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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir du texte de Louis Gill, “Nos grèves fondatrices : quatre mois en 1976-1977, mais d’abord trois semaines en 1971.” Un article publié dans la revue SPUQ-info, Bulletin de liaison du Syndicat des professeures et professeurs de l’UQAM, no 272, février 2009, pp. 3-4. [Avec l'autorisation de l'auteur accordée le 7 avril 2009 de diffuser cet article dans Les Classiques des sciences sociales.]

Louis Gill

Professeur au Département des sciences économiques de 1970 à 2001.
Il a occupé diverses fonctions à la direction du SPUQ
au cours de cette période.

Nos grèves fondatrices : quatre mois en 1976-1977,
mais d’abord trois semaines en 1971
”.

Un article publié dans la revue SPUQ-info, Bulletin de liaison du Syndicat des professeures et professeurs de l’UQAM, no 272, février 2009, pp. 3-4.

La grève actuelle incite tout naturellement à évoquer la célèbre grève victorieuse de quatre mois qui a eu lieu du 17 octobre 1976 au 17 février 1977, la plus longue jamais menée par des professeurs d’université en Amérique du Nord. Plusieurs y voient une source de fierté et d’inspiration, ainsi que l’origine de notre convention collective actuelle. De par son ampleur et sa notoriété, cette grève historique laisse malheureusement dans l’oubli celle qui a eu lieu cinq ans plus tôt, du 13 octobre au 2 novembre 1971, au terme de laquelle nous avons signé notre première convention collective.

La grève de 1971

C’est cette grève de trois semaines qui nous a donné tous les fondements de la convention collective actuelle : autonomie de l’assemblée départementale en matière d’embauche, d’évaluation et de répartition des tâches, charge maximale de quatre cours de trois crédits par année, pouvoir décisif sur l’orientation de l’enseignement et la recherche par une représentation professorale et étudiante majoritaire à la Commission des études, acquisition de la permanence au terme de deux contrats de deux ans, sécurité d’emploi, garantie de liberté académique et politique et de non-discrimination, etc. Cette convention collective a été l’épine dorsale des conventions collectives des autres constituantes de l’Université du Québec et une référence incontournable pour les autres universités au Québec où elle a aussi exercé une influence déterminante sur le mouvement de syndicalisation. Nous l’avons améliorée substantiellement par la suite au fil des années tout comme nous avons subi certains reculs, l’administration revenant sans cesse à la charge pour tenter de nous les imposer.

La plus formidable offensive en ce sens est incontestablement celle qui a été lancée en 1974 à l’enseigne de la « Réforme Després ». Cette réforme, identifiée à son concepteur le président de l’UQ Robert Després, nommé à cette fonction par le premier ministre libéral Robert Bourassa pour « mettre de l’ordre » à l’université, était un véritable coup de force qui remettait en question tout l’édifice de l’université démocratique et collégiale créée en 1968, dont nous avions consigné les garanties dans notre convention collective. On ne peut s’empêcher d’y voir des liens de parenté évidents avec l’opération en cours aujourd’hui au compte d’une prétendue meilleure gouvernance de l’université.

La grève de 1976-1977

La bataille pour la négociation de notre troisième convention collective en 1976 devenait donc une bataille non seulement pour préserver les acquis des deux conventions précédentes, celles de 1971 et de 1973, et les améliorer, mais une bataille dont le principal enjeu était la défense de l’université publique démocratique et collégiale qui était directement menacée. Le défi était de taille et la longue lutte que nous avons dû livrer a été à sa hauteur. Aussi, devons nous considérer la grève de 1976-1977 comme une grève qui a été d’abord défensive, menée à l’enseigne du mot d’ordre « Le coup de force ne passera pas ! ». Au terme d’une lutte sans relâche au cours de laquelle la menace de fermeture de l’université était omniprésente, la « Réforme Després » a finalement été retirée. Nous pouvions dire, le 17 février 1977 : « Le coup de force n’a pas passé ! ». Tirant les conclusions de leur échec, le recteur de l’UQAM, Maurice Brossard, et le président de l’UQ, Robert Després, présentaient peu après leur démission.

Les gains de la grande grève

La grève de quatre mois nous a donc permis de préserver l’ensemble de nos acquis, mais elle nous a aussi apporté des gains substantiels. Nous avons obtenu des augmentations de salaires de 32 % pour la première année, 8 % pour la deuxième et 6 % pour la troisième avec un seuil de déclenchement de l’indexation au coût de la vie à 6 %. Ces augmentations étaient comparables à celles qu’avaient obtenues le Front Commun des secteurs public et parapublic. Comme on le voit, c’était une autre époque. Nous avons aussi obtenu la base de notre régime actuel de congés sabbatiques accessibles à tous et à toutes sur un pied d’égalité, aux seules fins du ressourcement personnel. Et nous avons surtout obtenu ce gain majeur qu’était une formule d’ouverture de postes de professeurs réguliers destinée à réduire progressivement la proportion des cours donnés en appoint par des chargés de cours, de manière à faire reporter sur un corps professoral régulier et stable la majeure partie de l’enseignement : un objectif des plus légitimes dans une université normale, que nous poursuivions depuis les débuts de l’UQAM et qui est encore aujourd’hui au centre de nos revendications.

En vertu de cette disposition, le nombre de postes que l’Université avait l’obligation d’ouvrir, mais qu’elle refusait d’ouvrir, s’élevait cinq ans plus tard, en 1982, à 383. Le bien fondé de la contestation par le SPUQ de cette violation de la convention collective a été affirmé en arbitrage et par les tribunaux supérieurs qui ont ordonné à l’UQAM de procéder à l’ouverture des postes. Mais cela est survenu dans la conjoncture des années 1982-1983 qui ont vu le gouvernement de René Lévesque procéder à des attaques d’une rare férocité contre les syndicats des secteurs public et parapublic, avec des réductions de salaires de 30 % sur trois mois et une désindexation de 3 % des régimes de retraite. Dans le cadre du renouvellement de sa convention collective, le SPUQ a alors, dans ce contexte, abandonné sa clause d’ouverture de postes et concédé les 383 postes dont l’ouverture avait été ordonnée par les tribunaux. Triste dénouement.

Une grève illégale de 24 heures, le 11 mai 1972

Pour compléter ce tour d’horizon de l’activité gréviste passée du SPUQ, il faut mentionner sa grève illégale de 24 heures du 11 mai 1972 en appui à la grève générale déclenchée par les 200 000 syndiqués des secteurs public et parapublic à la suite de l’emprisonnement des dirigeants des trois grandes centrales syndicales, Louis Laberge de la FTQ, Marcel Pepin de la CSN et Yvon Charbonneau de la CEQ. Cette grève générale avait largement débordé le secteur public et couvert l’ensemble du Québec, prenant dans certaines régions une dimension quasi insurrectionnelle avec la prise de contrôle temporaire du pouvoir local par les travailleurs dans certaines villes, dont Sept-Îles. Il va sans dire que ce débrayage illégal du SPUQ n’avait rien à voir avec sa convention collective, mais tout à voir avec la solidarité syndicale dans une riposte unitaire sans précédent à la répression gouvernementale.

En 1971, Claude Corbo gréviste

Enfin, il est utile de savoir que notre recteur Claude Corbo a, dans une autre vie, été un défenseur des revendications historiques du SPUQ. Il était en 1971 membre de l’Exécutif du syndicat au sein duquel il occupait le poste de secrétaire et avait été désigné responsable de la préparation d’un « Dossier noir de la mal-administration ». Il avait été partie prenante de la recommandation unanime de l’Exécutif de déclencher la grève et avait de manière responsable participé au piquetage. Serait-il trop optimiste de souhaiter que ces vieilles racines puissent être aujourd’hui le gage d’une attitude favorable à l’égard de revendications qu’il a un jour défendues y compris par le recours ultime à la grève ?



Retour au texte de l'auteur: Louis Gill, économiste québécois, retraité de l'UQAM Dernière mise à jour de cette page le mardi 14 avril 2009 14:01
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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