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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Didier FASSIN, “Maladie et médecine.” Un texte publié dans l’ouvrage sous la direction de Didier Fassin et de Yannick Jaffré, Sociétés, développement et santé, pp. 38-49. Paris: Les Éditions Ellipses, 1990, 287 pp. Collection Médecine tropicale. [Autorisation accordée par l'auteur le 28 octobre 2008 de diffuser ce texte dans Les Classiques des sciences sociales.]

Didier FASSIN

Anthropologue, sociologue et médecin,
Professeur à l’Université Paris 13
et Directeur d’études à l’EHESS, Directeur de l'Iris

Maladie et médecine”.

Un texte publié dans l’ouvrage sous la direction de Didier Fassin et de Yannick Jaffré, Sociétés, développement et santé, pp. 38-49. Paris: Les Éditions Ellipses, 1990, 287 pp. Collection Médecine tropicale.

Introduction
1. LA MALADIE
1.1. Les différents sens de la maladie
1.2. Nommer, classer, interpréter
1.3. Les origines du mal
2. LES MÉDECINES
2.1. Les différentes pratiques de la médecine
2.2. Enjeux autour des médecines traditionnelles
2.3. Questions à la médecine moderne
BIBLIOGRAPHE

Introduction

Dans les sociétés africaines, latino-américaines, asiatiques ou océaniennes, comme dans les pays européens ou nord-américains, les désordres du corps et de l'esprit mettent en jeu beaucoup plus que du biologique - c'est-à-dire les descriptions physio-pathologiques qui permettent de les comprendre et les traitements médicaux qui cherchent à les guérir - : à travers ce qu'ils disent et ce qu'ils font, les malades, tout comme leurs familles ou leurs thérapeutes, expriment aussi la façon dont ils vivent les relations entre le corps physique et le corps social (qu'il s'agisse d'interpréter une maladie par une rupture d'interdit ou par une conduite à risque) et la manière dont ils pensent les rapports entre médecine et société (que ce soit dans l'interpénétration, commune à la plupart des sociétés dites traditionnelles, des domaines religieux, politique et thérapeutique, ou dans le débat ouvert, dans le monde occidental, autour des questions éthiques). Si cette affirmation de la maladie comme fait social paraît aujourd'hui à beaucoup une banalité (qu'il n'est pourtant parfois pas incongru de rappeler), c'est qu'elle est un acquis des sciences sociales grâce aux nombreuses études réalisées sur ce thème, mais aussi une constatation quotidienne des soignants et des développeurs travaillant dans une culture différente de la leur.

Paradoxalement, cette banalité est toutefois de « découverte »récente, tant par les sciences sociales que par les acteurs du développement. Ainsi, à l'exception de quelques travaux pionniers de médecins hygiénistes du XIXe siècle comme Villermé ou Bertillon, qui se sont intéressés à l'impact des conditions de vie des catégories pauvres sur leur état de santé (Surault 1979), et de quelques recherches d'ethnologues comme Rivers ou Clements ; qui, au début du XXe siècle, ont étudié les interprétations surnaturelles de la maladie dans les sociétés à l'époque appelées primitives (Mitrani 1982), ce n'est qu'à partir des années cinquante pour la sociologie et soixante pour l'anthropologie (et dans les deux cas avec une décennie de retard en France), que l'intérêt pour la maladie et la santé se manifeste vraiment, comme en témoignent la publication d'ouvrages nombreux sur ces thèmes, la création de sections spécifiques dans les sociétés savantes et la mise en place d'enseignements spécialisés dans les universités. De même, la croyance des développeurs, en particulier à l'époque coloniale, qu'il suffisait d'apporter une médecine de qualité pour rallier à ses succès les populations autochtones, a conduit à négliger les aspects proprement culturels de la santé, tout comme l'espoir des médecins des pays industrialisés d'arriver à faire reculer la maladie par le perfectionnement de leur technicité, a amené à se désintéresser des questions sociales.

La connaissance que l'on a aujourd'hui de la maladie et de la santé comme phénomènes culturels et sociaux est cependant gênée par le découpage institutionnel des sciences sociales qui séparent l'ici et l'ailleurs, c'est-à-dire la sociologie et l'anthropologie (ou l'ethnologie), avec une relative imperméabilité entre les deux disciplines, les acquis des uns n'étant guère connus, critiqués et surtout utilisés par les autres : en particulier, la dimension culturelle est assez peu prise en compte dans les travaux des sociologues, alors que la différenciation socio-économique ne reçoit pratiquement pas d'attention de la part des anthropologues. L'approche qui sera développée ici à propos des sociétés du Tiers Monde tentera donc d'intégrer au savoir anthropologique des concepts et des approches sociologiques, notamment dans l'intérêt porté aux institutions modernes de soins (et non préférentiellement aux thérapeutiques traditionnelles), aux processus sociaux producteurs de différences et d'inégalités devant la santé au sein des groupes (et pas seulement aux référents et comportements communs à tous les membres).

1. LA MALADIE

1.1. Les différents sens de la maladie

Il est classique de relever que le français dispose d'un seul mot - maladie -, là où l'anglais peut en utiliser trois - illness, disease et sickness. Cette constatation linguistique a conduit des auteurs américains, en particulier Horacio Fabrega, à en tirer des conséquences théoriques pour l'anthropologie médicale. « La séquence iatrogénétique qui nous est la plus familière en est une illustration élémentaire : mon expérience subjective de quelque chose d'anormal, ma souffrance, mes douleurs, mes malaises (mon illness) est considérée comme le signal d'un état d'altération biologique objectivement attestable de mon organisme (de mon disease), état biophysique que le diagnostic de mon médecin érige en fondement légitime de mon état ou de mon rôle social de "malade", soit de mon sickness qui n'est ni le résultat psychologique, ni la réalité biomédicale, mais la réalité socio-culturelle de ma "maladie" »( Zempléni 1985 : 14).

Les trois sens sont bien distincts : pour une même affection médicalement définie (c'est-à-dire disease), par exemple l'hypertension artérielle, une personne peut ressentir des bourdonnements d'oreille, une autre présenter une hémiplégie brutale, une troisième ne rien éprouver de particulier (ce qui correspond à illness) ; dès lors que le médecin mesure la pression artérielle et déclare le sujet hypertendu, celui-ci va devoir se comporter comme un malade (traduisant la réalité sociale de sickness), ce qui le conduira à se déclarer tel et à prendre des médicaments. Aussi les Africains, lorsqu'ils disent que l'hypertension artérielle est une maladie des Blancs ou une maladie de la ville expriment-ils ce passage de disease à sickness sans qu'il y ait nécessairement illness, puisque c'est le tensiomètre qui permet de reconnaître le caractère pathologique des chiffres mesurés et de donner à une personne qui ne se plaignait de rien le statut de malade et à une autre qui parlait de mal à la tête le qualificatif d'hypertendu, c'est-à-dire la légitimité d'une maladie reconnue par les médecins.

Ce fait est important à considérer lorsqu'on réalise des enquêtes de morbidité, puisque, selon les instruments que l'on utilise, on aura affaire à des réalités sociologiques différentes et donc à des évaluations épidémiologiques diverses. Ainsi, lorsque, dans une étude sur le paludisme, on interroge des Wolof en leur demandant s'ils ont un sibiru, que l'on traduit souvent par « corps chaud » (ce qui ne signifie pas fièvre pour autant), on obtient des taux de prévalence fort différents de ceux que l'on recueille à partir d'examens parasitologiques mesurant la présence de plasmodium dans le sang ; de même, si l'on regarde les registres des dispensaires, on s'aperçoit que certains infirmiers, devant des symptômes à peu près identiques, infléchissent leurs diagnostics en tenant compte de leurs connaissances épidémiologiques (une fièvre vue en octobre sera interprétée comme paludisme, alors qu'on parlera de grippe à partir de février-mars), ce qui fait que, pour une même symptomatologie et une même pathologie, le malade ne sera pas médicalement et socialement reconnu de la même façon - probablement mieux légitimé (ou excusé) pour un paludisme que pour une grippe.

Mais la distinction entre les trois sens de la maladie est également nécessaire à prendre en compte dans la relation thérapeutique, car ce qu'exprime le malade (ce qu'il manifeste et ce qu'il demande) s'inscrit dans un registre différent de ce que sait le thérapeute (de la maladie en général, et de son malade en particulier). Ainsi, les femmes stériles consultent-elles souvent pour des douleurs abdominales ou des symptômes diffus qui ne sont que la traduction dans leur corps d'une souffrance morale : ressentant des troubles qui ne laissent pas de traces sur les examens biologiques et radiographiques, elles finissent - au terme de consultations et d'explorations au cours desquelles le problème de la stérilité n'est jamais posé en tant que tel - par être considérées comme non malades (quand on ne les taxe pas d'hystérie). Dans ce cas, la maladie du sujet ne trouvant pas sa place dans les cadres nosographiques du médecin, ne reçoit ni le soulagement ni même la reconnaissance sociale.

Pour autant, cette triade sémantique qui désigne la maladie ne constitue qu'une approche, utile mais simplificatrice. En effet, que l'on aille étudier cette question dans un groupe ethnique donné, et l'on se rend compte que la terminologie est beaucoup plus riche. Ainsi les Toucouleur et les Peul du Sénégal disposent-ils de trois mots pour parler de la maladie : rafi qui fait référence à la perte ou la faiblesse d'un organe ou d'une fonction (rafi hooré, maladie de la tête) ; nyaw qui signifie le mal ou le malheur et s'associe souvent à un qualificatif (nyaw mawdo, la grande maladie, c'est-à-dire la lèpre), muusu qui désigne la souffrance et se présente souvent en association verbale avec une partie du corps (niiyé musooji, maux de dents) ; mais pour les affections des yeux, on aura donc rafi giité, nyaw gâté, giité musooji, selon la pathologie identifiée (Tall 1984 : 226 et 59).

D'une manière générale, on peut observer que la réalité biologique de la maladie ne correspond pas à la réalité de celui qui en est atteint (c'est d'ailleurs également vrai en France si l'on confronte « la maladie du médecin » et « la maladie du malade », pour reprendre les termes de Leriche) : lorsqu'un Africain de l'Ouest souffre d'épilepsie ou d'hémiplégie, c'est moins l'idée de maladie qui est pertinente (et souvent on ne l'appellera pas ainsi) que celle de possession par un esprit maléfique (rab domestiques des Wolof, bisira aquatiques des Soninké, etc.) ; plutôt qu'aux frontières entre le normal et le pathologique dont on sait qu'elles sont socialement et culturellement déterminées, cet écart renvoie à des différences entre les systèmes de représentation et d'ordonnancement du monde. Une conséquence pratique sur laquelle on reviendra est que le malade ne fera pas nécessairement appel au médecin ou au dispensaire lorsqu'il présentera des troubles qu'il attribuera à la catégorie du magico-religieux - ou plus exactement qu'il reliera à des interprétations sociales. Ces remarques ne doivent pourtant pas faire verser dans un culturalisme simpliste qui consiste à voir le surnaturel partout dans les sociétés africaines et à croire que la souffrance ou la dégradation d'un corps n'y sont pas ressentis comme telles : bien que leurs catégories diffèrent de celles du médecin, les gens, où qu'ils soient, savent ce que signifie « être malade » (même si ce mot ne recouvre pas pour eux tout à fait la même réalité). C'est peut-être en abordant les problèmes de classement des maladies que cette discussion s'éclairera.

1.2. Nommer, classer, interpréter

La médecine moderne dispose d'un appareil nosologique de plus en plus sophistiqué si l'on se réfère aux éditions successives de la Classification Internationale des Maladies (et de ses avatars locaux) et du Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux (le fameux DSM américain) ; les classements reposent sur plusieurs systèmes de repérage (symptômes, organes, mécanismes, causes, etc.). Par exemple, on dira d'un malade paralysé d'un bras et d'une jambe qu'il a une hémiplégie (symptôme), due à une lésion cérébrale (organe), provoquée par un caillot obstruant une artère (mécanisme) par suite d'un infarctus du myocarde (cause).

Les médecines dites traditionnelles se référent toutes également à des classements des maladies dont les ethnologues ont montré les principes de cohérence ; les critères de rangement ont une logique qui puise à la fois dans la connaissance empirique (l'atteinte d'un organe, l'existence d'une cause naturelle, etc.) et dans la nécessité théorique (besoin de mise en ordre, de compréhension, d'interprétation, etc.), comme l'a montré Claude Lévi-Strauss à propos d'autres systèmes classificatoires, tels que les mythes (1962). Ainsi Gilles Bibeau (1981) a montré que la façon de nommer les affections cutanées des Angbandi du Zaïre reposait sur six principes : localisation (ngaporo, qui veut dire maladie de la peau), ressemblance (ngbongo, qui signifie poisson électrique pour désigner l'urticaire), représentation (ndiba, qui veut dire le couteau mal aiguisé pour parler de la lèpre car elle est caractérisée par des troubles de sensibilité), étiologie (nga ngu, qui signifie maladie de l'eau sale, s'agissant de maladie provoquée par cet agent), thérapeutique (nga ké to, littéralement maladie de la flèche pour signifier le torticolis car on utilise cet instrument comme remède), socioculturel (soke, qui se réfère àdes relations sexuelles avant le sevrage et désigne une maladie sévère des enfants) ; encore ces six principes ne couvrent-ils pas la totalité des appellations.

Chaque culture a sa façon de classer les maladies, et à l'intérieur d'une société donnée, on trouve encore des différences entre catégories sociales, entre familles, entre guérisseurs. Ce qu'il est important de considérer, c'est que la diversité des termes, le choix de critères spécifiques pour reconnaître chaque affection, le recours à des registres multiples de dénomination rendent tout système strict d'équivalence linguistique - du type : tel mot en langue locale désigne telle maladie du corps médical - souvent plus satisfaisant pour l'ethnologue et son lecteur que pour les gens qui s'en servent en tant que thérapeutes ou en tant que malades. Il ne faut en effet pas oublier que ces systèmes classificatoires servent avant tout à reconnaître des maladies dans le double but de les comprendre et de les soigner.

Toute classification suppose une interprétation des mécanismes et des causes d'une maladie, grâce à laquelle un traitement pourra être entrepris. Les modèles auxquels se réfèrent les sociétés traditionnelles résultent de la superposition de registres d'interprétation non exclusifs, bien loin des modèles simplistes qui opposent des causes naturelles et surnaturelles (quand ils ne ramènent pas simplement les systèmes de pensée traditionnels à des tissus de superstition). Comme l'avait rappelé E.E. Evans-Pritchard (1976 : 25) à propos des Azandé d'Afrique Centrale, « la croyance ou la sorcellerie ne contredit en aucune façon la connaissance empirique des causes et des effets » : ainsi, « la croyance en la mort de causes naturelles et la croyance en la mort par sorcellerie ne sont pas mutuellement exclusives ; au contraire, elles se complètent, chacune permettant d'expliquer de ce dont l'autre ne parvient à rendre compte ». Et il en donne un exemple : le garçon qui s'est blessé en trébuchant sur une racine d'arbre n'ignore pas la cause immédiate de cette plaie torpide ; cependant il ne peut s'empêcher de s'étonner, d'une part de n'avoir pas vu la racine alors qu'il faisait attention et, d'autre part, de n'avoir pas cicatrisé rapidement comme à l'habitude ; d'où cette certitude qu'un acte de sorcellerie est en jeu. Cependant, une cause sociale évidente peut en écarter une autre : ainsi, lorsqu'un enfant tombe malade et qu'on sait que ses parents ont eu des relations sexuelles avant le sevrage de l'enfant, ou lorsqu'une personne développe la lèpre et qu'on retrouve une histoire d'inceste, alors on parlera de rupture de tabou et non de sorcellerie (Evans-Pritchard 1976 : 20 et 27).

De manière plus systématisée, on peut emprunter à Nicole Sindzingre et Andràs Zempléni leur modèle d'interprétation étiologique (1981) : ils distinguent en effet la cause (comment la maladie est-elle survenue ?), aussi appelée cause instrumentale, l'agent (qui, où, quoi, en est responsable ?), également nommée cause efficiente, l'origine (pourquoi s'est-elle produite ?), parfois désignée comme cause ultime ; cependant la distinction, qui paraît facile sur le papier, n'est pas toujours évidente sur le terrain, certaines affections ne jouant que sur un ou deux des trois registres et certaines explications appartenant à deux niveaux, cause et agent à la fois notamment. À cette différenciation s'ajoute d'ailleurs une seconde, proposée par ces auteurs qui distinguent causalité a priori et causalité a posteriori : il est en effet frappant de constater que l'explication donnée par un guérisseur lorsqu'on l'interroge peut différer de celle qu'il met en oeuvre dans une situation concrète (ce qui conduit à rappeler que le savoir énoncé doit toujours être confronté au savoir pratiqué) ; la société dispose ainsi de modèles généraux explicatifs pour une affection donnée mais les utilise de façon pragmatique, en fonction de la présentation et du contexte. Un exemple l'illustrera (Fassin 1988 : 287-289) : la lèpre chez les Soninké de la Vallée du Fleuve Sénégal est interprétée comme rupture d'un interdit sexuel (les parents du lépreux ont eu des relations sexuelles pendant la période menstruelle, signe d'impureté), alimentaire (le lépreux a mangé un poisson de fleuve, le silure dont la couleur rappelle la peau du malade) ou d'alliance (un mariage a eu lieu entre deux familles théoriquement « incompatibles ») : tel est le modèle a priori ; en fait, en fonction du statut social du lépreux (par exemple on épargnera un homme important en invoquant un tabou alimentaire plutôt que sexuel), des conflits lignagers locaux, des symptômes présentés, etc., on choisira l'une ou l'autre explication, voire une quatrième.

1.3. Les origines du mal

Malgré la diversité des systèmes d'interprétation de la maladie, une caractéristique générale des modèles étiologiques dans les sociétés dites traditionnelles est la fréquence des interprétations persécutives dont la sorcellerie est l'archétype (Augé 1975). Certes, il est des cas où une autre explication est invoquée : le nourrisson souffre de malnutrition parce qu'un charognard a survolé sa maison, l'enfant a des vers parce qu'il mange trop de sucreries, le lépreux est malade parce qu'un interdit a été rompu, etc. Cependant, la recherche d'un agresseur est la règle dès lors que surviennent une maladie grave, un accident imprévisible, une répétition de malheurs, et ce d'autant que la superposition de registres de causalité est habituelle, comme on l'a déjà vu. Ainsi, la rougeole chez les Toucouleur et les Peul en zone sahélienne fait-elle appel à plusieurs types d'explication (Fassin 1988) : elle est une maladie de Dieu (rafi yalla), elle est apportée par les vents de sable (ngellaw), et elle se transmet par contact entre les enfants. Cependant, qu'un malade meure, et ces explications ne suffisent plus : on dira qu'un sorcier l'a dévoré, on fera des divinations pour confondre le coupable, tout en continuant à considérer comme réelles les trois autres causes. Plus encore, lorsque les villageois viennent s'installer en ville où I'harmattan se fait moins sentir, ngellaw change de signification et devient l'esprit qui souffle la maladie sur l'individu, faisant passer l'interprétation du naturel au surnaturel, et de la contamination mécanique à l'agression magique.

En Afrique de l'Ouest, le modèle le plus habituel de la persécution comporte quatre termes, décrits initialement chez les Wolof du Sénégal (Zempléni 1968), mais qui ne semblent guère différer dans les autres groupes de la zone soudano-sahélienne. La maladie (car il ne s'agit pas seulement des troubles mentaux qui avaient fait l'objet de la première étude) peut conduire, lorsque des caractères de gravité, de durée, de répétition ou d'inattendu sont présents, à l'identification de l'une des quatre modalités d'agression : la vengeance d'un ancêtre, la possession par un esprit, le maléfice d'un humain, l'attaque par un sorcier. Le respect des ancêtres est normalement manifesté par des autels sur lesquels les vivants effectuent des prières, des dons et des sacrifices : lorsque les hommes oublient d'honorer leurs autels, les esprits des ancêtres les punissent en les affligeant de maux. Les esprits islamiques, aussi appelés génies (de jinné) et satans (de seytaané), sont des créatures de la démonologie musulmane dont on dit parfois qu'ils se marient avec les humains : ainsi, c'est en général par jalousie qu'ils font le mal. Le maléfice correspond approximativement au terme anglais sorcery qui désigne une action volontaire et instrumentale orientée négativement : un individu cherche à éliminer un rival (en amour ou en politique) par la manipulation d'objets lui appartenant ou par l'énonciation de paroles se rapportant à lui ; c'est ce qu'on appelle aussi maraboutage ou travail maraboutique. Enfin, la sorcellerie-anthropophage est ce que les anthropologues britanniques appellent, depuis E.E. Evans-Pritchard, witchcraft, c'est-à-dire un pouvoir néfaste qui dépasse celui qui le possède et le conduit presque malgré lui à dévorer sa victime, c'est-à-dire à s'emparer de son énergie vitale ; celui qui est menacé de sorcellerie peut échapper à la mort en devenant sorcier, c'est-à-dire dangereux pour les autres, ou bien en apprenant la contre-sorcellerie, au péril de sa propre vie. Dans les quatre cas, il s'agit de persécution, et le travail du devin sera de reconnaître l'agent agresseur afin d'indiquer le remède ou la réparation.

Ces interprétations se retrouvent, à des variantes près - ainsi, les esprits ancestraux des Wolof ont-ils des équivalents dans les génies de la forêt des Diola -, dans toute l'Afrique de l'Ouest islamisée, et au-delà, en pays, chrétien et en Afrique Centrale - dans les zones où le christianisme est prépondérant, le développement des prophétismes et des messianismes semble toutefois s'accompagner d'une régression des théories persécutives aux dépens des interprétations en termes de culpabilité comme le montrent les études sur le guérisseur Atcho réunies par Colette Piault (1975). La généralité du phénomène dans les sociétés dites traditionnelles est même attestée par sa vivacité dans les campagnes françaises où la sorcellerie est un mode courant d'interprétation de la maladie et du malheur ainsi que l'a étudié Jeanne Favret-Saada dans ses recherches sur le Bocage vendéen (1977). Au-delà de leur intérêt ethnologique, ces croyances sont importantes à prendre en compte comme réalité sociale dans des actions de développement ou de santé : ainsi des pratiques obstétricales modernes au cours desquelles le placenta est jeté à la poubelle après l'accouchement sont-elles considérées comme dangereuses dans des régions où l'on enterre le produit de la délivrance pour éviter qu'il ne soit volé ou utilisé contre la femme ou son enfant ; d'une manière générale, la prégnance de ces modèles interprétatifs incite à la prudence dans des interventions d'ordre médical, social, juridique ou politique qui peuvent toujours mettre en jeu, à l'insu des développeurs, des forces auxquelles seront ensuite imputés les échecs des actions entreprises.

2. LES MÉDECINES

2.1. Les différentes pratiques de la médecine

« Dans une ethnographie, que serait le sujet d'un chapitre intitulé "Médecine ?" », s'interroge L.B. Glick (1967) qui a travaillé en Papouasie-Nouvelle Guinée dans un groupe encore peu soumis aux changements de la modernité, les Gimi. Dans les sociétés dites traditionnelles, la médecine n'existe pas en tant que telle pour une double raison : la maladie met en jeu des institutions et des acteurs qui sont totalement en dehors des préoccupations ayant trait au corps et à la santé tels que des rituels, des églises, des marabouts, des devins ; et à l'inverse, ceux à qui l'on reconnaît un pouvoir thérapeutique sont également sollicités pour des choses qui n'ont rien à voir avec la maladie, comme l'issue d'un examen, d'une élection ou d'un procès. Autrement dit, la médecine ne se définit pas comme une profession ou un champ, mais plutôt comme un secteur d'activité en continuité avec le magique, le religieux, le politique ; d'ailleurs, être malade n'est pas seulement une affaire de thérapeutes, c'est une question sociale qui peut faire intervenir des histoires de lignages et d'alliances, de propriétés foncières ou de conflits familiaux, etc.

Conscients de ces différences, les anthropologues ont cherché à dresser des typologies des médecines en fonction notamment des savoirs auxquels elles se référaient. L'un des premiers à s'être intéressé à cette question, W.H.R. Rivers (1924) distinguait, en conformité avec les théories évolutionnistes de son temps, trois types de médecines éclairées selon les époques par la magie, la religion et la science, alors qu'un peu plus tard, E.H. Ackernecht (1971) réduisait le modèle à deux termes : médecine primitive et médecine occidentale. C'est à peu de choses près la même division qui sera reprise par plusieurs auteurs sous des terminologies un peu différentes : ethnomédecine et biomédecine, ou bien à partir des théories explicatives : personnel et impersonnel, personnaliste et naturaliste. Toutes ces typologies tombent sous le coup de la critique qu'adresse Jack Goody (1977) aux travaux anthropologiques sur la pensée traditionnelle qui consistent finalement à redécouvrir sans cesse « l'opposition Eux/Nous »dans laquelle « Eux » n'est jamais différencié (les Indiens d'Amérique Latine sont à cet égard logés à la même enseigne que les Pygmées d'Afrique Centrale et les Aborigènes d'Océanie). En réaction contre cet ethnocentrisme, certains chercheurs ont proposé des modèles plus riches : ainsi, F.L. Dunn (1977) parle-t-il de médecines locales (pouvant regrouper les pratiques traditionnelles africaines mais également les pratiques populaires françaises), régionales (rassemblant les médecines arabe, chinoise, indienne) et cosmopolite (celle qui se fonde sur les connaissances de la biologie moderne) ; ainsi, A. Kleinman (1978) reconnaît-il une médecine populaire (appartenant au cercle de la famille et des voisins), une médecine folklorique (avec les thérapeutes traditionnels non professionnalisés), une médecine professionnelle (où l'on trouve, à côté des praticiens de la médecine moderne, les professionnels des médecines savantes, telles qu'Ayurveda et Unani, en Asie).

Sans choisir parmi ces classifications dont aucune n'est à la fois réellement universelle et dénuée de tout ethnocentrisme, on peut proposer quelques remarques d'ordre général. La première est que ces modèles sont tous réducteurs en ce qu'ils considèrent implicitement comme acquis le fait qu'il existe dans toute société un domaine d'activité correspondant à la santé : où classer à l'intérieur de ces typologies l'officiant rituel, le prophète guérisseur, le marabout mouride qui tous interviennent dans le cours des maladies (ou au moins de certaines), mais dont l'essentiel de l'activité est d'ordre religieux ? La seconde est que ces taxonomies sont statiques et ne prennent pas en compte l'évolution des pratiques les unes par rapport aux autres, surtout dans le contexte actuel des changements sociaux rapides : comment parler du guérisseur qui cherche à donner des gages de modernité en utilisant un tensiomètre et de l'infirmier en quête d'authenticité qui cache des plantes dans l'arrière-cour de son dispensaire ? S'il est légitime de vouloir comprendre des savoirs différents, il faut se garder de ces modélisations et de ces abstractions qui finissent par dessécher et figer les réalités. Plutôt donc qu'une approche descriptive, on peut tenter d'aborder les médecines de manière plus analytique, en examinant les problèmes concrets qui se posent à elles aujourd'hui.

2.2. Enjeux autour des médecines traditionnelles

Les questions généralement posées à l'anthropologue par les acteurs du développement et de la santé au sujet des médecines traditionnelles se ramènent à une formulation simple : est-ce que ça marche ? Qu'on y croie ou qu'on en dénonce la supercherie, les pratiques thérapeutiques de type magico-religieux sont abordées en termes d'efficacité. Et c'est sur ce thème qu'ont été mis en oeuvre, à l'instigation de l'Organisation Mondiale de la Santé, des programmes de recherche visant à évaluer le travail des guérisseurs rebaptisés « tradipraticiens » (Bannerman, Burton et Ch'en Wen Chieh 1983) : des laboratoires chimiques ont analysé les propriétés pharmacologiques des plantes utilisées, des centres de médecines traditionnelles ont été ouverts à l'initiative des ministères de la santé, des associations de guérisseurs ont été constituées dans un but de coordination, des recensions de remèdes africains ou indiens ont été entreprises. Les efforts humains et financiers consentis pour ces travaux amènent à s'interroger sur le pourquoi et le comment de ces opérations.

L'explication fait appel à plusieurs types de raisons. En premier lieu, les difficultés enregistrées par les systèmes de soins modernes pour atteindre les populations rurales et suburbaines défavorisées, y compris dans le cadre des stratégies de soins de santé primaires, ont conduit les responsables internationaux en matière de développement sanitaire à chercher des réponses alternatives au problème de l'accès de tous aux soins, avec les thérapeutes et les matrones traditionnels. En second lieu, les mouvements de revendication des identités nationales et d'une culture africaine dans le contexte de la décolonisation ont trouvé une application concrète avec la revalorisation de savoirs ancestraux considérés comme menacés par les avancées de la modernité. En dernier lieu, les phénomènes d'attirance exercée sur des médecins et des scientifiques occidentaux, comme d'ailleurs sur certaines ethnologues, par le naturalisme et la philosophie des théories africaines de la maladie ont joué un rôle dans la multiplication des travaux et des écrits qui leur sont consacrés. C'est donc un ensemble de raisons à la fois pragmatiques et idéologiques qui conduisent à cet intérêt pour les médecines traditionnelles.

Mais quelle forme prend-il ? Et quelles conséquences a-t-il sur les thérapeutes eux-mêmes ? Tout d'abord, il faut remarquer que les recherches scientifiques menées sur ce thème ont presque exclusivement pour objet les pharmacopées, écartant ainsi les dimensions rituelles, magiques, religieuses - c'est-à-dire finalement sociales - de la cure traditionnelle : celle-ci est réduite à un inventaire de plantes, de substances, de recettes qu'il s'agit d'évaluer en dehors de tout contexte réel et du seul point de vue de la biologie ainsi que le met en évidence Jean-Pierre Dozon (1987) à propos du Bénin. Ensuite, on peut relever que ces expériences ont une dimension politique : à travers la reconnaissance des médecines traditionnelles qui prend la forme d'expertises scientifiques, de centres officiels, d'associations de guérisseurs, le pouvoir se donne les moyens de contrôler des pratiques qui l'inquiètent parfois, comme les confréries islamiques en Afrique de l'Ouest ou les églises prophétiques en Afrique Centrale, dont Marc-Eric Gruénais et Dominique Mayala (1988) donnent un exemple qui concerne le Congo. Enfin, si l'on regarde de près à qui profite cette officialisation des médecines traditionnelles, on se rend compte que ce sont surtout ceux qui ont le moins de reconnaissance traditionnelle, ceux que l'on appelle couramment charlatans, qui trouvent dans cette opération le moyen de gagner un peu de cette légitimité qu'ils n'ont pas ; la tentative de revalorisation des médecines traditionnelles risque bien ainsi d'être déviée de ses objectifs louables mais peu réalistes, comme nous l'avons montré avec Eric Fassin (1988) pour le Sénégal.

L'analyse sociologique a donc permis de révéler que la question de l'efficacité initialement posée avait été transformée par l'Organisation Mondiale de la Santé et les États africains en un problème de légitimité (reconnaître légalement l'existence des médecines traditionnelles), avec les dangers qu'un tel glissement comporte comme on l'a vu - mise à l'écart de toute dimension sociale, prise de contrôle politique et valorisation des moins reconnus des thérapeutes. C'est à ces enjeux qu'est confrontée la médecine qui, en conformité avec l'esprit et la lettre de la déclaration d'Alma Ata, tente de réaliser la mythique « intégration des médecines traditionnelles dans les soins de santé primaires ».

2.3. Questions à la médecine moderne

La médecine des dispensaires, des hôpitaux, des programmes de vaccination et de lutte contre les grandes endémies a peu fait l'objet de travaux ethnologiques - surtout si l'on établit une comparaison avec la profusion de livres et articles publiés sur les médecines traditionnelles. Pourtant, les questions qui lui sont posées aujourd'hui mériteraient l'intérêt des anthropologues et des sociologues. Animateurs de développement et responsables de santé sont en effet confrontés à une question fondamentale : la persistance - et dans certains cas l'aggravation - des inégalités devant l'accès aux soins et la qualité des prestations. Certes les inégalités face à la santé (telles qu'elles s'expriment par exemple dans les statistiques de mortalité) font appel à d'autres phénomènes explicatifs tels que les conditions économiques ou l'environnement physique, comme le montrent les études réunies par Jacques Vallin et Alan Lopez (1985). Cependant, les services sanitaires eux-mêmes participent de ces inégalités et les rendent encore plus insupportables.

Une première inégalité se manifeste dans l'accès aux soins. Selon qu'on est villageois ou citadin, chômeur ou salarié, ouvrier ou cadre, on n'a pas la possibilité de recourir aux mêmes institutions : à cet égard, l'existence d'une protection sociale (réservée aux salariés de l'État et du secteur privé qui, dans la plupart des pays du tiers-monde, constituent une minorité dépassant rarement le cinquième de la population totale) est l'élément souvent le plus discriminant puisque ceux qui en bénéficient peuvent aller dans des structures mieux équipées en ne payant qu'une partie de leurs frais médicaux, y compris pharmaceutiques. Des études de cas réalisées au Sénégal indiquent bien comment par exemple un chef de ménage qui perd son emploi et se retrouve journalier, donc sans couverture sociale, passe des consultations de médecin et des achats de médicaments en pharmacie à l'auto-prescription de produits achetés sur les marchés ; ce que confirment les enquêtes statistiques qui font apparaître une différenciation économique importante dans le recours à la médecine libérale comme dans les pratiques vaccinales (Fassin 1988 : 347 et 352). Lorsqu'une femme accouche chez elle avec l'aide d'une matrone traditionnelle ou lorsqu'un enfant malnutri n'est pas amené par ses parents au dispensaire, c'est le plus souvent à cause d'une accessibilité physique, financière et humaine restreinte, et non seulement pour les raisons culturelles qu'on entend parfois invoquer.

La seconde inégalité concerne la qualité des soins : l'approche épidémiologique des services de santé se limite généralement à l'étude de l'accès, sans tenir compte des prestations qui sont délivrées dans le dispensaire ou dans l'hôpital ; il est vrai que cette analyse ressortit plus aux techniques qualitatives que quantitatives, c'est-à-dire aux instruments de l'ethnologue plutôt que du statisticien. Dans la notion de qualité, il faudrait pouvoir prendre en compte la façon dont les gens sont traités, au double sens que peut revêtir ce mot, c'est-à-dire comment ils sont soignés mais aussi comment ils sont reçus. L'observation de la vie d'un dispensaire telle que l'a fait Bernard Hours au Cameroun (1987) révèle ainsi les conditions de l'attente et de la consultation, la manière dont sont réalisés l'interrogatoire et l'examen clinique (la mesure chronométrée apporte ici parfois des surprises). De même, entendre une femme raconter son accouchement à la maternité, parler des douleurs et des humiliations ressenties dans son corps, relève de l'ethnographie autant que de la santé publique. Ce qu'il est important de noter ici, c'est que le statut social du malade (âge, sexe, caste, ethnie, classe, etc.) influe sur le comportement qu'on a vis-à-vis de lui.

Parler d'inégalités, on le voit, c'est opérer un changement de registre, c'est en quelque sorte passer du sociologique au politique. En effet, ce que l'analyse scientifique met en évidence, ce sont des différences - dans l'accès aux soins ou la qualité des prestations -, comme elle fait pour d'autres objets -les pratiques vestimentaires ou les règles d'alliance - ; mais alors que dans le second cas, on ne prend pas parti pour le pagne, le boubou ou le costume, ou bien pour le mariage préférentiel avec la cousine croisée patrilatérale ou avec la cousine parallèle matrilatérale, dans le premier cas, en revanche on porte un jugement de valeur - pouvoir être soigné dans de bonnes conditions est préférable au contraire - et on passe de la description des disparités à la révélation des inégalités. On objectera peut-être que ces questions sont en dehors du champ des sciences sociales : en fait, elle ne le sont pas dès lors qu'on s'attache non pas à dénoncer mais a comprendre, c'est-à-dire à démontrer et analyser les mécanismes qui conduisent aux diverses formes d'inégalité ou de domination.

L'anthropologie et la sociologie de la santé dans les pays du Tiers Monde ne peuvent donc pas se contenter d'étudier la maladie comme un phénomène culturel hors du temps de l'histoire et d'aborder la médecine sous le seul angle des pratiques dites traditionnelles. La santé est un enjeu social et politique, les représentations de la maladie traduisent la façon dont fonctionne la société avec ses conflits et ses rapports de pouvoir, et les pratiques de la médecine se situent au coeur de changements profonds dont les déterminations sont pour une large part extérieures. Le travail de l'anthropologue et du sociologue est peut-être aujourd'hui moins de faire ressurgir le passé (tâche de l'historien) que d'aider à comprendre le présent, en posant le même regard sur les sociétés qu'elles soient proches ou lointaines. Dans le domaine du développement sanitaire, il importe notamment d'analyser les relations entre thérapeutes et malades chez les guérisseurs et dans les dispensaires, lés transformations locales des médecines africaines et de la médecine moderne, les structures actuelles de l'organisation sociale et politique. Ce qui est en somme le projet de toute science sociale.

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Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 29 mars 2009 12:21
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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