RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Marcel Fournier, “Marcel Mauss, l'ethnologie et la politique: le don”. Un article publié dans la revue Anthropologie et Sociétés, vol. 19, no 1-2, 1995, pp. 57-69. Québec : département d'anthropologie de l'Université Laval. [Autorisation accordée par l'auteur le 12 décembre 2002 de diffuser, dans Les Classiques des sciences sociales, cette oeuvre et toutes celles publiées au Québec.]

Marcel Fournier 

Marcel Mauss, l'ethnologie et la politique:
le don
”. 

Un article publié dans la revue Anthropologie et Sociétés, vol. 19, no 1-2, 1995, pp. 57-69. Québec : département d'anthropologie de l'Université Laval.
 

Résumé / Abstract
 
Introduction
 
La politique : la vie (socialiste) continue
L'Année sociologique (bis)
La création de l'Institut d'ethnologie
L'« Essai sur le don »
 
Conclusion
Références

RÉSUMÉ/ABSTRACT 

Marcel Mauss, l'ethnologie et la politique : le don

 

Si l'« Essai sur le don », publié en 1925, occupe une place aussi centrale dans l'œuvre de Marcel Mauss (1872-1950), c'est que non seulement il offre un renouvellement de la théorie durkheimienne de la cohésion sociale, mais aussi il constitue un point de rencontre de ses préoccupations scientifiques et sociales : ethnographie et politique se rejoignent. Pour Mauss, les années d'après-guerre, en particulier le début des années 1920, sont des plus actives. D'abord sur le plan professionnel : Mauss relance L'Année sociologique, fonde une société savante (Institut français de sociologie) et crée un centre de formation et de recherche (Institut d'ethnologie de Paris). Ensuite sur le plan social et politique : participation au mouvement coopératif et socialiste, membre du conseil d'administration du journal socialiste Le Populaire, publication de nombreux articles dans Le Populaire et La Vie socialiste. Les deux grands projets qu'élabore alors Mauss sont indissociablement intellectuels et politiques : il s'agit d'un grand travail sur la nation et à la suite de la publication de ses « Observations sur la violence », d'un ouvrage sur le bolchevisme.

 

Marcel Mauss, Ethnology and Politics : the Gift

 

The « Essai sur le don » (1925) is central in Marcel Mauss' work : first, it presents a new view of Durkheim's theory of social cohesion ; second, it is the junction of his social and scientific preoccupations. Ethnography and politics go together. During the 20's, Mauss is very active. At the professional level : publication of L'Année sociologique, creation of the Institut français de sociologie and of the Institut d'ethnologie de Paris. Also in politics : participation to socialist and cooperative movements, publication of many texts in Le Populaire and La Vie socialiste, etc. His most important projects are at the same time intellectual and political : the first one is an ambitious work on the nation, and the second, after the publication of his text « Observations Sur la violence », a large reflexion on bolchevism.

 

Introduction

 

Épreuve terrible, la Première Guerre a bouleversé la vie de toute une génération d'intellectuels. Engagé volontaire, Marcel Mauss a été affecté pendant plus de trois ans comme interprète auprès d'unités combattantes anglaises et australiennes ; il a, reconnaît Henri Hubert, « beaucoup gagné dans la guerre ». Mais comment, se demande son ami, peut-il en « faire bénéficier [son] parti comme [son] pays [1] » ? 

Comme le suggère André-G. Haudricourt, un ancien élève de Mauss, on ne peut « étudier les écrits de Mauss indépendamment de l'époque et des circonstances où il a été amené à les écrire » (1972 : 89). Côté scientifique, le neveu de Durkheim reprend, au lendemain de la Guerre, le flambeau : création de l'Institut français de sociologie, relance de L'Année sociologique. Côté politique, son attention est mobilisée par les grandes questions de l'heure : la paix, la Révolution russe, la création du Parti communiste français. Publié en 1925, l'« Essai sur le don » occupe une place centrale dans l'œuvre de Mauss : non seulement il constitue un point de rencontre de ses préoccupations scientifiques et politiques, mais aussi il offre un renouvellement de la théorie durkheimienne de la cohésion sociale, de la relation individu-société (Fournier 1993) [2]. 

 

La politique : la vie (socialiste) continue

 

Au lendemain de la Guerre, un peu dépaysé, Mauss évite dans un premier temps de s'engager directement dans les débats qui divisent la gauche. Son abstention politique est de courte durée : le « vieux militant » ne saurait se désintéresser des problèmes relatifs à la paix, au bolchevisme, à la coopération ou à la crise économique. Son activité politique est plus intense que jamais : il publie de nombreux articles sur le mouvement coopératif et il participe à la création de la Revue des études coopératives ; membre du conseil d'administration du Populaire, il y publie régulièrement des textes, dont une longue série sur les « Changes » ; il entreprend la rédaction de ses « Observations sur la violence » qui paraissent dans La Vie socialiste. Les projets qu'élabore Mauss dans les années 1920 sont indissociablement intellectuels et politiques : à la suite de son intervention sur « The problem of nationality » (1920), Mauss entreprend un grand travail sur la nation ; il a aussi le projet d'un ouvrage sur le bolchevisme et en établit le plan après avoir publié ses « Observations sur la violence ». Ce sont des écrits où se mêlent et s'exaltent « l'ardeur du savant et celle de l'homme politique » ; ce sont, même si elles ne sont pas « dénuées d'intérêt scientifique et philosophique », des « incursions dans le domaine normatif ». 

Socialiste sans doctrine, défenseur de la thèse de « majorités agissantes », ami fidèle de Jean Jaurès et de Pierre Renaudel, Mauss refuse, contrairement à son ami de longue date, Marcel Cachin, d'adhérer à la troisième internationale ; il est très critique par rapport à la Révolution bolcheviste : en « sociologues naïfs », les bolchevistes ont cru pouvoir construire une société « à coups de décret, à coups de violence ». C'est une erreur, pense Mauss : « La violence est stérile dans nos sociétés modernes » (1923b : 2). Mauss entend donc « juger » l'expérience bolchevique et le faire d'un point de vue sociologique. D'où le titre de son article qui parait en 1924 dans la Revue de Métaphysique et de Morale : « Appréciation sociologique du bolchevisme ». L'année suivante, paraît dans la Revue slave un autre article, « Socialisme et bolchevisme ». 

L'« Appréciation sociologique du bolchevisme » comprend d'importantes conclusions pratiques : qui veut « réformer » la société doit 1) respecter la « nature échangiste de l'homme » et garder le marché et la liberté commerciale et industrielle qui l'accompagne ; 2) maintenir un équilibre entre le collectivisme et la vie associative et développer des institutions de type intermédiaire (coopératives, groupes professionnels) ; 3) enfin, éviter de s'illusionner et de croire que l'on peut « supprimer toutes les formes de propriété pour les remplacer par une seule », car il n'y a de sociétés ni exclusivement capitalistes ni purement socialistes. Les « possibles » se ramènent à des économies mixtes, à des mélanges de capitalisme, de socialisme, de collectivités libres et d'individualisme. En d'autres termes, Mauss rappelle, en bon durkheimien, que la liberté et le contrôle collectif ne sont pas contradictoires. 

Au risque de « passer pour vieux jeu et diseur de lieux communs », Mauss revient aux anciens concepts grecs et latins de « charité », d'« amitié » et de « communauté » : c'est là, conclut-il, « l'essence de la cité » (1924a : 116). La morale qu'il propose est « de douceur et de légalisme ». D'ailleurs conscient qu'il prêche trop généreusement « la douceur, la paix, la prévoyance », Mauss souhaite que la politique soit « positive »et qu'elle devienne un « art rationnel » :

 

Le premier temps d'une politique positive c'est de savoir et dire aux sociétés en général et à chacune en particulier ce qu'elles font, où elles vont. Et le second temps de la morale et de la politique proprement dites consiste à leur dire franchement si elles font bien, pratiquement et idéalement, de continuer à aller dans telle ou telle direction.
 
Mauss [1927] 1969 : 171

 

La sociologie est donc tout le contraire d'une panacée : elle peut certes offrir une « conscience précise des faits » et constituer un « moyen d'éducation de la société », mais elle ne peut prétendre être un « moyen de rendre les hommes plus heureux » : « Durkheim l'a bien montré. Science et art n'ont pour effet que de rendre l'homme plus fort et plus maître de lui » (ibid. : 173). 

Mauss se revendique, tout comme d'ailleurs Durkheim ([1928] 1970 [3], du comte Henri de Saint-Simon, qu'il considère comme « le fondateur du socialisme et le fondateur de la sociologie, le fondateur de la "philosophie positive" et le fondateur de la "politique positive" dont s'inspire toute l'action sociale moderne » (Mauss 1925c : 242) [4]. En mai 1925, dans un numéro de la Revue de l'enseignement primaire consacré à Saint-Simon, il publie un article intitulé « Saint-Simon et la sociologie ». La « grande découverte » de Saint-Simon aurait été la suivante : « Il faut faire la "théorie" "positive", "expérimentale" des sociétés, si l'on veut fonder sur la science l'"organisa­tion" "expérimentale", "positive" des sociétés » (ibid.).

 

L'Année sociologique (bis)

 

Pour l'École sociologique française, la guerre a été une tragédie qui emporta Durkheim, son fils André et plusieurs collaborateurs de L'Année sociologique : Robert Hertz, Antoine Bianconi, Jean Reynier, R. Gelly. C'est le « désemparement »et puis l'« effondrement ». Mauss se remet au travail et, à l'hiver 1920, il reprend ses cours à l'École pratique des hautes études. La succession est lourde. Peu de groupes de chercheurs ont été, comme le rappellera Mauss, aussi « atrocement éprouvés » ([1933] 1969 : 437) que les durkheimiens par la guerre. Mauss voit « retomber sur lui le poids énorme de la publication de l'œuvre considérable et inédite » de Durkheim et de ses collaborateurs [5]. L'héritier a le « devoir envers la mémoire de Durkheim » de poursuivre et de défendre son oeuvre.

 

Tout est à (re)faire : « Il faut, propose Mauss, recruter de nouveaux élèves, constituer des laboratoires, faire appel aux pouvoirs publics [...]. Il faut que les savants fassent de la publicité, car une science ne peut devenir populaire que par la vulgarisation » ([1920] 1969 : 434). Dès la fin de la guerre, les anciens collaborateurs de L'Année sociologique se demandent s'il faut « refaire L'Année » : « Oui, répond Henri Hubert, si nous ne nous y tuons pas [6] ». Il y a de la « bonne volonté », mais peu d'empressement : personne ne veut s'engager dans une entreprise qui risque d'être une « charge aussi lourde qu'elle était pour Durkheim ». 

La réunion préparatoire a lieu le 1er mars 1923 et réunit une douzaine de personnes : Célestin Bouglé, Georges Bourgin, Philippe de Felice, Paul Fauconnet, Marcel Granet, Henri Hubert, Henri Jeanmaire, Raymond Lenoir, Henri Lévy-Bruhl, Lucien Lévy-Bruhl, Claude Maître, Marcel Mauss et Jean Marx. D'autres ne peuvent assister à la rencontre mais envoient leur adhésion. Les discussions portent sur la fondation d'une société savante de sociologie, composée d'un nombre limité de membres actifs, comme il en existe en anthropologie ou en biologie. 

L'Institut français de sociologie est fondé quelques mois plus tard. Les membres du premier exécutif sont Marcel Mauss, président, François Simiand, vice-président, Paul Fauconnet, secrétaire, et Henri Hubert, trésorier. Leur première préoccupation est la relance de L'Année sociologique. La situation financière s'annonçant « provisoirement bonne » -subvention de 9 000 francs, adhésion d'une trentaine de membres -, les responsables de L'Année sociologique signent en juin 1924 un contrat avec la librairie Félix Alcan. Mauss se voit par ailleurs confier la direction de la collection des travaux de L'Année sociologique [7]. Tous les collaborateurs [8] se mettent au travail : achat de livres, échange avec d'autres sociétés savantes et revues, envoi de lettres. Il s'agit, selon l'expression de René Maunier, d'une véritable « entreprise coopérative » (1927 : 305). L'organisation est sensiblement la même qu'au « temps de l'ancienne Année sociologique », avec des chefs de rubrique : 1- sociologie générale (Célestin Bouglé), 2- sociologie religieuse (Marcel Mauss), 3- sociologie juridique (Paul Fauconnet), 4- sociologie économique (François Simiand), 5- divers (Marcel Mauss) [9]. 

La tâche est considérable, car les publications qu'il faut recenser sont beaucoup plus abondantes, plus variées qu'avant la guerre. Le premier tome de la nouvelle série de L'Année n'est pas plus compact qu'auparavant : près de 1000 pages, dont plus de 800 consacrées aux comptes rendus. Pour Marcel Mauss et ses collaborateurs, il s'agit tout à la fois de défendre la méthode et les procédures de recherche mises au point par Durkheim, d'aller dans les directions qu'il a indiquées, par exemple la logique et la théorie de la connaissance, et de mettre en valeur leurs propres travaux. Le premier tome se présente comme un hommage au fondateur. Dans le « In memoriam » qu'il consacre à son oncle et à ses élèves, Mauss écrit : « [...] Tâchons de faire quelque chose qui honore la mémoire à tous, qui ne soit pas trop indigne de ce qu'avait inauguré notre Maître. Peut-être la sève reviendra. Une autre graine tombera et germera » ([1925b] 1969 : 28). 

La contribution de Mauss est de toute évidence la plus importante : non seulement il fournit les deux mémoires originaux (« In memoriam », « Essai sur le don »), mais il est aussi responsable de plusieurs sections et signe une centaine de comptes rendus et de notes critiques d'ouvrages et d'articles de revues. Pour plus de la moitié, ces ouvrages et articles relèvent du domaine de la sociologie religieuse, en particulier de l'étude des systèmes religieux des sociétés dites « inférieures ». Mauss n'utilise le terme « inférieur » qu'à regret, mais il n'en voit pas de meilleur pour « faire sentir la longueur et la grandeur de toutes les évolutions ». La curiosité superficielle et l'esprit de système des uns - par exemple Frobenius - agacent toujours autant Mauss ; la théologie des autres - par exemple le père W. Schmidt - l'exaspère. À ce genre « extensif et hâtif » d'études, il dit préférer les « honnêtes, simples et philologiques documents d'ethnographie en profondeur » : Boas, Malinowski, E.C. Parsons, Radin, R.S. Rattray, Charles G. et Brenda Seligman, etc. 

La parution de la nouvelle série de L'Année sociologique est saluée comme « un réconfort et un exemple » : grâce à Mauss, « cheville ouvrière » de l'entreprise, « le groupe de l'école sociologique française se maintient cohérent et actif, se recomplète, s'enrichit d'énergies et de tempéraments jeunes et divers », explique Paul Alphandéry (1927 : 177).

 

La création de l'Institut d'ethnologie

 

En décembre 1925, est créé l'Institut d'ethnologie de Paris. Peu avant la Première Guerre, Marcel Mauss avait soumis au ministre de l'Instruction publique le projet de création d'un « Bureau, Institut ou Département d'ethnologie », qui devait réunir des spécialistes des différentes parties du monde (Afrique, Amérique, Océanie et Asie). Tout cela était, avait-il conclu alors, d'une « urgence absolue » (Mauss 1913b : 5). La guerre avait empêché que le projet puisse se réaliser. L'idée refait jour en 1924, sous la pression, précise Lucien Lévy-Bruhl, « d'une opinion obscurément consciente de sa nécessité » (1926 : 207). 

Depuis le début des années 1920, une grande effervescence agite les milieux intellectuels et artistiques parisiens : apparition du cinéma, de la radio et du phonographe, irruption de l'« art nègre », « nouveau départ » de la musique avec Poulenc, Auric, Milhaud, Ravel, « importation » de la psychanalyse, découverte de la musique afroaméricaine. Cette ouverture des esprits, ce nouvel exotisme attire vers l'ethnologie un nouveau publie : des écrivains et des artistes - Vlaminck, les cubistes, Gris, Picasso - sont fascinés par les statuettes du Dahomey et de la Côte-d'Ivoire. L'Afrique « s'empare » des arts décoratifs : Pierre Lerain crée du mobilier inspiré de l'Afrique noire. Les arts océaniens, en particulier ceux de l'île de Pâques, occupent aussi une place importante dans la recherche d'un renouveau artistique. Les surréalistes y puisent une source d'inspiration privilégiée : pour André Breton, l'île de Pâques est une sorte d'« Athènes moderne de l'Océanie » tandis que Max Ernst collectionne des sculptures de l'Hommeoiseau. Quelques décennies auparavant, un tel engouement aurait été impossible : « Presque tout de l'art indigène était inconnu », constate Mauss (1931 : 1). 

La conjoncture politique est par ailleurs favorable : la victoire du Carte] des Gauches, en mai 1924, rend en effet possible la création d'un Institut d'ethnologie dirigé par des universitaires identifiés au Parti socialiste (SFIO). Le nouvel Institut est, reconnaît Marcel Mauss lui-même, créé grâce au ministre des Colonies, M. Deladier, et grâce à la bienveillance des gouverneurs généraux, dont Alexandre Varenne, alors en poste en Indochine. Élu radical-socialiste, Deladier est ministre du gouvernement Herriot. Et même si les socialistes ont refusé de faire partie d'un « cabinet bourgeois », la politique du nouveau gouvernement correspond aux attentes des électeurs de gauche : transfert au Panthéon des restes de Jean Jaurès, etc. 

Logé au 191 de la rue Saint-Jacques dans le bâtiment de géographie, l'Institut d'ethnologie ouvre ses portes au tout début de l'année 1926. Sa direction est composée de Marcel Mauss, Lucien Lévy-Bruhl et Paul Rivet [10]. Professeur d'histoire de la philosophie moderne à la faculté des Lettres de l'Université de Paris et directeur (depuis 1920) de la Revue philosophique, Lucien Lévy-Bruhl est le plus âgé et le plus connu du trio : son livre sur La mentalité primitive publié en 1922 connaît un grand succès. Médecin de formation, Paul Rivet est assistant au Laboratoire d'anthropologie du Museum d'histoire naturelle ; auteur d'une Ethnographie ancienne de l’Équateur (1912), il est secrétaire de la Société des américanistes et de ]'Institut français d'ethnologie. C'est un « chef, à l'autorité innée » (Soustelle 1967 : 25). Rivet et Mauss sont les piliers de l'Institut d'ethnologie. Deux personnalités différentes, qui ont en commun, souligne Jacques Soustelle, de n'être ni l'un ni l'autre d'un commerce aisé, Mauss se retranchant derrière un rempart de brumes, quoiqu'il puisse se montrer d'une désarmante bonhomie, Rivet juxtaposant à un intellect vaste et clair un caractère inégal et passionné (ibid. : 26). Mais la pensée encyclopédique du premier et la science méthodique et le pragmatisme organisateur du second se complètent d'autant mieux que tous deux partagent les mêmes convictions politiques. 

Les objectifs du nouvel Institut sont de « travailler au progrès de la science ethnologique » (publication d'ouvrages [11], réalisation d'enquêtes), tout en mettant « les résultats de cette science au service de notre politique indigène toutes les fois qu'on le lui demandera » (Lévy-Bruhl 1926 : 26). Les préoccupations pratiques ne sont donc pas absentes : en plus de former des « ethnologistes professionnels », on entend donner des instructions à tous ceux, administrateurs, médecins ou missionnaires, qui sont « destinés à vivre aux colonies » et qui sont souvent « en état de faire de bonnes observations ethnographiques ». 

Selon les statuts de l'Institut, les enseignements doivent comprendre les matières suivantes : « Les méthodes de la recherche et de la description ethnologiques, les institutions des indigènes, en particulier leurs langues, leurs religions, leurs coutumes, leurs techniques, leurs caractères anthropologiques, leur histoire et leur archéologie ». La première année, l'Institut d'ethnologie offre à une vingtaine d'élèves inscrits - venant pour la plupart de l'École normale supérieure, de l'École pratique des hautes études, et de l'École des langues orientales - les cours suivants : Instructions d'ethnographie descriptive, par Marcel Mauss (22 leçons) ; Instructions de linguistique descriptive, par Marcel Cohen (5 leçons) ; Linguistique et ethnographie de l'Afrique, par Maurice Delafosse (5 leçons) ; Linguistique et ethnographie de l'Asie orientale et de l'Océanie, par Jean Przyluski (5 leçons). A ces cours s'ajoute une série de conférences publiques données par Arnold Van Gennep (« La méthode géographique du folklore ») et René Maunier (« Les corporations industrielles en Afrique du Nord »). 

Un an après l'ouverture de l'Institut, Marcel Mauss se montre plus que satisfait. La création d'un certificat d'ethnologie à la faculté des Lettres en 1927 et à la faculté des Sciences en 1928 entraîne une augmentation considérable de la population étudiante : 67 élèves en 1927-1928, 89 en 1928-1929. Un tel succès oblige l'Institut à élargir son enseignement et aussi à fournir un meilleur encadrement (travaux pratiques, bibliothèque, excursions et visites de musées, examens).

 

L'« Essai sur le don »

 

Publication de nombreux textes politiques, relance de L'Année sociologique, fondation de l'Institut d'ethnologie, jamais Mauss n'a été aussi actif sur le plan professionnel, il s'identifie toujours, comme on le voit dans la série de trois conférences qu'il donne en mai 1920 à l'Institut des hautes études de Belgique à Bruxelles, à l'histoire des religions et il demeure préoccupé - c'était l'objet de sa thèse de doctorat demeurée inachevée - par les « origines de la prière ». L'un de ses cours à l'École pratique porte sur le rituel oral (rituel moral et négatif, drame musical, poésie, art magique, tabous linguistiques). Tel est aussi le thème de l'une des premières communications scientifiques qu'il fait au début des années 1920 : « L'expression obligatoire des sentiments (rituels oraux funéraires australiens) » (Mauss [1921] 1969 : 269-278). 

Par ailleurs, dès 1920 Marcel Mauss aborde dans ses cours, à l'École pratique, la question des potlatchs : ce sont, dit-il, des systèmes de prestations religieuses et juridiques à type usuraire qu'ont décrits Rivers dans son History of Melanesian Society (cours de 1921-1922 et de 1922-1923) et Malinowski dans ses travaux sur les tribus des îles Trobriand (cours de 1923-1924). Le don n'est cependant pas une préoccupation nouvelle pour celui qui dans l'« Essai sur la nature et la fonction du sacrifice »analysait ceux que les hommes font aux dieux [12]. Mauss s'appuyait alors sur une lecture des textes sanscrits et hébraïques pour effectuer une étude minutieuse du rituel védique et du rituel hébreu. 

Juif non pratiquant, Mauss n'a jamais renié son appartenance au judaïsme. Sa maîtrise de l'hébreu et sa connaissance des textes bibliques lui sont, comme on le voit dans plusieurs études et comptes rendus, fort utiles, pour ne pas dire indispensables. Mauss touche ici et là divers aspects du judaïsme : les interdictions rituelles relatives au sang menstruel, les arrêts périodiques de la vie (sabbat), la fête de Pourim, la synagogue comme société de prière, etc. Mais il n'est jamais question pour Mauss de s'en tenir à l'interprétation traditionnelle. Comme il le montre pour la circoncision dans le seul article qu'il publie dans la Revue des études juives en 1926, le judaïsme est d'abord un sentiment d'appartenance et une culture (1926a). 

Il ne faut pas chercher à présenter le judaïsme ou les « origines juives » de Mauss comme seul principe explicatif de son intérêt pour l'étude des systèmes de prestations religieuses et juridiques. Il a lu les travaux du philosophe Théodule Ribot, l'auteur de la Psychologie des sentiments, dont il a suivi les cours et pour qui les conditions fondamentales de toute société sont la réciprocité et la solidarité ; il n'ignore pas non plus que la solidarité a été analysée du point de vue de l'échange, par exemple en 1909 lors du congrès de l'Institut international de sociologie. 

Dans le résumé qu'il avait fait de ce congrès, René Maunier, un élève de Mauss, avait reconnu que la solidarité est « en quelque sorte le caractère constant et spécifique du fait social » (Maunier 1909 : 704) et, s'inspirant de la communication de Charles Gide, le théoricien de la coopération, il en avait donné la définition suivante : « La solidarité est tout échange d'un bien présent, individuel ou collectif, contre un bien futur, nécessairement collectif » (ibid. : 710). Nul doute, dans l'esprit de Maunier et des autres participants, que cette discussion avait eu une dimension non seulement scientifique mais aussi politique : on avait d'ailleurs constaté « l'existence d'une tendance contemporaine au développement des institutions de solidarité, et cela dans les sociétés les plus différentes » (ibid. : 711). L'exemple le plus souvent cité avait été celui des coopératives de production et de consommation. 

Lorsqu'au début des années 1920, il accepte de participer aux activités de l'Institut français d'anthropologie, Mauss présente trois communications, les deux premières sur « L'extension du potlatch en Mélanésie » et sur « Quelques faits concernant les formes archaïques du contrat chez les Thraces », et la troisième en 1923 sur « L'obligation à rendre les présents ». Le système d'échange de cadeaux qu'il analyse en Nouvelle-Zélande suppose : 1) l'obligation de donner, 2) l'obligation de recevoir, et 3) l'obligation de rendre. Et, s'appuyant sur les travaux de son « regretté ami », Robert Hertz, Mauss met en évidence le caractère spirituel de ce système d'échange : parce qu'ils sont doués de hau, autrement dit d'esprits, les cadeaux ne peuvent être conservés, ils doivent être rendus ([1923c] 1969 : 43). Dans le cours qu'il donne en 1923-1924, à l'École pratique, la discussion porte sur les travaux de Malinowski et concerne spécifiquement le potlatch : « Le fond de ces institutions est la notion que le circulus des richesses suit exclusivement les rapports non seulement économiques mais surtout religieux et juridiques entre les membres de la tribu » (École pratique des hautes études 1924 : 36). Mauss présente les résultats de sa recherche sur les notions de don, de désintéressement et de gage. L'un des élèves, Ed. Mestre, fait un exposé sur les notions de don et d'échange. 

Dans un court texte intitulé « Gift-gift » (Mauss 1924b), présenté dans le cadre de l'hommage offert à Charles Andler par ses amis et élèves, Mauss poursuit son analyse du système de prestations totales : « La chose reçue en don, la chose reçue en général, lie magiquement, religieusement, juridiquement le donateur et le donataire. Venant de l'un, fabriquée ou appropriée par lui, étant de lui, elle lui confère pouvoir sur l'autre qui l'accepte ». Comme l'indiquent les deux sens du mot gift dans les différentes langues germaniques, le « cadeau » est aussi un « poison » : il ne faut donc pas s'étonner qu'il suscite chez celui qui le reçoit à la fois agrément et désagrément. Ce sont là rapidement esquissés tous les faits, tous les thèmes de l'« Essai sur le don ». 

La même année, à l'invitation de la Société de psychologie, Mauss accepte d'analyser « les rapports réels et pratiques de la psychologie » ; reprenant sa déclaration de l'année précédente -« Sociologie, psychologie, physiologie, tout doit ici se mêler »([1923a] 1969 : 281) -, il cherche à bâtir des ponts entre les disciplines et à mettre en évidence les services qu'elles peuvent se rendre. Parmi les tâches urgentes qu'il indique, il y a « l'étude de l'homme complet, concret ». Les expressions que Mauss utilise sont celles de « phénomènes de totalité » et d'« hommes totaux » ([1924c] 1965 : 303-306) [13]. 

Publié en 1925 dans le premier volume de la nouvelle série de L'Année sociologique, l'« Essai sur le don » s'inscrit donc dans un véritable programme de recherche, auquel sont associés élèves et collaborateurs : Marius Barbeau, Maurice Cahen, Georges Davy, Marcel Granet, Henri Hubert, Paul Huvelin, Maurice Leenhardt, Raymond Lenoir, Henri Lévy-Bruhl, René Maunier, Antoine Meillet, Ed. Mestre, François Simiand. Dans le deuxième volume de L'Année sociologique paraîtra un long mémoire de René Maunier sur les mêmes usages autour du bassin méditerranéen. 

L'incident de la thèse de doctorat de Georges Davy, La Foi jurée, témoigne de l'importance de l'enjeu que représente l'étude du potlatch. Membre du jury, Marcel Mauss s'excuse à la dernière minute : il s'est ébouillanté le pied. Mais, comme il s'en confie à son ami Henri Hubert, il n'est pas fâché de « se dédire de la thèse », car il a des objections graves qu'il préfère livrer en privé plutôt qu'en public : analyse superficielle, confusions fréquentes, information insuffisante. La querelle s'envenime lorsque Marcel Granet, qui a remplacé Mauss comme membre du jury, publie dans le Journal de psychologie normale et pathologique une critique sévère de la thèse de Davy. L'un des reproches faits à Davy est de ne pas avoir reconnu ce qu'il devait à la sociologie et à Mauss en particulier. 

Pour sa part, Mauss ne songe pas à reprocher à son ancien élève d'avoir « brûlé son terrain » en utilisant sa documentation sur le potlatch ; au contraire, il accepte de publier la thèse de Davy dans la collection des « Travaux » de L'Année sociologique, et lorsqu'il publie l'« Essai sur le don », il souligne l'apport de Davy. Il est vrai que Mauss doit alors chercher à calmer les esprits, s'il veut maintenir l'unité au sein du groupe des collaborateurs de la nouvelle série de L'Année sociologique. Mais c'est aussi un trait de son caractère : il n'entre pas dans les luttes pour la priorité. De son point de vue, le travail scientifique est toujours un travail d'équipe. 

Pour résoudre le problème de la forme et de la nature de l'économie primitive, Mauss se sert, comme le souligne Henri Lévy-Bruhl (1927 : 123), de toutes les ressources de sa riche érudition : plus de 500 notes de bas de pages, des centaines de références. Les questions qu'il pose sont les suivantes : « Quelle est la règle de droit et d'intérêt qui, dans les sociétés de type arriéré ou archaïque, fait que le présent reçu est obligatoirement rendu ? Quelle force y a-t-il dans la chose qu'on donne qui fait que le donataire la rend ? » (Mauss [1925a] 1965 : 148). 

La méthode qu'emploie Mauss est comparative : il analyse le don, le contre-don et l'échange dans les sociétés archaïques, principalement la Polynésie, la Mélanésie et le Nord-Ouest américain ; il établit aussi des comparaisons avec quelques traits des droits indo-européens (droit romain, hindou classique et germain). Son attention se porte sur l'ensemble des prestations qui sont apparemment libres et gratuites, mais qui sont, comme il le démontre, contraintes et intéressées : ce sont des cadeaux. 

Se demandant pourquoi il est « de la nature du don d'obliger à terme », Mauss refuse de considérer la structure même de l'échange comme fondement de l'obligation ; il se tourne, comme il l'avait fait pour exposer sa théorie de la magie à l'aide de la notion indigène de mana, vers un autre type d'explication qui privilégie la dimension spirituelle, le « pouvoir spirituel »des choses données : il y a une « force des choses », il y a « une vertu qui force les dons à circuler, à être donnés et à être rendus ». Cette force, c'est en Polynésie le hau, l'esprit de la chose donnée : « Présenter quelque chose à quelqu'un, c'est présenter quelque chose de soi » (Mauss [1925a] 1965 : 161). 

Dans le compte rendu de l'« Essai sur le don » qu'il publie dans la Revue d'histoire du droit français et étranger, Henri Lévy-Bruhl (1927 : 124-125) dégage les principales caractéristiques du régime don-échange : 1) les opérations ne sont pas individuelles mais collectives ; 2) les échanges ne portent pas uniquement sur des biens économiquement utiles ; 3) les prestations se présentent sous l'aspect de dotations volontaires mais elles sont rigoureusement obligatoires. Le mérite de Mauss est, comme le souligne René Maunier, de démontrer deux choses : primo, la vie des « primitifs » est plus complexe, plus active, plus mouvante qu'on ne croit : il ne faut pas la figurer comme statique ; secundo, la vie économique tient profondément à la moralité et à la religiosité. Tout est dans tout (Maunier 1927 : 305). 

L'« Essai sur le don » permet à Mauss tout à la fois de toucher du « concret », de mettre en évidence le mécanisme central de solidarité qu'est la réciprocité, de critiquer l'utilitarisme des théories économiques et de dégager un principe heuristique qui consiste à étudier les faits comme des « faits sociaux totaux ». C'est pour lui une façon de « toucher un des rocs humains sur lesquels sont bâties nos sociétés ». Les sociétés ne sont pas des masses homogènes ; ce sont des réalités complexes, avec, précise Mauss, « des groupes et des sous-groupes qui s'imbriquent, s'entrecroisent et se soudent ». La cohésion sociale - thème cher à Durkheim - ne repose pas seulement sur une communauté (de langue, de valeurs, de traditions), elle exige aussi la réciprocité et tout un ensemble de liens contractuels. 

Dans la conclusion de son « Essai », qui est une conclusion morale et politique, Mauss étend ses observations à nos propres sociétés : les invitations doivent être rendues ; il faut être « grand seigneur » à l'occasion des fêtes et des mariages ; les choses vendues ont, comme on le voit dans la région des Vosges, une « âme ». Bref, tout n'est pas que relation marchande, tout n'est pas que calcul utilitaire : il y a toujours de la « dépense pure et irrationnelle ». 

Pour Mauss, l'importance de sa découverte est telle qu'il ne suffit pas de constater le fait, il faut aussi en tirer des conclusions de morale. Revenons à « de l'archaïque », réinventons des moeurs de « dépense noble » et retrouvons « la joie de donner, le plaisir de la dépense artistique généreuse, celui de l'hospitalité et de la fête privée et publique ». Mauss défend une « nouvelle morale » fondée sur le respect mutuel et la générosité réciproque qui assurerait la redistribution de la richesse amassée : c'est là, pense-t-il, la condition du bonheur des individus et des peuples. Le respect des principes d'honneur, de désintéressement et de solidarité est, comme il l'a préconise, possible et souhaitable dans les groupes professionnels. Il est aussi possible de concevoir ce que serait une société où régneraient de tels principes : adoption de législation d'assurance sociale (contre le chômage, la maladie, la vieillesse), création de caisses d'assurance par les entreprises, mesures pour limiter les frais de spéculation et l'usure, développement de la solidarité corporative. Ethnographie et politique se rejoignent. Très actif au sein du mouvement coopératif et socialiste, Mauss a terminé la rédaction d'une longue série d'articles sur les « changes » et il vient de publier une importante « Appréciation sociologique du bolchevisme » (1924a) : il ne désespère pas de contribuer à définir une politique qui donnerait une direction consciente de la vie en commun à partir de tous les genres d'études.

 

Conclusion

 

Au moment de sa publication, l'« Essai sur le don » est bien reçu : un « mémoire important », un « article admirable »(Malinowski), une « étude très intéressante » (Boas). Mauss devient l'un des « leading students of primitive economics » (Lowie 1937 : 216). Mais dès 1929, dans Primitive Economics of New Zealand Maori, R. Firth conteste l'utilisation de la notion de hau. C'est le début d'une longue controverse. Mauss se serait-il fait berner par les indigènes ? 

Pour sa part, Henri Hubert reproche à son ami d'avoir mêlé des considérations de politique et de morale pratique : « Es-tu bien sûr, lui demande-t-il, que l'on puisse rattacher à ton "roc humain", comme tu le dis, le développement des assurances sociales ? [14] ». Mauss se serait-il laissé aveugler par ses convictions politiques ? 

L'œuvre de Mauss est traversée par des questions politiques. Chez lui, le savant et le citoyen cohabitent sans se nier l'un l'autre : le plus « politique » des universitaires consacre temps et énergie à la conquête pour le champ scientifique et universitaire de son autonomie (animation de revues scientifiques, création de l'Institut d'ethnologie, etc.). Mais pas plus qu'il ne néglige le point de vue des indigènes qu'il étudie, Mauss n'est indifférent aux inquiétudes et aux aspirations des militants qu'il côtoie dans le mouvement coopératif et socialiste. Ne se considère-t-il pas comme un des héritiers de Saint-Simon, qui « a fondé à la fois la sociologie et le socialisme, la spéculation positive et la pratique positive en matière sociale » (Mauss 1925c : 243) ?  

 

Références

 

ALPHANDÉRY P.

1927 « Publications récentes », Revue de l'histoire des religions, 93.

DURKHEIM Émile

1970 Le Socialisme. Paris : Presses Universitaires de France (édit. orig. 1928). [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

ÉCOLE PRATIQUE DES HAUTES ÉTUDES

1924 Annuaire de l'École pratique des hautes études, section des sciences religieuses. Melun.

FOURNIER Marcel

1993 « Marcel Mauss ou le don de soi », Archives européennes de sociologie, XXXIV : 325-338.

1994 Marcel Mauss. Paris : Fayard.

HAUDRICOURT A.-G.

1972 « Souvenirs personnels », L'Arc, 48 (« Marcel Mauss »).

LÉVY-BRUHL Henri

1927 « Compte rendu - Marcel Mauss : "Essai sur le don" », Revue d'histoire du droit français et étranger, 6, 4.

LÉVY-BRUHL Lucien

1926 « L'Institut d'ethnologie de l'Université de Paris », Annales de l'Université de Paris (mai).

LOWIE Robert H.

1937 The History of Ethnological Theory. New York : Farrar & Rinehart Inc.

MAUNIER R.

1909 « Sociologues et solidarité », Revue d'économie politique, XXIII.

1927 « Compte rendu de L'Année sociologique », Revue philosophique, CIV, 9-10 (juillet-décembre).

MAUSS Marcel

1913a « Compte rendu - Charles G. Seligman : The Melanesians of British New Guinea », L'Année sociologique, 12. Repris dans Mauss (1969, tome 3 : 34).

1913b Projet de création d'un Institut d'ethnologie. Fonds Hubert-Mauss, Archives du Collège de France.

1920 « L'état actuel des sciences anthropologiques en France », L'Anthropologie. Repris dans Mauss (1969, tome 3).

1921 « L'expression obligatoire des sentiments (rituels oraux funéraires australiens) », Journal de psychologie. Repris dans Mauss (1969, tome 3 : 269-278). [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

1923a « Allocution à la Société de psychologie », Journal de psychologie. Repris dans Mauss (1969, tome 3).

1923b « Contre la violence. Pour la force », La Vie socialiste (5 mars).

1923c « L'obligation à rendre les présents », L'Anthropologie, 33. Repris dans Mauss (1969, tome 3).

1924a « Appréciation sociologique du bolchevisme », Revue de Métaphysique et de Morale.

1924b « Gift-gift », in Mélanges offerts à Charles Andler par ses amis et ses élèves. Repris dans Mauss (1969, tome 3 : 46-51).

1924c « Rapports réels et pratiques de la psychologie et de la sociologie », Journal de psychologie normale et pathologique. Repris dans Mauss (1965 : 303-306). [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

1925a « Essai sur le don. Forme et raison de l'échange dans les sociétés archaïques », L'Année sociologique (nouvelle série). Repris dans Mauss (1965 : 143-279). [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

1925b « In memoriam. L'œuvre inédite de Durkheim et de ses collaborateurs », L'Année sociologique (nouvelle série, volume 1). Repris dans Mauss (1969, tome 3).

1925c « Saint-Simon et la sociologie », Revue de l'enseignement primaire, 10 mai.

1926a « Critique interne de la légende d'Abraham », Revue des études juives, 82 : 35-42. Repris dans Mauss (1969, tome 2 : 527-536).

1926b « Effet physique chez l'individu de l'idée de mort suggérée par la collectivité », Journal de psychologie, 23. Repris dans Mauss (1965 : 311-330). [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

1927 « Divisions et proportions de la sociologie », L'Année sociologique (nouvelle série, volume 2). Repris dans Mauss (1969, tome 3). [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

1931 « Les arts indigènes », Lyon universitaire, 14.

1933 « La sociologie en France depuis 1914 », La science française. Repris dans Mauss (1969, tome 3). [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

1965 Sociologie et anthropologie. Paris : Presses Universitaires de France (3e édition). [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

1969 Oeuvres (3 tomes). Paris : Éditions de Minuit.

SOUSTELLE J.

1967 Les Quatre Soleils. Souvenirs et réflexions d'un ethnologue au Mexique. Paris : Plon.

 

Marcel Fournier
Département de sociologie
Université de Montréal
C.P. 6128, succursale Centre- Ville
Montréal (Québec)
Canada H3C 3J7


[1]    Lettre de Henri Hubert à Marcel Mauss, 20 décembre [1919] (Fonds Hubert-Mauss, Archives du Collège de France).

[2]    Voir aussi Fournier (1994).

[4]    Mauss n'en critique pas moins « le tour religieux et un peu fou que Saint-Simon donne à ses écrits à partir de 18 17 » ; il se démarque aussi de « la mystique, de la religion encore plus folle » de ses disciples.

[5]    Les cours de Durkheim sur la « Morale professionnelle »(1937) et sur le « Socialisme » (1928), une étude sur « Le péché et l'expiation » (1922) et un ouvrage de Robert Hertz, Mélanges de sociologie religieuse et de folklore (192 8), etc.

[6]    Lettre de Henri Hubert à Marcel Mauss, 27 septembre 1919 (Fonds Hubert-Mauss, Archives du Collège de France).

[7]    Les trois premiers ouvrages dont on prévoit la parution sont : L'Éducation morale d'Émile Durkheim [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.], Les Conditions sociologiques de la mémoire de Maurice Halbwachs et Les Danses et Légendes de la Chine Ancienne de Marcel Granet.

[8]    Aux amis et anciens collaborateurs de L'Année sociologique, première série - Lucien Lévy-Bruhl, Georges et Hubert Bourgin, P. Lalo, Claude Maître, Jean Marx, Antoine Meillet, D. Parodi -, s'ajoutent quelques collègues - Charles Blondel et André Piganiol de l'Université de Strasbourg, Albert Bayet et Alexandre Moret de l'École pratique des hautes études et des étudiants : Max Bonnafous, Marcel Déat, Françoise Henry, etc.

[9]    Institut français de sociologie, procès-verbal de la séance du 5 mars 1923 (Fonds Hubert-Mauss, Archives du Collège de France). À ces cinq sections, s'ajoutent, au moment de la publication, deux autres sections : Sociologie criminelle et statistique morale ; Morphologie sociale.

[10]   Le Conseil de direction de l'Institut d'ethnologie comprend en outre : Antoine Meillet, professeur au Collège de France, Maurice Delafosse, gouverneur des Colonies et professeur à l'École des langues orientales, et Louis Finot, professeur au Collège de France et fondateur-directeur de l'École française d'Extrême-Orient.

[11]   Les trois premiers ouvrages des « Travaux et mémoires » de l'Institut d'ethnologie publiés en 1926 sont : Les Bas-reliefs des bâtiments royaux dAbomey (Dahomey) (Em.-G. Waterlot), L'Art néo-calédonien (G.-Ch. Luquet), et La Construction collective de la maison en Kabylie. Étude sur la coopération chez les Berbères du Djurjura (René Maunier).

[12]   Voir aussi le compte rendu que Mauss (1913a) avait fait du livre de son ami, l'anthropologue anglais Charles G. Seligman, The Melanesians of British New Guinea.

[13]   Pour qualifier les faits de suggestion collective ou de « déraison collective », Mauss utilisera à nouveau la notion de « faits totaux », car ces faits mettent en évidence une caractéristique - la « totalité » propre aux peuples qu'on appelle improprement des primitifs (voir Mauss 1926b).

[14]   Lettre de Henri Hubert à Marcel Mauss, Les Lecques, 21 décembre 1925 (Fonds Hubert-Mauss, Archives du Collège de France).


Retour au texte de l'auteur: Marcel Fournier, sociologue, Université de Montréal Dernière mise à jour de cette page le vendredi 30 mai 2008 20:39
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref