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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

“ Le Rapport Parent - l’enseignement de l’histoire ” (1965)


Une édition électronique réalisée à partir du texte de par Alfred Dubuc, “ Le Rapport Parent - l’enseignement de l’histoire ”. Un article publié dans la Socialisme 65, revue du socialisme international et québécois, Montréal, printemps 1965, no 5, pp. 109-118.. [Autorisation accordée par le professeur Dubuc par téléphone, de chez-lui à Montréal, jeudi le 3 juillet 2003.]

Texte intégral de l'article

Introduction
L'Histoire, science du passé
L'Histoire, science du présent

Introduction
Dans son second rapport, la commission Parent recommande une nouvelle structure de l'enseignement et décrit les programmes qui devront s'élaborer à chaque niveau de cette structure. Au chapitre de l'enseignement de l'histoire, la commission recommande (no 272) que, dans leurs grandes lignes, les programmes soient les mêmes pour les deux secteurs (français et anglais) de l'enseignement Cette recommandation a soulevé une vive controverse dans nos journaux. On a parlé de conspiration, d'appauvrissement de la recherche historique, etc. SOCIALISME '65 n'a Pas voulu rester absent à cette discussion.

Plusieurs se surprennent de constater que dans un pays jeune, neuf, entièrement tourné vers l'avenir, entraîné dans un vaste mouvement d'industrialisation, l'étude du passé puisse recevoir toute l'importance qu'on lui donne chez nous. Les répercussions qu'a suscitées le rapport de la commission Parent, par ses recommandations sur l'enseignement de l'histoire, en sont un nouvel exemple.

Affirmons, d'entrée de jeu, pour y revenir par la suite, que l'Histoire est, avant tout, science du présent. Son utilité est la plus marquée dans la recherche de la direction du mouvement qui entraîne les sociétés, les civilisations, l'humanité. Pour savoir comment les définir et apercevoir la direction du mouvement qui les transforme, peu de questions sont aussi riches que celles de se demander d'où elles viennent et comment elles se sont formées.

L'Histoire, science du passé

Mais la science historique évolue elle-même. Chaque siècle refait son histoire ; chaque génération, presque, repose au passé des interrogations nouvelles. Dans ma recherche en archives, je consulte des documents jaunis, moins par la chimie du temps, que par les manipulations des générations d'archivistes et d'historiens qui m'ont précédé ; mais ceux-ci n'ont pas posé les mêmes questions que moi. Le passé révèlera toujours des choses différentes ; tout dépend de ce qu'on lui demandera. L'humanité ne cesse d'avoir de nouvelles inquiétudes.

La préoccupation la plus commune en Histoire, durant de longs siècles, fut, sans conteste, le rappel et l'explication des faits politiques. Mais les historiens relataient le passé sous les traits de la société de leur temps. À l'époque moderne, en Occident, l'image de la société aristocratique s'imposait à tous. Au moment de la naissance d'une bourgeoisie commerciale qui menaçait la suprématie sociale et politique de la noblesse, celle-ci a voulu magnifier son rôle, se convaincre de sa supériorité pour motiver les privilèges dont elle profitait. Ce fut la grande époque de l'Histoire politique parce que seule l'activité politique pouvait donner un semblant de fondement aux prétentions des aristocrates ; l'activité économique passait de plus en plus entre les mains de la classe bourgeoise. L'historiographie de l'époque est celle des guerres, des traités, de la naissance des États ; c'est la biographie des rois, des grands seigneurs, des militaires, des diplomates.

Au 19e siècle, apparût l'Histoire économique ; la description des mouvements du commerce et de l'industrie, la naissance des institutions financières et la biographie des grands entrepreneurs : tels étaient les objets de l'historiographie nouvelle. Une classe sociale venait d'accéder au faîte de la société occidentale, après avoir détrôné l'ancienne aristocratie par deux révolutions : la révolution industrielle en Angleterre et la révolution française. L'Histoire économique a d'abord été l'Histoire bourgeoise, celle d'une classe qui veut se convaincre à son tour de sa supériorité et, devant la menace d'un prolétariat qui s'organise et revendique, veut asseoir le fondement de ses privilèges.

À la fin du 19e siècle, lié à la fois à l'Histoire politique et à l'Histoire bourgeoise, s'est infiltré dans l'historiographie, jailli de l'Allemagne prussienne, le nationalisme. L'Histoire devenait apologétique, école de patriotisme ; elle fournissait les leçons à apprendre, les modèles à imiter, les personnages et les peuples à abhorrer. On n'enseignait plus l'Histoire ; ou endoctrinait la population. Ainsi, s'est développée une Histoire qui devenait une véritable science du passé. La nation se personnifiait par son passé et la politique des hommes d'État était déterminée, comme par une fatalité, dans le sens indiqué par le comportement des ancêtres. Certaines notions, liées au racisme, apparaissaient en Histoire : "le génie de la race" fut la plus fameuse et le demeure encore. Cette Histoire n'est pas une science ; elle n'analyse pas la réalité ; elle cherche dans les documents anciens les exemples qui illustrent les explications déjà faites.

Paul Valéry, dans ses "Regards sur le monde actuel", a condamné de façon très sévère cette démarche qui s'appela Histoire : "L'Histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l'intellect ait élaboré ... Il fait rêver, il enivre les peuples, leur engendre de faux souvenirs, exagère leurs réflexes, entretient leurs vieilles plaies, les tourmente dans leur repos, les conduit au délire des grandeurs ou à celui de la persécution, et rend les nations amères, superbes, insupportables et vaines."

L'Histoire, science du présent

Cette accusation fait frémir ; parce que chaque historien est bien conscient qu'il risque continuellement de la faire porter contre lui-même. L'Histoire est une science, bien sûr ; mais à l'instar de toute science humaine, elle n'est pas science exacte au même titre que les sciences naturelles, si tant est que celles-ci le soient vraiment. Parce qu'il est lui-même porteur de civilisation et de culture, parce qu'il est l'homme d'un temps et d'un lieu, parce qu'il participe d'une communauté humaine, l'historien court le risque de poser incon-sciemment au passé des questions suggestives.

Certes, la science sociale, parce qu'elle est science de l'homme, ne peut se dégager du problème des valeurs. Je dirai même que le danger, dans la démarche scientifique, est de prétendre n'en pas reconnaître. La seule façon de résoudre cette difficulté, ce n'est pas d'écarter les valeurs, mais de tenter de se rendre continuellement conscient de celles qui nous portent, c'est de les objectiver. Au fait, il ne peut y avoir de science historique sans une sociologie de l'Histoire et des historiens.

L'utilité des valeurs est reconnue en science de l'homme : elles fournissent des hypothèses de travail. Le problème est que, d'un part, ces hypothèses doivent être scientifiques et positives et, d'autre part, ces valeurs doivent pouvoir être constamment remises en question. C'est en cela d'ailleurs qu'une hypothèse se distingue d'un postulat ; celui-ci est accepté sans discussion, au départ d'une élaboration théorique.

Mais la recherche empirique, l'analyse des faits concrets, des mouvements sociaux réels, leur interprétation et leur explication ne peuvent reposer sur aucun postulat ou, ce qui revient an même, sur aucune valeur érigée en absolu. Toute recherche scientifique est orientée, bien sur, mais en vertu d'hypothèses de travail sans cesse discutées, remises en questions, exprimées de façon différente, voire même, éventuellement, rejetées.

***
Avec le 20e siècle et le développement des sciences sociales une nouvelle historiographie se développe. C'est une Histoire qui, au contraire de ce qui avait contenté ceux qui nous ont précédés, est une Histoire générale. Ce n'est plus l'apologie de l'un ou l'autre des groupes sociaux dominants, de l'une ou l'autre des nations supérieures ou opprimées. Mais une vraie science sociale qui veut expliquer le monde contemporain, globalement et dans son devenir.

L'homme ne s'est peut-être jamais tant interrogé sur lui-même qu'aujourd'hui. Devant les forces croissantes de la technique, il s'interroge sur sa propre puissance ; devant la diffusion des moyens de pression psychologique et idéologique, il s'interroge sur la liberté ; devant le phénomène de socialisation, il pose les valeurs de l'individu (jamais, peut-être, l'on n'a autant parlé de personnalisme qu'aujourd'hui) ; par la prise de conscience de la lutte des classes, de l'exploitation de certains groupes sociaux par d'autres, de la domi-nation de certaines nations sur d'autres, toutes les valeurs spirituelles de l'Occident sont remises en question.

Dans cette prise de conscience, l'Histoire joue un rôle fondamental ; Dilthey, philosophe allemand de l'Histoire, le voit de la façon suivante : tout comme l'individu, par le procédé psychologique de l'introspection, prend conscience de lui-même, de ses limites, de ses imperfections, mais aussi des lignes de force de son développement et peut, par là, assurer une transformation rationnelle de son être, ainsi l'humanité tout entière, au cours de son évolution, prend conscience, grâce à l'Histoire, de la direction de cette évolution, se révèle à elle-même et assure son développement ultérieur. L'homme se crée lui-même à travers le temps. C'est pourquoi, selon Dilthey, la science du passé a une validité universelle, supra-historique, (cf. Raymond Aron, "La philosophie critique de l'histoire". ch. 1).

L'analyse historique dépasse donc la description de l'évènement parce que l'évènement en lui-même n'a pas de signification précise. Il peut être intéressant de décrire la rébellion du Bas-Canada en 1837. Mais avant d'en proposer une explication "compréhensive", il faut la situer au point d'aboutissement d'un long mouvement de détérioration de l'agriculture, de baisse des prix agricoles, dans le contexte immédiat d'une crise financière et commerciale mondiale ; au point d'impact de l'affrontement de deux grands groupes d'intérêt : celui de l'agriculture et celui du grand commerce et des trois groupes sociaux qui y sont liés : la noblesse foncière qui ne cesse de s'appauvrir, la haute bourgeoisie anglo-saxonne du commerce international et de l'industrie, la petite bourgeoisie canadienne, issue des professions et du commerce local ; dans le contexte politique, en outre, de la transformation de la politique coloniale anglaise par la montée au pouvoir, au Parlement britannique, de la bourgeoisie libérale. Et l'on ne peut, non plus, la comprendre sans la mettre en parallèle étroit avec la rébellion du Haut-Canada, de la même année.

L'Histoire est science sociale. Et elle revendique, parmi celles-ci un rôle particulier. Car il n'est pas de cloison qui puisse l'enfermer ; elle ne peut, comme le font la sociologie ou la science économique, pour la commodité de l'analyse et de l'élaboration théorique, privilégier certains types de comportements ou certains facteurs d'explication. Dans la réalité, il n'y a pas de comportement qui soit ou social, ou économique ou politique. Dans l'explication d'un phénomène économique, il n'y a pas, pour l'historien, de facteurs qui soient endogènes ou exogènes, comme le proposent les économistes. L'utilité de l'Histoire réside précisément en ce qu'elle permet que les différentes sciences sociales ne se referment irrémédiablement sur elles-mêmes, hermétiques les unes aux autres, mais participent toutes, par les emprunts qu'elles se consentent réciproquement, à l'analyse d'un même objet : l'Homme.

De façon plus précise, nous pouvons, sans trop approfondir, définir
trois fonctions principales de l'Histoire en science sociale:


1 - L'Histoire décrit, dans leur déroulement même et non par étapes successives, l'évolution dynamique des phénomènes sociaux, économiques et politiques. Elle est un complément à toute théorie du développement économique et social ; elle apporte une dimension nouvelle, contrepoids de la généralisation ; le singulier et le continu. L'Histoire n'accepte pas la relation causale. Dans la réalité du développement historique, il n'y a pas d'effet qui soit proportionné à la cause. Rien ne peut être désigné avec précision comme étant la cause d'un évènement et nul évènement ne peut être dit l'effet de quoique ce soit de défini. Tout est interdépendant. Une seule relation est significative en science sociale : c'est la relation dialectique ; ce qui est entraîné, entraîne son propre moteur et le transforme en se transformant soi-même.


2 - L'Histoire fournit la description de l'infrastructure économique, politique et sociale dans laquelle sont apparues successivement, à travers les temps et les lieux différents, les théories économiques, les théories politiques et les théories sociologiques. Les théories sociales sont nées dans des contextes donnés, proposant des schémas d'analyse ou cherchant des réponses à certains problèmes concrets. Pour bien comprendre la théorie, saisir l'étendue et les limites de son application, il faut d'abord savoir dans quel contexte elle a surgi.


3 - L'Histoire agit comme un laboratoire pour les autres sciences sociales. On dit que les sciences naturelles auraient cette supériorité sur les sciences de l'homme que toute théorie peut-être expérimentée. Et, pourtant, depuis des siècles que l'humanité évolue, que des politiques sociales et économiques sont poursuivies, conscientes ou inconscientes, que des théories du comportement et du développement sont élaborées, de façon implicite ou expressément, toute une vaste matière à vérification existe. On connaît les données qui s'imposaient aux contemporains ; on connaît leurs théories et leurs explications du réel. On sait les décisions qu'ils ont prises et l'efficacité de leurs politiques. On saisit, même, les faits qui ont échappé à leur analyse et qui ont eu pour cela, des conséquences imprévues. Ainsi, peut-on en quelque sorte "expérimenter" le réel historique. François Simiand reconnaissait ce rôle à l'historien.

Si l'historiographie apporte quelque chose aux sciences sociales, en retour, elle adoptera leurs instruments positifs d'analyse et leurs hypothèses scientifiques de travail. Trop longtemps, on a considéré l'Histoire comme une discipline littéraire, le passé comme une galerie d'art. Mais, peu à peu, maintenant, la science historique se purifie, se définit ; elle se débarrasse, pénible-ment il est vrai, des scories qu'elle charie depuis des siècles. Notre historiographie nationale en contient encore de nombreuses : les notions de grand homme, de race supérieure ou de peuple élu, de Cité de Dieu, de géopolitique, de fatalité ou de doigt providentiel, d'élite, etc.

Le rapport de la commission royale d'enquête sur l'enseignement dans la province de Québec (commission Parent) recommande au ministère de l'éducation qu'on en allège nos manuels et tout notre enseignement. Au livre des programmes (vol. 3), le chapitre sur l'Histoire (ch. XX) contient des pages remarquables (145-154). L'étude est bien structurée. introduction (par. 835) ; orientations diverses (par. 836) ; valeur éducative de l'Histoire (par. 837-843) ; problèmes de l'enseignement de l'Histoire dans le Québec (par. 844-846) ; réformes à envisager (847-852) ; méthodes à utiliser (par. 853 et 854) ; direction que doit recevoir cet enseignement (par. 855) ; conclusion (par. 856) et, finalement, quatre recommandations (recommandations 272 à 275).

Les paragraphes sur la valeur éducative de l'Histoire sont groupés par sous-titres particuliers et subdivisés¨ :

a) Présence du passé :

i) sens de l'évolution humaine
ii) sentiment d'appartenance
iii) leçons d'expérience,

À la lumière de ce qui précède, il m'apparaît que le rapport insiste peut-être un peu trop sur cet aspect. L'Histoire ne doit pas être présentée comme une science du passé. Et même si des grands hommes (le rapport nomme Churchill, Kennedy et de Gaulle) ont développé, par l'étude du passé de leur pays un sentiment d'appartenance et un patriotisme profond, il n'en reste pas moins que l'Histoire écrite par des hommes d'action (Churchill, de Gaulle) sert à motiver leur politique, à se situer eux-mêmes dans l'histoire et à magnifier la destinée de leur nation en regard de l'étranger ou de l'ennemi. Non, l'Histoire ne peut servir de leçon de patriotisme ou d'héroïsme, le rapport de la commission le dit par ailleurs fort bien.

b)
Discipline de l'esprit

i) perception de l'élément temps
ii) objectivité scientifique et pondération
iii) science conjecturale et recherche
iv) rôle de l'imagination.

Celles-ci sont, sans conteste, les plus belles pages de ce chapitre. Le paragraphe 840, sur la perception de l'élément temps, du temps historique c'est-à-dire du continu, et des rythmes divers de la durée, atteint au plus profond des préoccupations des historiens.

L'enseignement dans le Québec affronte, selon le rapport, deux problèmes principaux. 1° le cloisonnement entre les deux sections de l'enseignement (celui de langue anglaise et celui de langue française) ; 2° la pénurie du personnel qualifié. Aussi, la commission Parent envisage-t-elle des réformes importantes dans l'enseignement :

a) dissocier Histoire et apologie ;
b) élargir la conception de l'Histoire ;
c) élargir le programme ;
d) préparer et utiliser de meilleurs manuels ;
e) renouveler la didactique ;
f) recruter le personnel qualifié.

Le rapport suggère, en outre, quelques méthodes particulières pour le niveau élémentaire et le niveau secondaire de cet enseignement.

Trois recommandations principales viennent couronner ces considérations. L'une, de caractère administratif, les deux autres, de caractère didactique : a) que l'enseignement de l'histoire se fasse davantage dans l'objectivité, la précision et la mesure ; b) que les programmes, "dans leurs grandes lignes", soient les mêmes pour tous les groupes ethniques ou religieux. C'est cette dernière recommandation qui a soulevé la polémique dans nos journaux. Il ne m'apparaît pas que cette recommandation repose sur la préoccupation de l'unité nationale ; la contradiction serait trop flagrante : il s'agirait d'une apologie tout aussi détestable que celles que dénonce le rapport lui-même.

Il s'impose ici de marquer la distinction entre recherche historique et enseignement de l'Histoire. Le chercheur est l'homme d'un lieu et d'un temps, je le disais plus haut ; certaines valeurs inspirent les hypothèses de travail qui guident sa recherche ; ses hypothèses seront scientifiques et sa recherche positive dans la mesure où il saura objectiver les valeurs qui le portent. C'est pourquoi, des scientifiques de groupes ethniques et de classes sociales différentes peuvent avoir des questions particulières à poser au passé. Mais les réponses qu'ils recevront seront objectives si leurs hypothèses sont bien explicitées. Ainsi, les questions peuvent être particulières à certains groupes, mais les réponses s'imposent à tous.

Prenons l'exemple le plus contestable possible pour illustrer davantage cette affirmation. Supposons que les sociologues et les anthropologues tracent du Canadien français l'image du colonise ; le comportement du Québécois serait caractérisé par la mentalité de l'homme exploité, aliéné, dépersonnalisé ; et s'ajouterait la confusion, relativement étroite, des notions de classe et d'ethnie. Je conçois très bien qu'un historien du Québec puisse se rechercher, dans les limites d'une hypothèse étroitement définie, comment et pourquoi, dans l'histoire du Canada, a pu se développer une telle mentalité. Il peut en arriver à conclure, ou bien que les documents consultés ne révèlent aucune trace de la naissance de cette mentalité ; ou bien, an contraire, que l'hypothèse est valable et que les documents révèlent la naissance et l'évolution de cette caractéristique culturelle.

Je prétends que, dans la mesure où l'hypothèse était bien précisée, que la recherche a été positive et que les conclusions ne dépassent ni les cadres fixés par l'hypothèse, ni la portée des documents consultés, les conclusions sont valables pour tous, y compris les Anglo-Saxons. Un historien anglo-saxon pourrait, quant à lui, inspirer sa recherche de toute autre hypothèse et arriver à des conclusions tout aussi acceptables, dans la mesure où il respecte les conditions d'objectivité déjà décrites.

C'est pourquoi, au niveau de l'enseignement, la commission Parent est fondée de recommander l'uniformisation, "dans leurs grandes lignes" des programmes d'Histoire. je ne vois dans cette recommandation ni de conspiration, ni de cause d'appauvrissement ; elle m'apparaît comme un gage d'objectivité.

Au fait, comme le conçoit la commission Parent, l'enseignement de l'Histoire développe, tant au niveau élémentaire que secondaire, le sens de la durée, de la dimension temporelle et le sens du continu. Il est, en outre, avec la géographie et en étroite liaison avec elle, introduction aux sciences sociales. Quant au niveau supérieur, l'historiographie est avant tout recherche positive.

Retour au texte de l'auteur: Alfred Dubuc, historien québécois (UQAM) Dernière mise à jour de cette page le Lundi 21 juillet 2003 11:04
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue.
 



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