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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Norman Clermont, “Archéologie. La préhistoire québécoise (1999)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Norman Clermont [Anthropologue, retraité de l’enseignement, Université de Montréal], “Archéologie. La préhistoire québécoise”. Un article publié dans l'ouvrage sous la direction de Robert Lahaise, Québec 2000. Multiples visages d'une culture, pp. 57-75. Montréal: Les Éditions Hurtubise HMH, ltée, 1999, 462 pp. Collection: Les Cahiers du Québec.

Introduction


Le monde amérindien est d'abord un monde vivant. Comme le monde européen, asiatique ou africain. Et comme tous les mondes vivants, c'est un objet multiforme, multidimensionnel, dynamique et changeant. C'est surtout un monde vécu. Avec ses tensions, ses contradictions, ses articulations et ses intérêts. Il a lui aussi une activité politique intense, une réalité sociologique, économique et idéologique, une vie religieuse et intellectuelle. Il a ses radios et ses journaux, ses écoles et ses cliniques. Ses sages et ses rebelles. Ses artistes. 

C'est un monde à la fois pluriel et singulier, découpé culturellement et linguistiquement, avec des préoccupations locales, des réclamations régionales, des solidarités nationales et internationales. 

En 1492, il occupait à lui seul 28% de la surface continentale de cette planète mais c'était un monde insoupçonné. Colomb lui-même crut n'avoir découvert qu'une route nouvelle menant à l'Orient déjà raconté. En moins d'une génération, on se rendit compte cependant qu'il s'agissait en fait d'un espace inédit, beaucoup plus grand que l'Europe et situé complètement en dehors de la mémoire collective. 

C'était aussi un continent déjà occupé où l'on rencontrait des rois, de l'or, des villes et des grandes plantations. En dehors des centres d'intense agitation, il y avait également des campagnes irriguées, des champs essartés et des forêts habitées par des groupes de chasseurs culturellement contrastés, parlant des langues mutuellement inintelligibles, priant des dieux différents. 

Intellectuellement, l’Amérique défiait les connaissances traditionnelles et soulevait le problème de ses origines. Les populations locales parlaient souvent d'une autochtonie littérale, inacceptable pour ceux qui étaient convaincus que toute l'humanité avait été contenue dans les lombes d'Adam, persuadés aussi que nous étions les petits-enfants de Noé. À ce moment-là, le concept de préhistoire n'existait pas encore. On fit alors intervenir des tribus perdues, des fuites migratoires, des refoulements ethniques, des aventuriers téméraires et, sur la base de quelques ressemblances générales, on crut pouvoir déceler des courants hébreux, atlantidiens, scythes, phéniciens, frisons, carthaginois, grecs, tartares ou scandinaves... (Charlevoix, 1744). 

Plus on devenait familier avec l'Amérique, plus ces spéculations s'avéraient chronologiquement, biologiquement, culturellement, linguistiquement et historiquement invraisemblables. Le mystère des origines semblait insoluble mais on ne soupçonnait pas que ce qui était en cause était notre propre mythologie et le carcan du calendrier génésiaque beaucoup trop court, beaucoup trop contraignant. Dans ce dernier cadre, l'Amérique était effectivement une impossibilité, même en invoquant un corridor nord-ouest comme certains le firent dès le XVIe siècle (Jose de Acosta). Il y avait trop de monde, trop de diversité. 

Ce n'est qu'au XIXe siècle qu'on abattit définitivement cet obstacle majeur et qu'on ouvrit alors le temps sur une profondeur illimitée en établissant, par-delà les premières écritures, l'existence de longs chapitres antérieurs à l'histoire classique. Acceptés désormais comme une évidence, ces temps révolus définirent alors le champ d'une nouvelle discipline, celle de l'archéologie préhistorique. 

Cette définition restait néanmoins ambiguë. En effet, si les textes écrits fixaient une frontière commode entre une discipline axée sur l'information écrite et une discipline axée sur l'information codée dans la seule culture matérielle fossilisée, l'observation montrait que l'écriture n'était pas un trait culturel universel et plusieurs populations n'apparaissaient dans les documents écrits qu'à une période très récente. C'était en particulier le cas pour la plupart des groupes de l'Amérique. Leur histoire commençait-elle alors avec leur première mention par des observateurs scribouillards et devrait-on conclure qu'ils n'avaient pas eu d'histoire avant cette inscription ? 

La difficulté paraît purement académique, presque scolastique, mais elle ne l'est pas. Elle pose des problèmes de méthodologie et de signification qui sont importants. N'avons-nous pas réagi avec vigueur, au XIXe siècle, au rapport d'un jeune Anglais qui écrivait que nous étions « un peuple sans histoire » ? Or, tous les peuples d’Amérique, comme tous les peuples préhistoriques d'ailleurs, ont toujours eu une histoire. 

Il est vrai que l'arrivée des Européens a eu, dans cette histoire, un impact considérable et qu'elle amorce incontestablement un chapitre spécial du développement culturel en Amérique, mais c'est aussi un chapitre inscrit dans la continuité. Il faut donc convenir que les mots ne sont jamais innocents. Néanmoins, par paresse épistémologique et sans souci de contradiction, nous acceptons ici de définir la préhistoire québécoise comme l'étude de l'histoire des groupes autochtones qui se partageaient le Québec avant l'arrivée de nos ancêtres européens.


Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 20 janvier 2013 16:31
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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