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Collection « Les sciences sociales contemporaines »


Une édition électronique réalisée à partir du texte de Louis Gill, “Le ministre Flaherty et la dette fédérale. Mirages d’élimination et gaspillage de ressources”, Le Devoir, 7 décembre 2006, p. A6 - idées. [Avec l'autorisation de l'auteur accordée le 6 février 2007.]
“Le ministre Flaherty et la dette fédérale.
Mirages d'élimination et gaspillage de ressources.”

par Louis Gill, économiste, retraité du département de sciences économiques, UQAM.
décembre 2006

Dans sa Mise à jour économique et financière présentée le 23 novembre dernier, le ministre fédéral des Finances, James Flaherty, a annoncé l’intention du gouvernement d’éliminer la dette nette (passifs diminués des actifs) de l’ensemble des administrations publiques du Canada (fédérale, provinciales, territoriales et locales) en 15 ans, d’ici 2021. La mesure de la dette nette qu’emploie le ministre pour faire ses prévisions est celle qu’utilise l’OCDE à des fins de comparaisons internationales. Cette mesure exclut du calcul de la dette totale les engagements des gouvernements envers les régimes de retraite de leurs employés et tient compte de tous les actifs financiers de tous les niveaux de gouvernement au Canada, y compris ceux du Régime de pension du Canada (RPC) et du Régime des rentes du Québec (RRQ). En 2021, selon les prévisions du ministre, la composante fédérale de la dette nette représentera 11 % du Produit intérieur brut (PIB) et les composantes provinciales, territoriales et locales combinées, 4 % du PIB, pour un total de 15% (p. 35 du document Avantage Canada annexé à la Mise à jour). Au même moment, les actifs du RPC et du RRQ, dont les estimations actuarielles prévoient qu’ils quadrupleront en 15 ans pour atteindre 420 milliards, représenteront 16 % du PIB. Il s’ensuivrait donc que la dette nette de l’ensemble des administrations publiques serait non seulement éliminée en 2021, mais que nous disposerions alors d’un excédent des actifs sur les passifs de 1 % du PIB (16 % - 15 %). Voilà une présentation tout aussi nouvelle qu’inattendue du problème de la dette publique, qui tend à banaliser son ampleur jusqu’ici mise en exergue ainsi que la nécessité présentée comme incontournable de sa réduction prioritaire en y affectant tous les surplus budgétaires. 

Retombant aussitôt sur ses pieds, M. Flaherty a par ailleurs annoncé, dans des termes auxquels on est davantage habitués, qu’il ramènera la portion de la dette fédérale nette représentant les déficits cumulés (incluant les engagements envers les régimes de retraite) de son niveau actuel de 482 milliards ou 35 % du PIB, à 25 % du PIB d’ici six ans, soit en 2012-2013, et qu’il utilisera à cette fin tous les surplus budgétaires annuels. Or, un simple calcul permet de vérifier que la seule croissance du PIB réel à un taux annuel réaliste de 2,5 % accompagnée d’une inflation annuelle de 2 % permettra d’atteindre cet objectif sans aucun remboursement. Même en supposant que la croissance du PIB réel diminuerait au cours des années suivantes, à un taux annuel moyen de 2 % par exemple, le rapport de la dette au PIB, sans aucun remboursement, ne serait plus que de 10,5 % dans 30 ans ; il serait à peine supérieur, soit 11 %, si le taux de croissance du PIB réel n’était que de 1,7 %. Relativement à sa valeur actuelle de 35 %, ce rapport serait ainsi divisé par 3,5. Il en serait de même du rapport du service annuel de la dette au PIB dans l’hypothèse où le taux d’intérêt n’augmenterait pas substantiellement. À moins d’une baisse radicale des revenus budgétaires, la marge de manœuvre du gouvernement serait ainsi rétablie, sans le coût prohibitif du remboursement. 

Pour prendre la mesure de ce coût, on vérifie facilement qu’à un taux d’intérêt de 6,5 %, les économies annuelles de frais d’intérêt découlant de la réduction de la dette seraient inférieures au coût annuel de cette réduction pendant les 15 prochaines années. En supposant que le remboursement annuel serait de 3 milliards comme l’annonce le ministre, le montant cumulatif de ces économies sur 15 ans ne serait que de 23 milliards, alors que le coût cumulatif du remboursement serait de 45 milliards, c’est-à-dire 22 milliards de plus. Et il faudrait 15 autres années pour que l’économie cumulative rejoigne le coût cumulatif, au montant de 90 milliards. Par surcroît, le service de la dette, qui est de 31 milliards actuellement, serait à peine réduit, à 28 milliards dans 15 ans et 25 milliards dans 30 ans. Par contre, comme nous venons de le voir, la seule croissance du PIB, sans réduction de la dette, en diminuerait considérablement le poids relatif par rapport au PIB. 

Au lieu de gaspiller en pure perte des sommes colossales dans la réduction d’une dette dont le poids relatif diminue de lui-même avec la croissance du PIB, le ministre serait mieux avisé de diriger ses surplus vers de meilleurs usages, comme le renflouement de la caisse d’assurance-emploi qui a été pillée de quelque 50 milliards au cours de la dernière décennie, ainsi que vers le règlement du déséquilibre fiscal, les dépenses sociales et les infrastructures, tant pour le bénéfice des générations futures que pour celui de la génération actuelle.


Retour au texte de l'auteur: Louis Gill, économiste québécois, retraité de l'UQAM Dernière mise à jour de cette page le lundi 12 février 2007 16:06
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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