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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article d'Alain G. Gagnon [politologue, UQÀM], Révolutionnaires en quête d’un métarécit : de la société globale à la citoyenneté québécoise”. Un article publié dans la revue Études canadiennes/Canadian Studies, Revue interdisciplinaire des études canadiennes en France, no 66, 2009, pp. 27-45. [Autorisation accordée par l'auteur, vendredi le 17 mars 2006, de diffuser tous ses travaux dans Les Classiques des sciences sociales.]

[27]

Alain-G. Gagnon

Université du Québec à Montréal (UQÀM)

Révolutionnaires en quête d’un métarécit :
de la société globale
à la citoyenneté québécoise
”. [1]

Un article publié dans la revue Études canadiennes/Canadian Studies, Revue interdisciplinaire des études canadiennes en France, no 66, 2009, pp. 27-45.


Résumé
Introduction
Les bouillonnements prérévolutionnaires
La construction de la nation politique comme mythe de la refondation
Le virage pluraliste de la nation québécoise
En guise de conclusion
Bibliographie


Résumé

De la société globale qu'elle est devenue à la fin des aimées 1960, la nation québécoise constitue aujourd'hui un peuple en quête d'affirmation internationale mais peut-être encore davantage un peuple à la recherche d'un nouveau métarécit. Revisitant les origines de la Révolution tranquille ainsi que les transformations d'idées et de structures qui l'ont traversée, cet article se propose d'éclairer les réflexions contemporaines sur la citoyenneté. Le rôle déterminant joué par la société civile, la capacité gouvernementale accrue et l'intégration sociale de l'ensemble des citoyens apparaissent sous cette perspective garants de la réussite d'un nouveau projet sociétal québécois.

From its emergence as a global society at the end of the 1960s, the Québec nation today has come to constitute a people in search of international affirmation, but perhaps even more, a community in search of a new meta-narrative. Revisiting the origins of the Quiet Revolution as well as the ideological and structural transformations that accompanied it, this article sheds light on contemporary analyses on citizenship. The determinant role played by civil society, the enhanced capacity of the government, and the social integration of the entire citizenry appear from this perspective as guarantees of success for a new Québécois societal project.


Introduction

Cette analyse permettra de mesurer jusqu'à quel point les débats ayant cours au Québec sont inspirés par ceux qui prévalent sur d'autres territoires quant au rôle clé exercé par les organisations sociales au chapitre des revendications permettant une plus grande décentralisation et un développement local mieux ciblé. Mais aussi - et c'est l'objectif principal que je me suis fixé - je souhaite explorer pourquoi plusieurs idées mises de l'avant au Québec depuis la Révolution tranquille méritent d'être prises en compte par les sociétés en quête de reconnaissance identitaire et d'enrichissement de leurs pratiques démocratiques. Ce Québec, on le verra, constitue un vaste laboratoire d'expériences démocratiques dont la portée est saisissante à la fois par leur richesse et leur étendue.

[28] Je souhaite vous entretenir certes de la Révolution tranquille qui a eu cours au Québec (et j'oserais dire qui continue d'avoir cours), mais peut-être encore davantage du rôle des révolutionnaires dans la construction, dans la fabrication de ce grand récit. La France, rappelons-le - et c'est là un apport substantiel au Québec d'aujourd'hui -, a d'ailleurs laissé un héritage durable au chapitre de la pensée révolutionnaire, et je m'en réclame.

Quelques mots sur les révolutionnaires dont il sera question dans ce texte. Nombre d'entre eux ont bénéficié du « ravissement français ». Ils ont su tirer profit de l'influence de la pensée personnaliste, des avancées de la social-démocratie et plus fondamentalement des Lumières françaises. Ces révolutionnaires des années 1960 ont beaucoup appris de la « vieille Europe » dont ils tirent une bonne partie de leurs repères intellectuels bien qu'ils n'aient pas toujours la nostalgie du vaste empire français. Les lumières écossaises, on l'a probablement trop peu dit, ont aussi marqué la culture politique québécoise. Il y a là, quant à moi, un vaste chantier qui demande à être exploré. Comprendre la Révolution tranquille exige une analyse plus sensible à l'héritage catholique qui lui a servi de socle de même que des ambitions sécularistes qui lui ont servi subséquemment de porte-étendard.

Ces Québécois, porteurs d'une identité qui s'est adaptée à un continent souvent fermé à leur volonté d'hétérogénéité, sont aussi à la recherche d'un métarécit en mesure de les solidariser. S'agira-t-il de l'implantation d'une citoyenneté pleinement fédérale ? D'un véritable projet prônant l'interculturalisme ? De la refondation d'un Québec en tant qu'espace national ou comme membre à part entière d'une fédération multinationale ?

Quoi qu'il en soit, les Québécois poursuivent leur quête identitaire. Comme on a pu le constater lors des témoignages rendus devant la Commission Bouchard-Taylor sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences culturelles (BOUCHARD et TAYLOR 2008), il s'agit là d'une tendance lourde. Ces mêmes Québécois se tiennent généralement à bonne distance du projet nationaliste canadien qu'ils jugent soit trop assimilateur, soit trop aligné sur les États-Unis, soit trop technocratique et légaliste, soit trop néo-libéral. Ils le jugent parfois souvent trop pluriel en ce sens qu'il met l'accent sur le multiculturalisme, ce qui a pour conséquence d'atténuer l'importance de leurs revendications en tant que communauté nationale fondatrice. Les Québécois proposent généralement une lecture pluraliste des récits nationaux et une citoyenneté plus ouverte sans être éclatée, faisant la promotion de l'avènement [29] d'un pôle identitaire principal pour le Québec, pour le Canada hors Québec et chez les Premières Nations.

Mon analyse se décline en trois temps : 1. les origines de la Révolution tranquille ; 2. la révolution des idées et des structures à travers la construction de la nation politique comme nouveau mythe fondateur ; 3. l'intégration des préoccupations identitaires au cœur du projet de construction nationale (le virage pluraliste de la nation québécoise).


Les bouillonnements prérévolutionnaires

Plusieurs métarécits se sont relayés au cours des dernières années pour rendre compte des développements économiques, sociaux et politiques qui se sont produits depuis la Deuxième Guerre mondiale. Il y a eu bien sûr le mythe de la Grande noirceur qui est venu s'échouer sur les rivages modernisateurs de la Révolution tranquille.

La période dite de la Grande noirceur a été beaucoup moins sombre que certains le soutiennent, alors que la période qui correspond aux années de la Révolution tranquille, bien que stimulante à plusieurs points de vue, a été empreinte d'un certain conservatisme. Toutefois, et c'est ce qu'il est important de souligner, les rapports de force entre les éléments progressistes et les éléments conservateurs ont été inversés.

Toutes les révolutions sont le résultat de frictions sociales et politiques, de tensions créatrices et de projets contradictoires. La Révolution tranquille ne fait pas exception à cette tendance lourde maintes fois vérifiée à l'échelle internationale. Les porteurs de cette révolution venaient de lieux aussi diversifiés que les partis politiques, les centrales syndicales, les mouvements sociaux ou les universités, les organisations sociales et religieuses et les milieux de la culture qui n'ont eu de cesse de créer des occasions permettant la politisation et la mobilisation des jeunes à travers des organisations comme celles de la Jeunesse étudiante catholique et de la Jeunesse ouvrière catholique.

Le mouvement des automatistes et son expression à travers le Refus global (1948) constitue une manifestation concrète de cette phase prérévolutionnaire. Cela a d'ailleurs contribué à démocratiser l'art et la culture en donnant accès à l'universel, mais peut-être encore davantage en libérant les consciences. Hubert Aquin dira d'ailleurs du Refus global qu'il a constitué « le premier chaînon de cette longue entreprise de « déplafonnement » (AQUIN cité par SMART 1998 : 16).

[30] Dans Prelude to Quebec's Quiet Revolution, l'historien Michael BEHIELS a montré que les années s'étendant de la fin de la Deuxième Guerre mondiale jusqu'à l'élection des libéraux provinciaux, sous le leadership de Jean Lesage en 1960, sont traversées par deux grands courants politiques. C'est ainsi que les revues Cité libre, Maintenant et le journal Le Devoir défendent des positions qui ne sont pas toujours concomitantes. Bien qu'ils aient en commun de s'opposer fréquemment aux politiques généralement conservatrices du gouvernement de Maurice Duplessis, ces revues et ce journal ne présentent pas une vision unanime des moyens à adopter pour remplacer le régime en place ou pour instaurer des politiques gouvernementales pouvant permettre aux Québécois francophones, majoritairement tenus à l'écart des lieux de décision économique, d'exercer des rôles clés au sein de la société québécoise et plus largement de la société canadienne. Dans Bilan du nationalisme au Québec, le politologue Louis Balthazar porte plus avant les travaux de Behiels en établissant qu'au cours de la période 1945-1960 :


Deux grands courants de pensée [...] préparent déjà la Révolution tranquille à venir : une sorte de libéralisme teinté de social-démocratie et accompagné d'un anti-nationalisme virulent ; un mouvement néo-nationaliste qui, tout en faisant aussi le procès du nationalisme traditionnel, annonce une nouvelle conception de l'identité des Canadiens français du Québec (BALTHAZAR 1986 : 9).


La démarche historiographique entreprise par Behiels demeure d'un grand intérêt pour les spécialistes des sciences sociales. L'historien veut faire la démonstration que le Québec d'avant 1960 n'était pas aussi monolithique que certains ont pu le suggérer. Les nationalistes traditionalistes devaient livrer bataille aux nationalistes canadiens d'orientation fédéraliste (Cité libre) et aux néo-nationalistes (Maintenant). Behiels affirme par ailleurs que la période d'avant 1945 est largement dominée par les nationalistes traditionalistes et qu'ils y auraient eu peu de notes discordantes à l'époque. Or, si Behiels avait été aussi attentif aux courants de pensée des années précédant 1945 qu'il l'a été pour les années 1945-1960, il aurait constaté la présence de diverses tendances idéologiques et culturelles au Québec. C'est ainsi, par exemple, que les intellectuels rassemblés autour de la revue La Relève, fondée en 1934, et la revue Le Jour (1937-1946), tiraient souvent leur inspiration du personnalisme [31] français [2]. La revue Relations laissait déjà entrevoir l'ancrage des valeurs libérales antérieures à la Révolution tranquille [3].

En outre, contrairement à ce qui a pu être écrit, la phase précédant 1945 ne peut pas se résumer à une période dont le credo aurait été l'unanimisme comme le suggère Michael Behiels dans le sillon de plusieurs penseurs fédéralistes au Québec. Cette interprétation traduit fort mal la façon dont la société québécoise évoluait. Des chefs de file influents comme Thérèse Casgrain, Jean-Charles Harvey [4], Robert Charbonneau, Robert Élie, Roger Duhamel, Paul Gouin et André Laurendeau n'hésitaient pas à donner la réplique aux forces politiques en place et à se relayer pour alimenter les mouvements d'opinion en vue de transformer leur société.

Ainsi, les années 1945-1960 au Québec, tout comme les années qui les ont précédées, sont caractérisées par des débats de fond sur le vivre ensemble. C'est au cours de ces années charnières que s'implantèrent les idées qui s'imposeront tout au long de la Révolution tranquille : celles de la justice sociale, de l'égalité des conditions, de l'accès à l'éducation, de l'éveil aux droits individuels, de l'égalité hommes-femmes, de la laïcité, de l'autonomie gouvernementale, de la subsidiarité et de la modernisation de l'économie. Les travaux de Gilles BOURQUE, de Jules DUCHASTEL et de Jacques BEAUCHEMIN, en particulier ceux qui sont rassemblés dans La société libérale duplessiste 1944-1960 (1994) confirment l'existence d'un trait trop souvent négligé dans les analyses portant sur cette période, celui de la présence au Québec d'un libéralisme économique de type classique.

Cette période fut caractérisée par la poursuite de l'industrialisation, de l'urbanisation et de la consolidation des infrastructures publiques. Les avancées de la syndicalisation sont significatives. Mon collègue Réjean Pelletier, de [32] l'Université Laval, apporte un éclairage complémentaire à celui de Bourque et de ses collègues de l'Université du Québec à Montréal en soulignant que :


Par-delà le conservatisme social qui prévalait s'installait progressivement la modernisation économique que l'Union nationale pouvait encourager. Investissements étrangers, développement des ressources naturelles, nouvelles industries, tels sont les traits dominants de cette modernisation économique en rupture avec l'attachement aux valeurs traditionnelles préconisé par le régime duplessiste et les élites de l'époque (PELLETIER 1992 : 611).


Deux logiques se complétaient : une logique marchande et une logique empreinte d'un certain conservatisme social. Une troisième logique, identitaire celle-ci, était par ailleurs en voie de s'imposer : une logique fondée sur les pratiques libérales de la reconnaissance et de l'affirmation nationale. Cette nouvelle logique tirait son inspiration tout autant du personnalisme que du mouvement décolonialiste mais surtout des premiers balbutiements du pluralisme identitaire et allait être alimentée par l'entrée en scène d'une nouvelle classe d'intellectuels (DION 1993) [5] tirant leur inspiration de divers courants philosophiques et politiques présents en Europe continentale et plus particulièrement en France.

En bref, on peut se demander si le Québec de la Grande noirceur, tel qu'il a été présenté dans la plupart des manuels, a vraiment existé. Cette référence à la Grande noirceur mérite aujourd'hui d'être revue à la lumière des changements en profondeur qui ont eu cours de la fin de la Deuxième Guerre mondiale jusqu'à la mort de Maurice Duplessis en 1959. De même, il importe d'explorer plus à fond l'importante contribution de l'Église catholique aux développements culturel, social et économique [6] du Québec contemporain, souvent négligée jusqu'à tout récemment dans les travaux des spécialistes des sciences sociales au Québec.

La Révolution tranquille tranchait donc de façon moins radicale avec le Québec des années précédentes. En fait, la révolution des idées et des structures [33] correspondant aux années 1960 s'inscrit dans la longue durée et a exigé la présence d'assises philosophiques et économiques concrètes pour s'accomplir.


La construction de la nation politique
comme mythe de la refondation


Le Québec de la Révolution tranquille, celui de la décennie des années 1960, projette une image assez simple de la réalité politique. Ce Québec est le plus souvent identifié à l'ère de la modernisation économique et politique [7]. L'historien Gérard Bouchard n'hésite pas à décrire cette période à partir du paradigme moderniste établissant que le Québec est à l'image des sociétés occidentales et états-unienne, « une société industrielle, capitaliste et libérale, aussi développée, aussi moderne que les autres » (BOUCHARD 1990 : 262). Ceux qui utilisent ce paradigme font état d'une population qui a pris confiance en ses moyens et qui est désormais tournée vers l'avenir.

Une des premières images qui viennent à l'esprit lorsque l'on évoque la Révolution tranquille est celle de la volonté de prise en charge par les Québécois de leur avenir collectif. On a souvent mis dos à dos les notions de Grande noirceur, antérieure à la Révolution tranquille, et celle de l'éveil des mentalités suggérant que le Québec passait d'une période où l'Église catholique régnait en maître à une période caractérisée par l'avènement d'une société sécularisée. On a aussi beaucoup parlé d'un Québec toujours assiégé culturellement et qui peinait à prendre son élan, ayant attendu la tenue en 1967 de l'Exposition universelle à Montréal pour prendre un nouvel élan. Ces idées sont fréquemment reprises comme clés d'interprétation dans les travaux des spécialistes des sciences sociales. Mais qu'en est-il au juste ?

À ce titre, une étude du politologue Daniel LATOUCHE propose d'analyser la Révolution tranquille à partir de la trame de la continuité plutôt que d'emprunter celle de la rupture. En s'appuyant sur une étude ciblée des dépenses gouvernementales couvrant la période de 1945 à 1960, Latouche en vient à la conclusion que les analystes ont exagéré la véritable nature de la Révolution tranquille et que, dans les faits, il y aurait eu plus de transformations dans les domaines de l'éducation et de la santé entre 1945 et 1960 qu'entre 1960 et 1965. Ce type d'analyses bien chiffrées, populaire à un certain moment, ne nous permet toutefois pas de saisir les transformations fondamentales sur les plans culturel, identitaire et idéologique marquant le Québec pendant les années 1960. L'analyse de ce seul indicateur (celui des dépenses gouvernementales [34] pour chacune des missions étatiques) peut-elle invalider ce qui a laissé une empreinte aussi profonde dans la psyché des Québécois ? (LATOUCHE 1974)

Selon le sociologue Fernand Dumont, on aurait trop fait état des dimensions politiques sous-jacentes à la Révolution tranquille et ignoré que les changements politiques qui avaient cours étaient essentiellement le reflet de transformations dans le champ culturel sur une période longue. Écrivant en novembre 1970, au lendemain des événements d'octobre, Dumont affirme que la Révolution tranquille « a été d'abord elle-même une révolution culturelle ». Il précise dans cette même intervention que « les grandes transformations économiques et politiques restent encore à faire ! » (DUMONT 1971 : 92). Le regard que Dumont porte sur les années 1960 est empreint de déception et l'horizon de liberté auquel il aspire pour le Québec semble avoir été repoussé.

Les transformations profondes s'exprimèrent au premier chef, pourrait-on dire, à travers l'avènement d'une société pressée de faire advenir le dirigisme étatique d'inspiration keynésienne, de lancer des réformes administratives et gouvernementales en profondeur et d'implanter des réformes majeures dans les domaines de l'éducation, de la santé et de l'économie pour que les Québécois puissent se doter collectivement des outils essentiels à leur développement et à l'insertion du Québec dans les grands réseaux d'échanges.

C'est fort de ces mutations que le Québec a pu entreprendre d'importantes réformes dans les secteurs de l'éducation (avec l'abolition des collèges classiques et l'arrivée des collèges d'enseignement général et professionnel), du système de santé et des services sociaux (substitution de l'État à l'Église), de la mise en place de plusieurs sociétés d'État appelées à jouer un rôle clé dans l'économie québécoise et canadienne, de l'édification d'une fonction publique professionnelle sans attache partisane et, pour se limiter à ces grands pans, des avancées d'un mouvement d'affirmation nationale à travers l'implantation de partis politiques voués à l'indépendance, à la souveraineté et à la construction de la nation québécoise (ROCHER 2001; GAGNON et MONTCALM 1992).

Ces interprétations sont fort pertinentes, mais elles tendent au même moment à cacher une partie de la forêt. Il est vrai que le Québec a fait un bond prodigieux en entrant de plain-pied dans l'économie émergente, en développant ses institutions étatiques et en refaçonnant ses institutions sociales ; mais il serait imprudent de croire que le Québec n'est pas toujours sous l'emprise de rapports de force économique qui lui sont souvent défavorables. C'est pour [35] rendre compte de cette réalité que des auteurs comme l'économiste Maurice Saint-Germain et le politologue Gérald Bernier ont parlé du phénomène de la dépendance économique et politique pour rendre compte du contexte des années 1960 et qu'ils se sont faits critiques de la notion de la modernisation utilisée par la plupart des auteurs à l'époque. Bernier établit d'ailleurs que « le phénomène de la dépendance [bien davantage que celui de la modernisation] constitue une trame de fond de l'histoire socio-économico-politique du Québec » (BERNIER 1976 : 46) s'éloignant dès lors des facteurs culturels (évoqués par Fernand Dumont et Léon Dion) qui ont eu cours pendant longtemps pour expliquer la lenteur des Québécois à pénétrer les réseaux économiques.

L'interprétation que nous avons proposée s'inscrit dans un mouvement de remise en question du paradigme moderniste. Déjà, j'ai évoqué les travaux de Daniel Latouche et de Gérald Bernier en science politique. Mais il y a aussi ceux de Colette MOREUX (1971) en sociologie qui, ayant fait le constat d'importantes mutations au niveau des mentalités pendant la Révolution tranquille, la fameuse révolution culturelle identifiée aussi par Dion et Dumont, défend la thèse que ces changements n'auraient pas eu véritablement d'impact significatif pour la suite des choses. Toutefois, aucun des chercheurs inscrits dans une certaine mouvance « révisionniste » n'en était encore venu à la conclusion que la Révolution tranquille ait pu constituer un frein au développement économique du Québec.

Certains sociologues, portant souvent Fernand Dumont en effigie, ont souhaité voir dans la Révolution tranquille l'expression d'une nouvelle sclérose dont il fallait se débarrasser. Inspirés par Dumont, du moins ils n'ont de cesse de se réclamer du bilan qu'il en fait dans La société québécoise après 30 ans de changements :


Nous avons éliminé les idéologies officielles d'avant la Révolution tranquille. Mais cette liberté des mœurs dissimule un nouvel immobilisme des structures, un assoupissement de la volonté de changement et de la volonté de justice. L'obsession de la gestion [...] est le signe le plus clair de ce nouveau conservatisme ; il ne paralyse pas seulement les institutions, il ensommeille la collectivité tout entière (DUMONT 1990 : 19).


Dumont s'inquiétait de ce que la Révolution tranquille ait pu rompre avec les périodes précédentes. Il était aussi d'avis que les révolutionnaires tranquilles avaient trop souvent agi en faisant abstraction du passé et surtout du [36] passé canadien-français (DUMONT 1990 : 13-23 ; DUMONT 1995 : 104-119 et ss.). Cela exigeait un redressement rapide et déterminé.

Les interprétations dumontiennes ont plusieurs fois été reprises par des représentants de l'École de Laval. Pensons aux importants travaux de Jean-Jacques SIMARD qui dénonce dans La longue marche des technocrates (1979) * les travers de la fonction publique et ses caractéristiques déshumanisantes. L'analyse que Simard fait de la période de la Révolution tranquille suggère un appauvrissement des pratiques démocratiques au Québec.

D'autres auteurs - pensons aux travaux de l'économiste Gilles Paquet - cherchent à établir que la Révolution tranquille a contribué à dilapider le capital social, ce qui aurait contribué à paralyser et à entraver le développement du Québec (PAQUET 1999 : 7-8). Il importerait donc de revoir urgemment, selon ces auteurs, le projet québécois sur de nouvelles bases. Selon Paquet, les nouveaux fondements dont il faut doter le Québec doivent tirer leur inspiration du libéralisme économique. Chez Dumont les choses sont bien différentes puisqu'il insistait plutôt pour « instaurer une société éthique... une authentique société démocratique » (DUMONT 1990 : 22). Chez Paquet, il faut libérer le Québec de lui-même en retournant aux pratiques du libéralisme économique classique ayant cours - faut-il en déduire pendant les années antérieures à la Révolution tranquille ? Chez Dumont il faut plutôt ouvrir de nouveaux chantiers d'interventions sociales et de démocratisation.

Avec un certain recul, force est de constater que les choix proposés par l'économiste Paquet et par le sociologue Dumont ont une forte résonance dans le Québec actuel. Ces auteurs mettent dos à dos le Québec dit des lucides et celui dit des solidaires et confirment la présence au Québec d'une profonde ligne de fracture idéologique (GODBOUT 2006). En France, cela est incarné par le truchement des débats ayant cours entre la droite prônant les libertés individuelles et le marché d'une part et, d'autre part, la gauche, celle des reconstructeurs, prônant d'un côté l'émancipation individuelle par opposition à l'individualisme destructeur et de l'autre une mondialisation maîtrisée plutôt qu'une mondialisation débridée.

Ces fractures idéologiques ont marqué le Québec tout au long du 20e siècle. Plus récemment - et c'est ce dont il sera question dans la troisième section -, le Québec de la Révolution tranquille a connu des changements fondamentaux aux chapitres de l'implantation graduelle d'une citoyenneté québécoise, de la concrétisation d'un virage communautaire empreint de [37] pluralisme identitaire et de l'affirmation du Québec en tant que « contexte de choix » véritable au sein des Amériques.


Le virage pluraliste
de la nation québécoise


Si la Révolution tranquille a été, pour reprendre les termes de Gilles BOURQUE, « la forme historique particulière qu'a prise l'affirmation pleine et entière de l'État keynésien dans l'espace politique provincial québécois » (1993 : 57), la période actuelle a en partie tourné le dos à cet héritage en s'insérant dans les réseaux économiques nord-américains et en acceptant de manière générale le projet de libre-échange économique.

Les avancées tardives de l'État-providence au Québec, à compter surtout des années 1960, ont contribué à faire de la classe ouvrière un acteur important et à refouler la classe agricole dans ses derniers retranchements. Cette période a été par ailleurs caractérisée par l'arrivée de nouveaux acteurs : les nouvelles classes moyennes (GUINDON 1964). Celles-ci se sont rapidement imposées comme des actrices incontournables du Québec contemporain.

Ce fut le compromis fordiste. Les nouvelles classes moyennes pouvaient s'imposer grâce justement à la place centrale occupée par l'État. Les acteurs politiques, appuyés par les spécialistes des sciences sociales récemment sortis des grandes écoles, participaient à la mise sur pied d'un vaste éventail de programmes et quadrillaient le Québec de long en large. Les leitmotivs de l'époque avaient, entre autres, pour noms la rationalité, la planification, la croissance économique, la prospérité, le développement régional, la démocratisation des institutions, le rééquilibrage des rapports de force entre Québec et Ottawa, l'amorce d'une reconnaissance du principe de la dualité canadienne (SIMARD 1979).

Sans avoir tourné le dos à tout cela, la période actuelle est davantage traversée par la question du pluralisme identitaire en contexte de construction nationale. Alors que la Révolution tranquille nous faisait découvrir des acteurs politiques entichés pour l'interventionnisme étatique, la période actuelle semble plutôt encline à abandonner au monde des affaires les grands projets que la société québécoise souhaitait se donner collectivement. Aussi, ceux qui ont le plus profité des réformes étatiques engagées au cours des deux décennies précédentes ont graduellement tourné le dos à l'État qui les avait si bien servis.

Il a plusieurs fois été question ces dernières années de privatiser des joyaux comme Hydro-Québec ou encore d'imposer une logique purement marchande à la Caisse de dépôt et placement du Québec, cette dernière devant dorénavant chercher les occasions d'affaires sur la scène internationale. [38] L'excuse fournie par les politiques est simple : il n'y aurait plus de bonnes cibles locales pour le développement économique ; donc à quoi bon chercher à structurer localement puisque les occasions d'affaires se trouvent ailleurs.

Depuis quelques années, le Québec ne semble en avoir que pour les partenariats publics-privés, imitant en cela de nombreux États en quête de fonds pour assumer leurs responsabilités sociales et financières. Le Québec a été plus hésitant que les autres États-membres de la fédération canadienne à s'engager sur cette voie. Cela est en partie dû, croyons-nous, à la présence d'une formation politique de centre gauche au pouvoir de 1994 à 2003. Toutefois, soulignons que, sous les gouvernements de Lucien Bouchard et de Bernard Landry, une tendance avait toutefois commencé à s'incruster (ROUILLARD, MONTPETIT, FORTIER et GAGNON 2008).

Sur un mode gradualiste, l'État abandonne des éléments clés de sa mission économique et incite les sociétés d'État à prendre le virage de la profitabilité. Cela a pour conséquence de relâcher le tissu social et de ralentir le développement en régions. De nouveau, on tourne le dos à l'une des principales missions de la Révolution tranquille qui consistait à épauler les initiatives structurantes sur l'ensemble du territoire.

Les Québécois, eux, semblent pour le moment plus portés à se questionner sur les rapports qu'ils souhaitent entretenir avec les immigrants d'arrivée récente. Comme toutes les sociétés neuves (BOUCHARD 1998 : 219-248), le Québec cherche à affirmer ses particularités sur la scène internationale en évoquant son histoire, en défendant bec et ongles les principes sous-tendant l'exercice démocratique, exprimant fréquemment sa sensibilité aux revendications des premiers habitants et son souhait de poursuivre plus avant l'affirmation du Québec comme société globale. Les défis sont donc grands et exigent une attention de tous les instants dans un monde fortement balayé par les forts vents du cosmopolitisme.

Jocelyn Maclure fait le constat de l'éclatement identitaire chez les Québécois. Il en parle de la manière suivante :


De la nation à l'identité sexuelle, en passant par l'appartenance de classe, l'affiliation politique et les traditions, les codes paradigmatiques de l'identitaire peuvent de moins en moins servir de références exhaustives et architectoniques. Il est devenu virtuellement impossible de saisir la complexité des identités en [39] se rapportant uniquement à l'une des filières identificatrices du sujet (nation, genre, classe, etc.) (MACLURE 2000 : 28).


L'éclatement identitaire auquel plusieurs chercheurs ont fait écho force les acteurs sociaux et politiques à repenser leurs stratégies mobilisatrices en proposant un projet éthique [8] à la hauteur des défis de solidarité qui devraient caractériser le monde contemporain.

Il importe de repenser les fondements de la représentation autour de notions plus rassembleuses et de valeurs communes que les Québécois de toutes origines voudront se donner collectivement. C'est en ce sens que la notion de la citoyenneté permet de porter plus avant le projet de la Révolution tranquille et constitue à coup sûr un point d'ancrage incontournable pour qui veut approfondir l'exercice démocratique, réduire les inégalités entre les classes sociales, épauler la société d'accueil dans sa mission d'insertion sociale et culturelle des nouveaux arrivants et faire du français un outil majeur dans la lutte contre toutes formes de discrimination en sol québécois.

Les années à venir seront animées par des tensions créatrices d'autant plus que les conditions idéales - d'autres diraient « gagnantes » -, ne sont là ni pour les fédéralistes ni pour les indépendantistes. Les experts appelés en renfort au moment de la Révolution tranquille, bien qu'ayant contribué à faire avancer le Québec sur la voie du progrès économique et social, en particulier, ne sont toutefois pas parvenus à trouver des réponses à bien des questions et, après un long parcours et en manque de ressources en provenance de l'État, semblent s'être essoufflés et s'être démobilisés.

Il importe de sortir de cette crispation en épaulant les initiatives en provenance de la société civile. Tout comme pour les années 1960, la société civile - cette grande oubliée a pu dire Luc Turgeon - doit exercer un rôle déterminant au cœur du Québec en émergence (TURGEON 1999). Sans quoi, cette même société civile se fragilisera et s'appauvrira par manque de projets communs, et les experts ne seront tout simplement pas en mesure d'obtenir les appuis essentiels à la prochaine révolution des esprits.

Les révolutionnaires tranquilles ont connu certains succès en misant sur les consensus à atteindre (GRAEFE 2003). Cela s'est le plus souvent présenté [40] sous la forme d'un corporatisme libéral mettant à contribution le grand capital, l'État et les organisations syndicales. Le temps est maintenant plus propice à l'avènement d'un corporatisme libéral doublé d'un pluralisme identitaire au sein d'une société d'accueil ouverte aux nouveaux courants d'idées. Ce nouveau régime de citoyenneté devrait faire montre de solidarité intergénérationnelle, de justice intercommunautaire et devrait implanter une politique de reconnaissance des communautés nationales. Ce projet se réalisera dans la mesure - et par contraste à la période précédente - où, pour employer les termes de Daniel Innerarity,


La rénovation de la démocratie ne viendra pas d'une ferveur pour le consensus, mais de la culture du désaccord raisonnable. La démocratie est impossible sans un certain consensus, mais elle doit permettre aussi l'expression des différences et la constitution des identités collectives autour de positions différenciées (INNERARITY 2006 : 129).


Dans la réalisation de ce projet, certaines avenues sont à éviter, le principal danger étant celui de l'effacement culturel et identitaire. Plutôt que de craindre l'identitaire et de le repousser dans la sphère privée, il faut, me semble-t-il, l'assumer de façon ouverte et respectueuse des autres. Aussi, ai-je écrit en 2000 que


La principale vertu du modèle québécois est d'établir un équilibre entre les exigences de l'unité, à travers la reconnaissance d'un pôle identitaire principal, et la reconnaissance des différentes cultures (GAGNON 2000 : 23) [9].


La commission Bouchard-Taylor sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences culturelles semble avoir pris parti pour une seule cause : celle du cosmopolitisme. Je suis d'accord pour dire qu'il s'agit là d'un trait important pour les années à venir ; mais de là à fragiliser les communautés nationales en situation minoritaire, il y a un pas à ne pas franchir.

[41] Les commissaires nous invitent à adopter l'hybridité, le métissage, l'individualisme sociétal, la reconnaissance des identités multiples en tournant le dos aux métarécits. Chantal Maillé a déjà constaté que cette façon de procéder constitue une tendance lourde propre à notre époque. Dans « Féminisme et mouvements des femmes au Québec », par exemple, MAILLÉ constate que « la mode n'est plus aux mobilisations collectives mais bien aux projets identitaires individualisés et personnalisés » (2000 : 88).

L'esprit animant la Révolution tranquille a contribué à faire de tous ceux qui vivent au Québec des ayants droit égaux. C'est dans cet esprit qu'il faut maintenant s'inscrire pour veiller à l'insertion économique, sociale et politique des récents immigrants. À ce titre, la reconnaissance des diplômes obtenus à l'étranger constitue un premier pas en vue d'une intégration réussie. La véritable participation à la construction nationale québécoise pour ces nouveaux citoyens débutera le jour où ils auront pleinement accès au marché du travail. Beaucoup reste à faire de ce côté : les syndicats, les partis politiques, les corporations professionnelles et l'État ont une responsabilité partagée à ce chapitre, à laquelle ils ne peuvent se dérober.

La commission Bouchard-Taylor a pour une large part manqué la cible en ce qu'elle se contente essentiellement de faire la promotion du relativisme culturel et, ce faisant, encourage l'éclatement identitaire plutôt que d'inviter les membres des diverses communautés culturelles à faire un pas vers une plus grande convergence culturelle en vue d'arriver à des projets communs. Ceux qui souhaitaient voir advenir l'ère de la reconnaissance à travers l'implantation de la voie multinationale [10] et l'établissement d'une citoyenneté québécoise devront chercher ailleurs des réponses à leurs questionnements.

Le Québec comme laboratoire culturel et politique doit maintenant s'engager plus à fond que jamais sur le terrain de la citoyenneté. C'est à travers l'exercice de la citoyenneté, et non à travers le relativisme culturel, que les Québécois de toutes origines parviendront à s'assumer pleinement comme êtres politiques et à établir un contexte de choix porteur pour les générations à venir.

[42]

En guise de conclusion

Suggérer que la Révolution tranquille ait pu s'accomplir en faisant fi du passé ne serait pas très convaincant comme j'ai cherché à l'établir. Or, il est facile de démontrer que l'ère qui s'amorçait en 1960 n'avait de spécifique que la recherche d'un nouvel équilibre entre les forces politiques et sociales en présence. Bien que le clergé ait été perçu comme étant en retrait de la vie politique émergente, il n'en demeure pas moins que son influence continuait à se faire sentir dans la plupart des institutions et que la société tout entière demeurait marquée par ses enseignements.

Le développement porté par les révolutionnaires tranquilles ne s'est pas limité à la mission économique bien qu'il en fût un élément clé. Le développement a consisté à encourager l'intégration sociale de l'ensemble des citoyens, à proposer un vaste plan de réformes politiques et à faire du Québec une société d'accueil ouverte à la diversité. L'idée centrale portée par les diverses familles politiques a consisté à accroître la capacité gouvernementale de l'État du Québec pour réussir pleinement son projet sociétal.

Aujourd'hui, les héritiers de la Révolution tranquille, bien qu'ils ne s'en réclament pas toujours, sont parvenus à instaurer une société pluraliste et inscrite dans les grands débats de notre temps. La Révolution tranquille revêt de nos jours des formes nouvelles. Le Québec est à une nouvelle croisée des chemins, tiraillé autant par la question nationale et la question sociale que par les forces relevant du cosmopolitisme et du relativisme culturel. Plus que jamais, il importe d'actualiser plusieurs des défis que les révolutionnaires tranquilles ont souhaité relever mais sans y parvenir pleinement.

Cela doit minimalement passer par cinq grandes étapes :


1. l'actualisation du projet national québécois ouvert aux influences humanistes ;
2. l'implantation d'un nouveau projet social prenant au sérieux le paradigme classiste plutôt que se laisser porter uniquement par le projet national ;
3. l'imbrication d'un projet économique plus sensible à l'économie sociale ;
4. l'enrichissement des pratiques démocratiques au niveau des régions du Québec et des territoires autochtones ;
5. l'affirmation d'un projet politique fondé sur la reconnaissance nationale et sur l'affirmation identitaire et culturelle.


[43] De la société globale qu'elle est devenue à la fin des années 1960, la nation québécoise constitue aujourd'hui un peuple en quête d'affirmation internationale mais peut-être encore davantage un peuple à la recherche d'un nouveau métarécit. Ce métarécit doit s'écrire à plusieurs.


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[45] MAILLÉ, Chantal (2000), « Féminisme et mouvements des femmes au Québec. Un bilan complexe » in C. Maillé et C. Savoie (éds.), Globe, revue internationale d'études québécoises, 3/2, pp. 87-105.

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[1] Ce texte reprend ici l'essentiel de mes propos prononcés lors de la conférence inaugurale du colloque organisé par l'Association française d'études canadiennes portant sur « Le Québec, 'laboratoire' politique et culturel : quel renouvellement depuis la révolution tranquille ? » et tenu à Bordeaux, les 18-19 et 20 juin 2008. Je remercie Jean-Pierre Augustin, Louis Balthazar, Thierry Berthet, Denys Delâge, Nathalie Lemarchand, Jacques Palard et Luc Turgeon pour leurs généreux commentaires qui m'auront permis d'étoffer mon argumentation.

[2] Sur le mouvement personnaliste, voir Jean-Louis LOUBET DEL BAYLE (1998). Pour une application au cas québécois et le développement que l'idée que la Révolution tranquille tire son inspiration première du mouvement personnaliste, on se reportera à l'essai révisionniste d'E.-Martin Meunier et Jean-Philippe Warren (1999).

[3] Dans La vigile du Québec. Octobre, p. 94, Fernand DUMONT constate qu'« [e]n examinant de près la revue Relations des années 1940 à 1960, mes étudiants ont été surpris de la faculté d'assimilation des événements qu'elle témoignait : « la Révolution tranquille » était là toute entière en projet ».

[4] Plusieurs sujets méritent d'être consacrés à cette période précédant la Révolution tranquille. Soulignons au passage le mémoire de David Éric SIMARD (2007).

[5] Les travaux de Dion portant sur la période 1945-1960 sont d'une grande utilité en ce qu'ils circonscrivent de belle façon la révolution sociale et culturelle en préparation.

[6] Pour une étude de l'apport de l'Église catholique au développement économique du Québec, on peut se reporter à notre étude (Alain-G. GAGNON 1979).

[7] Voir Gérald BERNIER (1976) pour une contre-analyse.

* [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

[8] Fernand Dumont a évoqué à plusieurs moments cette ambition pour le Québec. Cette idée a été reprise et affinée par Jacques BEAUCHEMIN (2004).

[9] Citant ce texte dans son rapport, les auteurs du rapport Bouchard-Taylor, pour valider leur propre thèse, ont fait sauter l'élément suivant de l'extrait « à travers la reconnaissance d'un pôle identitaire principal ». (Gérard BOUCHARD et Charles TAYLOR 2008)

[10] Se reporter ici à Alain-G. GAGNON et Raffaele IACOVINO (2007).



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le samedi 29 décembre 2012 16:40
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue,
professeur de sociologie retraité du Cégep de Chicoutimi.s
 



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