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Collection « Les sciences sociales contemporaines »
Une édition électronique réalisée à partir du livre de Thierry Gaudin, L’ÉCOUTE DES SILENCES. Les institutions contre l’innovation. Paris: Union générale d’Éditions, 10-18, 1978, 284 pp. Collection Inédit, série, 7, no 1289. [Autorisation accordée par l'auteur le 20 septembre 2004 de diffuser ce livre.] Présentation de l'auteur
L'innovation : réalisation de l'improbable. Voilà donc plus de six ans que je suis censé construire une politique de l'innovation ; six ans déjà, pour cette tâche ambiguë. Avec le temps, le concept d'innovation, au lieu de se meubler de connaissances et de certitudes, me remplissait au contraire de doutes, creusait constamment l'écart entre ce qui est et ce qui est dit. Étant alors arrivé, à force de douter, au point où il devient difficile de se faire comprendre, j'ai résolu de rédiger ce que j'ai vu, à travers l'innovation, avec l'espoir de raccourcir le chemin de ceux qui ne peuvent se satisfaire d'apparences, au risque de perturber le confort de quelques autres. J'aborde en effet l'innovation à l'envers, en disant les idées et les actes naissent de l'espoir d'être entendus. Ce n'est pas de leur production qu'il s'agit, mais de l'écoute qu'ils rencontrent. Que peut-on savoir de cette écoute qui, non seulement accepte ou rejette, mais aussi inspire l'innovateur et en quelque sorte, parle à travers lui ? Peu de choses car, le plus souvent silencieuse, elle n'apparaît que par bribes, en réaction, concernée au demeurant à la fois par le réel, le possible et les enjeux du futur. L'expérience montre que si l'on demande à l'industrie d'aller dans la lune, elle le fait, tandis que si on lui demande de dépolluer elle ne le fait pas, ou ne s'y résigne qu'en ronchonnant, comme l'enfant qu'on oblige à ranger, bien que ce soit possible, souhaité et reconnu. Car ce ne sont pas les obstacles techniques qui empêchent les projets des hommes, mais le comportement des institutions, entreprises, administrations, associations ou autres. Celles-ci sont des êtres vivants, ont leur propre vision du monde, elles habitent l'humanité, mais échappent à la volonté des humains. Elles sont donc au centre de l'analyse, d'autant que, en s'analysant elles-mêmes, elles se transforment. Cette écoute silencieuse qui gouverne toute chose à travers les institutions est opportuniste, protéiforme et insondable. Elle n'est pas : elle se transforme. Celui qui joue avec elle peut espérer l'obliger à se dévoiler. Mais il ne pourra ni vraiment la connaître ni la maîtriser. Cependant, sa présence est inévitable. Elle nous imprègne ; elle est là, derrière nous. Ainsi, certain soir, j'ai su que par ma main c'était quelque chose d'autre qui vous écrivait.
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