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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Conclusion. Des mots pour dire la maternité.” (2002)
Texte de la conclusion du livre


Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Francine Descarries Avec la collaboration de Christine Corbeil, respectivement sociologue, département de sociologie, UQÀM directrice de l'Alliance de recherche IREF/Relais-femmes, d’une part, et professeure à l'École de travail social de l’UQÀM, d’autre part, “Conclusion. Des mots pour dire la maternité.” Un article publié dans l'ouvrage sous la direction de Francine Descarries et Christine Corbeil, Espaces et temps de la maternité, pp. 523-538. Montréal : Les Éditions Remue-Ménage, 2002, 543 pp. [Avec l'autorisation de Mme Descarries accordée le 24 juillet 2006.]

Texte intégral de la conclusion

Introduction
Double sens du travail des femmes
Mère et travailleuse : pourquoi pas !
Des mots pour dire la maternité...
La maternité c'est formidable, mais...
Des mots pour dire le travail... 
Conclusion
Bibliographie 

Francine Descarries et Christine Corbeil

Conclusion. Des mots pour dire la maternité.” (2002)

 

Un article publié dans l'ouvrage sous la direction de Francine Descarries et Christine Corbeil, Espaces et temps de la maternité, pp. 523-538. Montréal : Les Éditions Remue-Ménage, 2002, 543 pp. 

Introduction 

Les études réalisées au Québec au cours des dernières années sur le thème femmes, familles et travail sont unanimes à reconnaître l'importance économique et la pertinence sociale de l'insertion des femmes en emploi. Pour notre part, les recherches que nous avons menées (Descarries et Corbeil 1996, Corbeil et Descarries 1997) nous renvoient à une réalité complexe dans laquelle se conjuguent la volonté des femmes de préserver les avantages économiques, sociaux et personnels que leur procure le travail salarié et leur indéfectible attachement à la famille, en particulier à la relation maternelle. Et cela, en dépit du maintien de la division sexuelle du travail au sein des familles, du peu de sensibilité de la culture organisationnelle à l'égard des responsabilités familiales, et de l'inévitable poids de la double tâche qui pèse sur la quotidienneté des mères-travailleuses et marque encore, plus souvent qu'autrement, leur trajectoire professionnelle. 

Une fréquentation assidue des discours et des pratiques des mères québécoises en emploi révèle en effet que la plupart ne conçoivent plus leur vie autrement qu'à travers la dualité de leur identité maternelle et professionnelle. Reste à voir maintenant comment interpréter ce double attachement, mais surtout comment faire place, théoriquement et stratégiquement, à la relation maternelle comme lieu d'accomplissement personnel, sans freiner pour autant la progression des femmes en emploi et la diversification de leur mode de vie [1]. La prise en considération des représentations que les mères-travailleuses entretiennent à l'égard de la relation et du rôle maternels, de même que celles qu'elles partagent à l'égard du travail salarié peut vraisemblablement nous éclairer à ce sujet. En nous demandant si ces représentations s'accordent avec les projets d'autonomie et de réalisation de soi auxquels les mères que nous avons interrogées aspirent de toute évidence, nous avons voulu identifier ce qui, dans leur discours, relève d'une idéalisation de la réalité maternelle ou d'une adhésion à des schèmes traditionnels, d'une part et ce qui, d'autre part, traduit une volonté de faire sens de leur vie et de s'inscrire dans la modernité des nouvelles pratiques familiales et professionnelles. 

Une telle connaissance est en soi déjà fort pertinente en raison de sa valeur documentaire. Mais il nous semble surtout qu'elle est un préalable à la mise à jour d'un modèle d'interprétation qui, tout en étant sensible à la diversité et à la pluralité de l'expérience contemporaine des femmes en tant que mères et travailleuses, favoriserait une analyse holistique et non polarisée de celle-ci. Elle est, de plus, un prérequis à l'introduction dans nos réflexions futures d'observations, de nuances et d'aménagements qu'appellent non seulement les contradictions et les paradoxes mis en évidence, mais encore la dialectique de la relation mère et travailleuse.

 

Double sens du travail des femmes

 

Avant de poursuivre cette analyse, il importe de rappeler deux a priori sociologiques qui participent à la construction de notre façon de conceptualiser le travail des femmes et d'en définir la spécificité. D'abord, nous adhérons à cette idée, moult fois confirmée par des études européennes et nord-américaines, selon laquelle dans une économie de marché l'intégration au marché du travail constitue, tant pour les femmes que pour les hommes, une ouverture sur la vie sociale et la voie d'accès par excellence vers l'autonomie économique. Nous concevons également que la participation des femmes au marché du travail a eu un impact émancipateur sur la définition même et la restructuration des rapports hommes-femmes vers plus d'égalité, tant sociale qu'économique, alors que le confinement des femmes à la sphère privée, même si une certaine reconnaissance socio-économique était accordée au travail domestique, les place dans des conditions d'isolement, de dépendance et d'appauvrissement au sein des sociétés salariales. 

Par ailleurs, dès le moment où l'on parle du travail des femmes - ou qu'elles en parlent elles-mêmes - et dès lors que le travail des hommes n'est plus le seul étalon, la déconstruction de la perception univoque à laquelle est associée généralement la notion de travail, notamment dans les études sociologiques et économiques traditionnelles et dans les pratiques d'évaluation et de gestion de la main-d'œuvre, s'impose. En effet, il est clair qu'une majorité de femmes - et un nombre non négligeable d'hommes, faut-il ajouter - conjuguent dorénavant dans leur pratique quotidienne travail rémunéré et travail non rémunéré, ce dernier, pour une forte proportion d'entre elles occupant une part égale, sinon supérieure dans leur charge de travail. Or, si Statistique Canada (ministres fédéral, provinciaux et territoriaux responsables de la condition féminine 1997 : 20) désigne dorénavant cette double réalité par le concept de « charge de travail totale [2] », en additionnant aux heures de travail rémunérées ce qui est décrit comme « les heures de travail non rémunérées à valeur économique [3] », il demeure que ces deux univers de travail continuent d'être dissociés dans les représentations sociales, dans les évaluations de productivité et ne reçoivent nullement la même reconnaissance. Pour pallier ce regard tronqué, tout questionnement sur le travail des femmes doit donc éviter d'appréhender, mais surtout de reconstruire celui-ci en des termes morcelés, dissociables ou oppositionnels : le travail des femmes, domestique et salarié, constituant un « tout, un ensemble » (De Koninck 1997 : 274). Bref, un travail à nommer, à comprendre dans ses continuités plutôt que dans ses ruptures et qui ne trouve tout son sens que dans sa double facture (Barrère-Maurisson 1992). 

Le refus d'endosser une vision dichotomique et clivée des sphères familiale et professionnelle, ou d'ériger une barrière entre les deux univers nous a amenées, comme nous en avons déjà fait mention dans un chapitre précédent, à préférer le concept d'articulation à celui de conciliation pour mieux insister sur la relation dialectique à travers laquelle se structure et s'organise la jonction des activités professionnelles et familiales, plutôt que sur les seules dimensions d'accommodement ou d'adaptation - de coping diraient les Américaines - que sous-tend la notion de conciliation. Dans cette optique, le concept d'articulation renvoie non seulement aux processus de structuration et d'organisation qui prennent place dans les univers domestique et professionnel [4], mais encore aux pratiques spécifiques requises pour gérer les activités qui appartiennent à l'intersection des deux univers. L’articulation devient donc une « activité de travail en soi » (Messing 1995 : 63) dont la principale raison d'être est de permettre la « gestion des incompatibilités entre les deux milieux », autrement dit, la rencontre des exigences de l'emploi tout en gardant une qualité de vie domestique satisfaisante et vice versa .

 

Mère et travailleuse : pourquoi pas !

 

L'analyse du discours de plus de 500 mères en emploi que nous avons interrogées au cours des années 1990 nous a permis de mieux cerner les représentations qui modulent leur rapport au travail et à la famille [5]. Quasi à l'unanimité, ces femmes se disent relativement à l'aise dans leur double identité de mère et de travailleuse. De toute évidence, contrairement aux générations précédentes, elles n'entrevoient plus les sphères familiale et professionnelle en termes oppositionnels, mais bien selon une logique d'interrelation et de recouvrement (Fagnani 2000, De Koninck 1999). Elles refusent d'être cantonnées dans un rôle et une image de soi qui les limiteraient à la maternité ou les dépeindraient comme de moins bonnes mères en raison de leur statut de travailleuses. Et, si le travail représente une partie intégrale et intégrante de leur vie, la grande majorité d'entre elles identifient néanmoins la maternité comme une expérience identitaire fondamentale. Nous sommes des mères avant tout, mais demeurer à la maison à temps plein, très peu pour nous, serait, d'une certaine manière, l'aphorisme qui résume le mieux leur témoignage sur la maternité. 

Sans hésitation, elles refusent toute comparaison entre leur situation de mères en emploi et celle des mères au foyer qui laisserait sous-entendre qu'elles sont de « moins bonnes mères ». L'étiquette de « mères à temps partiel » ne leur convient cependant pas davantage. Les résultats de nos recherches révèlent, au contraire, que les mères-travailleuses se sentent compétentes et appréciées dans l'exercice de leur fonction maternelle et qu'elles arrivent habituellement assez bien à conjuguer activités domestiques et activités salariées. À cet égard, elles nous ont dit avoir rarement manqué à leurs obligations tant envers la famille que l'employeur, ayant appris, souvent par la force des choses, à entremêler efficacement les temps domestiques et les temps salariés. 

Leur attachement à la relation maternelle apparaît, par ailleurs, indéfectible et est exprimé de façon explicite. Il est bien évident que le « refus de la maternité [6] » ne fait pas partie de leur horizon existentiel. En fait, la plupart réclament le droit et les moyens de vivre leur projet de vie dans sa double trajectoire familiale et professionnelle, alors que souvent se glisse dans leur discours une pointe de nostalgie quant à un idéal de relation familiale qu'elles ont l'impression d'avoir sacrifié sur l'autel de la double tâche. 

 

Des mots pour dire la maternité...

 

Dans un chassé-croisé d'énoncés où la maternité se voit à la fois idéalisée dans sa dimension relationnelle et vilipendée dans sa matérialité contraignante, les mères-travailleuses établissent une distinction nette, mais non moins paradoxale, entre relations avec les enfants et tâches ménagères, comme si les secondes étaient « le prix à payer pour être mère » (Ross 1983). De fait, les termes qu'elles utilisent pour décrire le lien maternel sont de l'ordre du superlatif, pour ne pas dire dithyrambiques : « avoir un enfant, c'est la plus belle chose au monde », affirment un grand nombre d'entre elles. Il n'est pas question ici de demi-mesure pour qualifier l'importance de la relation maternelle. À preuve, disent et redisent la plupart des mères, c'est : 

[...] la plus belle réalisation de ma vie ;
[...] ma plus grande histoire d'amour ;
[...] probablement la chose la plus intéressante et la seule qui vaille dans la vie. 

Indéniablement une surenchère de qualificatifs marque les énoncés des informatrices, ce qui nous amène à affirmer que la maternité est et demeure la grande passion des femmes. Et, si la maternité est donnée comme synonyme de bouleversement personnel, le caractère unique de la relation affective, voire amoureuse, qui lie mère et enfant est, pour sa part, objet de consensus. « Je suis en amour avec mon enfant. » À partir d'une telle déclaration et de plusieurs autres du même ordre, il apparaît clairement que la plupart des mères-travailleuses se disent comblées par la dimension affective de leur relation avec les enfants. En les interrogeant, nous savions à l'avance que nous obtiendrions des réponses positives, sinon lyriques. Mais nous ne nous attendions pas à ce que nos informatrices adhèrent en si grand nombre à l'idée que la maternité est une véritable source de plénitude, et l'expriment en des termes aussi forts et explicites. C'est une expérience de vie essentielle ; sans enfant, tu ne peux être complète est un énoncé qui résume bien leur pensée. Plusieurs d'ailleurs situent la maternité au cœur de l'identité féminine et y voient un passage obligé au devenir femme. Nombreuses sont celles qui associent leur expérience de la maternité à un processus de transformation de soi qui a interpellé l'ensemble de leurs valeurs et leur ordre de priorités. L'acte d'aider l'enfant à grandir est également perçu comme lieu d'accomplissement et de créativité qui, selon les termes mêmes d'une d'entre elles, permet de révéler des dimensions de soi, « de découvrir des forces intérieures qu'on ne soupçonnait pas », en d'autres mots d'affirmer une autre mère, « d'enrichir sa vie ». 

Ainsi, les mots utilisés par les femmes pour décrire ou commenter leurs sentiments à l'égard de la maternité traduisent l'idéalisme et l'enthousiasme qui marquent spontanément leurs perceptions. Elles en parlent comme d'une expérience unique et irremplaçable, un lieu identitaire par excellence, un espace de sécurité affective et une zone tampon les protégeant de l'envahissement de la marchandisation des rapports sociaux et des exigences trépidantes de la vie moderne. Cela, au point où certaines d'entre elles laissent peu de place à la probabilité de la non-maternité comme destin de femme.

 

La maternité c'est formidable, mais...

 

En fait, les seules véritables réserves dans le discours des mères-travailleuses apparaissent lorsque le rapport maternel est confronté à sa quotidienneté. En d'autres mots, lorsque ces dernières sont amenées à parler de leur expérience de mère, non plus dans sa globalité ou dans sa dimension relationnelle, mais dans sa spécificité et sa pratique quotidienne au fil des différentes étapes de vie des enfants, elles deviennent beaucoup plus critiques et sensibles face aux difficultés matérielles et relationnelles rencontrées. Les problèmes évoqués sont très concrets et concernent la garde des enfants, leurs maladies, les absences du travail, la fatigue, le manque de temps pour la famille et pour soi, la perpétuelle course contre la montre, les problèmes financiers, les contraintes que représente la supervision des devoirs ou encore le décrochage scolaire des adolescents, etc. Exaltation et lyrisme ne sont plus à l'ordre du jour. Les témoignages font alors place à des impressions et à des sentiments plus négatifs : stress, inquiétude, culpabilité, manque de temps reviennent comme un leitmotiv dans le discours des mères. Règle générale, les informatrices prennent donc soin de dissocier la dimension affective du rapport maternel de sa pratique concrète et quotidienne. Et, si ces dernières expriment une certaine satisfaction à pouvoir tout organiser, famille et travail, elles considèrent néanmoins que les exigences inhérentes aux soins des enfants représentent la principale embûche à la poursuite de leur projet professionnel. 

Il est manifeste que les principales contradictions qui subsistent relativement à l'articulation famille-travail sont encore largement déterminées par la division sexuelle du travail et par la reconduction d'une conception assez traditionnelle de la parentalité. En effet, si dans leur discours les mères-travailleuses soulignent les différentes contraintes qui découlent de l'inégal partage des tâches domestiques et du maintien d'une culture organisationnelle androcentriste, elles ne remettent pas pour autant en cause la relation maternelle. De toute évidence, elles hésitent à reformuler ou à redéfinir leurs représentations et leurs pratiques. Au contraire, les mères au travail, toutes catégories socioprofessionnelles confondues, continuent d'entretenir une conception de la maternité basée sur une norme chimérique de proximité constante pour l'enfant et de disponibilité totale, tandis qu'elles aspirent aussi à la réussite professionnelle. Ambivalence qui contribue sans doute à freiner l'expression de revendications plus musclées en faveur de la participation et de la responsabilisation des pères, des employeurs et de l'État.

 

Des mots pour dire le travail...

 

En dépit des réserves exprimées relativement à leur manque de disponibilité et à la frénésie de leur rythme de vie, la plupart des mères-travailleuses estiment que, toute chose étant égale par ailleurs, leurs enfants profitent davantage de leur présence sur le marché du travail qu'ils n'en subissent les inconvénients. Elles sont d'ailleurs nettement plus loquaces lorsqu'il s'agit d'évoquer les bénéfices qu'ils en retirent que les difficultés qui pourraient en résulter. Elles sont nombreuses à repérer les mêmes types d'avantages matériels, tels un meilleur niveau de vie, une plus grande capacité à répondre aux besoins et demandes des enfants (activités parascolaires, vêtements, école privée, etc.) et une plus grande marge de manoeuvre pour offrir de petits extras (repas au restaurant, vacances, activités sportives, etc.). De même, elles sont enthousiastes à l'idée que leurs enfants, même en bas âge, acquièrent débrouillardise et indépendance et que, l'expérience aidant ils soient appelés à développer leur autonomie et leur sens des responsabilités. Ces quelques propos illustrent bien leur appréciation de la situation familiale : 

Les enfants apprennent à vivre par eux-mêmes.
L'enfant devient vite plus autonome.
Ils prennent leurs responsabilités et ne s'attendent pas toujours à être servis.

 

La fierté éprouvée par les enfants à l'égard de l'insertion professionnelle de leur mère est un autre élément positif mentionné par les informatrices. Elles sont en effet convaincues que l'image d'une mère active, épanouie, autonome et capable de faire confiance à ses enfants compense bien des désagréments liés à leur présence sur le marché du travail, comme en attestent ces témoignages : 

Voir que « femme » n'égale pas « tablier », « mère » égale «personne »...
Avoir une mère active et autonome comme modèle, cela facilite leur intégration sociale et les sensibilise à la réalité de la vie adulte ;
Image d'une mère impliquée dans la vraie vie... plus indépendante.

 

De même, bien qu'elles soient soucieuses d'assurer une présence de qualité auprès de leurs enfants, elles estiment que le fait de devoir s'absenter de la maison en raison de leurs obligations professionnelles les amène à apprécier davantage les moments passés en compagnie de leurs enfants, et à vivre ceux-ci dans la « bonne humeur ». « Lorsque je suis avec eux, je suis toute là », dira à ce sujet une de nos informatrices. Propos qu'une autre complétera en ajoutant : « Trop de temps à la maison me rend agressive, apathique. » Pour certaines, c'est aussi une occasion pour le père d'assurer une présence plus significative auprès des enfants. 

À travers leurs énoncés, les femmes interrogées projettent donc une image positive d'elles-mêmes, plus moderne et actualisée, et indiscutablement axée sur leur personnage public. C'est en tant que mère-travailleuse qu'elles se disent plus engagées socialement, renseignées, épanouies, jouissant d'une meilleure estime de soi et en mesure de se réaliser et de se faire confiance. Elles entrevoient - il convient de le rappeler - leur participation au marché du travail comme le contrepoids qui garantit la poursuite de leur projet personnel et une représentation plus égalitaire des relations hommes-femmes au sein de la famille. Car, s'il est manifeste que les mères-travailleuses avec qui nous avons été en contact identifient la maternité comme une expérience fondamentale et le lieu de l'affect il est tout aussi évident que le travail salarié représente, à leurs yeux, une voie d'autonomisation, un outil d'intégration sociale, et une occasion de réalisation de soi. Pour elles, il n'est plus question de choisir entre l'un ou l'autre. « Le travail est une forme d'enrichissement et de développement professionnel, personnel et social [...]. Il procure un épanouissement, une évolution personnelle auxquels je tiens », dira l'une d'entre elles. « le ne peux pas penser demeurer à la maison, sans devenir au moins schizophrène », déclare cette autre mère qui, quelques instants plus tôt, proclamait : « La maternité c'est formidable ! » Néanmoins, ce n'est pas parce que la relation maternelle est formidable qu'on va pour autant mettre de côté un projet de vie personnel. L'emploi est dans cette perspective, associé à un monde à soi et à un univers de réussite possible. Il n'est nullement une activité secondaire ou simplement instrumentale. « Pour moi, un emploi égale cheminement, créativité et reconnaissance », dira l'une d'elles. Si l'importance immédiate et matérielle de leur apport salarial au revenu familial est indéniable [7], l'acquisition d'une autonomie financière est à leurs yeux tout aussi primordiale [8]. C'est en des termes non ambigus que l'une d'entre elles exprime ce point de vue : « L'autonomie économique de la personne est une des valeurs les plus importantes [...] il est vital pour moi d'avoir mon indépendance financière. » 

Mais, si l'accès à une relative indépendance économique est déjà un motif suffisant à leur insertion en emploi, il devient évident à la lecture des témoignages que ce n'est pas seulement la question financière qui les attache à leur emploi, mais tout autant les avantages sociaux et professionnels qu'il leur procure. Le travail offre, au dire de plusieurs, une occasion de structuration et de développement personnels. « C'est une opération "estime de soi" », dira l'une d'elles. Dans cette optique, si pour les unes, leur expérience de travail constitue une source majeure d'intérêt et de satisfaction, pour les autres, dont la nature du travail pourrait être considérée comme moins stimulante, cette expérience représente, au-delà de son strict apport économique, non seulement une façon d'échapper à la routine et à l'isolement du travail domestique, mais encore une ouverture sur une diversité d'espaces sociaux et d'occasions de sociabilité, comme le traduisent si bien les témoignages suivants. Le travail à l'extérieur permet, résume l'une d'entre elles, « de rompre avec le monopole du domestique » et donne accès à « une autonomie de mouvement hors du domicile », ajoute une autre. « le ne veux pas rester toujours à la maison, je trouve cela beaucoup trop routinier et ennuyeux. le serais incapable de me satisfaire avec la seule tâche d'élever des enfants. » Ce sont vraisemblablement les énoncés qui traduisent le mieux les attitudes des informatrices à cet égard et qu'une autre exprime en ces termes : « J'ai besoin de défis et de contacts avec des adultes. » 

Et, même si les problèmes de gestion de temps, de surmenage et de disponibilité sont constamment associés aux contraintes de l'articulation famille-travail dans le discours des mères, surtout chez les mères de jeunes enfants et les mères monoparentales, l'attachement à l'emploi et la conscience de son importance sociale et économique sont réitérés avec autant d'insistance. Elles disent en des termes fort simples et directs le rapport positif qu'elles entretiennent à l'égard de leur travail : J'aime mon travail est un énoncé dont la récurrence est forte. Le constat est clair. C'est dorénavant dans l'interrelation dynamique des sphères familiale et professionnelle que se construisent des identités féminines plurielles et diversifiées qui dépassent largement la seule assignation aux fonctions maternelles : « le savais, dira à ce propos l'une d'entre elles, que je pouvais concilier travail et maternité. La maternité est pour moi un plus, cela ne devrait pas m'empêcher de travailler. »Ainsi, les mères en emploi refusent d'être cantonnées à l'espace domestique et, si elles réclament un plus grand investissement de leur conjoint dans ce même espace, elles refusent tout autant de considérer que le monde du travail appartient en priorité aux hommes ou ne peut les accueillir que si elles tirent un trait sur leur identité maternelle. 

Par contre, si nos informatrices semblent avoir positivement intériorisé leur double identité de mère et de travailleuse, il est tout aussi vrai qu'elles sont à la recherche d'un rapport mieux équilibré entre les deux univers et d'un rythme de vie qui idéalement leur permettrait de profiter plus sereinement des deux mondes. Car, si le rapport à l'enfant est souvent vécu sur le mode de la gratification et de la célébration, et que le travail salarié est perçu comme garant de l'autonomie personnelle et financière, il en va tout autrement de la quotidienneté de l'articulation famille-travail ; celle-ci se révélant souvent source de stress et obstacle à la pleine réalisation du « désir de retrouvailles avec soi » (Méda 1999 : 231). C'est d'ailleurs lorsqu'elles sont invitées à parler de l'avenir de leurs filles que les femmes évoquent expressément les tensions qui sont les leurs : 

Je souhaite moins de stress à mes deux filles, plus de sérénité et moins de compétition.
Je souhaite que les choses se passent plus facilement par rapport à ce que l'on a vécu ; plus de moyens financiers, un congé de maternité plus long, un meilleur partage des tâches. le lui souhaite de trouver un espace personnel dans cette double vie.
Je lui souhaite d'avoir la même passion pour son travail et ses enfants. le ne lui souhaite pas le stress qui va avec.

 

Cependant, pour plusieurs des femmes que nous avons interrogées, les difficultés auxquelles les confronte l'éternelle course contre la montre ne sont pas uniquement la conséquence de leur double tâche, mais découlent également des contraintes structurelles qui régissent leur participation au monde du travail, des exigences accrues de productivité, de l'insuffisance des services et des mesures de soutien ainsi que du faible engagement des hommes dans la sphère domestique [9]. De ce point de vue, les problèmes liés à l'articulation famille-travail se révèlent profondément inscrits dans la division sexuelle du travail et ne sauraient, en conséquence, être réduits à des problèmes de femmes ou solutionnés à partir de mesures qui ne s'adresseraient qu'à elles seules.

 

Conclusion

 

On l'a vu, les femmes que nous avons interrogées sont particulièrement éloquentes dans l'expression de leur double attachement à l'égard du travail et de la maternité. Leur discours révèle un niveau de satisfaction élevé quant à leur capacité d'intégrer leur identité de mère et de travailleuse. Mais celui-ci laisse aussi entrevoir certaines ambivalences et nous met en présence d'une face plus sombre de l'existence des mères-travailleuses, qui les oblige à s'interroger sur le prix à payer pour être mère en termes personnels et professionnels. De toute évidence, ces dernières refusent de reproduire un mode de vie révolu, bien qu'elles arrivent difficilement à se distancier des référents traditionnels pour parler de leur rôle maternel. Car si, au jour le jour, leurs pratiques sont nettement différentes de celles de leur mère, proximité, disponibilité et don de soi demeurent pour elles des valeurs toujours associées à un idéal d'amour maternel. 

On peut dès lors mesurer l'étendue du défi qu'il reste à relever pour arriver à bien appréhender toute la complexité de cette nouvelle expérience de mère et de travailleuse dans une conjoncture où se multiplient par ailleurs les modèles familiaux et les pratiques de parentalité. Il reste, en effet, à développer une problématique originale fondée sur une éthique du lien social qui, à partir de ce double attachement des femmes à l'égard du travail et de la famille, arriverait à faire sens du discours entendu sur la maternité et à offrir une conception renouvelée des rôles maternel et paternel. D'ailleurs, notre lecture des écrits tant féministes que populaires nous a déjà amenées à affirmer que la maternité, mais plus spécifiquement le rapport des femmes à la maternité et l'interprétation qui pouvait en être faite ou proposée, constituait un enjeu (un espace trouble) aussi bien des discours féministes passés et actuels que des débats sociopolitiques. Si tous et toutes s'entendent pour dire que les femmes doivent pouvoir jouir pleinement de leurs droits, accéder à la pleine autonomie économique et disposer de toutes les possibilités pour développer un projet de vie personnel, les ambivalences sont beaucoup plus palpables, le consensus est beaucoup plus difficile à obtenir quant il s'agit de débattre du rôle ou de l'identité maternels ou encore de la place qu'occupe le désir d'enfant ou la maternité dans la constitution de l'identité féminine. Le constat est dès lors assez simple. Il nous faut encore « parler des mères » (Knibiehler 1999), mais surtout il nous faut laisser les mères se dire afin de mieux entendre et comprendre les contradictions observées entre leurs discours et leurs pratiques, déchiffrer leurs attentes et leurs besoins dans la conjoncture actuelle et tirer les enseignements qui s'imposent, notamment au niveau des politiques sociales et de l'organisation du monde du travail, de leur volonté d'épanouissement hors la maternité, tout comme de leur engagement dans la maternité. 

Dans cette optique, il nous semble que les questions suivantes doivent désormais être au cœur de la réflexion sociologique et féministe, même si elles soulèvent actuellement des interrogations et des interprétations qui vont dans tous les sens. Comment se débarrasser des schèmes obsolètes et hiérarchiques qui continuent de marquer les rapports sociaux de sexe et plus spécifiquement les rapports à la parentalité ? Quel enseignement retirer des nouvelles pratiques de parentalité qui pour le moins contribuent à l'éclatement d'une conception univoque de l'identité maternelle ? Comment, sans nier la spécificité de l'expérience maternelle, faire éclater cette conception de la mère « parent principal », qui continue de nourrir l'ambivalence des femmes quant à leurs choix et à leurs priorités en matière de famille et de travail ? Comment dès lors imaginer un nouveau contrat parental qui serait basé sur J'égalité et sur une certaine forme d'adéquation nourricière et affective entre les rôles maternel et paternel ? Autrement dit, pour reprendre les termes de Sylviane Giampino (1999 : 110), comment « à l'heure où hommes et femmes souffrent de ce qui les sépare, [...] lâcher prise sur les stéréotypes comportementaux afin de prendre appui sur le partage et la mixité à tous les lieux importants de la vie ? », dont la maternité et la relation à l'enfant. Comment, d'autre part, éviter le piège d'une survalorisation du travail salarié comme voie unique de réalisation de soi en réplique à l'infériorisation sociale et économique qui découlait de l'assignation des femmes au seul rôle maternel ? Enfin, plus concrètement comment faire dans la conjoncture socio-économique actuelle pour que les femmes puissent assumer et réaliser leur désir d'enfant sans du même coup signer un contrat de pauvreté, particulièrement dans le cas des mères seules ou, plus globalement, au nom d'un idéalisme ou par fausse nostalgie, un nouveau contrat de dépendance, peut-être moins contraignant qu'autrefois, mais tout de même réel et coercitif ?

 

Bibliographie

BARRÈRE-MAURISSON, Marie-Agnès (1992). La Division familiale du travail. La vie en double, Paris, Presses universitaires de France. 

CORBEIL, Christine et Francine DESCARRIES (1997). « Les stratégies de conciliation des mères en emploi : d'espoirs et de réalités » dans Angelo Soares (dir.), Stratégies de résistance et travail des femmes, Montréal, L'Harmattan, pp. 123-150. 

DE KONINCK, Maria (1997). « Postface : Le travail des femmes à travers le prisme de la continuité » dans Angelo Soares (dir.), Stratégies de résistance et travail des femmes, Montréal, L'Harmattan, pp. 271-280. 

DE KONINCK, Maria (1999). « Allocution » dans le cadre du colloque Marcher sur des œufs. Certains enjeux du féminisme aujourd'hui : Dévalorisation et déqualification du rôle maternel : est-ce la faute des féministes ?, Québec, Conseil du statut de la femme, feuillet no 198-21. 

DESCARRIES, Francine et Christine CORBEIL (1996). « La conciliation travail-famille » dans Huguette Dagenais (dir.), Science, conscience et action. 25 ans de recherche féministe au Québec, Montréal, Remue-ménage, pp. 51-72. 

FAGNANI, Jeanne (2000). Un travail et des enfants, petits arbitrages et grands dilemmes, Paris, Bayard. 

GIAMPINO, Sylviane (1999). « Femmes d'intérieur et mères actives : coupables ? » dans Yvonne Knibiehler (dir.), Repenser la maternité, revue Panoramiques, no 40, Condé-sur-Noireau, Corlet, pp. 106-110. 

KNIBIEHLER, Yvonne (dir.) (1999). Repenser la maternité, revue Panoramiques, no 40, Condé-sur-Noireau, Corlet. 

MÉDA, Dominique (1999). Qu'est-ce que la richesse ?, Paris, Aubier. 

MESSING, Karen (1995). « L'application d'une méthodologie ergonomique à la conciliation des responsabilités professionnelles et familiales » dans Francine Descarries et Christine Corbeil (dir.), Ré/Conciliation famille/travail : les enjeux de la recherche, Montréal, Cahiers Réseau de recherches féministes, no 3, IREF, UQÀM, pp. 51-72. 

MINISTRES FÉDÉRAL, PROVINCIAUX ET TERRITORIAUX, RESPONSABLES DE LA CONDITION FÉMININE (1997). Indicateurs économiques de l'égalité entre les sexes, Ottawa, no de catalogue SW21-17/1997F. 

ROSS, Martine (1983). Le Prix à payer pour être mère, Montréal, Remue-ménage.


[1] On peut mesurer la distance qu'il reste à franchir quand on s'attarde au non-dit et au double sens implicites dans une question comme celle que nous avons relevée dans un récent sondage de Statistique Canada sur les Attitudes à l'égard des femmes, du travail et de la famille présenté dans Tendances sociales canadiennes à l'automne 1997, à savoir, « Êtes-vous d'accord ou non avec l'énoncé suivant : Avoir un emploi, c'est très bien, mais ce que la plupart des femmes souhaitent réellement c'est un foyer et des enfants ».

[2] La répartition du temps de travail (rémunéré et domestique) consacré au sein des couples mariés par les parents ayant un enfant de moins de 18 ans au Canada en 1998 était, en moyenne, de 10,7 heures par jour pour les hommes et de 11,13 heures par jour pour les femmes, incluant les déplacements. Dans cette plage horaire, les femmes continuent de contribuer davantage à l'entretien ménager et aux soins des enfants que les hommes. Elles y consacrent 5,5 heures, comparativement à 3,6 heures pour les hommes. En contrepartie, les femmes consacrent 5,6 heures par jour au travail rémunéré et les hommes, 7 heures. Outre les désavantages économiques et professionnels qui découlent de cette répartition horaire, l'écart de 25 minutes par jour observé au niveau des horaires de travail des hommes et des femmes, bien qu'il puisse paraître infime à première vue, représente l'équivalent d'un surplus de travail de quatre semaines et demie par année d'un emploi à temps plein (données colligées à partir de l'enquête générale de 1998 dans Jiri Zuzanek, « Le temps consacré aux enfants : est-ce assez ou trop peu ?, ISUMA, vol. 2, no 2, été 2001, pp. 7-14, www.isuma.net/v02n02/zuzanek-tr/zuzanek-tr.ht).

[3] Sont désignées par le vocable « activités non rémunérées à valeur économique » celles qui « produisent un ensemble de biens et services commercialisables », c'est-à-dire des produits et des services qui pourraient être produits pour le marché et achetés sur celui-ci. Par exemple, le soin des enfants et des personnes âgées est un service non rémunéré qui pourrait être fourni par un employé ou une employée rémunéré-e. Un repas est un bien qui pourrait être préparé à la maison ou acheté au restaurant... » (Statistique Canada 1997 : 20).

[4] Parmi ceux-ci, relevons l'introduction d'une approche managériale à l'organisation familiale, la détermination des activités et des horaires familiaux en fonction du mode de participation au marché du travail. De l'autre côté, on pensera à l'adoption de mesures telles que les horaires flexibles, les congés parentaux et les garderies en milieu de travail qui sont venues bouleverser le visage traditionnel de l'organisation du travail.

[5] Par le biais d'une enquête par questionnaire, nous avons rejoint au total 493 mères en emploi de statuts socioprofessionnels diversifiés. Réalisée en deux étapes, l'enquête a d'abord été menée auprès de 310 mères à l'emploi d'une institution d'enseignement supérieur. Celles-ci ont rempli le questionnaire au printemps 1992. En janvier 1993,183 autres mères à l'emploi d'une grande institution financière ont répondu au même questionnaire. Dans l'une et l'autre de ces institutions, situées dans la région métropolitaine, ont été considérées comme éligibles les femmes qui travaillaient à plein temps ou qui occupaient un poste à temps partiel de 15 heures ou plus par semaine et qui avaient au moins un enfant âgé de moins de 20 ans habitant encore à la maison au moment de l'enquête. Les informatrices qui ont répondu à notre questionnaire sont pour la plupart mère d'un (41,0%) ou de deux (44,4%) enfants dont la moyenne d'âge se situe autour de 11 ans. Plus des trois quarts d'entre elles (77,5%) vivaient en couple au moment de l'enquête ; les autres (22,5%) étaient en situation de monoparentalité. Toutes possédaient au moins un diplôme d'études secondaires, alors qu'une sur deux avait également terminé des études universitaires (49,7%).

Dans le cadre d'un second volet de la recherche, nous avons effectué en 1996 une vingtaine d'entrevues semi-directives auprès de mères-travailleuses dont le statut socioprofessionnel est plus précaire et moins avantageux, tant sur le plan financier que sur celui des conditions de travail.

[6] Au cours des années 1980, les féministes du courant radical ont revendiqué le droit de dire « non à la maternité » tant et aussi longtemps qu'elle serait synonyme d'esclavage, d'enfermement, d'exclusion et de pauvreté pour les femmes.

[7] Trois informatrices sur quatre, soit 75%, assumaient effectivement la moitié ou plus des dépenses familiales au moment de l'enquête.

[8] On ajoutera que seulement 13% des 493 répondantes de notre échantillon prévoyaient quitter leur emploi actuel dans l'éventualité où le bien-être économique de leur famille aurait pu être assuré sans l'apport de leur salaire.

[9] Toutes les études statistiques convergent vers le même constat. Une proportion non négligeable de conjoints s'engagent dorénavant davantage dans l'univers domestique. Leur participation demeure cependant pour l'essentiel inférieure à celle des femmes (du simple au double, selon les études) et circonscrite largement à des activités de socialisation avec les enfants (loisirs, devoirs, transport) et à des tâches d'entretien traditionnellement masculines (pelouse, peinture, ordures et pelletage).


Retour au texte de l'auteure: Francine Descarries, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 4 février 2007 12:14
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur au Cégep de Chicoutimi.
 



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