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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Henri Dorvil, “Profilage diagnostique et traitement des troubles mentaux. Les attitudes de la société”. Un texte publié dans l'ouvrage sous la direction de Henri Dorvil, Problèmes sociaux. Tome IV. Théories et méthodologies de l'intervention sociale, chapitre 12, pp. 271-298. Québec: Les Presses de l'Université du Québec, 2007, 455 pp. [Autorisation accordée par l'auteur le 5 juin 2008 de diffuser ce texte dans Les Classiques des sciences sociales.]

Henri Dorvil 

Travailleur social, professeur, École de Travail social, UQÀM 

Profilage diagnostique et traitement
des troubles mentaux.
Les attitudes de la société
. 

Un texte publié dans l'ouvrage sous la direction de Henri Dorvil, Problèmes sociaux. Tome IV. Théories et méthodologies de l'intervention sociale, chapitre 12, pp. 271-298. Québec : Les Presses de l'Université du Québec, 2007, 455 pp. 

Introduction
 
1.  Beautiful patients are good patients
 
2.  Étude de cas - autobiographie de Patricia Deegan
3.  Revue de littérature sur les attitudes
 
3.1. Revue de littérature sur le logement
3.2. Revue de littérature sur le travail
 
3.2.1. Les obstacles structurels
3.2.2. Les obstacles cliniques, motivationnels, cognitifs, et ceux liés aux antécédents scolaires et de travail.
 
Conclusion
 
Bibliographie
 

INTRODUCTION

 

Selon un expert de la Faculté de droit de l'Université de Windsor (Tanovich, 2006), 

Racial profiling occurs when law enforcement or security officials, consciously or unconsciously, subject individuals at any location to heightened scrutiny based solely or in part on race, ethnicity, Aboriginality, place of origin, ancestry, or religion or on stereotypes associated with any of these factors rather than on objectively reasonable grounds to suspect that the individual is implicated in criminal activity. Racial profiling operates as a system of surveillance and control. It creates racial inequities by denying people of color privacy, identity, place, security, and control over (their) daily life. » It shares many similarities with previous systems of control such as slavery and segregation, both of which had a long history in Canada. As one scholar has pointed out, , racial profiling is best understood as a current manifestation of the historical stigma of blackness as an indicator of criminal tendencies. » 

Le profilage s'avère une notion qui a migré des études ethniques à la sociologie de la santé. Un stigmate est une marque au couteau ou au fer rouge que l'on faisait sur la peau d'un individu (esclave, criminel, traître) pour le désigner à l'opprobre du public, car il était frappé d'infamie, il était rituellement impur. Cette marque physique, avec le temps, est devenue de plus en plus une marque sociale. Goffman (1975) précise : 

Un individu qui aurait pu aisément se faire admettre dans le cercle des rapports sociaux ordinaires possède une caractéristique telle qu'elle peut s'imposer à l'attention de ceux d'entre nous qui le rencontrent, et nous détourner de lui, détruisant ainsi les droits qu'il a vis-à-vis de nous du fait de ces autres attributs. Il possède un stigmate, une différence fâcheuse d'avec ce à quoi nous nous attendions. Quant à nous, ceux qui ne divergent pas négativement de ces attentes particulières, je nous appellerai les normaux. 

Il existe plusieurs types de stigmates. En dehors des anomalies physiques constituant le premier type, viennent les différences de caractère qui, aux yeux d'autrui, prennent l'aspect d'un manque de volonté, de passions irrépressibles ou antinaturelles, de croyances égarées ou rigides, de malhonnêteté. Les personnes jugées mentalement dérangées font partie de cette catégorie où l'on retrouve également les prisonniers, les drogués, les alcooliques, les chômeurs, les suicidaires, les gens d'extrême gauche et jusqu'à tout récemment, les gais et lesbiennes. Un des stigmates les plus coriaces et les plus tabous est le Racial Profiling (sélection raciale), profil statistique construit à même des banques de données. Ce marqueur social construit sur un phénotype racial donne lieu à un genre de harcèlement policier qui consiste à contrôler et arrêter d'une manière intempestive les gens de race noire ou les hispanophones jusqu'à deux fois par mois, cinq fois plus souvent que les Blancs. Une jolie voiture conduite par un Noir, c'est une voiture de dealer. Même si 80% des consommateurs de cocaïne aux États-Unis sont blancs, la police cherche de la drogue en priorité chez les Noirs et les Latino-Américains, en conformité avec le Drug Courrier Profie. D'ailleurs, c'est maintenant connu. Quand les policiers se mettent en parallèle des autoroutes, ils contrôlent la conduite automobile à même les plaques d'immatriculation. Quand ils garent leur voiture en retrait de manière perpendiculaire à la circulation automobile, ils contrôlent avant tout le profil racial. Ce problème est d'actualité et fait la une dans les journaux du Québec. Le Conseil interculturel de Montréal (Cauchy, 2006) a dévoilé un avis sur le profilage racial. Un jeune de la polyvalente Georges-Vanier d'origine haïtienne témoigne : l'autre jour, des policiers m'ont arrêté alors que je courais vers la station de métro pour attraper le dernier train. Il y avait plein d'autres personnes qui passaient mais les policiers ne faisaient rien. 

Si la couleur de la peau (les Noirs, Hispaniques, Asiatiques, Musulmans) signe en quelque sorte la ligne de démarcation et voue ces personnes au traitement discriminatoire, il en est de même du diagnostic psychiatrique qui enlève, à toutes fins pratiques, l'essence même de la nature humaine aux personnes usagères des services de santé mentale. 

Ce chapitre se divise en trois parties. Tout d'abord, un aperçu de la problématique générale de la beauté ; ensuite, une étude de cas relatant le témoignage d'une personne diagnostiquée schizophrène à l'âge de 17 ans et qui a eu à vivre avec ce stigmate plus difficile à traiter que la maladie elle-même. En dernier lieu, une revue de littérature récente décrira les attitudes de la société à l'égard des personnes présentant une maladie mentale (PPMM) pour ce qui concerne le logement, l'emploi ou les médias de masse. 

 

1. BEAUTIFUL PATIENTS
ARE GOOD PATIENTS

 

Il y a de cela un quart de siècle environ (Nordhlom, 1980), une recherche confirmait les préjugés favorables que les travailleuses sociales, les psychologues, les médecins nourrissent à l'égard de leurs clients beaux et tranquilles. Il en est de même en cour de justice où les beaux accusés, les femmes « sexy », les gens instruits en général écopent de peines moins sévères (beautiful but dangerous). Selon Amadieu, un professeur de sociologie et de gestion des ressources humaines, être beau, c'est un atout dans la vie. 

Un individu doté d'une caractéristique qui a été perçue par les autres comme distinctive va déclencher un certain nombre de préjugés. On va lui prêter des qualités ou des défauts et, du coup, tout ce qu'il va faire ou dire ne sera pas évalué de façon juste. Il y a une sorte de flou ou de brouillard qui va auréoler cette personne et qui va faire qu'au fond, on ne verra pas les caractéristiques réelles de la personne. Cet effet de halo profite aux uns et nuit aux autres. Surtout, il brouille la perception et la vision des autres de ce que l'on est vraiment (2005, p. 31) 

L'apparence a un impact sur l'insertion professionnelle et l'ascension professionnelle des individus. 

Dans deux cas de testing, j'ai constaté qu'un visage disgracieux ou une surcharge pondérale entravent l'accession à un emploi. Il existe aussi des travaux sur les déroulements de carrière. Les effets de la taille des individus ont été démontrés. Les gens de grande taille font de meilleures études, gagnent plus que des gens de petite taille (Amadieu, 2005, p. 31). 

Il vaut mieux être né beau dans un milieu défavorisé que laid dans un milieu favorisé. Il est peu probable qu'un laid né dans un milieu favorisé connaisse un déclassement social dû à son handicap physique. Les images des gens beaux, minces, bronzés, souriants sont partout à la télévision, sur les pancartes publicitaires et deviennent au fil du temps la norme très largement dominante. 

Par ailleurs, depuis les philosophes de la Grèce antique, il existe une association entre la beauté du visage et celle de l'âme. Le stéréotype « ce qui est beau est bien » se manifeste sur plusieurs registres, incluant des dimensions sociales comme l'extraversion, la sociabilité aux compétences (intelligence, qualifications) sans oublier la santé physique, mentale, la grandeur, la puissance d'attraction sexuelle, etc. Si les effets de ces stéréotypes peuvent s'observer à l'évaluation scolaire, dans le processus d'embauche, ou pour des promotions, ils sont parfois déterminants dans les diagnostics et les pronostics médicaux, dans l'évaluation de la dangerosité et pour toute décision judiciaire. Par exemple, une recherche (Farina, 1986) établit que les malades mentaux qui sont les moins attirants ont un diagnostic plus sévère et sont hospitalisés plus longtemps. A contrario, les autorités hospitalières autorisent les plus attirants à vivre hors de l'hôpital pendant plus longtemps. Une autre recherche (Zebrowitz et McDonald, 1991) démontre que le degré d'attirance du plaignant a un poids déterminant sur la diminution des chances de l'accusé. 

Toute cette problématique doit être drapée dans l'individualisme contemporain nimbé de narcissisme où le flot d'images s'avère incessant, où le sensationnalisme prime. La surabondance des images (Denis, 2004, p. 176) fait écran à notre monde intérieur : il peut exister ainsi une sorte de toxicomanie des images, qui s'apparente, à la traumatophilie et qui, comme tout recours à un toxique, vise à en réprimer les effets. La médecine est une discipline où le regard tient une place fondamentale, mais il s'agit d'un regard de pathologiste, d'emprise, d'étiquetage d'objet et non de compréhension de l'être humain dans toutes ses dimensions, d'empathie, d'acceptation inconditionnelle d'autrui. Le regard est au cœur de la condition humaine, disait Claudine Haroche (2004, p. 160). Le déni du regard est alors susceptible de provoquer la perte de l'intériorité et de déposséder la personne de ses attributs les plus fondamentaux. De là, l'importance des apparences, la recherche de notre part de l'attention qui deviennent des éléments déterminants dans le jugement porté sur un individu, et par ricochet sur notre identité. Il faut être regardé pour être reconnu. L'individu dit normal ou aux prises avec des troubles mentaux a un profond besoin d'attention et de regard. 

Comme je l'ai avancé en début de chapitre, le stigmate associé aux troubles mentaux s'avère très traumatisant et enlève aux personnes diagnostiquées l'essence même de la nature humaine associée à la rationalité et à la volonté. Si vrai qu'il faut se rétablir non seulement de la maladie mentale mais aussi des effets de l'étiquette « malade mental ». Les professionnels des services de santé mentale, les chercheurs (Link et Phelan, 1999), essaient de comprendre l'état des personnes diagnostiquées. Cependant, seule la personne ayant vécu le traumatisme du diagnostic et de l'internement psychiatrique est à même de l'exprimer authentiquement dans la force de la sévérité des conséquences. C'est le cas de Patricia E. Deegan, Ph.D, directrice de programme, Northeast Independant Living Program, Lawrence, Massachusetts et consultante au National Empowerment Center. 

 

2. ÉTUDE DE CAS – AUTOBIOGRAPHIE
DE PATRICIA DEEGAN

 

L'autobiographie désigne simplement le récit rétrospectif écrit qu'une personne fait de sa propre vie, sans interlocuteur ou intermédiaire extérieurs. L'élément de définition le plus important à retenir de l'autobiographie (Létourneau, 1989) est qu'il s'agit d'un récit élaboré comme une réinterprétation de sa vie en vue de lui trouver un sens. L'acte d'écriture proprement dit est donc inséparable d'une prise de conscience (latente ou manifeste) et d'un effort d'intégration de divers épisodes dont chacun à été vécu de façon spécifique et sans s'inscrire nécessairement dans un projet de vie complet et logique. Le récit de Deegan (1993) répond justement à cette définition du document biographique. 

Au cours de mes réflexions devant alimenter mon témoignage, j'ai fait un retour en arrière dans ma vie quand j'étais adolescente et que je venais d'être diagnostiquée la toute première fois pour une maladie mentale grave. Je pensais à la première de mes deux hospitalisations et dans quelles circonstances on a associé mes problèmes à de la schizophrénie et trois mois après, lors de ma seconde hospitalisation, j'étais devenue une schizophrène chronique.
 
Je m'étais dit que j'avais une maladie comme le diabète et que si je continuais à prendre mes médicaments neuroleptiques pour le reste de ma vie et si j'évitais des situations trop stressantes, je serais capable de m'y adapter. Je me souviens du moment où le psychiatre a prononcé ces mots, tous mes rêves d'ado volèrent en fumée. Plus question de jouer à la crosse dans l'équipe féminine des États-Unis ou de travailler dans le Peace Corps. Toutes ces fonctions de mon identité s'échappaient de ma personne. Un processus de déshumanisation, de dévalorisation s'opérait en moi : je n'étais plus une personne, je devenais une maladie. Je n'étais plus Pat Deegan mais une schizo. Un profond sentiment de solitude, de perte de valeur, de manque de dignité s'emparait de moi. Des membres du personnel des soins me donnaient des médicaments, prenaient ma tension artérielle, faisaient de l'ergothérapie, de l'occupation thérapeutique, des loisirs avec moi. Cependant, j'étais toute seule avec ma solitude, à la dérive sur une mer sans nom sans boussole ou gouvernail. Ça aurait été tellement réconfortant si quelqu'un était venu m'encourager en me disant par exemple : Tenez bon, vous allez vous en sortir. Et le plus profond sentiment de solitude venait du fait que beaucoup de gens me parlaient de mes symptômes, mais personne ne me demandait comment je me sentais. Personne ne venait à moi pour dire : Hey, vous êtes en train de vous diriger droit en enfer. Je sais que vous vous sentez totalement perdu dans un cauchemar. Je sais que vous ne pouvez voir aucun chemin au bout du tunnel. Cependant, j'ai été là où vous êtes en ce moment. Moi aussi, j'ai été étiquetée schizophrène et de toute une kyrielle d'autres diagnostics. Et je suis là à vous dire qu'il existe un chemin pour s'en sortir, que votre vie ne doit pas se dérouler à l'intérieur des institutions psychiatriques. Je suis dans les alentours à votre disposition si vous voulez m'en parler.
 
Personne n'est venu à moi avec ces mots de réconfort. Tout ce que je savais de mon état était les stéréotypes que j'entendais à la télévision ou dans les films comme Vol au-dessus d'un nid de coucou (One Flew Over the Cuckoo's Nest). Pour moi, à cette époque la maladie mentale signifiait Dr. Jekyll et Monsieur Hyde, des tueurs en série, des maisons de fous, des idiots, des schizos, des cinglés, des timbrés, des cas de camisole de force, des fous furieux. C'étaient ces idées qui me venaient à l'esprit et ce qui me paraissait le plus terrifiant dans tout ça, c'était que les professionnels m'envoyaient le message que j'étais l'une de ceux-là. Cela aurait été drôlement aidant d'avoir quelqu'un pour me dire que je pouvais survivre à la maladie mentale, que je pouvais me rétablir de cette maladie, construire une nouvelle vie. Cela aurait été le fun d'avoir des modèles à imiter, je ne sais pas moi, des gens qui sont déjà passés par là, qui ont réussi à s'en sortir et qui maintenant ont un bon boulot, ou qui sont en amour, qui ont un apart avec ou sans coloc ou même leur propre maison unifamiliale, ou enfin qui ont fait une contribution valable à la société. C'est dommage pour moi, ça ne m'est pas arrivé.
 
Aujourd'hui j'ai la chance de dire ces choses que personne ne m'a jamais dites. Je veux parler avec l'ado de 17 ans, presque jeune adulte, que j'étais autrefois. Je veux lui dire ce que je sais maintenant, ce que je ne savais pas cette époque là. Je désire lui dire et aussi à tous ceux qui ont porté le poids du diagnostic de maladie mentale, qui ont souffert profondément, qui ont connu des moments de désespoir, à qui on a dit qu'ils n'avaient pas de valeur et qui se sont sentis seuls, abandonnés, à la dérive sur une mer morte et silencieuse. 
Une existence triste, monotone. Je tourne mon regard sur les vingt et un ans qui me séparent de mon adolescence. J'essaie de la voir ... c'est difficile de la regarder. Je peux voir ses doigts jaunis par la nicotine. Je la vois ankylosée, bourrée de médicaments, traînant les pieds, ses yeux ne dansent pas. Le danseur s'est écroulé et ses yeux sombres regardent fixement nulle part. C'est le temps entre la première et la deuxième hospitalisation et elle retourne vivre chez ses parents. Elle se force à se lever du lit à 8 h du matin. Par automatisme, elle s'assoit sur une chaise, tous les jours la même. Elle fume des cigarettes. Cigarette sur cigarette. La fumée fait passer le temps. De 9 h à midi, elle s'assoit, fume et regarde au loin. Après, c'est l'heure du lunch. À 13 h, elle retourne se coucher jusqu'à 15 h. Elle retourne s'asseoir sur sa chaise pour fumer et regarder dans le lointain jusqu'à l'heure du souper. Après, elle retourne sur sa chaise à 18 h. En dernier lieu, l'heure tant attendue, l'heure d'aller au lit et de tomber dans un profond sommeil sans rêve. Le même scénario se répète le lendemain, de jour en jour, de mois en mois, tout un temps qui s'envole avec la fumée des cigarettes.
 
Et quand je l'observe ce n'est pas tant la maladie mentale que j'observe. Je suis témoin d'une flamme de l'esprit humain qui chancèle. Elle perd la volonté de vivre. Elle n'est pas suicidaire mais elle veut mourir parce que la vie ne vaut plus la peine d'être vécue. Ses espoirs, ses rêves, ses aspirations ont volé en éclats. Elle ne voit aucune issue pour accomplir les rôles dont elle avait rêvé. Son avenir se réduit au pronostic funeste de schizophrénie. Son passé disparaît comme un rêve qui appartenait à autrui. Son présent est vide. Non, ce n'est pas une maladie mentale que j'observe. Je vois une jeune femme dont l'espoir de mener une vie pleine et entière s'évanouit. Son esprit ne tient plus le coup, c'est une morte vivante.
 
Ce que j'aimerais lui dire. Je me promène dans la chambre et je m'assois tout près d'elle. Je veux lui parler. juste à cette pensée, ça me donne envie de pleurer. Patricia, je suis très peinée par ce qui vous arrive. Je peux voir que vous souffrez beaucoup. Votre souffrance ne m'est pas inconnue. Je sais que les professionnels qui vous traitent, ne veulent pas, ne peuvent s'approcher de votre souffrance. Cependant, il n'y a rien de mauvais ou de honteux dans ce que vous souffrez. Essayez de comprendre que la très grande majorité des professionnels ne peuvent pas tolérer la souffrance, nos sociétés ne peuvent pas supporter la crise. Ils préfèrent que l'on garde tout en dedans, c'est plus confortable pour eux. Souvenez-vous de ce qui se passe dans les salons funéraires. Les gens qui veulent consoler les personnes endeuillées sont tellement anxieux qu'ils disent n'importe quoi. C'est effrayant de passer du temps avec quelqu'un qui vit une grande peine. Chaque être humain cache une peine, une blessure que l'on garde au fond de soi-même, que l'on refoule et qui peut refaire surface au contact des gens qui souffrent. Le seul moyen pour les professionnels de garder leur anxiété sous contrôle c'est de vous observer, de vous bourrer de médicaments et de garder une « saine » distance avec la source de vos souffrances qui risque de réveiller leur propre malheur.
 
J'entends la colère de votre souffrance. Vous êtes en colère parce que vous avez été diagnostiquée pour une grave maladie mentale. Vous êtes en colère parce que vos amis sont normaux. Ils vont à l'école, à leurs rendez-vous et vivent leurs rêves. Vous vous dites : Pourquoi pas moi ? Pourquoi ça m'est arrivé ? Je ne connais pas la réponse à cette question. Je ne sais pas pourquoi vous avez eu cette mauvaise carte dans votre jeu ? Cependant ce que je peux vous dire par exemple c'est que vous avez été affublée d'un diagnostic, mais vous n'êtes pas une maladie. Vous êtes une personne humaine dont la vie est précieuse et d'une infinie valeur. Vous êtes à un moment critique. Les professionnels disent que vous êtes une schizophrène. Votre famille et vos amis ont commencé à voir en vous une schizophrène. C'est parce que le monde entier leur a mis sur leurs yeux des lunettes qui déforment la réalité et qui leur laissent l'impression que vous êtes une maladie. Que vous soyez en joie ou en peine, tranquille ou excitée, quelque soit votre comportement, votre entourage vous trouvera inquiétante et aura toujours à redire. Désormais c'est à travers la lorgnette du diagnostic que vous serez perçue. Si vous êtes triste, comme tout le monde peut l'être, on dira que vous êtes déprimée ; si vous manifestez votre désaccord quelques fois, l'on dira que vous manquez d'insight. Si vous manifestez la moindre autonomie, vous serez jugée comme une patiente qui ne coopère pas à son traitement et ainsi de suite. Combien de fois Elizabeth Taylor s'est mariée ? Sept ou huit fois, je crois. La pauvre femme manquait d'insight. Elle faisait preuve d'un jugement déficient. Elle n'apprenait pas de ses erreurs passées. Elle tombait toujours et chaque fois dans le même pattern. Va-t-on l'obliger pour autant à avoir un case manager ? Attention, vous êtes à un moment critique de votre vie. Résistez aux messages qu'on vous envoie de tout bord. Le grand danger qui vous guette, c'est que vous pourriez subir une métamorphose complète vous faisant passer d'un être humain àune maladie, de Patricia à schizophrène ou bipolaire ou autre chose du genre. Si la personne arrive à croire qu'elle n'est plus une personne mais une maladie, il n'y a personne dans votre for intérieur qui va se charger de votre rétablissement, de votre guérison, de bâtir la nouvelle vie que vous voulez vivre. Si vous croyez que vous êtes une maladie mentale, vous perdez votre pouvoir et ce sont les autres qui vont décider à votre place. Soyez vigilante, vous avez le droit d'être en colère, de vous indigner. Et si quelqu'un essaie de vous convaincre que votre colère est un symptôme de votre maladie mentale, c'est un menteur, ne le croyez pas. Quelques-uns vont même essayer de vous donner des médicaments pour apaiser votre colère. Ne les prenez pas, c'est dangereux ça risque de briser votre esprit de résistance, de blesser votre dignité.
 
Your anger is not a symptom of mental illness. Your angry indignation is a sane response to a situation that you are facing. You are resisting the messages you are being given. In and through your fiery indignation your dignity is saying : "No, I am not an illness. I am first and foremost a human being. I will not be reduced to being an illness or a thing. I will keep my power and save a part of myself that will, in time, be able to take a stand toward my distress and begin the process of recovery and healing.
 
En psychiatrie/santé mentale, il faut se souvenir de ce constat comme d'un leitmotiv. C'est important de comprendre qu'il s'agit de se rétablir non seulement de la maladie mentale, mais aussi et surtout des conséquences d'avoir été étiquetée malade mentale. Je crois que, beaucoup d'entre nous ont quitté les hôpitaux psychiatriques avec un violent choc post-traumatique, résultat du traumatisme et des abus que nous avons expérimentés ou dont nous avons été témoins durant notre séjour à l'hôpital psychiatrique ou dans des centres communautaires de santé mentale. Il faut nous rétablir du processus d'intériorisation du stigmate qui nous a emmaillotés, des effets aussi de la discrimination, de la pauvreté, de la citoyenneté de seconde classe. En effet, il n'y a pas de doute que le profilage psychiatrique ne vient pas tout seul et qu'il est enrobé dans un package deal qui inclut la pauvreté, le traumatisme, la déshumanisation, la dévalorisation, la déchéance de ses droits civiques et sociaux. Ainsi le processus de recovery doit marcher main dans la main avec le processus d'empowerment (prise de pouvoir sur sa vie).
 
Le processus de rétablissement est politique et implique les plans social et économique, et les injustices humaines criantes que nous avons vues ou endurées. À mon avis, l'empowerment et le recovery signifient reprendre notre voix collective, notre fierté collective, notre pouvoir collectif. Finalement, Patricia, une dernière chose méfiez-vous des jugements de valeur qui sont la marque de commerce du système de santé mentale. L'on vous dira que vous êtes up ou que vous êtes down. Il n'y a pas d'attributs qui existent à l'intérieur des êtres humains. C'est tout simplement que le professionnel ou le travailleur communautaire est incapable de voir et de découvrir vos talents. Vous êtes un être humain, non une folle à lier. Vous portez en vous une précieuse flamme, l'esprit du Créateur. Ne baissez pas les yeux, regardez droit devant vous et marchez.

 

3. REVUE DE LITTÉRATURE
SUR LES ATTITUDES
 [1]

 

Selon l'OMS (2001), les pays doivent formuler une politique générale de santé qui accorde une place prépondérante aux éléments concernant la santé mentale, « en raison notamment de la stigmatisation et des violations des droits de l'homme dont sont victimes bon nombre de personnes atteintes de troubles mentaux et du comportement, et parce que celles-ci ont besoin d'une aide pour trouver un logement ou obtenir des allocations ». Malgré l'évolution des mentalités, les préjugés associés aux maladies mentales ont la vie dure et handicapent la réinsertion sociale des personnes qui en souffrent, notamment concernant l'emploi. Selon Goffman (1963, cité dans Stuart, 2003), la stigmatisation est une puissante expérience de discrédit et d'isolement social, associée à des sentiments de culpabilité, de honte, d'infériorité et à un désir de dissimulation. De plus, la « stigmatisation de courtoisie » est une stigmatisation par association avec des personnes stigmatisées, par exemple, par les membres de leur entourage qui maintiennent leur lien avec eux malgré leur dévalorisation et leur marginalisation. Stuart (2003) démontre, sondages à l'appui, que la maladie mentale est associée à la dangerosité et que les mentalités changent très lentement. Par conséquent la maladie mentale, pour la plupart des gens, doit être maintenue le plus éloigné possible (Star, 1955). Tout le problème de la stigmatisation réside dans la confusion entre « avoir une maladie mentale » et « être un malade mental », contrairement aux maladies biologiques (c'est-à-dire le diabète) où on distingue la maladie de l'individu (Gervais, 2004). Cette stigmatisation les discrimine et les exclut de plusieurs sphères de nos sociétés, tels que les services de santé, le logement et le travail (Knight et al., 2003 ; Alexander et Link, 2003 ; Green et al., 2003 ; Sieff, 2003). Wahl (2003) rapporte également une perte de la dignité et un retrait de participation à la société. La discrimination vient des pairs et de tous les niveaux de la société et elle atteint les individus dès le début de la maladie et pendant son développement. (Penn et Wykes, 2003). 

Dans des récits de vie collectés par Wahl (1999), les PPMM considèrent que la stigmatisation a non seulement un impact sur leur vie mais également sur leur rétablissement. La perception négative qu'ils ressentent les maintient dans le silence quant àleur condition de santé (famille, amis, collègues, propriétaires de logement ou employeurs) et les empêche souvent de demander des soins. Dans la lignée des récits de vie sur la nature et l'impact de la stigmatisation, tous les usagers (n = 27) des services de santé mentale (SSM) interviewés par Green et al. (2003) rapportent être affectés par la stigmatisation, quels que soient leurs diagnostics. La peur de la stigmatisation a été la plus commune des caractéristiques mentionnées (93%) et serait plus restrictive pour eux que la discrimination (52%). Les résultats de Angermeyer et al. (2003) vont dans le même sens. Les patients (n = 210) avec diagnostic de schizophrénie ou d'épisode dépressif anticipent la stigmatisation alors que les schizophrènes vivent plus d'expériences de stigmatisation. Selon les auteurs, les statistiques sur la réduction de la stigmatisation peuvent parfois cacher l'évitement de situations à haut risque de stigmates (travail et relations interpersonnelles) par les gens qui anticipent la stigmatisation. Au Québec, il semble qu'un changement des mentalités de la population québécoise se soit effectué durant la dernière décennie malgré une persistance de certaines craintes (St-Laurent et Clarkson, 1989). Deux ans auparavant, un membre de notre équipe (Dorvil, 1986) a évalué les attitudes des gens vivant près ou éloignés d'hôpitaux psychiatriques en milieux rural et urbain (L'Annonciation et Montréal). Les résultats démontrent une modification des préjugés de dangerosité et de peur des gens habitant près, ou travaillant dans un hôpital psychiatrique. L'intolérance est parfois voilée ou oscillante. En 1988, une étude effectuée par Dulac, Corin et Murphy sur les attitudes des Montréalais révèlent que 75% considèrent la pathologie visible et 68% croient qu'il est facile de reconnaître les usagers des SSM par des signes extérieurs (vêtements, la démarche, se parler seul...). Notre équipe (Dorvil et al., 1995) a effectué une enquête téléphonique (n = 899) portant sur les attitudes des Montréalais. Malgré tout, la maladie mentale est perçue comme une déviation par rapport à la norme. Ces résultats laissent entrevoir une certaine ambivalence quant à la tolérance et la crainte de gens vis-à-vis les personnes désinstitutionnalisées (Lamontagne, 1993 ; Dorvil et al., 1995). Ce phénomène du « pas dans ma cour » est connu du milieu et est une des conséquences directes des perceptions négatives (Crevier et al., 2004 ; Piat, 2000 ; Berger, 1997 ; Dear et Taylor, 1982). Paradoxalement, selon Côté, Ouellet et Caron (1993), le personnel en psychiatrie hospitalière a plus de réticence (56%) que le grand public, ou selon Sevigny (1999), que les psychiatres. 

Selon plusieurs auteurs, la persistance des attitudes et croyances négatives vient de l'ignorance des gens face aux maladies mentales, surtout chez les personnes âgées (Wolff et al., 1999). Selon un Rapport de Santé Canada (2002), se greffent à l'ignorance la superstition et le manque d'empathie, faisant de la discrimination et de la stigmatisation une des plus tragiques réalités de santé mentale au Canada. Penn et Wykes (2003) ajoutent à ces causes l'image très stéréotypée que conserve la population sur les PPMM. Cette image est projetée en l'occurrence par les médias, est internalisée par l'auditoire et devient un mythe dont il est difficile de se défaire (Wahl, 1989 ; Gerbner, 1980 ; Mcquail, 1979). Dans nos sociétés modernes, dans lesquelles les médias et les communications sont consommés de façon grandissante par la population, autant par les enfants que par les adultes, cette influence est perceptible dans de multiples recherches comme étant une source primaire d'acquisition de connaissances (Paik, 2001). Or, tel que Scheff (1999) le mentionne, les médias créent et perpétuent les stigmates sur les PPMM. De même, selon l'association canadienne de la santé mentale (CMHA), les stigmates se modèlent à l'image de nos croyances sociales. Lors d'entrevues sur le sujet, des adolescents, collégiens et adultes reconnaissent l'influence des médias sur leurs perceptions des PPMM (Granello et Pauley, 2000 ; Lopez, 1991). Ce portrait négatif des médias aurait un impact direct sur la vie des PPMM. Plusieurs usagers (n = 32) dénonçaient la fausse représentation d'eux dans les médias, ce qui les empêchait de demander de l'aide et diminuait leur estime et leur confiance en soi (Philo, 1996). Philo et Secker (2003) rapportent également qu'une crainte existe envers les PPMM même si les gens interviewés n'ont jamais vécu d'expériences personnelles ou n'ont pas été témoins d'actes violents les mettant en cause. Selon Scheff (1999), ces représentations négatives se forgent dès la petite enfance par la cristallisation à l'école élémentaire de la signification du mot « fou ». Cette construction se poursuit tout le long de l'adolescence et de l'âge adulte. Par exemple, dans une étude de Wahl (2002) sur les médias pour enfants, les jeunes enfants avaient déjà acquis une attitude négative et de non-désirabilité d'être en contact avec des PPMM même s'ils n'avaient pas encore cristallisé les connaissances sur la maladie et les symptômes associés. Wahl (2003) constate que les images et références projetées par la télévision, les films (c'est-à-dire Disney), les bandes dessinées, les jeux vidéo et les vidéo musicales pour enfants et adolescents sont majoritairement négatives. Les réactions de la population face aux PPMM se reflètent alors en sentiments de peur, d'embarras, de colère ainsi qu'en comportements d'évitement et d'exclusion. Selon Wahl (2003, 1995), il existe tout de même des films ayant une position plus positive sur les PPMM, par exemple A Beautiful Mind (2001). Le cadre est défini comme étant la façon dont l'information est organisée, présentée et interprétée (Entman, 1993 ; Goffman, 1986 ; Gitlin, 1980). Sieff (2003) signale que le cadre projeté quant aux PPMM est majoritairement négatif. Il existe également quelques études sur l'impact de la perception du public sur les politiques gouvernementales. Certaines évidences indiquent qu'il y aurait un lien entre le portrait négatif des médias et la réponse des gouvernements sur les politiques en santé mentale (Olstead, 2002 ; Hallam, 2002 ; Rose, 1998). Le gouvernement pourrait suivre l'opinion publique lors de l'adoption de législations au lieu de tenir compte des besoins et de la souffrance des PPMM (Cutcliffe et Hannigan, 2001). À ce sujet, plusieurs actes de violences impliquant des PPMM ont été reportés dans les médias et s'en est suivie la mise en application de législations plus coercitives en Grande-Bretagne (Philo et Secker, 2003) et aussi en Ontario. 

Selon plusieurs auteurs, il faut diminuer la stigmatisation et la discrimination afin d'avoir des effets à long terme sur le cours du développement des problèmes de santé mentale (c'est-à-dire retrait et non-observance). Il existe déjà de nombreuses campagnes de sensibilisation et d'intervention dans la communauté dont le changement d'attitude par les contacts. Certaines recherches suggèrent que l'expérience personnelle (amis, famille, travail) avec des PPMM peut réduire les attitudes de stigmatisation envers eux, entre autres, la perception de la dangerosité et le désir de maintenir une distance sociale (Alexander et Link, 2003 ; Dorvil et al., 1995 ; Couture et al., 2003). Selon une étude de Read et Law (1999), le contact demeure une bonne intervention de déstigmatisation pour augmenter les attitudes positives, surtout les approches privilégiant les contacts avec les personnes utilisatrices en santé mentale dans un contexte d'éducation anti-stigmatisation (Stuart, 2003 ; Thompson et al., 2002). Il existe d'autres interventions pour contrer la stigmatisation soit un changement des attitudes négatives par l'éducation et la protestation civile ainsi que par des législations. Il y a également le récit de vie, qui, selon Lundin (2003), aide à contrer la stigmatisation des autres de même qu'elle permet de se réapproprier un certain pouvoir et une estime de soi.

 

3.1. Revue de littérature sur le logement

 

L'habitat nous inscrit dans un territoire, dans un mode d'existence sociale. Pour les personnes exclues de la sphère économique, elle constitue d'ailleurs le mode d'inscription privilégiée dans un plus vaste réseau et de ce fait représente l'un des éléments clés de toute politique sociale visant à contrer la pauvreté et l'exclusion sociale (Ulysse et Lesemann, 2004). La problématique de l'habitat pose également d'emblée des questions primordiales quant au rapport de l'être humain àl'espace et à l'appropriation de l'espace (Willcoks, Peace et Kellaher, 1989 ; Norman et Parker, 1990). Contrôle, territorialité, sécurité, ces concepts reviennent constamment dans la littérature sur l'habitat (Dupuis et Thorns, 1998). Tous et toutes nous aspirons à avoir un chez-soi ; celui-ci représente un désir légitime à l'intimité, à la sécurité, à la souveraineté d'un espace privé. Cela demeure pourtant hors de portée pour nombre de PPMM (Dorvil, Morin, Beaulieu et Robert, 2002, 2005 ; Kushel et al., 2003). 

En regard d'une époque où l'hôpital psychiatrique était encore et toujours le centre du dispositif, Tranchina pouvait écrire justement que « L'asile est la destruction de la sphère privée dans une société basée sur la propriété privée » (1976, p. 108). Nous n'en sommes plus là ; cette destruction de la sphère privée se poursuit toutefois mais en se déclinant différemment selon la logique de la transinstitutionnalisation où les personnes psychiatrisées sont traités comme des objets que l'on déplace (Castel, Castel et Lovell, 1976, comme l'affirme la Vérificatrice générale du Québec, 2004, p. 35-36) : « Présentement plusieurs personnes ayant des problèmes de santé mentale sont en attente ou à la recherche d'une ressource résidentielle qui répondent à leurs besoins... plusieurs personnes doivent vivre dans des conditions insalubres, voire dans la rue » (Vérificateur général du Québec, 2004, p. 35-36). Pourtant le rapport Deschênes et Gagnon (1998) sur les personnes vulnérables susceptibles de bénéficier d'un régime de protection avait déjà clairement identifié les chambreurs comme des « personnes extrêmement fragiles qui ne sont pas détectées par notre système socio-sanitaire » (p. 22). Une recherche (Morin, Dorvil et Grenier, 2003) quant àl'univers des maisons de chambre a toutefois démontré que celui-ci n'est pas homogène d'un endroit à l'autre mais il est manifeste toutefois que la sécurité l'emporte sur l'autonomie définie par les propriétaires. Une recherche (Newill et Korr, 2004) effectuée auprès de 1200 travailleurs sociaux aux États-Unis intervenant auprès des PPMM révèle d'ailleurs que l'un des aspects les moins satisfaisants de leur profession est de les retourner dans des « [...] poverty stricken residences where they'll be taken advantages of » (p. 304). 

Plus globalement le zonage, un mécanisme de division des sols et de ségrégation des populations, a joué un rôle majeur dans la reconfiguration des services d'hébergement et dans la reproduction de rapports sociaux fondés sur une distance vis-à-vis de la folie. Le zonage, comme technique de contrôle du territoire, est ainsi devenu l'instrument privilégié d'exclusion des populations marginalisées, aux États-Unis comme au Canada. Aux États-Unis et au Canada, c'est par le biais du zonage que les gouvernements locaux se sont occupés des résultats locaux de la désinstitutionnalisation et de la décentralisation des services. Les valeurs du mouvement de désinstitutionnalisation ont alors été confrontées aux normes dominantes de la société telle que les normes familiales et le respect de la propriété privée. Les règlements de zonage, conçus pour spécifier l'usage des terrains d'une municipalité, se sont transformés en outils majeurs de discrimination envers les personnes aux prises avec un trouble d'ordre mental. Nous sommes ainsi passés d'un isolement de jure réalisé par l'internement asilaire à un isolement de facto induit par les normes de zonage. Un processus de ghettoïsation non planifié s'est ainsi concrétisé dans plusieurs grandes villes d'Amérique du Nord, tant américaines que canadiennes et québécoises (Morin, 2001 ; Morin, 1994). 

Il ne suffit pas que la PPMM ait un chez-soi, l'environnement doit concourir à son inclusion dans la société. Ainsi la recherche qualitative de Yanos, Barrow et Tsemberis (2004) auprès de 80 personnes logées dans des appartements a révélé qu'un tiers de celles-ci estimait problématique leur intégration dans leur nouveau quartier, dû notamment à une intolérance à cause de leur différence. Une recension des écrits préparée pour le « Social exclusion unit » par Watson et Hacker (2003) sur le thème « Mental health and housing » a aussi permis de constater, en Grande-Bretagne également, les limites du logement comme vecteur d'inclusion sociale. Les recherches de Tarpey et Watson (1997) et de Ford et al. (1997) sont citées à cet égard. Des 500 personnes suivies dans un quartier par des équipes de santé mentale, 14% vivant dans leur maison ou en appartement et 26% de ceux hébergés chez leurs parents ou des proches souhaitaient déménager. Les disputes avec le voisinage ou des allégations de harcèlement étaient le plus souvent nommées. Alors que les données probantes (Rog, 2004 ; Fakhoury et al., 2002) s'accumulent en faveur de la mise en oeuvre généralisée du modèle du logement avec soutien dans la communauté, ce modèle se heurte à des résistances. Felton (2003) a ainsi mis en évidence un tel processus dans son étude de cas sur les difficultés d'implantation de ressources résidentielles pour les personnes sans-abri avec des problèmes de santé mentale. De même, Tsemberis et al. (2003), toujours avec un tel sous-groupe d'usagers, en regard de l'opérationnalisation d'un nouveau programme résidentiel, concluaient que « Implementing and disseminating social Programs requires working with these structures of belief to find common goals and evidence that different stakeholders will find persuasive  »(p. 315).

 

3.2. Revue de littérature sur le travail

 

Depuis le XXe siècle, le travail est devenu une valeur centrale de notre société. Mais il n'en fut pas toujours ainsi. Par exemple au XVIe le travail, objet de mépris, occupait un temps minimal de la vie, étant dévolu sous forme de corvée aux esclaves, des non-citoyens (Delumeau, 1983). Au XVIIe, le travail s'inscrit d'emblée dans des activités de production de grande échelle. Il faut attendre le XIXe siècle pour que le travail devienne l'activité créatrice par excellence, source d'épanouissement et lieu de réalisation de soi (Méda, 1998). Avec le XXe siècle, le travail devient le lieu de socialisation, d'apprentissage des règles sociales, de structuration des identités, d'organisation du temps, d'intégration sociale. Plus qu'un lieu pour subvenir à ses besoins ou acquérir la richesse, le travail devient créateur de liens sociaux et assure ultimement la cohésion sociale (Dorvil et al., 2001 ; Beaulieu, Morin et al., 2002). Freud (1930, 1970) écrivait : aucune autre technique de la vie n'attache aussi fermement l'individu à la réalité que le travail car il procure une place sécurisante dans la réalité et dans la communauté humaine. Étant donné l'unanimité sur les vertus du travail, ce n'est pas une surprise que le droit au travail ait été enchassé dans la Déclaration des droits de l'ONU (article 23) : « Everyone has a right to work, to free choice of employment, to just and favourable conditions of work and to protection against unemployment. » D'ailleurs Vostanis (1990) insiste à l'effet que le travail ne devrait pas être considéré comme un facteur indépendant dans la réadaptation, mais davantage comme un élément du processus de celui-ci. En faisant référence à Rowland et Perkins, il mentionne quatre cibles dans le travail : 1) le développement des processus de base comme la responsabilité, le jugement et la perception ; 2) l'amélioration de l'estime de soi ; 3) une baisse des hospitalisations ; et 4) le développement d'habiletés sociales et relationnelles. 

Malgré ces bénéfices, seulement 15% des personnes utilisatrices des services de santé mentale occupent un emploi (Becker et al., 1994) alors que l'Organisation mondiale de la santé souligne que 90% d'entre elles souhaitent exercer un emploi (OMS, 2000). Dans un tel contexte, on comprend la frustration de milliers de personnes classées malades mentales qui, au Québec, aspirent à retourner sur le marché du travail. Pour eux être sans travail, c'est se situer en marge de la société, se sentir inutile, dévalorisé, rejeté. Quelles sont les données de la littérature scientifique sur les obstacles rencontrés par ces PPMM dans cette quête de valorisation ? Ils sont de deux ordres a) structurels b) cliniques, motivationnels, cognitifs, et ceux liés aux antécédents scolaires et de travail.

 

3.2.1. Les obstacles structurels

 

Une enquête sur la réadaptation psychiatrique par l'emploi dans le nordouest de Grande-Bretagne (Diffley, 2003) établit que les PPMM ont des taux élevés de chômage se situant entre 61% et 73%, même si la plupart ont le goût de travailler. Malgré le grand nombre de modèles d'aide (occupation thérapeutique, vocational rehabilitation, Clubhouse, supported employment, job placements) pour les PPMM qui veulent retourner sur le marché de l'emploi, plusieurs difficultés persistent. Bref, aider les PPMM à se placer sur le marché de l'emploi constitue un aspect de l'inclusion sociale mentionnée dans le National service framework for mental health en Grande-Bretagne. Richard Warner (2001) a étudié attentivement les facteurs discriminatoires et les mille et un ennuis qui découragent les PPMM à chercher un emploi. Il constate, dans un marché de travail compétitif dans le comté de Boulder au Colorado, que le taux d'emploi des gens atteints de psychose a augmenté autour de la moitié de la population. Un facteur crucial affectant les désincitatifs au travail semble être le montant du « earnings disregard », le montant de revenu gagné qu'un travailleur handicapé peut recevoir avant que ses bénéfices gouvernementaux se voient réduits ou discontinués. Augmenter le earning disregard peut aider à maintenir la personne handicapée en emploi, à décroître la pauvreté et à améliorer le quota en emploi des personnes psychotiques. Il est maintenant évident que les politiques publiques et spécialement celles en matière de santé mentale freinent la réinsertion en emploi et constituent la principale barrière à l'employabilité des PPMM. C'est pourquoi plusieurs chercheurs essaient d'infléchir les projets de loi en gestation pour contrer l'exclusion du marché du travail vécue par un grand nombre de personnes handicapées (Morin, 2004) ou rappellent à l'État le devoir d'un taux minimal de 6% de salariés handicapés à fixer aux entreprises de plus de 20 personnes puisque leur insertion s'impose « au regard des évolutions démographiques et de leur conséquence sur les besoins de main-d'œuvre » (De Larminat, 2004), en plus de l'impératif de solidarité envers cette population fragilisée qui accuse un taux de chômage élevé de 40%. Un autre obstacle est la forte discrimination qui frappe cette population handicapée en quête d'emploi (Ravaud et al., 1992). Les employeurs manifestent le désir d'embaucher cette catégorie de personnes, mais il n'y a pas de passage à l'acte, les bonnes intentions demeurant une mesure de résistance passive (Gibson, 1986). 

Sans diagnostic de maladie mentale, les personnes qui vivent des problèmes psychologiques sont aussi rejetées par leur milieu de travail (Alderson, 2004). En effet, elles installent souvent une distance entre elles-mêmes et celles avec lesquelles elles travaillent ou avec celles dont elles doivent s'occuper. Cette distance mène à une déshumanisation qui est blâmée par les collègues. Les problèmes psychologiques regroupent plusieurs problèmes de santé mentale considérés comme transitoires et liés au stress (Alderson, 2004). Les personnes en contact avec les patients seraient particulièrement à risque : infirmières, infirmières auxiliaires et préposés aux bénéficiaires (Lessard, 2005 ; Robitaille, 2001). La durée moyenne des absences est passée de 31,7 jours en 1993-1995 à 57,1 jours en 1998-1999 (Viens et al., 2002). La majorité des études cherchent à identifier les agents stressants menant à l'épuisement professionnel : le manque de contrôle, de latitude pour développer ses aptitudes, la complexité de la tâche, la quantité de temps fixée par l'employeur pour l'exécuter, le conflit et l'ambiguïté des rôles, le manque de soutien social, le harcèlement, la non-reconnaissance, les perspectives médiocres de carrière, la culture de l'organisation, l'impact du travail sur la vie privée (Vézina et al., 2004). Toutefois, peu d'études se sont intéressées au rétablissement ou à la réintégration professionnelle des soignants après une période d'absence pour problèmes psychologiques. A notre connaissance, seul Damasse et son équipe (2005) ont examiné la situation et ils l'ont fait sous l'angle des rapports au travail et ses conditions d'exercice. 

 

3.2.2. Les obstacles cliniques, motivationnels, cognitifs, et ceux liés aux antécédents scolaires et de travail.

 

De par les degrés de performance et de productivité qu'il exige, le marché régulier du travail est souvent perçu par les PPMM comme une sorte de roue qui tourne trop vite (focus group, 28 septembre 2000). Cette image est d'autant plus troublante que les structures du marché du travail dans les sociétés postindustrielles, comme le souligne Tausig (1999), tendent à se transformer pour faire apparaître un taux de plus en plus élevé de travailleurs en situation précaire d'emploi (contingent workers). Ceux-ci se voient offrir un salaire moins élevé, peu d'avantages sociaux, une opportunité moindre d'avancement dans la carrière et des chances moins grandes d'exercer un réel contrôle sur les conditions de leur travail. Dans ce contexte, plusieurs patients psychiatriques craignent de demeurer des stagiaires à vie (focus group, 14 juin 2002). Si l'on en croit ces personnes usagères, il s'agit d'un appel au secours pour leur permettre de sortir de ce labyrinthe. Becker et al. (1998) se sont penchés sur ce genre d'obstacles qui pèsent de tout leur poids sur la réinsertion en emploi de ces personnes. Une recherche signée de Casper et Fishbein (2002) a démontré que l'estime de soi pouvait être un prédicteur modéré de la satisfaction et de la persistance en emploi. Deux recherches effectuées au Québec (Corbière et al., 2002 ; Corbière et al., 2004) concluent que les antécédents de travail, le soutien social et l'estime de soi constituent le principal prédicteur du retour en emploi. Un mémoire de maîtrise (Grenier, 2002) a également mis en évidence l'expérience et l'absence du marché du travail comme de bons prédicteurs de l'employabilité d'une personne. D'autres études (O'Brien et al., 2003) vont dans le même sens. Quant aux déficits cognitifs, au moins deux études (Jones et al, 2001 ; McGurk, Mueser et al., 2003) ne trouvent pas qu'ils constituent un handicap à l'employabilité des personnes aux prises avec des troubles mentaux graves. Par ailleurs une recherche (Mueser, 2001) suggère que l'aide aux clients dans l'obtention d'un travail relié à leurs préférences est un important ingrédient de succès dans les programmes de supported employment.

 

CONCLUSION

 

La maladie mentale affecte la vie de beaucoup de Canadiens. Elle a un impact sur les relations sociales, l'éducation, la productivité et, par-dessus tout, la qualité de vie. Approximativement 20% des individus expérimentent une maladie mentale durant leur vie et les 80% restants seront affectés par une maladie chez un membre de leur famille, un de leurs amis, un collègue de travail (Health Canada, 2002). En Grande-Bretagne, le stress, la dépression et l'anxiété liés au travail occasionneraient la perte de quelques 13,5 millions de journées de travail par an. Lauzon et Charbonneau (2000) mentionnent que les problèmes de santé mentale canalisent 5,12 milliards de dollars par année au Québec en frais reliés à la santé et à la perte de productivité. Par contre, il n'est fait nulle mention du chiffre ou du pourcentage exact de personnes avec des troubles mentaux graves sans emploi. La plupart des auteurs font référence aux études menées par l'OMS ou encore par les USA pour déterminer ce pourcentage. Selon l'OMS, 90 des personnes « handicapées du psychisme », et aptes à réintégrer le marché du travail n'occupent pas un emploi rémunéré (OMS, 2000). Plus encore, le Comité sénatorial sur la santé, la science et la technologie (Comité Kirby), qui a produit une série de rapports entre 2001 et 2003, cautionne lui aussi les chiffres provenant soit de l'OMS soit des États-Unis pour les extrapoler à l'ensemble canadien. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS, 1995), la santé physique s'est améliorée à l'échelle mondiale mais l'état de santé mentale n'a pas changé ; au contraire, il se serait même détérioré. Cependant, en dépit de la prévalence des troubles mentaux et de leur complexité, on constate que l'utilisation des services en santé mentale est beaucoup moins spontanée et fréquente comparativement aux services de santé physique. En fait, 60% à 80% des personnes présentant une maladie mentale (PPMM) ne consulteraient pas, les justifications fréquemment invoquées étant la méconnaissance et l'inefficacité des services (Lesage, 1996). Mais il y a d'autres facteurs qui contribuent à cette situation. La stigmatisation de la maladie mentale ainsi que les préjugés à l'égard des PPMM entravent l'accès aux soins et aux services de santé mentale et contribuent fortement à exclure ces personnes des milieux du logement et de l'emploi (Philo, 1996 ; Wahl, 1999 ; Alexander et Link, 2003 ; Green et al., 2003 ; Knight et al., 2003 ; Sieff, 2003). Lorsque ces personnes ont déjà un logement ou un travail, la manifestation d'un trouble mental, par exemple un épisode dépressif chez des infirmières, entraîne leur dévalorisation (Caan et al., 2000) qui peut mener à des difficultés majeures de réintégration dans leur emploi. 

Il fut un temps, pas trop lointain, où toutes les personnes aux prises avec des troubles mentaux graves n'avaient qu'une seule résidence, l'hôpital psychiatrique. C'était l'époque de la solidarité mécanique de Durkheim qui correspond nécessairement à un état fort de la conscience collective, parce qu'une telle société, pour survivre, ne peut tolérer les dissemblances, l'originalité, les particularismes, autant chez les individus que dans les groupes (Rocher, 1968, p. 203). Elles s'habillaient de la même manière, une chemise grise, un pantalon vert olive, une casquette bien vissée sur le crâne et des souliers avec de fortes semelles. Chez les normaux aussi, du moins dans les villages du Québec vers les années 1960, il y avait homogénéisation au plan de l'habillement. Tout le monde commandait ses vêtements à l'aide du catalogue Eaton. La société mécanique est fondée sur la similitude des sentiments, des valeurs et des comportements entre les individus. Ceux-ci sont solidaires parce qu'ils sont pareils et interchangeables comme les molécules d'un corps inorganique (Piotte, 2005, p. 557). La division du travail engendre plutôt un nouveau type de solidarité basée sur la complémentarité de parties diversifiées. 

La rencontre d'intérêts complémentaires n'est pas en soi un principe d'individualisme pur, libéré de toute contrainte ; c'est plutôt un lien social d'un nouveau genre, c'est un autre principe de solidarité, ayant sa morale propre et engendrant un nouveau type d'organisation sociale. Parce que cette solidarité n'est plus basée sur la ressemblance des personnes et des groupes, mais sur leur indépendance, Durkheim lui donne le nom de solidarité organique. La diversité étant son fondement, ce type de solidarité suppose et même appelle une plus grande autonomie des personnes, une conscience individuelle plus étendue (Rocher, 1968, p. 204). 

La désinstitutionnalisation des patients psychiatriques fait partie de cette nouvelle forme de solidarité. Aussi retrouve-t-on une diversification des résidences pour ce type de nouveaux citoyens et aussi une pluralité des types d'exercice professionnel engendrés par la division du travail. Cela contraste avec les ateliers protégés anonymes d'autrefois, tout comme des vêtements distinctifs pour exprimer la grande variance des personnalités différenciées. 

Pour revenir au monde de l'image, le cinéma, qui a l'avantage de la durée, est capable du meilleur comme du pire (Beaulieu et al., 2005, p. 2). Toutefois les médias d'information de masse (journaux, télévision, magazines, radio, etc.) posent le plus souvent sur la maladie mentale un regard déformé et sensationnaliste en introduisant un lien non fondé entre folie et dangerosité pour les autres. Cette inférence est statistiquement fausse. On sait que les personnes atteintes de troubles mentaux demeurent plus dangereuses pour elles-mêmes, mais proportionnellement moins dangereuses pour leur entourage et plus vulnérables vis-à-vis des autres. Les épisodes dépressifs et les psychoses favorisent en effet l'émergence de pensées suicidaires. Pourquoi alors les médias de masse s'empressent-ils de lier homicide et démence ? L'ignorance constitue une réponse valable qui n'explique cependant pas tout. Il y a aussi des intérêts financiers qui orientent la rédaction des faits divers. La désinformation que s'autorisent les médias grand public est conditionnée par l'audimat. Ces médias ont intérêt à laisser croire que les personnes dangereuses pour autrui sont aussi les plus radicalement différentes de la majorité. Les personnes classées malades mentales, qui ne constituent toujours qu'une minorité de la population, se trouvent ainsi toutes désignées pour incarner ce qu'il y a de plus socialement dangereux. Les fous deviennent la proie des médias de masse qui modulent insidieusement la réalité de manière à minimiser le risque d'identification du consommateur au meurtrier. Ce moyen subtil d'affirmer : « le danger est dans l'autre et pas chez toi » obéit à une logique de déresponsabilisation qui a des effets très concrets sur les attitudes et croyances des populations. Nos études ont montré que les collectivités se disent généralement en faveur du retour des patients psychiatriques dans la communauté, alors qu'une minorité accepterait d'avoir des ex-patients psychiatriques dans son voisinage. Les médias sont en partie responsables de ce syndrome NIMBY (Not In My Back Yard). 

Beaulieu et al. se réjouissent du fait qu'aujourd'hui les troubles psychiques (dépression, burn-out, troubles anxieux, etc.) sont régulièrement évoqués dans les médias. Toutefois, une part importante de la façon dont la maladie mentale est médiatisée (aussi bien dans les médias pour enfants que pour adultes) encourage le développement de nouveaux mécanismes de discrimination. Certaines productions médiatiques contribuent à dissocier le fou du criminel ou du malade incurable. Mais d'autres excellent dans l'art de stigmatiser à notre époque obsédée par le calcul du risque. La « gestion du risque » n'est pas seulement un précepte économique, elle affecte aussi notre rapport à l'« anormalité » et à la déviance sociale. C'est ainsi que les médias de masse attribuent gratuitement des potentiels de dangerosité pour autrui aux personnes fragilisées par la maladie mentale et vivant dans la communauté. Ces personnes sont alors perçues comme des terroristes en puissance qui risquent de déstabiliser l'ordre établi et contre lesquels il faut mener des « guerres préventives ». Certains journalistes se donnent pour mission de conscientiser le public sur la présence d'un danger qui, telle une cellule dormante, est à la fois parmi nous et hors de nous. Les médias de masse (publics et privés) participent ainsi à une entreprise de normalisation qui considère maintenant la « maladie mentale » comme un danger virtuel vis-à-vis duquel la population dite normale, pourtant la plus dangereuse pour autrui, doit exercer une méfiance de tous les instants. 

 

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[1] Une partie de la revue de littérature qui meuble ce chapitre vient de Dorvil, H., Michaud, C., Morin, P. et Dubois, A. (2005). La stigmatisation des troubles mentaux dans les médias, dans le logement et l'emploi, 16 p. Cependant, toute imprécision et toute mésinterprétation sont de mon fait.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le jeudi 31 juillet 2008 20:39
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cegep de Chicoutimi.
 



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