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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Robert Comeau, Maurice Séguin, historien du pays québécois vu par ses contemporains
suivi de: Les normes de Maurice Séguin. (1987)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Robert Comeau, Maurice Séguin, historien du pays québécois vu par ses contemporains suivi de: Les normes de Maurice Séguin. Édition préparée par Robert Comeau. Montréal: VLB Éditeur et Tatiana Démidoff-Séguin, 1987, 307 pp. Collection: Études québécoises. Une édition numérique réalisée par Réjeanne Toussaint, bénévole, Chomedey, Ville Laval, Québec. [Autorisation accordée par l'auteur le 4 novembre 2010 de publier tous ses écrits publiés il y a plus de trois ans dans Les Classiques des sciences sociales.]

[7]

Maurice Séguin, historien du pays québécois
vu par ses contemporains

suivi de : Les normes de Maurice Séguin.


Introduction

Lorsque j'appris le décès de Maurice Séguin, survenu le 28 août 1984, je regrettai encore une fois qu'il ne fût pas plus connu en dehors du milieu des historiens et des professeurs d'histoire. Pourtant il a exercé une influence considérable par disciples interposés dans de multiples secteurs de la vie québécoise où ses idées ont pénétré. La liste de ceux et celles qui ont été marqués par son enseignement et qui en ont témoigné est trop longue pour en entreprendre l'énumération ici. Les observateurs attentifs de l'histoire du Québec contemporain devront un jour le reconnaître.

Comme bien d'autres j'ai voulu le sortir de la clandestinité intellectuelle où il se confinait pour reprendre l'expression de Marc Thibault. Mon projet a pris la forme de ce livre à quatre volets. Une première partie rassemble des informations biographiques. Pierre Tousignant nous parle de la carrière universitaire de Maurice Séguin au département d'Histoire de l'Université de Montréal de 1948 à 1984. Grâce à la contribution de Tatiana Démidoff-Séguin, nous pouvons connaître un peu plus la vie privée de cet homme secret et attachant qui fut son époux pendant vingt-deux ans. Cet intellectuel, obsédé par le drame de sa nation et l'histoire qui se construisait, était un homme simple qui aimait les enfants, la nature et excellait dans le travail manuel.

Une deuxième partie rassemble quelques études qui nous introduisent à sa pensée. La liste aurait pu s'allonger. Pour éviter les redondances, nous avons dû écarter des textes intéressants qui avaient déjà été publiés. Je pense à l'excellente préface de Jean Blain publiée dans l'édition de 1970 de la thèse de doctorat de [8] M. Séguin, ou encore au témoignage du professeur André Lefebvre publié dans La presse pédagogique, en 1979.

Nous avons ensuite reproduit son cours de « normes ». Ce texte n'était pas destiné à la publication mais devait servir de guide aux étudiants-tes qui suivaient son cours à partir de 1965. Il a été rédigé pour être lu et commenté en classe par son auteur. Il avait déjà refusé d'en publier une version remaniée qu'il jugeait trop éloignée de son texte original. Il avait refusé de le publier intégralement car il croyait - avec raison - que certains passages avaient vieilli. Pour respecter la forme qu'il avait choisie, nous l'avons reproduit textuellement, bien conscient que ce texte ouvert aux commentaires et aux exemples ne devrait pas se laisser enfermer dans un livre. Il importe de garder en tête l'usage pour lequel ce texte a été construit. Son intelligibilité en dépend.

Il ne faut pas oublier que ce texte a été élaboré durant les quinze années qui ont précédé sa forme polycopiée de 1965. Nous y retrouvons son enseignement à travers les conceptions philosophiques dont il avait hérité des collèges classiques où il avait étudié avant et pendant la Deuxième guerre. Mais sa lecture de l'histoire des Canadiens français était tout à fait inédite et tranchait sur l'histoire officielle. Novatrice, sa grille d'analyse avait la particularité de pouvoir retenir les phénomènes d'oppression nationale. Il avait mis de longues années à l'élaborer. Elle était efficace. Elle avait cependant ses limites : elle ne retenait pas l'oppression des femmes et secondarisait la lutte des classes. Elle était datée. Mais à cette époque, c'est lui qui parlait avec le plus de justesse des rapports d'inégalité entre les nations. Il faisait appel à notre intelligence. Son interprétation donnait un sens à notre histoire et à notre lutte pour l'indépendance nationale. Pour reprendre le commentaire que m'a fait Jean-Marc Léger, « il était au Québec, ce qu'ont été pour les peuples en voie de décolonisation les Césaire, Berque, Fanon et Memmi ».

La quatrième partie du livre regroupe des témoignages de camarades de collège, de collègues, d'ex-étudiants et étudiantes qui ont spontanément accepté de collaborer à cette publication. Des délais trop courts ne nous ont pas permis d'accueillir les retardataires. Je voudrais remercier particulièrement madame Tatiana [9] Démidoff-Séguin qui nous a confié la publication des Normes et qui a accepté de collaborer étroitement à toutes les étapes de ce projet. Sans elle, cet ouvrage n'aurait pu voir le jour. Je lui en suis très reconnaissant. Je veux également remercier mon collègue Pierre Tousignant qui a cru à ce projet dès le départ et qui m'a fourni une aide précieuse, ainsi que Madeleine Dionne-Tousignant qui a révisé avec beaucoup d'attention les épreuves du texte des Normes.

Il peut sembler paradoxal de publier cet ouvrage sur le théoricien du mouvement indépendantiste québécois contemporain à l'heure même où la question du Québec est mise en veilleuse et où toute trace d'oppression nationale semble avoir disparu de la conscience de ses interprètes officiels et de ses dirigeants. Cette question nationale, qui a été au cœur de tant de débats, ne semble plus à l'ordre du jour maintenant que les historiens québécois recyclés dans la « nouvelle histoire » nous présentent une image de notre peuple de plus en plus moderne, heureux du statu quo politique et satisfait de pouvoir jouir des bienfaits de la société de consommation nord-américaine. Il semble bien que nous soyons passés de l'ère de la contestation, à celle des chambres de commerce, des régimes d'épargne-action et du libre-échange. Certains préfèrent affirmer que nous avons maintenant acquis la confiance en nous-mêmes. La vision tragique du sort de la nation canadienne-française conquise, annexée et la mieux entretenue du monde que d’écrivait Maurice Séguin, ne semble plus partagée par ceux-là même qui ont cru que nous pouvions accéder un jour à l'indépendance. À lire l'histoire officielle du Québec contemporain, on peut même se demander si ce drame du peuple québécois a déjà existé. Par cette publication, nous avons voulu rappeler ce passé alors que le silence et l'oubli s'installent de nouveau. Les manuels d'histoire sont toujours aussi rassurants, fussent-ils au goût du jour.

Je souhaite vivement que la publication des Normes permette d'évaluer à sa juste mesure l'apport de ce maître à penser dans la [10] formulation des projets d'indépendance nationale pour la société québécoise. Pouvons-nous espérer que ce livre suscite suffisamment d'intérêt pour encourager quelques historiens ou historiennes à poursuivre la recherche sur la genèse et le cheminement de cette pensée ainsi que sur l'influence de cet historien qui a espéré ce pays québécois, pays qui n'est pas ce futur sans avenir.

Robert COMEAU



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le jeudi 3 janvier 2013 8:11
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie retraité du Cégep de Chicoutimi.
 



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