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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Hervé Carrier, L'université entre l'engagement et la liberté. (1972)
Présentation


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Hervé Carrier, L'UNIVERSITÉ ENTRE L'ENGAGEMENT ET LA LIBERTÉ. Rome: Presses de l'Université Grégorienne, 1972, 261 pp. [Autorisation accordée par l'auteur le 17 novembre 2009 de diffuser la totalité de son oeuvre dans Les Classiques des sciences sociales.]

Présentation

L'Université en devenir


Ce livre contient sept essais sur l'Université moderne, ses évolutions récentes et ses responsabilités nouvelles. Une question centrale est sous-jacente à chaque chapitre et donne son unité au volume : quelles sont les transformations sociologiques, à l'intérieur comme à l'extérieur de l'Université, qui sont en train de modifier l'institution universitaire dans son rôle culturel et ses fonctions sociales ? [1]

Le point de vue adopté en ces pages n'est pas d'abord pédagogique, administratif ou philosophique, il est sociologique.

C'est l'Université comme institution ou comme organisation sociale qui nous retiendra avant tout. Nous serons, certes, amenés à considérer des problèmes pédagogiques, comme la question des programmes, des cycles d'études, des méthodes d'enseignement. Nous toucherons aussi à des problèmes administratifs, comme le financement et la gestion des Universités. Nous ne minimisons pas ces aspects, même si ceux-ci constituent l'objet second de nos observations. Toutes ces [8] questions sont d'ailleurs reliées entre elles. Nous croyons même qu'une analyse sociologique du fait universitaire actuel est indispensable à tous ceux qui travaillent à la réforme pédagogique ou administrative de l'Université.

Pour le sociologue, l'Université est une institution sociale à observer dans sa vie interne et dans ses relations avec les autres institutions ou avec la société totale.

Au sein même de l'Université, il faut comprendre ce qui spécifie les rapports sociaux entre les personnes et les groupes constituant l'institution. Il faut percevoir la coordination des fonctions ou des rôles, surtout les finalités explicites ou implicites poursuivies par l'institution. On se demandera quelles sont les valeurs, conscientes ou non, qui président aux orientations de l'Université et à l'élaboration de sa politique effective. On examinera les relations de participation, de concurrence, ainsi que les conflits qui caractérisent la direction ou le gouvernement de l'institution. On prêtera une attention particulière, étant donnée la nature de l'Université, aux relations psychologiques et culturelles entre la génération des enseignants et celle des enseignés. En d'autres termes, le sociologue observe l'organisation universitaire dans ses structures, ses rapports sociaux, ses valeurs inspiratrices, ses orientations culturelles.

Vue de l'extérieur, toute Université apparaît comme située dans un milieu propre, ce qui amène l'institution à se définir par rapport à une culture, a une tradition historique, et par rapport à des structures économiques, politiques, religieuses déterminées. Le sociologue essaie, par exemple, de comprendre ce qui advient à l'Université d'aujourd'hui, quand elle exerce son action dans les pays en voie de développement, dans les pays socialistes, ou dans les sociétés dites post-industrielles.

[9] Notre propos apparaîtra plus clairement, si nous indiquons le type d'interrogations qui a orienté nos observations.


a) Une première série de questions concerne la socialisation de la culture et les responsabilités nouvelles qui en découlent pour l'Université. Des questions comme celles-ci sont alors soulevées :

- l'Université d'élite reste-t-elle conciliable avec l'enseignement de masse qui tend a prévaloir dans les sociétés modernes ?

- quelles fonctions de recherche sont réservées aux Universités dans les États où la planification de la recherche. scientifique fait l'objet d'une politique nationale ?

- quelles sont les responsabilités propres de l'Université dans un monde de plus en plus préoccupé par les problèmes du développement et de la justice sociale ?

b) D'autres questions sont inspirées par les transformations de la communauté universitaire, ses nouvelles formes de gouvernement, ses orientations pédagogiques. On se demandera ici :

- comment, dans la communauté universitaire, assurer à la fois une collégialité réelle et l'efficacité de la direction ?

- selon quels critères, l'Université moderne peut-elle harmoniser les fonctions de recherche et les tâches d'enseignement ?

- à quelles conditions, la technologie de l'éducation, les nouvelles techniques audio-visuelles et les enseignements programmés sont-ils acceptables pour l'Université ?

c) On s'interrogera, en outre, sur la signification que prend pour l'institution Universitaire la distance ou [10] le conflit entre générations. On cherchera à comprendre, par exemple :

- quelles sont les raisons psycho-sociologiques qui expliquent la contestation étudiante et l'écart croissant entre les générations ?

- quels sont les problèmes sociaux, moraux et spirituels que posent à l'Université l'avènement d'une contre-culture et le refus, par une partie de la jeunesse, des institutions établies ?

d) Nous toucherons également au problème de l'enseignement et de la recherche en matière religieuse, et nous poserons les questions suivantes :

- comment le renouveau des sciences religieuses s'insère-t-il dans le contexte actuel de la vie universitaire ?

- comment les Universités catholiques pourraient-elles collaborer à la mise en oeuvre d'une politique de la recherche dans l'Église ?

L'énoncé de ces questions éveillera sans doute des préoccupations habituelles, familières même, chez tout lecteur qui a quelque connaissance de l'Université moderne. Il est évidemment plus facile de formuler des questions, que d'offrir en tout point des réponses adéquates. En poursuivant ces observations sociologiques, notre intention ne peut être que de chercher des éléments de réponse et de participer, avec d'autres, à la réflexion commune sur le destin de l'Université dans la société moderne.

Il est clair qu'on ne peut avoir l'ambition d'offrir ici une sociologie de l'Université. Nos observations, espérons-nous, auront quelque valeur générale dans la mesure où nous tâcherons, par la perception directe des faits et par la consultation des études existantes, de saisir quelles sont les évolutions typiques du monde universitaire en ces dernières décennies.

[11] Tout observateur perçoit l'événement d'un point de vue propre. Notre intérêt immédiat, mais non exclusif, est l'Université catholique. On estime à 600 environ le nombre des institutions universitaires catholiques dans le monde. Depuis le Concile Vatican II surtout, de profondes mutations s'opèrent dans les Universités catholiques. Certaines connaissent un renouveau notable, plusieurs sont en crise à cause de difficultés financières ou autres. Toutes s'interrogent sur leur rôle dans une société de plus en plus sécularisée. On peut dire que les Universités catholiques, dans leur ensemble, se sentent solidaires des évolutions qui emportent toutes les Universités du monde, évolutions caractérisées surtout par la socialisation et la démocratisation de l'enseignement supérieur, par la recherche de nouveaux modes d'enseignement et d'apprentissage, par la nécessité de redéfinir les finalités sociales de l'Université et ses tâches dans un monde à développer, par la concurrence de nouveaux moyens de diffusion des connaissances, par l'exercice de la fonction critique à l'Université, par la planification de la recherche scientifique de la part de l'État, etc.

Il est dès lors normal que notre propos ne se limite pas à l'Université catholique. Ajoutons même que l'accent principal dans ces analyses sera souvent mis sur l'Université en général plutôt que sur l'Université confessionnelle. Pour les universitaires catholiques, il est indispensable de se situer dans le contexte plus large de l'Université moderne, dont on perçoit aujourd'hui plus nettement les évolutions, grâce au travail d'analyse qui se poursuit dans les nombreuses Fédérations ou Associations d'Universités. D'autre part, les institutions non-confessionnelles peuvent trouver quelque intérêt à découvrir les préoccupations propres de l'Université catholique, en un moment où la crise de l'enseignement supérieur est surtout ressentie comme une crise culturelle et morale.

[12] Une dernière remarque : ces observations sociologiques sur l'Université moderne sont à entendre en deux sens distincts et complémentaires : il s'agit premièrement de constatations, secondement de considérations. Nos observations signifient d'abord la constatation, la description ou la perception des situations universitaires actuelles. Mais nos observations comporteront en outre des considérations, des réflexions ou des évaluations, à partir des faits perçus. Ces deux démarches de l'esprit, l'une plus empirique l'autre plus réflexive, nous semblent indispensables pour tous ceux qui ont quelque responsabilité dans l'orientation de l'Université moderne.

En terminant, il nous reste l'agréable devoir de remercier les collègues qui, en divers pays, nous ont fourni de très utiles renseignements et suggestions ; en particulier, nous remercions ceux qui ont bien voulu lire et critiquer ces pages avant leur publication. Leurs propres observations ne constituent pas la part la moins appréciable de ces études sur l'Université actuelle.



[1] Les chapitres III, IV et VI reprennent en les refondant des études sur l'Université parues dans les revues Studia Missionalia, 19 (1970) 235-253 ; et Gregorianum, 50 (1969) 463-483 ; 52 (1971) 5-25. Ce dernier article d'abord publié en anglais, constituait le Rapport Général présenté à la Fédération Internationale des Universités Catholiques à Boston en 1970. Les chapitres I, II et V ont été préparés en vue de la présente publication. Le chapitre VII est basé sur une conférence donnée à Lisbonne en 1972 lors de l'inauguration de l'Université Catholique Portugaise.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le vendredi 23 avril 2010 8:27
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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