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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

La « modernisation » du syndicalisme québécois ou la mise à l'épreuve d'une logique représentative. ” (1998)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Mona-Josée GAGNON, “ La « modernisation » du syndicalisme québécois ou la mise à l'épreuve d'une logique représentative. ” Un article publié dans la revue Sociologie et sociétés, vol. XXX, n° 2, automne 1998, pp. 213-230. Montréal: Département de sociologie, Université de Montréal. (Autorisation formelle de l'auteure accordée le 23 juin 2003.)

Introduction


On n'a de cesse, dans la littérature scientifique, de s'interroger sur la capacité du syndicalisme contemporain à s'adapter aux mutations de tous ordres qui caractérisent notre fin de siècle. C'est dans cette ligne d'interrogation que se situe cet article, lequel propose une analyse de l'évolution du syndicalisme québécois à l'échelle de l'établissement ou milieu de travail [1]. Les terrains de recherche qui l'ont inspiré appartiennent pour l'essentiel au secteur privé manufacturier [2]. Si tous les auteurs qui ont étudié l'évolution de l'action syndicale dans les milieux de travail, tant au Québec qu'au Canada et aux États-Unis [3], entendent sur l'émergence de facteurs de discontinuité dans l'action syndicale, les analyses divergent. Le courant dominant (approche dite « stratégique ») s'inscrit dans un cadre dunlopien [4] élargi et propose que les changements aux niveaux politique, sociologique, économique et technologique obligent les employeurs et les syndicats à gérer autrement les relations du travail (T. Kochan et coll., 1986, 1994). Les syndicats sont fortement incités à modifier leurs comportements, à abandonner la confrontation au profit de la concertation et à devenir proactifs pour ce qui concerne l'organisation de la production et de l'entreprise. Débordant les cadres de l'Université, ce point de vue domine maintenant largement le discours syndical nord-américain.

Au Québec même, où plusieurs sociologues ont adopté le cadre d'analyse de l'école régulationniste française, plusieurs travaux de nature monographique identifient des mutations dans la relation patronale-syndicale qui amènent à envisager diverses avenues de sortie du fordisme. Très souvent, sinon toujours, les conclusions de ces travaux sont en convergence avec le courant stratégique des relations industrielles, dans la mesure où les mêmes comportements des acteurs des relations du travail sont valorisés (Bélanger et coll., 1994 ; Grant et coll., 1997 ; Grant, 1996).

À côté de cette littérature aux forts accents normatifs, d'autres travaux appellent au rajeunissement de l'action syndicale traditionnelle sans pour autant souhaiter que son caractère oppositionnel soit gommé (Lipsig-Mummé, 1995 ; Jenson et Mahon, 1993). C'est dans cette ligne générale de pensée que nous nous situons, mais notre démarche se distingue sur le plan analytique. À partir d'une reconstruction théorique des fondements traditionnels de la pratique syndicale, nous analysons les changements à l’œuvre dans les relations du travail et dans les processus de réorganisation du travail. Ceci nous amène à mettre en relief les contradictions et hiatus immanents aux pratiques syndicales « modernes » lorsqu'on les met en rapport avec les fondements traditionnels de la pratique syndicale. Notre préoccupation n'est certes pas de vouloir à tout prix sauvegarder les traditions, mais plutôt de conceptualiser les possibles dérives de l'action syndicale « moderne », dérives qui risquent de mettre en cause la capacité représentative des syndicats à l'échelle locale et, par extension, sociétale.

En première partie, nous proposons le concept de logique représentative, lequel s'appuie sur trois composantes, à savoir l'institutionnalité, l'identité et la délégation. Les changements à l'oeuvre, susceptibles d'ébranler la logique représentative des syndicats, sont décrits dans la deuxième partie de l'article ; ils sont de trois ordres, à savoir la « flexibilisation » des relations du travail, les démarches de réorganisation du travail ainsi que le raffermissement du discours corporatif. La troisième partie est consacrée à un examen des conséquences immédiatement perceptibles des changements sur les éléments de l'action syndicale, à savoir le rapport entre responsables syndicaux et employeur, entre ces derniers et le collectif salarié, ainsi que la dynamique d'ensemble. La quatrième et dernière partie revient au concept de logique représentative dont il s'agit, au terme de cette démarche, de préciser en quoi cette dernière se voit mise en cause.

Notes :

Note 1. L'établissement, dans l'acception juridique nord-américaine, désigne une succursale d'entreprise (lorsqu'elle en compte plusieurs) ou encore une entreprise à site unique. Il s'agit donc du milieu de travail (workplace). Pour plus de clarté, nous utilisons quand même dans cet article le terme « entreprise ».

Note 2. Nous remercions ici les responsables locaux d'une cinquantaine de sections syndicales qui nous ont reçue, parfois à plus d'une reprise, pour nous faire partager leurs expériences et réflexions, entre 1993 et 1996. Notre gratitude va aussi à la FTQ (Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec), sous l'égide de laquelle nous avons mené ces recherches, de même qu'à nos collègues d'alors, tout particulièrement Dominique Savoie. Ces recherches avaient deux objets, soit l'évolution des relations du travail et celle des processus de réorganisation du travail, dans le cadre d'une réflexion plus globale sur l'évolution des dynamiques syndicales. Dans chaque cas, des rapports d'enquête ont été rédigés à partir des données accumulées lors de la visite de l'entreprise, de rencontres avec les responsables syndicaux, de conversations lorsque possible avec les salariés et de l'analyse de la documentation afférente (convention collective, etc.). Ces rapports ne sont pas publics. Il faut préciser qu'à ces recherches-terrains s'ajoute une expertise qui découle d'une longue association avec une organisation syndicale, association qui a, en l'occurrence, pris la forme d'un terrain « informel » fait de multiples rencontres, conversations, observations d'assemblées, interventions à titre d'experte.

Note 3. Le constat de l'existence d'un modèle nord-américain fait consensus. Par ailleurs, il est tout aussi usuel de constater qu'à partir d'une trame commune, des dispositions spécifiques différencient les encadrements juridiques de l'action syndicale. De même, des différences dans l'administration des lois contribuent à expliquer le niveau de syndicalisation des États-Unis et du Canada, ainsi que des différents états (É.-U.) et provinces (Canada). Voir à ce sujet N. Meltz (1989), L. Troy (1991), S. M. Lipset (1990).

Note 4. D'après John T. Dunlop, auteur de travaux fondateurs pour la discipline des relations industrielles.

Retour au texte de l'auteur: Mona-Josée Gagnon, sociologue québécois Dernière mise à jour de cette page le Mardi 24 juin 2003 15:18
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue.
 



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