RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir du texte de Louis Gill, “Dette du Québec. Réplique à Claude Picher.” Montréal, le 28 décembre 2009. Réplique parue dans La Presse du 7 janvier 2010 en page A18 à la critique faite par Claude Picher le 26 décembre 2009 sous le titre: «La dette, un faux épouvantail ?» de l'article de l'auteur (Louis Gill) parue le 22 décembre 2009 dans La Presse. [Texte diffusé dans Les Classiques des sciences sociales avec l'autorisation de l'auteur accordée le 19 février 2010.]

Louis Gill

Dette du Québec. Réplique à Claude Picher”.

Montréal, 28 décembre 2009. Réplique [parue dans le journal La Presse, Montréal, le 7 janvier 2010 en page A18], à la critique faite par Claude Picher [parue dans La Presse du 26 décembre 2009 sous le titre : “La dette, un faux épouvantail ?”] de l’article de l’auteur parue  dans La Presse du 22 décembre 2009 sous le titre : “Exorbitante, la dette du Québec ?”


Dans La Presse du 22 décembre (P. A23), j’ai comparé la dette du gouvernement du Québec contractée sur les marchés ou « dette directe » (41 % du PIB en 2009, 45 % en 2010) à celle, beaucoup plus élevée, du gouvernement des États-Unis (60 % du PIB en 2009, 70 % en 2010). Dans l’édition du 26 décembre, le journaliste Claude Picher estime qu’il est « téméraire » de se limiter à cette mesure de la dette et qu’il faut ajouter à la dette du gouvernement celles d’Hydro-Québec, des commissions scolaires, des municipalités, des hôpitaux et des universités, ainsi que les engagements de l’État envers ses futurs retraités et la part du Québec dans la dette du gouvernement du Canada, ce qui porterait la dette du Québec à 108 % du PIB en 2009.

Cette mesure de la dette que Claude Picher propose est une extension abusive du concept de dette (brute et nette) de l’ensemble des administrations publiques, utilisé par les organismes internationaux comme l’OCDE et le FMI pour comparer l’endettement des divers pays. Ce concept comprend les diverses composantes mentionnées par Claude Picher, mais exclut les sociétés d’État comme Hydro-Québec, ainsi que les engagements envers les régimes de retraite du secteur public, parce que certains pays les comptabilisent et d’autres pas.

Ainsi calculée de manière à comparer des comparables, la dette brute de l’ensemble des administrations publiques du Québec représente 70 % du PIB en 2009 plutôt que les 108 % calculés par Claude Picher. Ce chiffre est significativement inférieur à la moyenne des trente pays membres de l’OCDE qui est établie par cet organisme ainsi que par le FMI à plus de 90 % du PIB en 2009 et à plus de 100 % pour 2010. Sous cet aspect comme sous celui de la dette directe, on vérifie donc que la situation du Québec n’a rien du caractère exorbitant que certains souhaitent lui attribuer.

Il est par ailleurs pour le moins étonnant de voir Claude Picher présenter les États des États-Unis et particulièrement la Californie comme étant en bien meilleure santé financière que le Québec alors qu’on sait très bien que cet État et plusieurs autres traversent en ce moment des crises financières sans précédent qui les placent dans des situations de quasi faillite et les acculent à un véritable saccage de leurs services publics. Il est désolant de constater à quels glissements peut mener l’admiration béate d’un tandem d’« experts indépendants ».




Claude Picher

“La dette, un faux épouvantail ?”


Montréal, La Presse, le 26 décembre 2009.
Claude Picher.

En pleines négociations avec le gouvernement, les syndicats de la fonction publique essaient de répandre, par les temps qui courent, l'idée que la dette publique québécoise n'est pas aussi grave qu'on pourrait le croire.

Ça tombe mal. Quatre économistes de grande réputation (Pierre Fortin, Robert Gagné, Luc Godbout et Claude Montmarquette) viennent de déposer un rapport qui qualifie la dette d'exorbitante.

Cette semaine, dans les pages Forum de La Presse, l'économiste Louis Gill accuse les quatre auteurs d'agiter «l'épouvantail d'une catastrophe imminente». Selon lui, il s'agirait de camoufler «une volonté de demander aux moins nantis de contribuer davantage sans toucher aux privilèges existants», rien de moins.

Qu'en est-il? La dette est-elle ou un problème grave, comme le soutiennent une vaste majorité d'économistes, ou un faux épouvantail ?

Voyons donc quel est le raisonnement de Louis Gill.

La dette du gouvernement québécois est de 125 milliards. Cela représente 41% du produit intérieur brut (PIB). Aux États-Unis, le chiffre équivalant est de 8500 milliards et représente 60% du PIB. Compte tenu de leur capacité de payer, les Québécois sont donc beaucoup moins endettés que les Américains, et l'écart a des chances de se creuser davantage au cours des prochaines années. En 2011, en effet, la dette québécoise atteindra 45% du PIB, contre 70% aux États-Unis. De quoi se plaint-on ?

Le chiffre de 125 milliards mesure la dette directe, celle qui est inscrite dans les documents budgétaires et que le gouvernement doit financer sur les marchés. C'est aussi le chiffre qui sert pour les comparaisons interprovinciales.

Or, il est hautement téméraire de se limiter à ce chiffre, qui ne comprend pas la dette d'Hydro-Québec, ni les dettes des commissions scolaires, des municipalités, des hôpitaux, des universités, ni les engagements de l'État à l'égard de ses futurs retraités. Certes, le gouvernement n'a pas à financer directement toutes ces dettes. Ce n'est pas une raison pour faire comme si elles n'existent pas. Au total, si on tient compte de l'ensemble de ces engagements, la dette publique québécoise atteint 214 milliards. On vient de passer à 68% du PIB.

Mais la plus grosse erreur de M. Gill est de dresser sa comparaison avec les États-Unis comme si le Québec était un pays souverain.

Les Québécois font partie du Canada et, à ce titre, doivent assumer leur part de la dette fédérale de 535 milliards, ou 16 000 dollars par citoyen canadien. Pour le Québec, cela représente 123 milliards. On est rendus à 108% du PIB.

Pour être juste, il fait aussi tenir compte de la dette publique totale des États-Unis, qui dépasse largement le chiffre de 8500 milliards que nous venons de voir. Il faut aussi ajouter, comme on l'a fait dans le cas du Québec, les dettes des États, des municipalités, comtés, commissions scolaires et autres instances. Il y en a pour 1000 milliards. Les États américains sont beaucoup moins endettés que les provinces canadiennes. La Californie, par exemple, a une dette directe de 122 milliards, à peu près la même que le Québec (pour une population cinq fois supérieure). La Virginie, dont la population est comparable à celle du Québec, a une dette de 22 milliards. Il faut aussi ajouter les déficits actuariels des caisses de retraite et de la sécurité sociale, 2800 milliards. On en arrive ainsi à une dette publique totale de 12 300 milliards, ou 87% du PIB.

En tenant compte de l'endettement public total, les Québécois sont donc plus endettés que les Américains.

En évoquant le «lourd endettement» des États-Unis, M. Gill ajoute que «tous les pays industrialisés sont dans la même situation». Tous, vraiment? Nous avons vu que la dette directe américaine représentait 60% du PIB. Voici, selon le plus récent classement du CIA World Factbook (dont les chiffres recoupent dans les grandes lignes ceux de l'OCDE, mais avec l'avantage d'être plus récents), voici donc la liste des pays dont la dette directe est inférieure à ce pourcentage: Australie, Autriche, Espagne, Finlande, Irlande, Islande, Luxembourg, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Suisse, Taiwan.

Mais au-delà de ces comparaisons internationales, le fait est que l'ampleur de la dette publique québécoise n'a rien d'un faux épouvantail. Elle est, comme le soulignent avec justesse MM. Fortin, Gagné, Godbout et Montmarquette, exorbitante, et cela, c'est la réalité.


Retour au texte de l'auteur: Louis Gill, économiste québécois, retraité de l'UQAM Dernière mise à jour de cette page le jeudi 25 février 2010 19:05
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref