ravardière en France Equinoxiale. Dans les ouvrages du cordelier Thevet (1997, p.178) et du capucin d’Evreux (1985, p.122), ces deux auteurs reprochent aux Français d’avoir contribué à transmettre les maladies vénériennes qui étaient connus autant dans la France Antarctique  que dans la France Équinoxiale

Selon le cordelier André Thevet (1997, p.167-168) : « Ils vous donneront une fille pour vous servir le temps que vous y serez, ou autrement, ainsi que vous voudrez ; et vous sera libre de la rendre quand bon vous semblera, et en usent ainsi coutumièrement. Incontinent que serez là, ils vous interrogeront ainsi en leur langage : ‘Viens-çà, que me donneras-tu, et je te baillerai ma fille qui est belle, elle te servira pour te faire de la farine et autres nécessités.’ Pour obvier à cela, le seigneur de Villegagnon à notre arrivée défendit sus peine de la mort de ne les accointer, comme chose illicite au chrétien. »

L’huguenot Jean de Léry (1994, p. 180) nous fait savoir que certains Français “estoyent demeurez parmi les Sauvages, où vivans sans crainte de Dieu, ils paillardoyent avec les femmes et  filles (comme j’en ay veu qui en avoyent des enfans ja aagez de quatre à cinq ans) tant, dis-je, pour reprimer cela, que pour obvier que nul de ceux qui faisoyent leur residance en nostre isle et en nostre fort n’en abusast de cette façon: Villegagnon, par l’advis du Conseil fit deffense à peine de la vie, que nul ayant titre de Chrestien n’habitast avec les femmes des Sauvages [...].

Pour la France Equinoxiale, les ouvrages des capucins Claude d’Abbeville et Yves d’Evreux font également référence à ce sujet. Selon le capucin Yvres d’Evreux  (1985, p. 39), les Indiens « avaient coutume de donner leurs filles à leurs compères, celles-ci prenant dès lors le prénom de Marie et le nom du Français, pour désigner l’alliance avec tel Français, de sorte que dire ‘Marie une telle’, c’était autant dire la concubine d’un tel [...] Cette coutume de prendre les filles des Sauvages a été défendue aux Français et cela ne se fait plus, si ce n’est occultement.”

Si par le don de leurs filles aux Français les Amérindiens envisageaient un échange plus favorable, il va de soi que cette circulation facilitait également les alliances. Cependant, il semble que parmi les peuples algonquiens du Canada, les femmes n’ont pas joué un rôle marqué dans l’échange, encore qu’elles soient toujours présentes dans les festivités qui entourent les rencontres importantes. Par ailleurs, la critique de Lévi-Strauss sur la théorie de Meyer Fortès concernant la parenté démontre que ce sont les liens d’alliance qui priment le fait social. Selon Lévi-Strauss, les règles du mariage assurent la circulation des femmes au sein du groupe social et remplacent ainsi un système de relations consanguines d'origine biologique par un système sociologique d'alliance. C’est celui qui assure à l’individu l’appartenance à un groupe. Il va de soi que la progéniture et la parenté renforçaient les liens entre les Français et les Amérindiens, surtout au Brésil, au XVIe et XVIIe siècles.

Au Brésil, la relation d’hospitalité intraculturelle qui prévalait entre les Indiens lorsqu’ils se rendaient en visite chez leurs alliés fut aménagée pour les Européens. Pour la France Équinoxiale, la mise en place d’une relation de compérage entre Tupinambás et Français a été bien détaillé par les Capucins Claude d’Abbeville et Yves d’Evreux. Les Français devaient être pourvus de marchandises à donner en échange de la nourriture qu’ils recevaient de leur hôte. Les Français devennaient ainsi Chetouasaps (= mon hôte, mon allié) des Tupinambás. Il faut souligner que dès la fondation de la France Équinoxiale, les Français ont été défendu d’accepter les femmes indiennes. L’introduction de cette interdiction a crée un certain embarras puisque la circulation de femmes s’inscrivait dans le cadre des échanges entre Français et Tupinambás au nord du Brésil depuis 1570. Il s’agissait du don des jeunes filles à travers lequel des alliances étaient scéllées. Il faut souligner que si les Tupinambas baillaient leurs filles aux Français, ils envisageaient par ceci établir des liens de parentés.

Selon le capucin Yves d’Evreux (1985, p.102), il y avait deux sortes de parenté contractée par alliance: « la première, ou en donnant leur fille à quelqu’un, ou en recevant une fille pour femme de leur fils ; la seconde, en contractant l’alliance d’hospitalité avec les Français, quand ils leur donnent leurs filles pour concubines. Ils appellent ceux à qu’ils donnent leurs filles taiuuen , gendre, ou chéraiuuen, mon gendre. [...] Ils appellent le Français avec qui ils contractent l’alliance d’hospitalité touassap, compère, ou ché touassap,  mon compère, ou parfois, lorsque le Français retient leur fille pour concubine, chéaïre, mon fils, ou chéraiuuen, mon gendre. Tel est donc ce rameau d’alliance. »

Le lien entre le compérage, le don des filles et l’échange de produits divers semble fort étroit dans le passage suivant sur les attentes des Tupinambas à l’arrivée des Français: “Voilà les navires de France qui viennent, je ferai un bon compère: il me donnera des haches, des serpes, des couteaux, des épées et des vêtements; je lui donnerai ma fille, j’irai à la chasse et á la pêche pour lui, je ferai force cotons, je chercherai des aigrettes et de l’ambre pour lui donner ; je serai riche, car je choisirai un bon compère qui aura beaucoup de marchandises” (d’Evreux, 1985, p.197)

Les femmes cherchaient à leur tour à profiter de leurs hôtes tant en France Antarctique qu’en France Equinoxiale. Selon le cordelier André Thevet (1997, p.177) « les femmes sont plus flatteresses que les hommes, et toujours pour tirer à elles quelque chose, bien vrai qu’elles se contentent de peu. » Thevet n’oblitère pas la réciprocité entre le don et le contredon, puisque elles apportent aussi de petites choses : « Elles s’en viendront à vous de même grâce que les hommes, avec quelques fruits ou autres petites choses dont ils ont accoutumé faire présent ». À son tour, le capucin Yves d’Evreux (1985, p.196) averti son lecteur : « Ne vous laissez pas emporter aux mignardises des filles de votre hôte, ou des autres : elles ne manqueront pas de vous cajoler si elles savent que vous avez des marchandises. »

Le concubinage entre Français et Indiennes pourrait avoir une raison insolite. Yves d’Evreux (1985, p.116) dénonce que les Français prenaient de jeunes filles pour concubine « puisque la nécessité requiert qu’elles tirent et ôtent des pieds des Français cette vermine ». [27] Les Français achetaient aussi des esclaves pour profiter de la parenté, du don et du contredon, car l’esclavage était une sorte d’adoption. Le mariage d’une femme esclave impliquait l’élargissement du réseau parental puisque son époux devait, en général, travailler pour son chérou. La présence française chez les Indiens nous fait croire que « l’endotisme » (Lestringant, 1987) n’a pas empêché le changement dans la structure sociale et parentale. L’exemple suivant de la France Équinoxiale démontre une innovation française dans le cadre des alliances franco-amérindiennes. Selon d’Evreux (1985, p.70),  les Indiens prennent les filles esclaves pour femme, et ils donnent leurs propres filles ou leurs soeurs aux garçons esclaves pour accroître leur ménage et entretenir la cuisine alors que « les Français font autrement, car ils achètent des hommes et des femmes esclaves qu’ils marient ensemble, la femme pour faire le ménage de la maison et le mari s’en va à la pêche et à la chasse. S’il arrive quelquefois qu’un Français recouvre et achète une jeune fille esclave, il la fait voir à quelque jeune Tapinambos fort porté à l’amour de celles qui ont bonne grâce, et il lui promet qu’il le prendra pour gendre car il aime son esclave comme sa propre fille ; ainsi le Tapinambos vient demeurer chez lui, épouse la jeune fille, si bien que pour une esclave il en a deux. Il les appelle du nom de fille et de gendre, et eux l’appellent leur ‘chérou’, c’est à dire leur père. »

Dans l’ouvrage de Yves d’Evreux (1985, p.207), on trouve une promesse des Français aux Principaux des Tupinambas. Il s’agit de faire venir des femmes depuis la France. Selon le capucin, quelques Indiens ont manifesté leur contentement puisque « si nous voyons venir des femmes en notre pays, nous tiendrons pour certain que les Français ne nous abandonneront plus, ni les Pères, surtout s’ils nous donnent des femmes de France. » Le Principal Grand Chien avait dit à son tour : « l’on m’a promis de m’amener une femme de France que j’épouserai de la main des Pères et je me ferai chrétien, comme j’ai fait faire chrétien mon petit Louis Coquet dont je veux faire mon fils légitime dans peu de temps. Ma première femme est vieille, elle n’a plus besoin de mari ; quant aux huit jeunes que j’ai, je les donnerai pour épouses à mes parents ; j’aurai plus que la femme de France et ma vieille femme pour nous servir» (Evreux, 1985, p.208).

Le passage ci-dessus démontre bien comment les enjeux politiques et religieux dans le cadre des alliances franco-amérindiennes passaient par la circulation des personnes. Monogamie, évangélisation et d’autres éléments d’acculturation n’étaient donc pas imposés par les Français et les Pères, mais largement négociés par les Indiens.

4. L’adoption dans le cadre des alliances

Pour l’historien français Bonnichon (1997, p.28), le Brésil a introduit le Canada en France. Si l’expérience française au Brésil a influencé la rencontre entre les Français et les Indiens au Canada, elle a pu également l’ébranler puisque les Micmacs ou les Iroquois n’étaient pas les Carijós ou les Tupinambás. Malgré le propos de Sturtevant sur la tupinambisation des Indiens de l’Amérique du Nord [28], il faut quand même rendre compte des singularités qui depuis André Thevet jusqu’à nos jours sont mises en évidence. [29]

Absente des premières rencontres franco-amérindiennes au Canada, l’adoption de la part des Indiens de plusieurs Français a joué un rôle important dans le cadre des alliances franco-amérindiennes au Brésil. L’historien français Frank Lestringant (1987) a nommé « endotisme » ce phénomène d’intégration des Français dans les communautés indigènes au Brésil. Le sociologue brésilien Florestan Fernandes averti à son tour que la présence des Français chez les Tupinambás ne menaçait pas l’organisation socio-économique et culturelle des Indiens.

Si les sources sur les voyages d’explorations du Canada au long du XVIe siècle ne font pas référence à l’adoption de Français par les « Sauvages », l’alliance franco-amérindienne de 1603 est la première et la dernière, dont les truchements ou coureurs des bois d’origine française et qui ont vécu l’adoption et/ou la captivité parmi les Amérindiens ne participent pas aux négociations. Pour le XVIIe siècle, des noms de Français comme ceux de Étienne Brûlé, Jean Nicollet, Louis Thomas de Joncaire et Pierre-Esprit Radission, Nicolas Marsollet, abondent dans les négociations et traités de paix entre les Français et les Amérindiens de la Nouvelle France. [30]

À défaut de truchements d’origine française, l’alliance franco-amérindienne scellée à Tadoussac prenait appui sur deux Amérindiens qui agissaient comme interprètes. Pierre Chauvin les avait ramenés en France pour les présenter à Henri IV en 1602. De retour en 1603, leurs harangues ont permis à Champlain et à Pont Gravé de s’ajuster à la coutume du pays pour sceller l’alliance avec les Montagnais et leurs alliés, les Algonquins et les malécites. Il faut souligner que des seize hommes laissés dans le poste de traite fondé par Chauvin en 1600, cinq seulement ont survécu à l’hivernage, secourus par les Montagnais. Les sources ne donnent aucune piste si les cinq hommes ont été adoptés ou s’ils ont joué le rôle de truchements pour les Montagnais. À son retour en France, Champlain ramène six autochtones en septembre 1603. Champlain ramène le fils d’un chef montagnais ou algonquin, un  homme de l’Acadie, une femme iroquoise, prisonnière, ainsi que trois Canadiens (probablement des Micmac), dont une femme et deux enfants. (Champlain, Des Sauvages, 1603, facsimilé 1978, chapitre XIII, p. 36; Thierry, 2008, 105). Ce don de personnes engage les parties à l’alliance. Dans cette circulation des personnes et des produits, se scellent et se confirment des alliances sur lesquelles l’économie et le droit des parties se fondent. Celui qui donne s’attend à recevoir en retour; celui qui reçoit et qui accepte de recevoir s’engage à redonner, à rapporter un don équivalent qui confirme cette obligation essentielle à l’échange tant dans la culture autochtone que pour le roi de France: donner aux Français ses enfants, ses femmes, des prisonniers, les recevoir pour les ramener au roi de France, voilà qui engage la France à redonner en retour afin de respecter l’alliance. Donner, recevoir et rendre, voilà le cycle incontournable de la dynamique de l’échange dans lequel l’alliance de 1603 se déroule. (Mauss, 1950)

Champlain rapporte en 1629, lors de la prise de Québec par les Anglais, que les Indiens alliés des Français lui ont offert deux jeunes filles pour aller en France. Les Indiens semblent hésiter à confirmer ce don puisque les Français ne pourront plus ramener les filles au pays après leur séjour en Europe. Champlain se sert de cet incident pour montrer sa position d’intercolocuteur privilégié auprès du conseil de ses alliés. Il rappelle que le tout doit se faire en accord avec les parties. Il répète : « … en vous demandant permission d’emmener ces filles que j’ayme comme si elles estaient miennes, vous me permettrez que je parle pour ces pauvres innocentes qui m’ont été données par les sauvages assemblez en Conseil, sans que je les aye demandez, mais au contraire comme forcé avec le consentement des filles et des parents,  à telle condition que j’en disposerois à ma volonté, pour les instruire en notre foy, comme si c’estaient mes enfants, ce que j’ay fait depuis deux ans le tout pour l’amour de Dieu… » (Champlain, 1973, III, p. 1254-1255) En fait Champlain semble avoir adopté les deux filles qui lui « avaient esté données de la bonne volonté, sans esperance autre que de nostre amitié… » (p. 1258) Mais, ultimement les alliés veulent le retour des jeunes filles auprès de leur famille. Même si Champlain envisage de « contenter les sauvages par présent », et malgré qu’il envisage l’enlèvement, il se résigne à retourner les deux jeunes filles en prenant soin de dénoncer le truchement Nicolas Marsolet qui a agi en faveur des Anglais dans ces pourparlers.

Il faut souligner que depuis la première rencontre luso-amérindienne au Brésil, il y a eu plusieurs cas d’adoption. Les sources portugaises et françaises sont riches en exemples de Portugais et Français adoptés par les Indiens. Le truchement Diogo Alvarez, plus connu sous le nom de Caramuru, a été un des principaux anneaux de l’alliance luso-tupi. Adopté lui aussi, Caramuru a renforcé son lien avec les Indiens à travers son mariage. Lui aussi a voyagé en Europe et il a eu même l’occasion de visiter Paris avec son épouse indienne Paraguaçu[31]

Le nombre de Français adoptés par les Tupinambás a été remarquable à l’époque de la fondation de la France Antarctique. Même le récit d’un mercenaire allemand, Hans Staden (1557), lors de sa captivité chez les Tupinambás, nous informe sur un Français qui habitait parmi les Tupinambás. Plusieurs Français adoptés par les Tupinambás ou simplement alliés ont participé aux « petites guerres » menées contre les Portugais à la moitié du XVIe siècle. Les sources portugaises décrivent ces Français et ces métis qui participent aux festins anthropophages et qui parfois sont « plus barbares que les sauvages ».

Pour la France Équinoxiale, le français des Vaux a joué un rôle décisif pour sceller l’alliance franco-amérindienne. Selon Claude d’Abbeville (1975, p.22), des Vaux s’est rendu au Brésil avec le capitaine Riffault en 1594. [32] Le capitaine français avait déjà de bonnes relations avec un Principal, appelé Uirapive. Mais un désaccord entre les Français de son équipage et le naufrage d’un de ses trois vaisseaux ont obligé Riffaut à retourner en France avec seulement quelques membres de son équipage. Toujours selon le récit d’Abbeville, des Vaux et d’autres Français qui sont restés au Brésil ont appris la langue du pays et se sont battus, épaulés par les Tupinambas, contre leurs ennemis. L’expérience en région et le prestige guerrier de des Vaux auprès des Indiens ont aussi été mentionnés par d’Abbeville. Lors de son retour en France, des Vaux prône auprès du roi Henri IV la colonisation française de l’île du Maragnan et des terres circonvoisines. Rassuré par le récit de des Vaux, le roi ordonne à La Ravardière d’entreprendre un voyage au Brésil. Après six mois au nord du Brésil, La Ravardière retourne en France pour ratifier le roi de toutes les choses dites par des Vaux. La mort d’Henri IV a retardé néanmoins le nouveau départ de La Ravardière. En 1611, La Ravardière et son associé Rasilly ont été nommés lieutenants de la France Équinoxiale par la reine Marie de Médicis. Avec quatre capucins et de nombreux Français (parmi eux des Vaux), La Ravardière et Rasilly se sont lancés dans l’entreprise coloniale au nord du Brésil. En dépit de la courte vie de la France Équinoxiale, il faut souligner que les Français fréquentaient déjà depuis environ 40 ans le nord du Brésil et la circulation et l’adoption de personnes comme des Vaux ont été préalables à la colonisation. [33]

Le séjour des morubixabas ou de leurs fils en France avait pour but de sceller ou de consolider les alliances. D’ailleurs la paix entre les groupes Tupinambá et Tabajara sous la médiation française démontre la réussite de la politique indigéniste sous la France Équinoxiale. Yves d’Evreux (1985, p. 130-131) nous fait savoir que le morubixaba de Caïetes, Grand-Raie, « était autrefois venu en France, dans un navire de Saint-Malo, et y avait séjourné l’espace d’un an ou environ. En si peu de temps, il avait appris à parler français, si bien qu’encore aujourd’hui il se fait entendre des Français quoiqu’il y ait bien des années qu’il soit de retour. » Le capucin fait aussi référence à une l’alliance potentielle avec le Principal d’une « grande nation des Canibaliers », appelé Grand Diable. Selon d’Evreux (1985, p137), « c’est chose assurée que si les Français ont du bon en ces pays-là, il trahira les Portugais et se joindra aux Français, car on tient qu’il est mulâtre français, c’est-à-dire né d’un Français et d’une Indienne. »

Dans la France Antarctique et dans la France Equinoxiale, il y a eu aussi plusieurs adoptions des jeunes indiens. André Thevet, Jean de Léry, Claude d’Abbeville et Yves d’Evreux font références à des jeunes garçons, dans la plupart des cas, dont les parents voulaient qu’ils deviennent « caraïbes » et pour cela, les confiaient aux religieux des deux colonies françaises au Brésil. Plusieurs jeunes hommes convertis au christianisme sont allés en France selon les sources référées ci-dessus. Il va sans dire que les pratiques de plusieurs chefs indiens d´autoriser le séjour en France de quelques uns de leurs et de donner des enfants aux  Français, notamment aux prêtres, s´inscrivaient dans la logique de s´emparer d´une connaissance “magique” dont le pouvoir été convoité par les chefs indiens. Dans les ouvrages de Claude d´Abbeville et Yves d´Evreux, on trouve plusieurs exemples d’Indiens qui voulaient devenir “caraïbes” ou s’assurer que leurs enfants le deviennent. Si la circulation de personnes a contribué pour augmenter la connaissance européenne sur le Nouveau Monde, elle n´était pas sans avantage réciproque pour les Amérindiens désireux de mieux leurs alliés.

Conclusion

Jusqu’au début du XVIIe siècle les relations interculturelles entre Français et Indiens du Brésil ont été plus régulières et moins instables que celles entre Français et Indiens au Canada. Cependant, l’entreprise coloniale française au Brésil n’a pas eu le même avenir que celle au Canada. Les alliances franco-amérindiennes au Brésil n’ont pas empêché l’échec de la France Antarctique (1550-1600) et de la France Équinoxiale (1612-1617). L’échec de deux projets de colonisation française au Brésil ne veut pas dire que le troc a été sans importance. Les Français avaient des comptoirs très rentables dans les littoraux de l’Atlantique sud et un commerce interlope a eu lieu à défaut d’une colonisation durable au Brésil.

Malgré l’expérience brésilienne, et notamment celle des Normands qui fréquentaient la côte atlantique du Brésil depuis le début du XVIe siècle, Jacques Cartier a commis des erreurs diplomatiques lors de ses voyages au Canada. Par la série de fautes commises par le capitaine malouin on peut se douter de son intérêt à sceller des alliances avec les Amérindiens de Stadaconé et Hochelaga. Les enlèvements pratiqués par Cartier ont rendu plus difficiles les relations des Français qui ont pris la relève de l’entreprise coloniale au Canada. L’enlèvement se faisait aussi parmi les Amérindiens et le sort des enlevés parmi eux laissait craindre pour le sort de leurs proches enlevés par les Français. La circulation plus ou moins volontaire des personnes a permis cependant une connaissance réciproque plus profonde et des alliances ont pu être scellées, malgré le sort de quelques malheureux pris en otage.

La circulation des personnes était devenu une coutume dans les relations franco-amérindiennes. S’il y avait des Amérindiens qui séjournaient en France, nombreux sont les Français qui habitaient volontiers parmi eux au Brésil du XVIe siècle. En demeurant parmi les Indiens, les Français étaient, en général, adoptés. Il n’était pas rare de les voir aussi enlevés par les Amérindiens au Canada du XVIIe siècle. En fait, les Amérindiens étaient habitués à faire des razzias contre leurs ennemis. [34] Pour cela, l’avenir des comptoirs français et de la colonisation du Canada passait plutôt par les alliances. Les alliances franco-amérindiennes au Brésil et au Canada du XVIe et XVIIe siècles ont été scellés dans un contexte où le don et l’adoption étaient des pratiques courantes dans les relations euro-amérindiennes et inter-amérindiennes. Si les alliances franco-amérindiennes ont débuté au Brésil, c’est en Nouvelle France que leurs retombées pour la colonisation ont été plus remarquables.

Au Brésil, les Français sont de moins en moins nombreux au cours du XVIIe siècle. L’abandon des projets de conquêtes territoriales au Brésil n’empêche pas la France d’envisager une pénétration commerciale en Amérique portugaise. Les négociations du chevalier de Chavigny (1740-1748) et la vaine poursuite du traité de commerce franco-portugais (1752-1774) démontre que la diplomatie française ne s’intéressa qu’assez peu au Brésil et que le négoce français dut se contenter d’un commerce interlope dans la riche colonie portugaise (Labourdette, 1989, p.270). Non seulement pour l’or, le Brésil est devenu très rentable pour la traite d’esclaves dont les négriers nantais seront impliqués et feront de grands profits à partir du XVIIIe siècle. [35] Après l’échec de la France Équinoxiale, les alliances franco-amérindiennes au Brésil ne sont plus renouvelées. Cependant l’accession de la France au traité du Pardo (1783) faisait espérer une ouverture du Brésil au commerce français, notamment pour le profit des négriers. En réalité, la circulation des personnes dans l’espace atlantique est devenue une composante de la modernité.

Les contextes des alliances franco-amérindiennes au Nouveau Monde ont été variés dans le temps et dans l’espace, résultantt des particularités culturelles de leurs protagonistes (Normands ou Bretons, Catholiques ou Huguenots, Iroquois ou Tupinambas...). Ainsi, la circulation des personnes s’inscrivait dans l’univers symbolique européen et amérindien depuis les premières rencontres de ces univers symboliques et parfois préalables à quelques alliances franco-amérindiennes au Brésil et au Canada.

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* Les auteurs remercient le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH, 2004-2008) ainsi que le Comité de Perfectionnement long de l’Université du Québec à Chicoutimi (CLI) pour leur soutien de recherche. Merci à Carl Brisson, géographe au GRH-UQAC et Mathieu D’Avignon, professeur Université d’Ottawa ainsi que M. Guy Simard qui ont apporté leurs suggestions. Pour cet article nous traiterons seulement de la circulation des personnes dans le cadre des alliances franco-amérindiennes au Brésil et au Canada. Nous rappelons que les relations interculturelles dont les Français étaient protagonistes concernent une géographie plus vaste dans le continent américain. La colonisation française en Floride (1562-1565) et d’autres expériences franco-amérindiennes dans les îles du Caraïbe et en Guyane aux XVIIe et XVIIIe siècles en sont quelques exemples.

[1] Cf. Perrone-Moysés, 1995, p. 24.

[2] Plusieurs discours et harangues sont documentés dans les ouvrages des capucins Claude Abbeville et Yves d’Evreux.

[3] Dans la lettre de Pero Vaz de Caminha, nombreux sont les indices qui démontrent qu’ils ont entamé un premier contact avec les Amérindiens dans un cadre de connaissance empirique construit pendant leurs voyages précédents en Afrique.

[4] Pour un étude comparative entre la lettre de Caminha et la relation de Gonneville, cf. Perrone-Moysés (1995, p.183 ss.)

[5] Il faut  dire aussi que les alliances en Afrique et en Amérique ont joué un rôle important dans les stratégies géopolitiques des Européens, notamment dans leurs alliances intra-européennes.

[6] Il s’agit de la « leyenda negra » anti-espagnole, tirée par le parti huguenot, des écrits du Dominicain Bartolomé de Las Casas et d’autres dénoncent les horreurs commises par les Espagnols, notamment le Discours de l’histoire de Le Challeux, témoin oculaire des massacres de la Floride en 1565. Il va sans dire que la destruction de la colonie huguenote de Floride par les soldats de Pero Menendez de Avilés, envoyé du roi d’Espagne Phillipe II, et l’égorgement des colons huguenots ont suscité une certaine indignation dans les pays protestants. Mais l’affaire n’a entraîné aucune riposte française.

[7] Dans les lettres envoyées au roi d’Espagne, Cortés (1996, p. 74) montre l’importance des alliances sur la route qui mène vers Mexico. Dans sa deuxième lettre du 30 octobre 1520, Cortés souligne l’importance des alliés dans la pacification de plus de 50 villages qui regroupent plus de 50 000 hommes de guerre qu’il s’engage à traiter avec bienveillance. L’alliance avec les Tlaxcaltèques semble avoir perduré (Cortés, 1996, p. 10). La circulation des personnes, dont les caciques et les femmes semblent aussi s’inscrire dans un processus d’échange qui favorise des alliances. Pensons ici au rôle primordial de Dona Marina qui agira comme interprète, diplomate, et vivra avec Cortés après son baptême. (Cortés, 1996, p. 31) Le roi d’Espagne peut être considéré comme fiduciaire en créant en 1516 le Protectorio de Indios (Protecteur des Indiens) qui vise à protéger les Indiens et leurs territoires. Sur cette question, ainsi que sur les détournement de cette politique, voir, Cuena Boy, Francisco, 1998, Utilizacion pragmàtica del derecho romano en dos memoriales indianos del siglo XVII sobre el Protector de Indios,  Revista de estudios historico-juridicos,  n. 20, Valparaiso, Ediciones Universitarias de Valparaíso, Pontificia Universidad Católica de Valparaíso, Chili. (version en ligne, janvier 2006); sur les territoires indiens au Mexique, Diego de Encinas, 1596 et Hanns J. Prem, “La extension del dominio Mexica ,” dans Constanza Vega Sosa, coordinadora, 2000, Codices y Documentos sobre México, Instituto Nacional de Antropologia e Historia, Mexico, D.F. Primera Edicion.

[8] La France Antarctique est devenue vulnérable, car  son commandant Villegagnon a choisi l’isolement plutôt que de se joindre à d’autres Français sur le continent, truchements, marchands et métis, qui avaient une alliance avec la confédération des Tamoios. Selon Frank Lestringant, (1999) la crise interne entre calvinistes et papistes au sein de la communauté française est aussi très importante pour comprendre la débâcle de la France Antarctique. Si quelques Français ont su garder une alliance franco-amérindienne au Brésil, d’autres n’ont pas su tenir à bon terme une alliance entre calvinistes et papistes. Contrairement aux Français du continent, les colons français de Villegagnon ont préféré être « isolés » ce qui a mis en péril la France Antarctique. Cet isolement nous permet de soutenir la thèse d’un refus de la part de quelques colons d’accepter les Amérindiens comme alliés.

[9] Le voyage d’Esoméricq en France et son parcours biographique ont été étudiés par l’historienne brésilienne Perrone-Moisés (1995). Voir aussi, Leyla Perrone-Moïsés, Le voyage de Gonneville a-t-il vraiment eu lieu ? Colloque international « Voyages et images du Brésil, » Paris, 10 décembre 2003, Table 2. Les récits de conquête et de colonisation. (en ligne).

[10] D’Avignon, Mathieu,  2006, Champlain et les historiens : les figures du père et le mythe de la fondation,  thèse de doctorat, Université Laval. Raymonde Litalien, Denis Vaugeois, dir., 2004, Champlain. La naissance de l’Amérique française, Québec, Septentrion, Paris, Édition du Nouveau Monde, pp. 63-97.

[11] Cf. Catherine Ferland, 2003.

[12] Apud Daher, 2002b.p.98, note 37.

[13] Michel Bideaux, 1986, p. 180; 152-153.

[14] Cf. Alencastro, Luiz Felipe. 2000, p. 256-259; Costa e Silva, Alberto. 2002, p. 424.

[15] Cf. Girard, Camil et Édith Gagné, 1995, pp. 3-14.

[16] Hans Staden, 2005, Carrios alliés des Espagnol, p. 57, p. 127; Tupinambas et Tupinikins, 69, 94 ss. Jean de Léry, 1994, sur les Tupinambas, alliés des Mairs ou Français, p. 154, 189, 211, 335, 412; les Tamoio, p. 159, les co-alliés Oueanen, p. 417. Sur les Kario et les Margaïas, alliés des Peros ou Portugais, p. 147, 154. Lestringant, Frank, 1999, p. 28. Sur les peuples alliés en Floride, l’auteur souligne l’appui des Timucua le 1er mai 1562 (p. 290) et des indiens de Satouriana qui participent avec les Français aux guerres contre les Espagnols (24-27 avril, 1568), p. 294.

[17] Cf. Richard White, 1991, p.25.

[18] Michel Bideaux, 1986, p. 142-143 ss;

[19] Cf. Gordelier, 1997. Voir aussi Alain Montadon, dir., 2004, Le livre de l’hospitalité. Accueil de l’étranger dans l’histoire et les cultures, Paris, Bayard, articles sur le don, Danielle Perrot, « Hospitalité et réciprocité », pp. 47 ss et Anne Gotman, « Marcel Mauss. Une saison sacrée de la vie sociale », p. 61 ss.

[20] Paul Lejeune, 1999, p.83.

[21] Cf. Daher, 2002, p. 100, note 53.

[22] N. E. Dionne, 1891, note 11, liste des armements de navires normands pour les Terres Neuves et le Canada, 1574-1603. Voir aussi Bréard, 1889, 53 ss et Laurier Turgeon, 2004, pp. 108 ss.

[23] Cf. Henry Harrisse, 1968, p. vi et note 4.

[24] Cf. Champlain, 1993, p. 112.

[25] Pour une analyse approfondie, voir Roland Viau, 2000, Femmes de personne, sexe, genres et pouvoirs en Iroquoisie ancienne, Montréal, Boréal.

[26] Au Mexique, Cortés avait déjà montré dans ses relations diffusées en Europe à partir de 1522 que les femmes s’inscrivaient dans les stratégies afférentes aux alliances. La Malinche joue un rôle important dans la vie d’Hernàn Cortés,de qui elle aura un fils. Cortes, 1996, p. 112.

[27] Il s’agit d’une sorte de puce dont la femelle pénètre sous la peau des orteils où elle dépose ses oeufs.

[28] Cf. William Sturtevant, 1988, pp. 293-303.

[29] Cf. Daher, 2002a.

[30] Le récit de plusieurs voyages réalisés par le coureur des bois, Radisson, est riche en exemple de circulation des personnes et du rôle important de l’adoption dans le cadre des alliances interculturelles. Lui-même, aurait été captif chez les Iroquois et adopté par eux. Par la suite Radisson (1999) a fréquenté plusieurs groupes d’Amérindiens. Étant adopté par quelques autres, il a scellé des alliances dont les conséquences n’étaient pas toujours favorable aux intérêts français en Nouvelle France. Il faut souligner qu’il avait aussi fréquenté les Hollandais et les Anglais. Cela démontre que les alliances scellées par des individus comme lui, échappaient parfois au contrôle de la couronne française et des ses commissionnaires en Nouvelle-France. Le Dictionnaire biographique du Canada en ligne : http://www.biographi.ca/FR/

[31] Un autre nom important dans les premières alliances entre Portugais et Amérindiens au début du XVIe siècle est celui de João Ramalho. Il a aussi renforcé ses liens par un mariage qui lui a donné une progéniture fort nombreuse.

[32] On peut se demander si le capitaine Riffault est le même capitaine Jean Ribault. Le Dieppois Jean Ribault et le Breton René de Laudonnière ont prété main forte à l’implantation d’un Refuge huguenot en Floride, entre 1562 et 1565, à l’instigation de l’amiral de Coligny.

[33] D’autres truchements comme le dieppois David Migan ont joué un rôle important pour les alliances franco-amérindiennes. Cf. Daher, 2002b, p.97 note 29.

[34] Les récits de voyage et les nombreux ouvrages apparus au cours du XVIIe siècle sont riches en exemples de captifs français parmi les Amérindiens. La plupart n’ont pas connu la chance de survivre en se faisant adopter comme Pierre-Esprit Radisson (1999).

[35] Cf. Olivier Pétré-Grenouilleau. 1996.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le jeudi 12 septembre 2019 8:03
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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