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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir du livre de Nicole Gagnon, “UN NOUVEAU TYPE DE RELATIONS FAMILIALES.” In ouvrage sous la direction de Fernand Dumont et Jean-Paul Montminy, L’urbanisation de la société canadienne-française, pp. 59-66. Québec: Les Presses de l’Université Laval, 1967, 211 pp. Quatrième colloque de la revue Recherches sociographiques du Département de sociologie et d'anthropologie de l’Université Laval. [Le directeur général des Presses de l’Université Laval, M. Denis Dion, nous a accordé, le 4 juillet 2017, son autorisation de diffuser en libre accès à tous ce livre dans Les Classiques des sciences sociales. ]

[59]

L’urbanisation
de la société canadienne-française.

III. ASPECTS DE LA VIE URBAINE

UN NOUVEAU TYPE
DE RELATIONS FAMILIALES
.”

par
Nicole GAGNON

Les remarques que j'ai à proposer sur le thème de la famille en regard du phénomène d’urbanisation se basent sur trois séries d’entrevues, recherches entreprises au Département de sociologie et d’anthropologie de Laval, l’une par Jocelyne Valois et les deux autres par moi-même. [1]

La première de ces recherches remonte à l’hiver de 1962-1963 ; il s’agit d’une étude exploratoire en vue d’établir un modèle général de la famille ouvrière urbaine québécoise. À cet effet, 72 entrevues ont été recueillies auprès de femmes d’ouvriers de quatre entreprises montréalaises. La seconde recherche, celle de Jocelyne Valois, s’est effectuée dans le quartier Saint-Sauveur de Québec ; 52 familles ont été visitées en 1956-1966. Quant à la dernière recherche, actuellement en cours, il s’agit de 28 familles d’ouvriers des raffineries de pétrole de Montréal que j’ai interviewées au cours de l’automne de 1966.

Première recherche

Pour la première étape de mes recherches, j’ai cherché à construire une typologie de la famille urbaine à partir du critère : relations sociales extra-familiales (structures externes). J'avais établi a priori quatre types logiques, dont deux se sont avérés empiriquement sans intérêt :

a) Famille parentale : famille dont les relations extérieures se situent à l’intérieur du réseau de parenté ;

b) Famille ouverte : famille dont les relations extérieures se situent en dehors du réseau de parenté ;

c) Famille individualiste : famille dont les relations extérieures sont individuelles, i.e. non-familiales ;

d) Famille fermée : famille caractérisée par l’absence de relations extérieures.

[60]

Les types « individualiste » et « fermé », peu nombreux, ont été réduits au type parental ; il n’existe en fait presqu’aucun cas où ne subsiste un minimum de relations de parenté. Par contre, ce type a dû lui-même être subdivisé selon que la famille entretient uniquement des relations de parenté ou bien que les relations de parenté y sont prédominantes. Dans un dernier type, j’ai regroupé tous les cas où les relations de parenté ne sont pas prédominantes.

Nous obtenons ainsi, pour la dimension relations extérieures, trois valeurs :

1° Relations de parenté seulement : famille parentale ;
2° Relations de parenté prédominantes : famille ouverte ;
3° Relations extra-parentales prédominantes : famille sociale. [2]

Pour compléter le modèle, j’ai introduit au moment de l’analyse une seconde dimension : les relations intra-familiales ou systèmes de rôles (structures internes). J’ai pu établir sur cette dimension deux pôles que, m'inspirant de la formule de E. W. Burgess, « from institution to companionship », j’ai dénommés matriarcat et compagnonnage. [3] En effet, le modèle de comportements paraissant offrir certaines caractéristiques de normes institutionnalisées peut se décrire, de façon très large, comme un matriarcat. De fait, il serait plus exact d’utiliser l’expression « organisation matri-centrique ».

Dans les familles classées comme matriarcales, on relève de façon plus ou moins explicite la plupart des traits suivants, par lesquels je définirai le premier type :

1. le rôle attribué au mari réfère essentiellement à l’idée de gagne-pain (e.g. la première qualité d’un mari, c’est qu’« il rapporte son salaire ») ; 2. corrélativement, la femme n’aspire pas au travail extérieur ; 3. l’éducation et le contrôle des finances relèvent de la femme ; 4. le mari n’a pas de rôle domestique précis (« la maison, c’est l’affaire de la femme ») ; 5. par contre, on reconnaît au mari un certain leadership externe : contrôle sur le travail extérieur de la femme (il ne veut pas qu’elle travaille), leadership politique (elle vote comme lui) ; 6. au plan des relations extérieures, importance du lien de la femme à sa mère.

On peut dès lors considérer la famille dite matriarcale comme un modèle institutionnalisé de comportements, structuré par la relation d’échange entre le salaire du mari et le travail domestique de la femme : échange entre l’univers social, représenté par le mari, et l’univers domestique, propriété de la femme.

[61]

À l’autre pôle, dans la structure dite de compagnonnage, la famille devient propriété commune du couple. Le rôle d'épouse prend une importance au moins égale au rôle de mère. On observe alors : un système d’autorité conjoint, le partage des tâches domestiques, l’appropriation des valeurs sociales par la femme, soit de façon individuelle — notamment par le travail extérieur, soit de façon conjointe — c’est le cas de la famille-communauté-de-loisirs.

Cette typologie par les structures internes offre un degré de relation suffisant à la première [4], celle des structures externes, pour qu’il soit légitime de regrouper les deux dimensions en un modèle grossier, mais globalement valable, de la famille ouvrière. En outre, l’analyse du système d’éducation permet d’introduire une caractéristique complémentaire dans la typologie : la famille matriarcale, située dans un système de relations de parenté, peut être caractérisée par un mode d’éducation impérative à valeurs familiales (tel le respect) ; la famille de compagnonnage, où les relations parentales ne constituent qu’un élément d’un système hétérogène de relations sociales, par un mode d’éducation compréhensive à valeurs sociales (telle l’émancipation des enfants).

Deuxième recherche

Inspiré de loin par ces conclusions, le travail de Jocelyne Valois est axé sur l’étude du couple, défini ici par le dialogue, c’est-à-dire par la communication verbale. L'objectif était de vérifier l’influence du milieu extra-familial sur la communication conjugale. L’hypothèse centrale de l’auteur, confirmée par la recherche, se formule de la façon suivante : s’il est vrai que la famille s’en va vers une forme de communication où le couple et les enfants jouent respectivement un rôle irremplacé, d’intenses relations extra-familiales, même si elles sont individuelles, n’empêcheraient pas la famille de réaliser cette communication. Cette hypothèse contredit une conclusion d’Elizabeth Bott qui, dans Family and Social Network [5], trouve une relation inverse entre l’intensité des relations extérieures et l'intensité de la communication conjugale. Selon Jocelyne Valois, l'hypothèse d’Elizabeth Bott peut se vérifier pour le cas de la famille-institution [62] (famille matriarcale). Mais l’analyse empirique établit que les activités extra-familiales, plus particulièrement le travail, à condition que la femme y soit impliquée, c’est-à-dire au moment où la femme n’est plus identifiée à l’univers domestique, sont à la fois gage et conséquence d'une communication conjugale effective. De façon plus précise, ce sont les couples où l’homme et la femme ont des activités extra-familiales tant conjointes qu’individuelles qui semblent avoir le plus de facilité à réaliser une véritable communication conjugale.

Les conclusions de cette recherche rejoignent ainsi largement les miennes. La typologie proposée : absence de communication, communication latente, communication effective, recoupe entièrement celle des structures familiales. Jocelyne Valois relie l’absence de communication à une structure autoritaire patriarcale, le dialogue latent à ce que j’ai appelé matriarcat, la communication effective à la structure de compagnonnage.

Il semble alors qu’on puisse utiliser comme caractéristique fondamentale du type compagnonnage : l’émergence de la notion du couple et des valeurs de compréhension et de dialogue. Si l'on veut cependant être en mesure de dégager la spécificité du phénomène compagnonnage, il importe d’élaborer le modèle en se référant à l’organisation de l’univers familial.

D’après les résultats de la première recherche, nous retiendrons comme caractéristiques essentielles trois dénominateurs communs d'organisations à première vue disparates : 1° la diversification des relations externes, i.e. le développement d’activités extra-familiales pour les deux conjoints et la perte d’importance relative des relations de parenté, qui n’occupent pas ici de place privilégiée parmi les autres relations sociales ; 2° la dissolution de l’opposition « domestique-extérieur » comme base nécessaire de la division du travail ; 3° l’indétermination du système de rôles qui semble échapper à tout critère normatif institutionnalisé.

Il reste à comprendre la signification d’un tel type de famille : dans quelle optique peut-on l'interpréter comme une réalité essentiellement différente de l’organisation que nous avons appelée matriarcat ? Il importerait également de repérer certains facteurs susceptibles de rendre compte de l’émergence de cette réalité nouvelle.

Sur cette dernière question, les deux recherches n’apportent qu’une information assez vague. J’avais formulé l’hypothèse que l’organisation matriarcale peut se définir comme le résultat de l’adaptation de l’ouvrier à la situation urbaine : elle aurait ainsi une signification essentiellement d’ordre économique. La répartition des tâches de l’unité de consommation selon le critère interne-externe, fondement de l’organisation matriarcale, ne serait que le mode le plus efficace d’organiser un ménage urbain à bas niveau de vie. Les données n’ont pas permis de confirmer cette hypothèse : le niveau de vie, pas plus que les critères écologiques, n’offrait de relation suffisante avec ce type de structure. Si le niveau de vie est un facteur [63] déterminant, il présuppose le jeu d’autres facteurs dont le principal paraît être d’ordre idéologique. J’ai donc modifié l’hypothèse initiale en ce sens : le matriarcat serait la traduction, pour les familles à bas niveau de vie, non pas de l’adaptation au mode de vie urbain, mais tout au contraire, de l’idéologie traditionnelle de la famille-institution. L'émergence de la famille de compagnonnage supposerait donc le jeu combiné de facteurs idéologiques et économiques.

L’étude de Jocelyne Valois met, par ailleurs, en évidence le rôle primordial de l’attitude de la femme dans l’instauration de la communication du couple. Mais selon la perspective plus particulière ici adoptée, aucun facteur explicatif n’est invoqué qu’un facteur général d’évolution : le dialogue conjugal serait un indice de mentalité sinon urbaine du moins moderne.

Cependant, même si le type de famille-compagnonnage est défini comme une réalité d’ordre idéologique (ou représentatif), on ne peut en rendre compte par la seule affirmation de valeurs qui peuvent être véhiculées par les techniques de diffusion culturelle (mass media) et qui n’ont ainsi aucune relation directe avec l’habitat urbain. L’idée de compagnonnage, au sens où je l'utilise, met en jeu toute une définition de la famille dont l’élaboration suppose un système de comportements spécifiques, une expérience effective où puissent s’enraciner ces valeurs et ces représentations de la mentalité urbaine. En ce sens, on doit supposer que l’habitat urbain est un facteur essentiel à l’émergence des comportements impliqués dans l’organisation de compagnonnage.

Troisième recherche

Cette représentation de la famille, dérivée d’un système de comportements et qui donne à ceux-ci leur sens, j’ai cherché à l’élucider au moyen d’une deuxième série d’entrevues. L’analyse de ces entrevues est à peine ébauchée mais une première lecture vient étayer l’interprétation qui se dégage des considérations précédentes.

L’examen du contenu représentatif permet d’abord de rendre compte de l’absence de régularité manifeste dans le système de rôles de l'organisation de compagnonnage. La famille n’est pas un système de pouvoir mais une réalité d’abord économique, le ménage, où les rôles dont distribués d’après le critère d’efficacité. L’autorité, comme le budget, est avant tout une tâche, assumée entièrement par la femme dans l’organisation matriarcale, partagée entre les conjoints selon différentes modalités dans l’organisation de compagnonnage. La notion d’autorité, dans ce dernier cas, n’a pas d’autre contenu que celui de « technique d’éducation ». [6]

[64]

Si nous examinons les facteurs explicatifs, nous constatons que l'organisation typiquement matriarcale, dans cette troisième recherche, est beaucoup moins fréquente que dans le premier groupe. Ce fait semble confirmer l’hypothèse du lien entre le type de famille et la variable économique : toutes les familles ont ici un niveau de vie relativement élevé. [7] Il y aurait également une relation entre l’organisation de compagnonnage et le travail féminin. Mais celui-ci ne doit pas être interprété uniquement comme un facteur d’ordre économique. Le travail de la femme peut être considéré comme un élément essentiel de la structure de compagnonnage en tant qu’il signifie développement d’activités extra-familiales. On peut supposer, en effet, qu’à bas niveau de vie le travail féminin soit envisagé comme solution aux problèmes économiques du ménage ; dans ce cas, il ne modifiera pas la représentation dite matriarcale. Mais si le niveau de vie est plus élevé, un deuxième salaire implique développement d’aspirations. Ces aspirations demeureront d’ordre économique et c’est de préférence le mari qui prendra un deuxième travail lorsque la représentation est de type matriarcal. On pourra même constater ici l’instauration d’un matriarcat véritable, corrélativement au développement de la notion de système de pouvoir. Mais si le développement d’aspirations est assumé par le travail féminin, il comportera une dimension autre qu’économique et se traduira par une représentation où, à la notion de ménage, doit se superposer non pas celle de pouvoir mais celle de couple, élément essentiel de la représentation de compagnonnage.

La cohérence de cette représentation implique une définition de la famille totalement différente de celle qui est assumée dans le système matriarcal. Dans celui-ci, la famille est un système de relations de parenté auquel s’identifie la femme ; ce système s’oppose au système social dont l’homme porte les valeurs, — en tout premier lieu, la valeur universelle qu’est le salaire. La relation d’échange entre l’homme et la femme consiste dans l’échange de ces deux systèmes de valeurs. Elle est totalement contenue dans l’idée de « ménage ». Le ménage, c’est l’association d’un homme et d’une femme où l’homme prend une femme pour faire partie d’une famille.

Dans l’organisation de compagnonnage, le système familial des relations de parenté se dissout dans le système hétérogène des relations sociales. Les valeurs sont partagées par l’homme et par la femme. Surtout, le couple est une réalité d’un autre ordre et antérieure à celle du ménage. L’organisation [65] de compagnonnage se définit alors comme celle où le couple se met en ménage pour élever une famille. Cette définition comporte deux conséquences : le ménage, relation d’échange global, ne désigne plus que l’organisation matérielle d’une relation préexistante : le couple ; la famille, système institutionnel dont on fait partie, ne désigne plus que le groupe des enfants en bas âge — elle devient une valeur qu’on s’approprie en la créant.

Cette dissociation de l’image traditionnelle de la famille en trois réalités distinctes : couple, ménage et famille, paraît en relation étroite avec le phénomène d’urbanisation. En effet, si la notion de couple peut se diffuser indépendamment d’un système de comportements qui en garantisse la cohérence, le développement d’un tel type de comportements serait directement relié à l’habitat urbain. D’une part, la dissolution du système familial des relations de parenté dans le réseau hétérogène des relations sociales présuppose, de toute évidence, le développement de relations sociales diversifiées. Par ailleurs, l’activité professionnelle de la femme, dans sa dimension d’appropriation des valeurs sociales, paraît également favorisée par la diversité de l’espace urbain où les valeurs matérialisées sont directement appréhensibles. Hors de sa maison, la femme peut immédiatement développer une conscience de participation à l’univers social.

Mais, beaucoup plus profondément, cette dissociation implique l’émergence d’un trait de mentalité et de comportement qui me paraît un aspect essentiel du phénomène d’urbanisation : la mobilité.

Si la famille représente une valeur dans laquelle s’investit l’activité créatrice du couple, cette valeur se dissout peu à peu, à mesure que les enfants grandissent. Passé un certain âge, les enfants peuvent faire partie du ménage mais ils se sont dégagés de leur existence familiale. Le couple doit ainsi être en mesure d’opérer une conversion de son activité créatrice pour l’investir dans quelque forme de participation sociale. Ou encore, et ce sera sans doute le cas général dans la famille ouvrière, le couple doit convertir son activité créatrice en activité de consommation de valeurs, e.g. devenir communauté de loisirs. Il faut signaler, comme aspect secondaire de cette mobilité essentielle à la nouvelle famille, la mobilité professionnelle. Pour la femme, l’activité de ménagère n’est qu’une profession temporaire, correspondant au moment de la vie du couple qu’est la famille. Il y aura enfin, dans plusieurs cas, mobilité géographique : la maison de banlieue, habitat approprié au ménage familial, sera délaissée pour l’appartement urbain dès que le moment de la famille est terminé.

Il resterait à voir jusqu’à quel point ce modèle très sommaire qui définit la famille comme « un moment » dans la vie du couple urbanisé, c’est-à-dire mobile, rend compte du réel. Il est certain que si l’habitat urbain ne signifie pas nécessairement urbanisation, ce type de famille n’est probablement pas très répandu actuellement. Mais l’important serait de vérifier jusqu’à quel point il correspond à une tendance réelle. Rappelons [66] que le modèle a été construit à partir d’une première lecture d’entrevues. Il n’a donc qu’une valeur hypothétique. Mais surtout, ce modèle laisse en plan plusieurs dimensions du réel et soulève plus de questions qu’il n’en résoud.

Je terminerai par trois de ces questions.

Nous avons vu que l’habitat urbain et les valeurs modernes, véhiculées par les techniques de diffusion culturelle, semblent des facteurs explicatifs de l’émergence de la représentation de compagnonnage pour les couples à niveau de vie suffisamment élevé. Ces facteurs à eux seuls sont cependant insuffisants. Le cas semble beaucoup plus répandu où le couple se contentera d’investir dans les valeurs domestiques du ménage, ce qui ne nécessite pas une remise en question de l’image traditionnelle de la famille. Il importerait donc de repérer les facteurs déterminants de cette représentation nouvelle.

Quel est le contenu de la notion de couple qui vient se superposer à celle de ménage ? Comment définit-on cette relation d’échange préexistante à l’échange économique qui constitue le ménage ? Nous avons vu qu’elle peut exister comme valeur sans contenu lorsqu’elle ne s’enracine pas dans une expérience effective ; encore faudrait-il voir jusqu’à quel point l’expérience du couple urbanisé est susceptible de se traduire en une représentation originale de l’échange conjugal.

Le modèle proposé définit la famille par référence au couple mais laisse de côté la signification de la famille pour l’individu lui-même. Même si le domaine de la vie privée, qu’on a trop souvent tendance à englober dans la notion de famille, déborde largement celle-ci, l’appartenance familiale et la relation de consanguinité y conservent peut-être une signification essentielle. Dans une existence mobile par définition, l’individu urbanisé ne cherchera-t-il pas l'image concrète de la stabilité dans ce qu’il peut récupérer de l’ancienne valeur familiale ? De sorte que, pour rendre compte de cette réalité insaisissable parce que trop proche de chaque expérience individuelle, la famille, l’opposition couple-enfant ne saurait être qu’un point de départ. La construction de notre objet nécessite sans doute que l’on parvienne à situer la famille comme terme d’une série d’oppositions, dont celle de « stabilité-mobilité » n’est qu’un exemple.

Nicole Gagnon
Département de sociologie et d’anthropologie,
Université Laval.


[1] Nicole Gagnon, La famille ouvrière urbaine, Département de sociologie et d'anthropologie, Université Laval, 1964, texte dactylographié ; La famille ouvrière urbaine : une étude de représentation, recherche en cours ; Jocelyne Valois, Communication et relations interpersonnelles dans les familles d’un quartier ouvrier, Département de sociologie et d’anthropologie, Université Laval, 1968. (Miméo.)

[2] Les fréquences de ces types sont respectivement de 32, 25 et 15 (total : 72).

[3]      Les fréquences de ces types extrêmes sont de 38 et 11 ; 19 cas ont été classés comme « intermédiaires » et 4 comme « patriarcaux ».

[4] Distribution de fréquence :

M

C

P

21

0

21

O

12

4

16

S

5

7

12

38

11

49


[5] Elizabeth Bott, Family and Social Network, London, Tavistock Publications, 1957 : « The degree of ségrégation in the role-relationship of husband and wife varies directly with the connectedness of the family’s social network. The more connected the network, the greater the degree of segregation between the rôles of husband and wife. The less connected the network, the smaller the degree of ségrégation between the roles of husband and wife » (p. 60).

[6] Jocelyne Valois, op. cit., 105. Dans les cas de communication effective, « les pouvoirs de décisions économiques prennent formellement la même tangente que dans les familles ne connaissant aucune communication. Mais la situation est fondée non plus sur l’autorité mais sur la complémentarité et l’autonomie ».

[7] II s’agit d’ouvriers de raffineries de pétrole dont le salaire de base varie entre $5,000 et $9,000. Dans le premier groupe, la répartition des salaires est approximativement la suivante :

$2,500-$3,500 :

20 pour cent

$3,500-$4,000 :

35 pour cent

$4,000-$5,000 :

25 pour cent

$5,500-$8,000 :

20 pour cent




Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 12 novembre 2017 19:34
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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