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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article d'Eugène Forsey, “Historique du mouvement ouvrier au Canada.” Un article publié dans L’ÉTUDE DE LA SOCIÉTÉ, Section 7: “Le monde du travail”, pp. 262-274. Textes recueillis et présentés par Jean-Paul Montminy. Québec: Les Presses de l’Université Laval, 1965, 517 pp. [Autorisation formelle accordée le 4 mai 2010, par le directeur général des Presses de l’Université Laval, M. Denis DION, de diffuser ce livre dans Les Classiques des sciences sociales.]

[262]

Eugène Forsey

intellectuel et sénateur canadien

Historique
du mouvement ouvrier
au Canada
.” [1]

Un article publié dans L’ÉTUDE DE LA SOCIÉTÉ, Section 7: “Le monde du travail”, pp. 262-274. Textes recueillis et présentés par Jean-Paul Montminy. Québec : Les Presses de l’Université Laval, 1965, 517 pp.


L'origine du syndicalisme ouvrier au Canada remonte beaucoup plus loin qu'on s'imagine généralement. En 1816, la Nouvelle-Ecosse avait déjà adopté une loi contre les syndicats ouvriers, c'est donc dire qu'il existait des syndicats dans la province à ce moment-là. Les imprimeurs se sont d'abord organisés à Québec en 1827 puis à Montréal et Hamilton en 1833. Les cordonniers de Montréal se formèrent en syndicats en 1827, suivis par les menuisiers en 1834 et les tailleurs de pierre en 1844. Les imprimeurs de York s'organisaient en 1832 et la Toronto Typographical Union existe depuis 1844. La plupart de ces syndicats, cependant, n'eurent qu'une brève existence et ce n'est qu'au milieu du dix-neuvième siècle qu'on commença lentement à jeter les bases du syndicalisme ouvrier tel qu'on le connaît au Canada à l'heure actuelle.

Presque dès sa naissance, le syndicalisme canadien a revêtu en grande partie un caractère "international", c'est-à-dire que la plupart de ses membres appartenaient à des syndicats dont le siège et le gros de l'effectif se trouvaient dans un autre pays. Les premiers syndicats "étrangers" étaient britanniques. L'Amalgamated Society of Engineers (ASE) fondait sa première unité locale au Canada en 1850 et en établissait trois autres en 1851. L'Amalgamated Society of Carpenters and Joiners (ASCJ) est devenue en 1860, le premier syndicat permanent dans les métiers de la construction. L'ASE a été absorbée par l'International Association of Machinists en 1920 et l'ASCJ par le United Brotherhood of Carpenters and Joiners en 1914, bien que certaines branches s'en soient retirées en 1922 pour redevenir des unités locales de l'organisation britannique jusqu'en 1925, alors que cette dernière s'est retirée officiellement. Les syndicats américains, beaucoup plus importants, on fait leur entrée chez nous en 1861 ; ce furent d'abord les mouleurs de fer, suivis par les mécaniciens de locomotives en 1864, [263] la National Typographical Society (maintenant l'International Typographical Union) et les cigariers en 1865, les Chevaliers de St-Crispin (cordonniers) en 1867 et les conducteurs de chemins de fer en 1868. Les tonneliers s'organisèrent vers la fin des années 1860 et les chauffeurs de locomotives au début des années 1870.

À la même époque, cependant, surgissaient divers syndicats locaux purement canadiens : charpentiers de navires (à Victoria et Québec, en 1862, à Halifax en 1863, à Saint-Jean et Québec en 1865), boulangers, tailleurs, briqueteurs, tailleurs de pierre, débardeurs et relieurs.

Jusqu'en 1871, les divers syndicats n'entretenaient guère de rapports entre eux, mais en cette année, cinq syndicats de métiers formèrent la Toronto Trades Assembly. Deux ans plus tard, Ottawa comptait un Conseil des métiers florissant qui a réussi, en 1873 et 1875, à élire un député ouvrier, M.D.J. O'Donoghue, à la législature provinciale. Hamilton avait son Conseil des métiers à peu près à la même époque. Toutes ces organisations sont disparues durant la crise des années 1870, mais non sans avoir jeté les bases d'une organisation nationale et gagné une victoire retentissante dans le domaine législatif.

En 1873, la Toronto Trades Assembly convoqua dans cette ville un congrès des syndicats, auquel assistèrent des délégués de 31 unités locales de 14 syndicats, tous de l’Ontario ; des lettres d'approbation furent reçues de syndicats de typographes de Québec et de Montréal. Il fut décidé à ce congrès d'établir une organisation centrale nationale, le Syndicat canadien du Travail, qui s'est réuni de nouveau en 1874, 1875, 1876 et 1877. La crise économique, cependant, porte un coup aussi fatal à l'organisation nationale qu'aux conseils locaux et, de 1878 à 1882, il ne se trouvait plus même l'ombre d'une centrale syndicale nationale.

La victoire dans le domaine législatif découlait d'une grève des imprimeurs de Toronto en 1872, une partie du mouvement en faveur des neuf heures. La plupart des maîtres imprimeurs, ayant à leur tête M. George Brown du journal Globe, s'opposaient violemment aux syndicats. Ils firent arrêter tous les 24 membres du comité de la Typographical Union sous une accusation de conspiration séditieuse. Les travailleurs avaient supposé en toute confiance que les syndicats étaient des institutions légales, mais ils venaient de découvrir le contraire. Ils n'avaient profité d'aucune des lois britanniques libérant les syndicats du préjudice dont ils étaient frappés sous le Droit commun en tant que conspirations ou coalitions entravant la liberté de commerce. Vis-à-vis de la loi, les syndicats canadiens se trouvaient encore au dix-huitième siècle, à l'âge précédant la Révolution industrielle. Ils se mirent immédiatement à l'œuvre pour obtenir une législation canadienne correspondant à celle de Grande-Bretagne. Sir John A. Macdonald, ravi de l'occasion de gagner les suffrages des travailleurs et de "servir aux libéraux" deux mesures législatives inattaquables, à la Gladstone, s'empressa [264] de faire adopter par le Parlement fédéral une loi des syndicats ouvriers et une loi modifiant la législation pénale (1872), calquées sur les lois britanniques de l'année précédente. Ce fut là le premier grand succès politique des syndicats canadiens. La poursuite fut abandonnée et la grève se termina par un succès ouvrier.

L'adoption de la politique nationale de protection tarifaire en 1879 et la construction du Pacifique Canadien en 1881-1885 ranimèrent l'industrie canadienne ; les syndicats ouvriers suivirent le mouvement. Les métiers de bâtiment accusèrent une expansion marquée. Les syndicats ferroviaires accompagnèrent les chemins de fer vers l'Ouest. En 1879, les mineurs de charbon de la Nouvelle. Ecosse établirent le premier syndicat de houilleurs de l'Amérique du Nord. Cette organisation, la Provincial Workmen’s Association, a été l'un des premiers syndicats industriels, car elle acceptait tous les travailleurs de l'industrie sans tenir compte de leur métier. Elle devint presque pendant quelque temps un "syndicat unique" d'ordre provincial, englobant non seulement les houilleurs et les travailleurs des quais de charbon, mais aussi les travailleurs du fer et de l'acier, les cheminots, les employés de tramways, les souffleurs de verre, les travailleurs de la chaussure, les commis des magasins de détail et quelque quatre-vingt-dix autres catégories. Les Knights of Labor (Chevaliers du Travail) sont arrivés au Canada en 1881 ; ce groupe, qui était aussi sur le plan industriel, est resté actif au Canada longtemps après sa disparition presque complète aux États-Unis. Sans tenir compte des Chevaliers, plus d'une centaine de nouvelles unités locales vinrent s'ajouter, entre 1880 et 1890, à celles qui avaient survécu à la crise économique. Près de la moitié de ces unités se trouvaient en Ontario, 21 dans les provinces Maritimes, 19 dans le Québec et 18 dans l'Ouest.

Il y eut renaissance aussi des conseils locaux. Le Conseil des métiers et du travail de Toronto fut organisé en 1881, le Conseil de London en 1883, le Conseil de Montréal en 1.885 et d'autres à Ottawa, Brantford, Hamilton, Vancouver et Victoria, à différentes dates entre 1880 et 1890. Au commencement, les Chevaliers du Travail s'associèrent à ces Conseils, s'y intéressant souvent d'une façon très active, mais vers l'année 1890 ils constituèrent leurs propres assemblées régionales à Montréal, Québec, Toronto, St-Catharines et St-Thomas.

La renaissance des Conseils fut accompagnée de la réapparition de l'organisme central national. En 1883, un comité du Conseil de Toronto invita toutes les organisations ouvrières à envoyer des délégués à une réunion nationale, laquelle donna naissance au Canadian Labour Congress constitué de délégués d'organismes ouvriers et d'assemblées des Chevaliers du Travail de la province d'Ontario exclusivement.

En septembre 1886, trois mois avant la fondation de l’American Federation of Labor (Fédération américaine du Travail), le Conseil des métiers et du travail [265] de Toronto convoqua le Congrès de nouveau et le Canadian Trades and Labor Congress fut formé ; ce Congrès devint le Trades and Labor Congress en 1888 et le Trades and Labor Congress of Canada (Congrès des Métiers et du Travail du Canada) en 1892. La première réunion comptait 109 délégués, dont une femme. Sauf un délégué de la ville de Québec, tous venaient d'Ontario et au moins 84 étaient Chevaliers du Travail. Les Chevaliers avaient aussi une majorité des délégués aux réunions de 1887-1889, 1891, 1893 et 1894 et un Chevalier présida le Congrès de 1886 à 1892 inclusivement. Après 1894, les Chevaliers déclinèrent rapidement et le Congrès les expulsa en 1902.

Jusqu'en 1896, le Congrès était loin d'être un organisme national. Aux réunions de 1887 et de 1888, tous les délégués venaient d'Ontario. A partir de 1889, le Québec envoya toujours une délégation assez nombreuse ; en 1890, la Colombie-Britannique était représentée par trois délégués et, en 1895, le Manitoba en comptait un ; en 1896, la Colombie-Britannique en avait deux et le Manitoba, un. Le Nouveau-Brunswick, 1'lle-du-Prince-Edouard et la Nouvelle-Ecosse envoyèrent leur premier délégué en 1897, 1900 et 1903 respectivement, mais en 1905 et 1906, aucun délégué ne représenta les provinces Maritimes. Des bureaux provinciaux furent élus en 1895 pour la Colombie-Britannique et le Manitoba, en 1896 pour le Nouveau-Brunswick et en 1901 pour la Nouvelle-Ecosse et l'Ile-du-Prince-Edouard. La Saskatchewan et l'Alberta furent représentés dès qu'ils furent érigés en province. Cependant, même en 1901, la dernière année avant que l'unité fut détruite par l'expulsion des Chevaliers du Travail et d'autres organisations en concurrence avec les syndicats de l'American Federation of Labor, le Congrès ne comptait que 8,381 membres dans tous ses syndicats et ses dépenses pour l'année ne s'élevaient qu'à $809.88. En 1902, on employa pour la première fois "une sténographe et une machine à écrire", ce qui "nécessita l'aménagement d'un petit bureau comprenant deux pupitres et une chaise".

À partir de 1896, le syndicalisme ouvrier au Canada eut à faire face au problème de la conciliation de la solidarité syndicale continentale et de l'autonomie canadienne. La Canadian Labour Union de 1873-1877 n'avait pas eu ce problème à envisager, vu qu'il n'existait aucune centrale américaine concurrente. Il en fut de même d'abord pour le Trades and Labor Congress, en partie parce que son activité se limitait presque entièrement au domaine législatif (la plupart de ses syndicats étaient des unités locales d'organisations détenant une charte de l'American Federation of Labor ou des assemblées locales des Chevaliers du Travail) et en partie parce qu'il ne semble avoir eu aucun rapport formel avec l'American Federation of Labor avant 1896. Cette année-là, le Congrès porta plainte à la Fédération au sujet de l'application aux travailleurs canadiens de la loi américaine concernant la main-d'œuvre étrangère embauchée par contrat. La Fédération proposa en réponse que le Congrès envoie un délégué fraternel à son congrès. Bien qu'il n'acceptât pas l'invitation, le Congrès adressa une invitation semblable à la Fédération en 1898, et en 1899 commença l'échange de délégués qui a duré aussi longtemps que le Congrès lui-même.

[266]

En expulsant les Chevaliers du Travail et les organisations "doubles" purement canadiennes en 1902, le Congrès se rangea formellement du côté du syndicalisme international par opposition au mouvement national. Cependant, il n'accepta aucunement le rôle secondaire que la Fédération voulut à plusieurs reprises lui imposer. Dès 1897, il chercha sans cesse à obtenir que les unions internationales, ou la Fédération en leur nom, remettent au Congrès les cotisations que ces unions versaient à la Fédération par rapport à leurs membres canadiens. Il trouva finalement la solution au problème en amenant les unions internationales à affilier directement leurs effectifs des chartes à des unités locales au Canada. Elle essaya aussi à plusieurs reprises, mais sans succès, de refuser au Congrès le droit d'accorder des chartes à des conseils locaux des métiers et du travail, et il fallut au Congrès 35 ans (de 1910 à 1945) pour gagner une victoire complète. Non sans efforts, la Fédération réussit en 1939 à obliger le Congrès à expulser tout un groupe de syndicats faisant partie du Congress of Industrial Organisations (CIO). Une tentative du même genre en 1946 pour imposer l'expulsion des Machinists essuya un refus vif et résolu et échoua complètement. Le Congrès décida alors de d'affirmer en instituant une série de départements et en s'assurant un personnel complet d'organisation, et de préciser en même temps le statut qu'il estimait avoir et devait avoir à titre de centrale canadienne pleinement autonome.

Aucun de ces différends, toutefois, n'a réellement troublé l'harmonie fondamentale existant entre le Congrès et la Fédération. Le Congrès, qui était constitué surtout d'unions internationales dont les membres américains étaient affiliés à la Fédération, est resté fidèle au mouvement international. Il savait que, dans la plupart des industries, seules les unions internationales avaient le personnel, l'expérience et l'argent nécessaires pour s'occuper de là tâche qui s'imposait.

Dans l'entre-temps, le mouvement ouvrier canadien tout entier avait été "déchiré par des schismes et épuisé par des hérésies". Le nationalisme, l’organisation par industrie au lieu de l'organisation par métier, les idées révolutionnaires et un mélange de nationalisme et de confessionnalisme jouèrent tous leur rôle. Les syndicats expulsés par le Congrès des Métiers et du Travail en 1902 ne tardèrent pas à former le National Trades and Labour Congress, qui devint en 1908 la Provincial Workmen's Association de la Nouvelle-Ecosse. En 1919, immédiatement après la grève générale à Winnipeg et en partie comme résultat de cette grève, un bon nombre de syndiqués de l'Ouest, attirés par le syndicalisme industriel révolutionnaire, se séparèrent du Congrès des Métiers et du Travail et formèrent la One Big Union. De 1901 à 1921, de petits syndicats catholiques (dont certains étaient d'anciennes assemblées des Chevaliers du Travail) s'établirent sur le plan local dans le Québec avec l'encouragement des autorités religieuses ; ils formèrent en 1921 la Confédération des travailleurs catholiques du Canada. Cette organisation, d'abord taxée de groupement à peine voilé de [267] "syndicats de compagnies" par les syndicats orthodoxes auxquels elle n'inspirait pas confiance, a depuis dix ans abandonné le confessionnalisme et le nationalisme étroits de ses années de début pour devenir l'une des organisations ouvrières les plus militantes au pays. En 1927, la Canadian Federation of Labour et autres syndicats nationaux (notamment le Canadian Brotherhood of Railway Employees, qui avait été fondé en 1908, s'était joint au Congrès des Métiers et du Travail en 1917, pour en être expulsé en 1921) formèrent le All Canadian Congress of Labour (Congrès pancanadien du travail) dédié au syndicalisme industriel et national. En 1935, les syndicats exclusivement canadiens d'un type ou d'un autre, sans oublier la Communist Workers' Unity League, comptaient près de la moitié de l'affiliation syndicale au Canada. Quelques années plus tard, cependant, le syndicalisme international avait réaffirmé sa prédominance, et depuis longtemps déjà environ 70 p. 100 de tous les syndiqués canadiens sont membres de syndicats internationaux.

La question épineuse des années 1930 aux États-Unis touchant les mérites relatifs de l'organisation par industrie ou par métier eut de bien faibles échos au Canada. Le Congrès des Métiers et du Travail avait accepté les deux types et montrait très peu d'empressement à expulser les divisions canadiennes du (CIO). Sommé par l'American Federation of Labor d'expulser les syndicats affiliés au (CIO) ou de perdre ceux de l'AFL (dont les membres canadiens étaient alors beaucoup plus nombreux), il n'eut réellement pas le choix et en 1939 les syndicats du (CIO) furent abandonnés. Ceux-ci formèrent immédiatement un comité canadien du (CIO), qui devint la quatrième centrale canadienne.

Pendant que se produisaient tous ces changements, les quatre métiers des services roulants des chemins de fer (les conducteurs, mécaniciens, chauffeurs et agents de train) demeurèrent non affiliés à un organisme central, bien que chacun d'eux eût à l'occasion envoyé des délégués aux réunions du Congrès des Métiers et du Travail et qu'en 1896 leur Conseil conjoint d'action législative eût envoyé deux délégués, dont l'un fut élu membre du bureau du Congrès. Les "quatre grands" cependant, collaborèrent entre eux et avec deux syndicats ferroviaires du Congrès pour former le Comité national conjoint d'action législative.

Le premier pas vers l'unité se fit tard en 1939 (paradoxalement il créa la première opposition efficace au Congrès des Métiers et du Travail). Le Congrès pan-canadien et le Comité canadien du (CIO) convinrent de fusionner et de former le Canadian Congress of Labour (Congrès canadien du Travail), qui fut établi en 1940 avec l'autonomie complète non seulement pour lui-même mais pour les divisions canadiennes des syndicats, du (CIO),Contre toute attente, le nouveau Congrès non seulement survécut, mais il grandit et s'accrut ; il organisa des industries de production en grande série et fut un novateur en recherches ouvrières, en éducation des travailleurs et en Relations publiques. Durant les [268] 15 années qui suivirent, les deux congrès adoptèrent presque chaque année des résolutions en faveur de l'unité et, à partir de 1948, l'action conjointe concernant diverses questions devint de plus en plus courante. Un comité consultatif conjoint des deux Congrès, de la Confédération des travailleurs catholiques du Canada et du Comité national conjoint d'action législative, fut établi en 1951, mais ne dura qu'un an. Aussi longtemps que les deux organismes américains furent en désaccord, les organisations correspondantes au Canada ne purent réaliser que peu de progrès quant à la fusion, vu que les dispositions de la constitution du Congrès des Métiers et du Travail lui interdisaient en fait d'affilier tout syndicat dont les objectifs étaient semblables à ceux des syndicats de l'American Federation of Labor. Lorsqu'on décida aux États-Unis de parler unité, cet obstacle disparut. À la fin de 1953, les deux Congrès canadiens nommèrent un comité conjoint d'unité, qui rédigea d'abord en 1954 un "accord de non-débauchage syndical" (d'après lequel les syndicats des organisations rivales s'engageaient à ne pas s'enlever respectivement leurs membres), et un "accord de fusion" qui entra en vigueur en 1955 après ratification par les deux Congrès. La réunion d'institution du Congrès du Travail du Canada (CTC) unifié eut lieu en avril 1956. En janvier 1957, les éléments faibles mais respectables qui restaient de la One Big Union, autrefois puissante et d'esprit révolutionnaire, se joignirent au nouveau Congrès, suivis par les chauffeurs de locomotives en février et les agents de train en septembre. Dans l'intervalle, le Congrès et la Confédération des travailleurs catholiques du Canada avaient voté en faveur de l'affiliation de ce dernier organisme, et des négociations se poursuivent en ce sens. Les seuls syndicats d'importance qui demeurent en dehors du mouvement unitaire sont les deux syndicats à domination communiste expulsés par le Congrès canadien du Travail ; les United Mine Workers, qui se sont exclus eux-mêmes en ne versant pas les cotisations requises au Congrès ; les conducteurs de trains et les mécaniciens de locomotives ; et les mécaniciens d'appareils fixes, suspendus par le nouveau Congrès. L'effectif du CTC (complètement autonome bien que composé de syndicats internationaux) s'élève à quelque 1,100,000, soit plus de 80 p. 100 de tous les syndiqués au Canada. On trouve des syndicats organisés par industrie ou par métier et des syndicats nationaux et internationaux.

L'historique complet des centrales syndicales, comme aussi du mouvement ouvrier, il va sans dire, n'a pas encore été fait. La documentation est volumineuse et en grande partie intéressante, non seulement par elle-même mais aussi par le jour qu'elle jette sur l'histoire sociale de l'ensemble du Canada et sur son histoire politique.

Sous certains rapports, le mouvement syndical canadien a changé au point de n'être presque plus reconnaissable depuis la fondation du premier congrès ouvrier il y a près de trois quarts de siècle. Certaines revendications qui figuraient au premier plan dans les premières années ont presque complètement disparu, [269] parfois parce qu'elles ont été incorporées à la législation et parfois à cause des circonstances qui les ont rendues désuètes ou de changements dans le courant des idées. D'autres revendications du début paraissent encore au programme de principes du présent Congrès du Travail du Canada.

Des premières revendications qui ont complètement disparu, la plus en évidence est peut-être celle qui visait la tempérance. En 1883, le Congrès adoptait une résolution unanime d'« appui chaleureux » à l'égard de "toute législation qui tendrait à réduire la consommation de boissons enivrantes". En 1886, les mots devenaient "tout effort pratique". La réunion de 1888 réitéra ce principe. Celle de 1886 reçut effectivement une délégation de la Dominion Alliance et autorisa le conseil exécutif du Congrès de collaborer avec l'Alliance. Les réunions de 1889 et de 1890 invitèrent toutes les organisations ouvrières à user de leur influence en vue d'encourager la tempérance. La réunion de 1890 rejeta par seulement 30 voix contre 23 une résolution demandant la prohibition totale. La réunion de 1898 présenta une motion en vue d'un plébiscite sur la prohibition.

Chose tout aussi surprenante, jusqu'à 1902, le Congrès des Métiers et du Travail demanda continuellement l'arbitrage obligatoire des différends ouvriers et adopta plusieurs résolutions en faveur de l'incorporation des syndicats, deux sujets qui sont aujourd'hui proscrits dans le mouvement ouvrier. La taxe unique sur la propriété foncière proposée par Henry George revient infailliblement tous les ans jusqu'en 1899, et une formule adoucie de cette requête reparut au programme de principes jusqu'en 1912 au moins. L'initiative et le referendum firent leur apparition dès 1892 et figuraient encore au programme en 1913. En 1887, le Congrès vota en faveur de l'abolition des postes de lieutenant-gouverneur et de l'élection du gouverneur général. Cette dernière proposition fut adoptée de nouveau en 1890 par 39 voix contre 14. La réunion de 1893 désirait l'abolition du poste de haut-commissaire à Londres. Celles de 1892 et de 1893 demandaient la tenue d'un vote populaire sur "le maintien de notre statut colonial ; une fédération impériale ; l'indépendance du Canada ; l'union politique avec les États-Unis". Les réunions de 1886 à1888 voulaient que le gouvernement émette toute la monnaie ; celle de 1893 demandait "la démonétisation de l'or et de l'argent". La réunion de 1891 demandait que les produits des employeurs antisyndicaux soient privés de la protection tarifaire ; celle de 1893 "se déclara en faveur du libre échange" ; celle de 1902 s'opposa à toute hausse des tarifs ; celles de 1903 et de 1905 censuraient les propositions de M. Chamberlain visant les tarifs de protection en Grande-Bretagne. Les réunions de 1907, 1908 et 1909 déclaraient carrément : "vu que les capitalistes du monde sont les auteurs de la guerre, ils devaient livrer eux-mêmes leurs batailles", et celui de 1909 autorisait le conseil exécutif à "se charger de convoquer une réunion de tous les citoyens canadiens amis de la paix" en vue de protester contre l'augmentation des dépenses pour fins militaires. La réunion de 1911 appuyait une grève générale contre la guerre. Les réunions de 1888-1890 et de 1900 censuraient la formation [270] manuelle dans les écoles. Les réunions de 1886 à 1889 invitaient les gouvernements à cesser de verser des octrois aux universités et collèges et à donner plutôt cet argent aux écoles. La réunion de 1909 "adressa une prière fervente pour que la lumière du bon sens puisse finalement venir éclairer l'Association des manufacturiers canadiens".

Les premières demandes d'une journée de repos sur sept, de lois contre le paiement des ouvriers en nature, de bureaux provinciaux et fédéral de la statistique ouvrière, d'un ministère du Travail, d'un ministre du Travail distinct, de lois sur les accidents du travail, du suffrage universel, du suffrage féminin (1891), ont toutes été obtenues sous une forme ou une autre. La journée de neuf heures est devenue celle de six heures et les résolutions violemment restrictives des premiers temps contre l'immigration (d'abord contre les Chinois, puis contre les japonais, ensuite contre les Hindous, et en tout temps contre l'indigent) sont devenues "l'immigration organisée en vue du plein emploi", avec un Conseil national représentatif chargé de recevoir continuellement la loi, ses règlements et la politique et de suggérer des modifications. Les premières demandes qui figurent encore au programme du Congrès du Travail du Canada comprennent l'abolition du Sénat, l'étatisation des banques et des services d'utilités publiques, un salaire minimum vital, l'éducation obligatoire gratuite et l'appui aux coopératives.

Un sujet qui a été très en vogue dans les premières réunions du Congrès des Métiers et du Travail et qui semble par la suite avoir été oublié pendant toute une génération est la collaboration avec les cultivateurs. En 1886, le Congrès instituait un comité chargé de s'aboucher avec la Dominion Grange en vue d'« assurer une certaine mesure d'action concertée » à l'égard de la loi sur les fabriques. En 1893, le conseil exécutif du Congrès se réunit avec des représentants de la Grange, des Patrons of Industry (autre organisation d'agriculteurs) et de la Social Problems Conference, et un "programme" commun fut adopté. La même année, la réunion établit un comité permanent avec les Patrons "aux fins de... établir un projet d'union des effectifs ouvriers (ruraux et urbains)", et organisa un scrutin parmi les organisations affiliées en vue d'autoriser l'affiliation de la Grange, des Patrons et des Associations de la taxe unique. On considéra que les réponses des filiales étaient trop clairsemées pour assurer une règle de conduite. Néanmoins, en 1894, la constitution fut modifiée aux fins d'admettre les Patrons et leur accorder trois délégués. Il n'en résulta rien et l'on supprima la modification l'année suivante. Nullement désemparé, le Congrès reconnut en 1896 l'avantage de s'unir avec les Patrons et chargea le conseil exécutif de se faire représenter à toute réunion convoquée par cette organisation. La réunion de 1907 comptait un délégué de la division canadienne de l'American Society of Equity, une autre organisation d'agriculteurs, et le bureau d'Alberta du Congrès demanda que les délégués étudient les possibilités d'union du "groupe des Métiers et du Travail" avec cette société. En 1910, le conseil [271] exécutif recommanda l'établissement d'un comité spécial aux fins d'organiser la collaboration avec les cultivateurs. À partir de 1911, le Congrès des Métiers et du Travail et le nouveau Congrès canadien du Travail s'occupèrent dans une certaine mesure de la collaboration ouvrière-agricole. Le premier, en 1911, "reconnut que le bien-être de l'ouvrier est inséparablement lié à la prospérité du cultivateur" et, craignant que "bon nombre de cultivateurs ne soient forcés d'abandonner la terre et d'entrer en concurrence avec les travailleurs, d'où baisse possible des salaires", exprima "sa sympathie à l'égard des cultivateurs et promit son appui pour obtenir une juste protection contre les dettes et assurer l'égalité des prix des produits agricoles". La même année, le Congrès canadien du Travail se déclara en faveur de la collaboration avec les associations de cultivateurs partout où la chose était possible et de l'aide du gouvernement en vue de la vente des produits agricoles dans les pays amis. L'année suivante, le Congrès des Métiers et du Travail demanda au gouvernement d'aider les cultivateurs à combler le manque de machines et de services agricoles. En 1946, les deux congrès appuyèrent la grève des cultivateurs d'Alberta ; le plus ancien se déclara en faveur d'une "collaboration étroite" entre le Congrès et ses organismes provinciaux et les organisations agricoles nationales et provinciales ; l'autre proposa une conférence des "organisations ouvrières et des porte-parole officiels des cultivateurs", en vue d'un effort commun pour réaliser "l'unité complète... dans les demandes de sécurité sociale". En 1947, le Congrès canadien du Travail affirma son appui aux cultivateurs "dans leurs efforts en vue d'obtenir des prix raisonnables pour leurs produits", et en 1948, il s'engagea à faire tout son possible pour encourager la collaboration "entre les groupes agricoles, enseignant et ouvrier à l'égard de buts et d'objectifs communs", à l'exemple de l'Occupation Group Council de Saskatchewan. En 1949, le président de l'Alberta Farmers' Union (déjà affiliée au Conseil des Métiers et du Travail de Calgary) prononçait un discours de bienvenue devant le Congrès des Métiers et du Travail. En 1951, le Congrès canadien du Travail demandait au gouvernement d'établir avec les organisations agricoles "une juste structure des prix agricoles". L'année suivante, le Congrès des Métiers et du Travail entendait un autre discours de bienvenue, cette fois de la part du président de l'Interprovincial Farm Union Council, et le Congrès canadien du Travail se déclarait en faveur d'un "comité national de coordination des organisations agricoles et ouvrières". De 1953 à 1955, les deux congrès ont reçu chaque année des porte-parole des cultivateurs ; le Congrès du Travail du Canada a maintenu la coutume à sa réunion d'institution en 1956. En février 1954, les deux congrès et l'Interprovincial Farm Union Council ont établi le Conseil économique des cultivateurs et des travailleurs syndiqués, qui existe toujours.

Un autre sujet de grande importance qui a paru sous une forme ou une autre dans presque toutes les réunions nationales des organisations ouvrières depuis 1883 est la question de l'action politique. Le Canadian Labor Congress de 1883 déclarait à l'unanimité que "la classe ouvrière du Dominion ne sera jamais [272] représentée convenablement au Parlement et n'obtiendra jamais justice en matière de législation tant qu'elle ne sera pas représentée par des personnes sorties de ses rangs et partageant ses opinions". La réunion de 1886 réaffirmait ce principe et les membres s'engagèrent à faire tous leurs efforts, quand la chose serait possible, pour présenter des candidats aux élections locales et fédérales ou, quand la chose serait "jugée inopportune", à appuyer le candidat "qui s'engageait à voter pour le plus grand nombre de points du programme du Congrès". La réunion de 1887 omit cette dernière partie et adopta le reste à l'unanimité. La réunion de 1889 établit un comité chargé d'étudier la formation d'un "parti politique indépendant", et recommanda aux organisations de désigner des candidats où il était possible et, ailleurs, d'appuyer le parti qui était prêt à faire le plus pour le travail syndiqué. En 1892, sur la motion de deux délégués Canadiens français, la réunion résolut d’« étudier l'opportunité de la formation d'un parti ouvrier ». Partiellement par suite de cette étude peut-être, la réunion de 1893 invita ses organisations affiliées à répondre à quatre questions : 1.- Etes-vous en faveur du présent régime industriel ? 2.- Etes-vous en faveur du régime coopératif de distribution productive (sic) et d'échange dit coopératif ? 3.- Etes-vous en faveur d'un régime de gouvernement communiste ? 4.- Pouvez-vous proposer un meilleur régime de gouvernement que les régimes ci-haut ? (Chose étrange, il n'y eut presque pas de réponses). En 1895, la réunion se prononça à une très faible majorité en faveur de l'admission de "secteurs du parti ouvrier socialiste" (résolution révoquée en 1896) et résolut que "les organisations ouvrières devaient s'unir en vue d'action politique indépendante".

Dans l'entre-temps, certains organismes s'étaient effectivement occupés d'action politique. Durant les années 1880, les Conseils des Métiers et du Travail de Toronto et de Hamilton avaient nommé des candidats aux élections provinciale et fédérale ; en 1886, les Chevaliers du Travail avaient trois candidats provinciaux à Montréal. Aucun d'entre eux ne fut élu et, à toute fin pratique, le Congrès semble n'avoir compté pendant plusieurs années que sur ce qui devait plus tard devenir la pratique courante de rencontrer les ministres fédéraux et provinciaux pour leur soumettre ses idées. Cependant, rendu à 1899, le bureau d'Ontario avait décidé que cette méthode était inefficace et que "le seul moyen d'obtenir du gouvernement ce qui nous revient de droit, c'est d'être des gens sympathiques à la cause ouvrière". La même année, le Conseil des Métiers et du Travail de Winnipeg et le parti ouvrier de Winnipeg désignaient M.A.W. Puttee comme leur candidat à la Chambre des communes, et le Congrès, présidé par M. Ralph Smith, député de Nanaïmo (C.-B) au provincial, décidait de demander à ses filiales si elles étaient en faveur d'un parti ouvrier indépendant et si elles appuieraient ses candidats. Le projet fut ratifié par un vote de 1,424 contre 167 et seuls trois organismes sur quarante-quatre le rejetèrent. La réunion de 1900 décida que le résultat justifiait le Congrès de "prendre les mesures qu'il jugeait à propos en vue de pousser le projet". Elle demanda aussi aux mineurs de Nanaimo de nommer le président Smith comme leur candidat à la Chambre des Communes. MM. Smith et Puttee furent l'un et l'autre élus et un autre candidat ouvrier fut défait au Manitoba après une lutte serrée. Un [273] nouveau président du Congrès, M. John Flett, déclarait en 1903 que les rencontres avec le gouvernement fédéral étaient inutiles et que le mouvement ouvrier au Canada devrait suivre le mouvement britannique et élire des candidats ouvriers au Parlement. En 1904, il revenait sur le même sujet et pendant trois ans les rencontres annuelles furent abandonnées en faveur d'un conseiller en matière parlementaire chargé de s'occuper à plein temps des intérêts du Congrès durant la session. En 1903, 1904 et 1905, les réunions adoptèrent des résolutions favorisant la nomination de candidats ouvriers indépendants partout où la chose était possible. En 1906, le président du Congrès, M. Alphonse Verville, était élu à la Chambre des Communes pour la circonscription de Maisonneuve (Montréal) et il exprimait le vœu de voir "au moins une douzaine" de membres ouvriers au prochain Parlement. En réponse, la réunion adopta la politique d'action politique que le Congrès des Métiers et du Travail devait conserver durant tout le reste de son existence. Le Congrès devait appuyer l'élection de représentants ouvriers au Parlement et aux assemblées législatives ; ses bureaux provinciaux devaient convoquer des réunions de syndiqués et de personnes sympathiques à la cause ouvrière pour établir "les groupements nécessaires" ; puis le Congrès devait s'effacer après avoir "recommandé" son propre programme de principes comme programme de "cet effort indépendant". Le Parti ouvrier canadien fut donc créé en Ontario et dans le Québec, le Manitoba, la Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse. Bien que lancé avec grand bruit, surtout en Ontario, il eut en général peu de succès ; il remporta son seul succès appréciable en Ontario en 1919 quand onze candidats ouvriers furent élus et deux ministres ouvriers se joignirent à la coalition des cultivateurs et des travailleurs. Quelques secteurs qui existaient encore s'allièrent à la Fédération pour la communauté coopérative (FCC) en 1932 et 1933, de même que le Parti ouvrier indépendant du Manitoba qui avait élu deux membres à la Chambre des Communes.

Le Congrès Canadien du Travail a appuyé catégoriquement la FCC en 1943 et lui a toujours maintenu son appui par la suite. Il a institué des comités d'action politique en vue de mettre sa politique en œuvre. Ses efforts ont sûrement aidé la FCC à prendre le pouvoir en Saskatchewan en 1944 et à le conserver depuis ; à se maintenir à titre d'opposition officielle en Colombie-Britannique pendant la plus grande partie des derniers vingt ans ; à devenir brièvement, bien que pour la deuxième fois, l'opposition officielle en Ontario de 1948 à 1951 ; à gagner quelques sièges à la législature de la Nouvelle-Écosse ; et à faire élire ses candidats aux Communes dans certaines circonscriptions ouvrières aux élections de 1945, 1949, 1953 et 1957. En général, cependant, les résultats ne furent pas ceux que le Congrès avait espérés.

Le Congrès du Travail du Canada a adopté à sa première réunion une politique de compromis en matière d'action politique ; il laisse toute liberté à ses fédérations provinciales, ses conseils locaux et, évidemment, ses filiales autonomes d'adopter la politique qui leur convient, et il a autorisé son comité d'éducation politique à entamer, sous la direction du Conseil exécutif, les discussions [274] avec d'autres syndicats ouvriers libres, les principaux groupements agricoles, le mouvement coopératif, la FCC et "les autres partis qui se sont engagés à appuyer le programme législatif" du Congrès, en vue "d'étudier et de développer l'action coordonnée dans les domaines législatif et politique" jusqu'ici aucune discussion du genre n'a eu lieu. Les Fédération d'Ontario et de Colombie-Britannique et d'importants Conseils locaux ont donné leur adhésion à la FCC et plusieurs syndicats locaux qui appuyaient déjà la FCC lui ont maintenu leur appui.

Il ne s'agit ici forcément que d'une ébauche du mouvement ouvrier au Canada s'inspirant d'impressions. On ne mentionne pas l'attention constante apportée par les Congrès aux problèmes particuliers des syndicats, aux questions d'hygiène et de sécurité, aux conditions de travail et à une foule d'autres sujets ; on ne parle pas non plus des divers syndicats qui composent les centrales et qui sont à plusieurs points de vue plus importants car ce sont les syndicats affiliés qui s'occupent des négociations collectives, qui possèdent la plus grande partie des fonds et qui sont pleinement autonomes. Il est à peine question de l'importante Confédération des travailleurs catholiques du Canada. Mentionnons de nouveau que l'historique des Congrès, et évidemment celui des syndicats particuliers, est encore à faire. D'ici là, tout exposé ne peut être que préliminaire, à titre d'essai et sujet à une révision rigoureuse.

Statistique syndicale.- Le tableau 33 porte sur les effectifs syndicaux au Canada.

Tableau 33.
Effectifs syndicaux au Canada, 1927-1957

Année

Membres

Année

Membres

Année

Membres

1927

290,282

1937

383,492

1947

912,124

1928

300,602

1938

381,645

1948

977,594

1929

319,476

1939

358,967

1949

1,005,639

1930

322,449

1940

362,223

_________

1931

310,544

1941

461,681

1951 [2]

1,028,521

1952

1,146,121

1932

283,096

1942

578,380

1953

1,219,714

1933

285,720

1943

664,533

1954

1,267,911

1934

281,274

1944

724,188

1955

1,268,207

1935

280,648

1945

711,117

1956

1,351,6,52

1936

322,746

1946

831,697

1957

1,386,185



[1] Eugène FORSEY, "Histoire du mouvement ouvrier au Canada", Annuaire statistique du Canada 1957-1958. Bureau fédéral de la statistique, Ottawa, p. 816-824.

[2] Les chiffres de 1949 et des années antérieures sont arrêtés au 31 décembre ; les chiffres depuis 1951, au ler janvier.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le mardi 12 novembre 2013 10:50
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie retraité du Cégep de Chicoutimi.
 



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