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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir du texte de Hervé Carrier, “Progrès de l'urbanisation dans le monde”. Un chapitre publié dans l'ouvrage collectif (J. Antoine, H. Carrier, H. Chambre, H. Fréville, Fr. Houtart, A. Laure, Ph. Laurent, Ph. Pinchemel, J. Remy, Fr. Russo, L. Thoré, G. Vailland et l'Atelier d'urbanisme et d'architecture), Le phénomène urbain, chapitre 2, pp. 29-52. Paris : Les Éditions Aubier-Montaigne, 1965, 259 pp. Collection : Recherches économiques et sociales, no 2. [Autorisation accordée par l'auteur le 17 novembre 2009 de diffuser la totalité de son oeuvre dans Les Classiques des sciences sociales.]

Hervé CARRIER, s.j.

Progrès de l'urbanisation dans le monde”.

Un chapitre publié dans l'ouvrage collectif (J. Antoine, H. Carrier, H. Chambre, H. Fréville, Fr. Houtart, A. Laure, Ph. Laurent, Ph. Pinchemel, J. Remy, Fr. Russo, L. Thoré, G. Vailland et l'Atelier d'urbanisme et d'architecture), Le phénomène urbain, chapitre 2, pp. 29-52. Paris : Les Éditions Aubier-Montaigne, 1965, 259 pp. Collection : Recherches économiques et sociales, no 2.

AMPLEUR DE L'URBANISATION ACTUELLE

Les populations urbanisées.
Les villes de plus d'un million, d'habitants.
Les cités de 20.000 et de 100.000 habitants.
Étalement des espaces urbains.
Prolifération des banlieues.
La conurbation.
La création de villes neuves.
Le spontané, l'irrationnel, l'incontrôlable.


Après la naissance des villes, les hommes devinrent différents de ce qu'ils avaient été auparavant.
Robert REDFIELD.

Siècle de la révolution industrielle, le XIXe fut tout autant celui de la grande révolution urbaine. Pour la première fois dans l'histoire se multiplient à un rythme rapide les agglomérations d'un million d'habitants : Londres, Tokyo (Édo), Paris, New York, Vienne, Berlin, Chicago, Philadelphie, Calcutta, Buenos Aires. jamais, sauf à Rome et à Constantinople, on n'avait connu pareils rassemblements humains. L'équilibre traditionnel des populations rurales et urbaines se renverse ; une proportion toujours croissante et bientôt une majorité des humains habiteront les villes.

La concentration dans les villes occidentales résulte d'une conjonction de facteurs divers. D'abord l'accroissement considérable des populations européennes entre 1800 et 1900, passant de 180 à 400 millions. Ces masses sont profondément sollicitées par les bouleversements économiques et techniques qui marquent tour à tour l'Angleterre, la France, puis les autres pays d'Europe ; les populations ouvrières se rassemblent autour des fabriques et des industries naissantes. C'est le début d'une vaste translation des populations rurales vers les centres manufacturiers. Le processus s'accentuera à mesure que le capitalisme financier aura appris lui-même à se concentrer davantage et à créer des entreprises toujours plus vastes, plus désireuses de main-d'œuvre. Également à cette époque s'opèrent, en divers pays, la centralisation administrative, la concentration des réseaux impériaux, la création de moyens rapides de communication par eau, route et chemin de fer. Sur cette trame vont se dessiner de forts mouvements de populations vers les agglomérations nouvelles ; bientôt ce sera une véritable ruée des masses paysannes - souvent spoliées, appauvries, exploitées - vers les villes industrielles en croissance.

« La concentration géographique n'est qu'un des traits extérieurs du nouveau régime industriel. Au‑dedans s'opère une concentration plus profonde ; c'est celle des entreprises, liées entre elles par la nécessité commune des approvisionnements et des débouchés ; c'est celle des capitaux, dont le rôle va grandissant à mesure que l'outillage se perfectionne et se complète [1]. »

Au-delà des frontières européennes, les États-Unis se mettent en mouvement. En Afrique, au Proche-Orient et en Asie, tout un chapelet de villes « coloniales » surgissent au cours du XIXe siècle et au début du XXe : Singapour, Bangkok, Manille, Batavia-, villes aujourd'hui immense§, n'étaient que bourgades vers 18oo.

La fièvre d'urbanisation n'apporte pas que des avantages. À côté des immenses profits du capitalisme, des progrès de la technique, de l'enrichissement et de l'embellissement des grandes métropoles comme Londres, Paris, Bruxelles - véritables « capitales d'Empire » -, il y a une Contrepartie négative : l'entassement et la misère turbulente des masses. Ce sont les émeutes de Lyon, les révélations affreuses de Villermé sur les villes manufacturières du Nord de la France. Birmingham et Manchester, villes types de l'industrie anglaise, « n'étaient pas des communautés humaines mais de simples entassements d'hommes » (Lewis Mumford). Pendant toute la seconde moitié du XIXe siècle, des enquêtes sociales révéleront les conditions inhumaines des nouvelles populations urbaines, surtout en Angleterre et en France. Moralistes, prédicateurs et socialistes en souligneront les horreurs. Marx et Engels s'inscriront parmi les plus célèbres dénonciateurs de la démoralisation de ces foules urbaines, déracinées, exploitées et livrées à une profonde désintégration sociale [2]. C'est l'époque où l'Église perd en Europe la classe ouvrière.

Sans dresser un bilan complet de l'urbanisation au siècle dernier, il convenait de rappeler et de retenir la connexion historique entre la révolution industrielle et la révolution urbaine.


AMPLEUR
DE L'URBANISATION ACTUELLE

Depuis une dizaine d'années, grâce surtout aux travaux des Nations Unies et aux recherches de quelques équipes internationales [3]. on cerne assez bien l'extension de l'urbanisation vers le milieu du XXe siècle. Plusieurs méthodes permettent de mesurer le phénomène : la détermination des populations urbanisées par rapport aux populations totales ; la répartition de la population mondiale dans des villes de diverses dimensions ; la distribution des super-cités [4].

Les populations urbanisées.

Selon le critère des Nations Unies est considéré comme « urbain » celui qui réside dans une localité d'au moins 2.000 habitants. Actuellement, 20 nations sont urbanisées à plus de 50% ; 13 à plus de 60% et 5 à plus de 70%.

Voici quelques taux d'urbanisation typiques [5] :

Angleterre

80,8

Argentine

62,5

Allemagne de l'Ouest

71,1

Canada

61,6

États-Unis

64

Espagne

60,5

Belgique

62,7

France

55,9

URSS

48 [6]


Plusieurs nations admettent aujourd'hui que la majorité de leurs citoyens sont des « urbains », avec toutes les conséquences politiques, sociales ou culturelles que chaque pays attache à cette situation toute nouvelle dans son histoire.

Les villes de plus d'un million, d'habitants.

En 1960, il existait 99 localités [7] de plus d'un million d'habitants, ainsi distribuées par secteurs géographiques :

Amérique du Nord

23

Extrême-Orient

36

Amérique latine

9

Proche-Orient

4

Europe occidentale

17

Océanie

2

Europe de l'Est

4

Afrique du Sud

1

Union Soviétique

3

(Source : Ann. démogr. des NU 1960.)


Sur ces 99 agglomérations, 36 dépassent 2 millions d'habitants ; et 19 dépassent 3 millions, ainsi réparties :

- huit en Amérique : New York, Los Angeles, Chicago, Philadelphie, Detroit, Buenos Aires, Rio de Janeiro, São Paulo ;

- six en Asie : Tokyo, Tien-tsin, Shanghaï, Pékin, Bombay, Calcutta ;

- cinq en Europe : Londres, Paris, Berlin (Ouest et Est ensemble), Moscou, Leningrad.

Treize super-cités ont 4 millions d'habitants ou plus

En millions

En millions

New York

10,6

Moscou *

5,0

Tokyo

9,5

Bombay *

4,9

Londres

8,2

Paris

4,8

Shanghaï *

6,9

Buenos Aires

4,6

Los Angeles

6,7

Philadelphie

4,3

Chicago

6,2

Pékin *

4,0

Calcutta

5,9

* Ville seulement, sans l'agglomération.
(Source : Ann. démogr. des NU 1960.)



Les cités de 20.000 et de 100.000 habitants.

Il ne suffit pas de signaler les concentrations gigantesques ; il faut estimer les taux de concentration dans les pays les plus urbanisés. Les sociologues emploient aujourd'hui deux points de comparaison : le pourcentage des populations nationales vivant dans des localités de 20.000 et de 100.000 habitants. Voici d'abord la répartition selon les continents.

I. POURCENTAGE DU POPULATIONS DU GLOBE
VIVANT DANS DES LOCALITÉS.

De 20.000 h. et +

De 100.000 h. et +

Ensemble du globe

21

13

Océanie

47

41

Amérique du Nord (USA & Canada)

42

29

Europe (sauf l'URSS)

35

21

URSS

31

18

Amérique du Sud

26

18

Amérique centrale (avec les Caraïbes)

21

12

Asie (sans l'URSS)

13

8

Afrique

9

5

(Source : K. Davis, in Am. Journ. Sociol., 60, 1955, 429 sq.)


Examinons maintenant, au niveau national, la répartition des populations dans les villes de plus de 100.000 habitants. Cet unique critère facilite l'analyse et est le plus communément retenu dans les études internationales [8]. En 1960, dans une vingtaine de pays, 25% au moins de la population résident dans des agglomérations de 100.000 habitants ou plus. Le tableau II (p. suiv) les présente selon l'ordre décroissant de leur taux de concentration.

Il y aurait présentement dans le monde environ 1 .050 zones urbaines de 100.000 habitants ; l'examen des recensements nationaux depuis 1920 révèle une multiplication constante de ces localités. Certaines estimations laissent entrevoir que, vers la fin du siècle, le quart de la population mondiale sera concentré dans des villes de 100.000 habitants ou plus. Dans l'hypothèse d'une progression constante de ce processus, la proportion serait de l'ordre de 50%, vers le milieu du XXIe siècle [9].

II. PAYS AVANT 25% DE LA POPULATION
CONCENTRÉS DANS DES LOCALITÉS DE 100.000 H. ET PLUS.

Pays

% de la population nationale

Nombre de localités de 100.000 h. et +

Australie

57,4

8

Royaume-Uni

51,0

40

Japon

41,2

115

Argentine

39,5

20

Écosse

36,9

4

Israël

34,3

3

Danemark

34,2

3

Liban

33,2

2

Pays-Bas

33,1

14

Autriche

32,9

4

Uruguay

32,6

1

Nouvelle-Zélande

32,2

3

Venezuela

31,7

5

Irlande du Nord

31,1

1

Allemagne fédérale

30,7

51

Chili

30,1

4

USA

29,5

107

Syrie

28,9

4

Colombie

28,6

13

Espagne

26,6

26

Union Sud-Africaine

25,4

11

Points de comparaison

Italie

23,9

31

URSS

23,5

148

Canada

22,8

11

France

16,8

24

Belgique

10,5

5

Inde

8,6

97

Chine continentale

8,3

102

(Source : Ann. démogr. des NU 1960.)

Ces données ont une signification sociale évidente : certaines nations sont devenues aujourd'hui presque entièrement urbanisées. Des sociologues désignent par « société urbanisée »celle qui compte au moins le tiers de sa population dans des localités de 100.000 habitants ou plus. Sept ou huit nations correspondent actuellement à cette définition : l'Australie, l'Angleterre, le Japon, l'Argentine, l'Écosse, Israël, le Danemark.

Les rythmes de la concentration urbaine ne sont ni comparables ni simultanés dans les divers pays. Les nations en voie de développement sont entrées plus tard dans ce processus, mais ont un rythme actuel relativement plus élevé. L'Égypte et le Mexique, par exemple, abordent ce processus vers 1920. En 1937, l'Égypte avait seulement 3 villes de 100.000 habitants ou plus ; aujourd'hui elle en a 12, concentrant 22% de sa population totale. Le Mexique avait 4 villes de 100.000 habitants en 1940, et 18 aujourd'hui concentrant 20% de sa population. Pour l'Inde, le nombre de ces villes a triplé depuis 1921 et le phénomène est surtout notable depuis 1941 ; aujourd'hui elle en a 97. En 1926, l'URSS comptait seulement 31 localités de 100.000 habitants, avec 6,5% de sa population ; aujourd'hui elle en dénombre 148 avec 23,5% de sa population nationale ; par ailleurs, l'URSS a triplé le nombre de ses villes de 20.000 habitants ou plus : 782 en 1959 contre 226 en 1926 ; ce qui représente 35% de sa population actuelle, contre 12% à peine en 1926 [10].

Les analyses et les mesures qui précèdent vont toutes dans le même sens : elles accusent un mouvement universel de concentration urbaine aux dépens des populations rurales. Ce phénomène se produit selon certains modes typiques : dispersion des agglomérations dans l'espace national, prolifération des banlieues, conurbation ou fusion des villes. Il faut aussi souligner la création de villes nouvelles ainsi que l'effort caractéristique de planification et de rénovation urbaines.

Étalement des espaces urbains.

Dans la plupart des pays industrialisés, la concentration urbaine s'est réalisée en deux phases successives : d'abord une forte attraction vers les centres urbains puis un débordement des populations sur les pourtours semi‑ruraux. Les vieilles villes étaient autrefois circonscrites par la limite précise d'une enceinte ; et si la population s'accroissait, on élargissait la couronne des murailles autour de la cité. Aujourd'hui, la frange qui borde les grandes agglomérations reste floue et toujours mouvante. La ville moderne annexe peu à peu, par avances concentriques, une proportion toujours plus vaste du territoire national.

À Londres, en 1861, on pouvait déjà se rendre compte que l'anneau extérieur de la ville, l'outer ring, croissait à un rythme supérieur au centre de la City. Le même phénomène fut mis en évidence par Thompson [11] aux États‑Unis ; dans son étude sur 44 zones métropolitaines, il trouva qu'entre 1930 et 1940 l'accroissement démographique des zones semi‑rurales autour des grandes villes était trois fois supérieur à celui des zones suburbaines immédiatement contiguës au centre de ces cités. Ce processus de « dispersion métropolitaine » est très notable à Rome ; entre 1951 et 1959, tous les quartiers du centre (rioni) ont enregistré une nette diminution de population ; les quartiers mitoyens entre le centre et la périphérie (quartieri) présentent une situation intermédiaire : les deux tiers de ces 18 quartiers ont vu leur population augmenter, l'autre tiers est en diminution ; quant aux 11 quartiers de la périphérie (suburbi), ils sont tous en net progrès démographique.

La même tendance à l'étalement se constate pour l'agglomération parisienne. De 1830 à 1960, la population de l'ensemble parisien est passée de 1 à 7 millions environ. L'éclatement dans l'espace est encore plus spectaculaire : la surface de l'agglomération parisienne s'est multipliée par 15 ; elle s'étend aujourd'hui sur 3 départements et absorbe plus de 200 communes [12]. On distingue autour de la ville 4 limites de plus en plus vastes : l'agglomération restreinte (6,5 millions d'habitants) ; l'agglomération étendue (7,25 millions) ; le complexe résidentiel (7,5 millions) ; et au‑delà une vaste zone de peuplement industriel.

Ces quelques exemples illustrent clairement l'effet de capillarité qui se produit aujourd'hui à la périphérie des grandes cités. Le phénomène ne se réduit pas cependant à une simple addition ou à une juxtaposition sur le pourtour toujours incertain des agglomérations. L'un des aspects les plus frappants de la « dispersion métropolitaine » est le bourgeonnement des banlieues nouvelles sur l'hinterland autrefois rural des villes.

Prolifération des banlieues.

Autour des villes traditionnelles, de nouveaux bourgs se constituaient souvent en bordure des murailles ; c'étaient des faubourgs (foris-burgus). Ces quartiers finissaient par être englobés dans l'enceinte élargie de la cité. Aujourd'hui, les villes ne croissent plus par simple adjonction de faubourgs nouveaux ; loin du centre souvent surgissent des banlieues périphériques qui se greffent cependant à la vie économique et sociale de l'agglomération-mère. On les appelle des villes-satellites, des villes‑champignons, des villes‑dortoirs, pour souligner leur stricte connexion avec le centre, en même temps que leurs fonctions semi-autonomes.

Aux États-Unis, en 1950, 21,6% de la population urbaine du pays vivait dans ces zones de banlieues ; un lien étroit existe entre l'expansion des banlieues et la multiplication des moyens de transports, surtout des automobiles [13].

Les banlieues de grandes villes ont des fonctions sélectives ; leur population tranche assez nettement sur celle du centre. Les banlieues attirent généralement des familles plus jeunes, aux enfants plus nombreux et qui possèdent le plus souvent un moyen de transport. D'autre part, la standardisation des constructions et l'uniformité relative des loyers opèrent une sélection socio‑économique qui tend à regrouper dans des banlieues identiques des résidents à revenus similaires.

Selon certains planificateurs, ces quartiers devaient décentraliser les villes et permettre de les décongestionner. De fait, ces quartiers-satellites ont pu soustraire une fraction de leur population aux centres urbains ; mais, tout compte fait, ils n'ont décentralisé qu'une part limitée des fonctions urbaines. Sans doute, le résident de banlieue trouvera près de chez lui les commerces et les services qui satisfont à ses nécessités quotidiennes ; mais pour les services plus recherchés, pour les achats plus importants, pour consulter tous les experts et les spécialistes de la vie moderne, c'est « en ville » qu'il se rendra. C'est également en ville qu'il partira travailler chaque matin, que ses enfants plus âgés fréquenteront l'école qualifiée, le collège ou l'université. Au lieu d'alléger les activités au coeur de l'agglomération, les banlieues et les cités‑satellites ont plutôt contribué à les intensifier à l'extrême.

De nouveaux rythmes urbains se créent ; les résidents de la périphérie font soir et matin la navette entre leur domicile et leur lieu de travail. À Paris, on a estimé à plus d'un million les personnes qui, en 1960, transitaient quotidiennement entre Paris et la banlieue [14]. Ces migrations alternantes donnent une idée de l'étroite symbiose qui unit une ville à ses banlieues-satellites. Chaque jour ouvrable, un flot humain se déverse sur les villes et regagne le soir les banlieues-dortoirs. Certains quartiers du centre se sont peu à peu transformés en villes‑diurnes, grouillantes d'activité durant le jour et désertes la nuit. Dans un seul gratte-ciel de New York, celui de la Pan American, 25.000 employés se trouvent réunis chaque matin, - une ville dans la ville, - et ce point de concentration extrême est desservi quotidiennement par les 400 trains qui se croisent dans le soussol de l'édifice.

La conurbation.

Toute ville industrielle de quelque importance tend aujourd'hui à créer autour d'elle une zone d'attraction de plus en plus large. L'excroissance des périphéries est souvent telle que les agglomérations finissent par se rejoindre et fusionner entre elles. On a appelé ce phénomène la conurbation [15]. Le processus est particulièrement observable en Angleterre, aux États‑Unis et au japon.

En Angleterre, une immense région de conurbation s'est formée autour de la chaîne pennine. Cet ensemble urbain englobe 6 villes importantes, Manchester, Liverpool, Birmingham, Sheffield, Leeds, Bradford, lesquelles fusionnent à leur tour une dizaine d'autres villes de 100.000 habitants ou plus. L'ensemble de la population ainsi agglomérée atteint 8,25 millions. Même phénomène autour du « Grand Londres » qui incorpore dans une immense zone urbaine non moins de 16 villes périphériques, chacune dépassant les 100.000 habitants [16].

Osaka, capitale du Japon central, est une ville géante (3 millions) qui forme depuis Kobé jusqu'à Sakaï une conurbation de 7,5 millions d'habitants. La population de cet ensemble urbain sera de 12 millions en 1970. La zone métropolitaine de Tokyo‑Yokohama s'étend à une trentaine de municipalités et à une vingtaine de villes ; la population de cette immense conurbation est de 13,8 millions et elle occupe 2.801 km2 [17].

En Europe continentale, le phénomène est moins marqué ; encore que le processus ait été nettement observé dans des régions industrielles comme Turin, Milan, Paris, Lyon, Lille-Roubaix-Tourcoing. Certains se demandent même si l'on n'assiste pas à la lente formation d'une zone de conurbation internationale qui finirait par souder ensemble un tissu d'agglomérations qui s'étendraient de Paris à Bruxelles et jusqu'à Amsterdam et Cologne.

Le cas le plus spectaculaire est celui de la Mégalopolis américaine qui depuis Boston au nord s'étend jusqu'à Washington au sud ; soit un espace urbanisé d'environ 1.000 kilomètres de long par 80 à 150 kilomètres de large. Ce phénomène absolument unique, - du moins au stade actuel de l'urbanisation mondiale, - a été étudié avec soin par l'économiste français Jean Gottman [18]. Rien de plus impressionnant que de survoler en avion cette super-agglomération qui recouvre, le long du littoral Atlantique des États‑Unis, un espace équivalent à la distance Paris-Rome, ou à la longueur de toute l'Italie.

La première vérification statistique de ce phénomène fut possible au lendemain du recensement de 1950 ; déjà on dénombrait dans cette vaste zone de conurbation plus de 30 millions d'habitants. Au dernier Congrès mondial de sociologie à Washington (septembre 1962), on présenta aux congressistes un filin qui illustrait parfaitement le rôle dominant de cette agglomération géante, dans l'industrie, le commerce, la finance et les transports aux États‑Unis. Certains planificateurs urbains se demandent même si ce n'est pas à cette échelle qu'il faudra planifier demain les réseaux industriels, les systèmes routiers, les transports et les services communs. Quelques sociologues américains se sont déjà mis à la tâche pour entrevoir le terme de l'évolution en cours. Une étude récente n'hésitait pas à prédire que 90% de la population américaine pourrait, en un avenir prévisible, être concentrée dans des super-métropoles de 25 à 30 millions d'habitants. Une ville de 50 millions d'habitants ne serait pas impensable vers l'an 2000 ; l'approvisionnement en eau potable semble être l'obstacle majeur à surmonter avant de rendre possibles d'aussi gigantesques rassemblements de citadins.

La création de villes neuves.

L'urbanisation actuelle présente un autre trait typique elle est volontaire ou planifiée. Maints pays tentent d'infléchir la croissance urbaine par la création de villes ou de banlieues entièrement neuves, ou par l'implantation de quartiers « directionnels ». L'audacieuse création de Brasilia symbolise parfaitement cette tendance nouvelle.

Les Soviétiques rapportent qu'au Kazakhstan, en pleine steppe, plus de 600 « cités ouvrières » ont été créées là où huit ans auparavant il n'y avait pas une ville [19]. En Israël, une quinzaine de cités nouvelles ont été édifiées depuis 1948. En Inde, deux capitales nouvelles ont surgi en l'espace de cinquante ans. On pourrait également énumérer toutes les villes minières, les villes du pétrole, les villes atomiques, les villes militaires qui ont surgi nombreuses sur tous les continents surtout depuis la dernière guerre. Le Canada édifie actuellement des villes très modernes dans la région arctique du pays, telles Frobisher-Bay et Inuvik ; la « ville polaire » d'Inuvik, construite sur le pergélisol, repose sur des pilotis solidifiés par le gel ; elle possède ses écoles, ses églises, son hôpital, sa centrale électrique, une station émettrice, des commerces et des services nombreux.

Quand les urbanistes parlent des villes nouvelles, c'est surtout à l'expérience anglaise qu'ils songent. Les new towns anglaises ont suscité toute une littérature [20]. Depuis 1945, 15 villes nouvelles ont été aménagées en vue de décongestionner Londres, dont l'extrême vulnérabilité avait été tragiquement démontrée à la suite des bombardements aériens. Ces réalisations s'inspirent de l'idéal des grands urbanistes anglais, comme Patrick Geddes, Ebenezer Howard, promoteurs des cités‑jardins (garden‑cities, green-belt cities). Ce programme de construction s'insère dans une politique nationale de planification des villes ; un ministère spécial a été créé à cet effet (Ministry of Country and Town Planning). Une loi (New Towns Act 1946) habilite le ministre à choisir le site des villes à construire, et à constituer les organismes régionaux destinés à réaliser les projets. Ces villes ont pour originalité de ne pas être des cités-satellites liées fonctionnellement aux grands centres, mais d'être autonomes économiquement et industriellement. Dans ces villes, la construction de zones résidentielles s'est accompagnée d'un effort parallèle pour y implanter des industries, des sources d'emplois et tous les services scolaires, religieux, culturels, sanitaires, requis pour une ville autonome.

Les Russes, pour leur part, semblent avoir mis au point des critères et des normes pratiques pour une planification rationnelle des cités nouvelles. Le développement harmonieux d'une ville exigerait une répartition des investissements qui serait de l'ordre suivant : 50 à 55% pour l'habitation, 20 à 23% pour la culture et les services communs, 23 à 25% pour les fonctions d'utilité publique ; mais ces normes seraient souvent mésestimées en pratique. Par exemple, le plan élaboré pour Volgograd en 1959 destinait 82,5% des investissements de capitaux à l'habitation, mais à peine 8,5% allaient aux services publics et à l'aménagement des terrains et 9% à des fins culturelles [21].

Des expériences hardies de planification urbaine se poursuivent aussi en certains pays neufs ; tel le travail remarquable accompli par le Fomento et son « Planning Board » à Porto Rico. Des programmes précis - dont une partie est déjà réalisée - sont destinés à créer dans l'île trois vastes régions plus ou moins autosuffisantes économiquement, et gravitant autour des trois villes principales du pays. Les bureaux de planification urbaine sont fort influencés par les théories les plus récentes du développement communautaire aux États-Unis. Selon les normes prévues, on a déjà édifié plusieurs communautés urbaines de 900 unités familiales, sur des sites de go acres dont 14 sont obligatoirement réservés aux services d'utilité commune [22].

Au chapitre de l'urbanisation volontaire, il faut également signaler la création de quartiers « directionnels » au sein des grandes villes. Par la construction de vastes édifices consacrés au commerce et aux affaires, on provoque volontairement au coeur des villes un processus de revalorisation des quartiers vieillis et détériorés ; ou encore, l'on crée de nouveaux quartiers périphériques destinés à polariser la croissance des cités. Déjà Le Corbusier, dans son projet sur le Paris de demain (publié après la Première Guerre), proposait de construire au centre de la Ville 24 gratte‑ciel de 60 étages chacun et 1 réseau de rues à 3 paliers pour véhicules circulant à différentes vitesses. Des projets à peine moins audacieux sont aujourd'hui en cours de réalisation.

Au coeur de New York, on construit d'immenses gratte‑ciel qui transforment à vue d'œil les grandes avenues du secteur central (le Central Business District) où 3.300.000 personnes pénètrent chaque jour. En Italie, Milan s'efforce de déplacer son centre commercial et financier en créant un quartier de gratte‑ciel à distance de la zone centrale actuelle. Rome a imaginé et réalisé le nouveau quartier de PEUR (qui devait momentanément abriter l'Exposition Universelle de Rome 1940) pour attirer la population romaine vers la mer.

En France, tout en procédant à la création de quartiers neufs en plein centre des villes, comme le nouveau complexe de Montparnasse, on s'oriente vers la création de « cités-parallèles », tels les projets en cours de réalisation pour les régions de Paris (Rond‑Point de la Défense), de Lyon (La Duchère), de Toulouse (Le Mirail). Il ne s'agit pas de villes‑dortoirs construites aux portes des grands centres, mais de complexes urbains relativement autonomes, quoique reliés par communication rapide avec l'agglomération voisine. Le Mirail sera édifié à 4 kilomètres de Toulouse et comprendra 25.000 logements sur une superficie de 800 hectares. De façon générale, l'urbanisme français se caractérise par la planification obligatoire des villes de 10.000 habitants ou plus, par la rénovation méthodique des vieux quartiers, par la construction de grands ensembles immobiliers dans les quartiers neufs [23].

Conjointement à ces initiatives de renouvellement urbain, un effort parallèle est mené pour résoudre le problème de l'habitation populaire. Sans entrer dans ce problème particulier, mentionnons que les programmes d'habitations populaires ont connu, en Italie, en France et dans les Pays Scandinaves, un succès tout particulier, compte tenu des critiques inévitables en ce domaine.

Ces notations rapides donnent une idée de l'effort immense fourni en plusieurs pays pour diriger ou pour contrôler l'expansion des villes. Mais l'urbanisation volontaire et planifiée reste relativement circonscrite ; trop d'improvisation, trop d'implantations injustifiables, socialement et économiquement, échappent encore à l'aménagement rationnel de la cité.

Le spontané, l'irrationnel, l'incontrôlable.

À côté des développements prodigieux et bien réglés de l'urbanisation contemporaine, un lourd passif continue à peser sur les formes de la vie urbaine. Des villes, pourtant modernes et puissantes, n'ont pas réussi encore à prévenir les excroissances irrationnelles à leur périphérie, ou à assainir les zones pathologiques qui déshonorent leur centre même. Aux abords parfois d'une grande cité, surgiront du soir au matin des rangées de baraques occupées par des migrants en quête de travail ou attirés par le mirage de la ville. Ces « citadins abusifs », comme on les appelle à Rome, une fois déracinés de leur pays d'origine n'y retournent plus. Ils ont « émigré » vers la ville pour le mieux comme pour le pire. La situation est encore à demi tolérable quand l'offre d'emploi correspond à peu près au flot des nouveaux-venus [24]. Mais dans les pays neufs surtout, il n'y a souvent aucune proportion entre cet afflux des ruraux et l'offre très limitée d'emplois. Ainsi se gonfle à l'extrême une population urbaine sous‑employée, vivant à la périphérie des villes dans des conditions infra-humaines, sans services sanitaires, souvent sans électricité, ni eau courante.

Le problème est particulièrement aigu en Afrique et encore plus en Amérique latine. Par dizaines et parfois par centaines de milliers se concentrent les migrants ruraux sur le pourtour des villes ; ils y vivent dans de redoutables conditions d'insalubrité, de promiscuité et de misère. Le journal naïf et réaliste de cette pauvre chiffonnière de la favelle Canindé à São Paulo fait sentir le drame familial et personnel de ces populations parasitaires [25]. Ces zones inhumaines révèlent un déséquilibre économique plus profond, affectant non seulement les villes mais l'ensemble de ces pays. L'extension urbaine reste souvent artificielle ; elle ne correspond à aucun développement industriel. On l'a appelée une fausse urbanisation.

En Amérique latine surtout, la population augmente à un rythme galopant : le taux d'accroissement y est de 2,4% par année (en Afrique il est de 1,9% ; en Asie de 1,8%) ; mais, estime-t-on, la population des villes latino-américaines croît à un rythme double, soit à environ 5% par an. En Amérique latine, sur une population totale de 200 millions il y aurait 40 millions d'habitants massés dans des zones délabrées, favelles, bidonvilles. Environ une dizaine de villes dépassent aujourd'hui le million d'habitants.

Au Brésil, entre 1940 et 1950 la population des villes de 5.000 habitants ou plus a augmenté de 43,6% ; et environ 60% de cet accroissement provient des migrations internes. On rencontre des situations analogues au Mexique, au Venezuela, au Pérou, au Chili. Des études précises sur ces problèmes font encore défaut, mais on semble ici devant un phénomène général. Aux alentours de 1950, 61% de la population urbaine d'Amérique latine était concentrée en des villes de 100.000 habitants ou plus [26]. En Argentine, Buenos Aires, à elle seule, réunit 44,2% de la population urbaine totale ; Santiago comprend 47,6% de tous les citadins chiliens. Caracas, Mexico, Quito, La Paz, Lima concentrent plus de 25% des populations urbaines des pays concernés. À titre de comparaison, pour Washington la proportion est de 1,6%, et pour Londres de 9,2%.

Ces problèmes suscitent depuis quelques années l'intérêt des chercheurs en plusieurs pays et il faut espérer qu’avant longtemps l'on aboutisse à une véritable sociologie des villes du Tiers Monde... Mais ces recherches sont difficiles : recensements déficients, manque de cartes adéquates, instabilité des populations urbaines, susceptibilités légitimes des administrations peu soucieuses d'étaler les misères de leurs ressortissants. Cependant - on a toute raison de le croire ‑l'absence de documentation précise sur le sort véritable des villes du Tiers Monde contribue à entretenir une ignorance et une inertie désastreuses pour le développement de ces régions [27].

L'urbanisation irrationnelle n'est pas le lot des seuls pays en expansion rapide ; partout à travers le monde l'extension et le vieillissement des villes posent aux planificateurs et aux législateurs des problèmes apparemment insolubles. De vieilles villes d'Europe, des villes plus récentes d'Amérique semblent impuissantes à enrayer les excroissances indésirables ou à se débarrasser de leurs taudis inhumains. Rome, Paris, Londres, New York possèdent encore une carte de quartiers à démolir parce qu'antisociaux et antihygiéniques. Malgré tous les programmes de rénovation méthodique, une portion notable des populations continue à vivre dans des conditions misérables. Même Washington, qui dispose pourtant de tous les moyens de l'État fédéral, ne réussit pas à faire disparaître de la capitale ces zones de détérioration ou d'installations précaires. Les propriétaires de taudis ne peuvent, au nom de la loi, être forcés à les abattre ; le « libéralisme urbain » est tenace.

Une carence plus grave encore existe : l'anarchie administrative qui préside au gouvernement des nouvelles agglomérations citadines. L'homme du XXe siècle n'a pas appris à gouverner et à gérer les immenses ensembles urbains, amorphes et sans statut juridique, qui de plus en plus recouvrent les territoires nationaux. Les États continuent à croire que l'unité administrative locale demeure la commune, la ville, la cité, bien délimitées ; or ces cadres ne correspondent plus à l'unité sociologique réelle qu'est l'agglomération. Les gouvernements centraux hésitent à confier trop de pouvoirs aux villes de peur de voir des États se constituer dans l'État. Songeons au poids politique de Paris, de Londres, de Tokyo. D'autre part, les villes assistent à l'invasion chaotique de leur hinterland et sont impuissantes, faute de pouvoirs efficaces, à contrôler ces implantations improvisées et souvent irréparables. « Une des raisons majeures de la crise du gouvernement local dans une société industrielle est que l'unité du peuplement n'y est pas le village ou même la ville, mais l'agglomération... Il est certain que l'agglomération pose de graves problèmes de civilisation ; elle pourrait même avoir tous les inconvénients traditionnels de la ville sans en avoir les avantages ; mais le problème central en est son gouvernement. Aussi longtemps que nous n'aurons pas d'organes politiques efficaces de décision et d'action commune, nous ne pourrons résoudre aucun de ces problèmes ni même les aborder [28]. »

Un enjeu domine notre époque : comment instituer des formes de gouvernement qui conviennent à la civilisation et aux structures nouvelles? Ce n'est pas au seul plan des relations internationales, ou au niveau des États nationaux que les institutions sont à revoir ; c'est aussi à l'échelon des agglomérations urbanisées. Des formes originales d'administration et de prévision seront à créer, afin de donner aux localités urbaines le pouvoir de s'orienter et de se gouverner rationnellement. Le laisser‑faire, le libéralisme urbain ont fini par se détruire eux‑mêmes. Champ de recherche encore peu exploré, ces problèmes promettent de devenir l'un des chapitres les plus féconds de la nouvelle « science des villes ».



[1] Paul Mantoux, La Révolution industrielle au XVIIIe siècle, Paris, Genin, 1959 (1906), p. 250.

[2] Voir H. Rigaudias-Weiss, Les Enquêtes ouvrières en France entre 1830 et 1848, Paris, Alcan, 1936. - Parmi les plus célèbres enquêtes de l'époque citons celle de L.-R. Villermé, « Tableau de l'état physique et moral des ouvriers employés dans les manufactures de coton, de laine et de soie » (1840) ; celle de J. Kay, « The moral and physical condition of the working classes employed in the cotton manufacture in Manchester » (1832) ; celles d'E. Buret, « La misère des classes laborieuses en Angleterre et en France » (1840) ; W.C. Preston, « The bitter cry of outcast London » (1883) ; Ch. Booth, « Life and labour of the people of London », 1897 ; F. Engels, « La situation des classes laborieuses en Angleterre » (1845).

[3] Mentionnons surtout les travaux de l'équipe de l'International Urban Research à l'Université de Californie : IUR, The world's metropolitan areas. Los Angeles, University of California Press, 1959. L'UNESCO a également organisé divers colloques internationaux pour étudier les problèmes de l'urbanisation en Asie, en Afrique, en Amérique latine : UNESCO, Urbanization in Asia and the Far East, Calcutta, 1960 ; UNESCO, The social implications of industrialization and Urbanization (in Asia), Calcutta, 1956 ; UNESCO, Social implications of industrialization and urbanization in Africa south of the Sahara, London-Paris, 1956 ; pour l'Amérique latine, voir le symposium récent : Ph. Hauser (en collaboration), Urbanization in Latin America, New York, Columbia University Press, 1962.

[4] Pour la question des méthodes de recherche en sociologie urbaine voir J.-P. Gibbs, Handbook of urban research methods, New York, London, Van Nostrand, 1961.

[5] Ces chiffres sont tirés, sauf pour l'URSS, de l'Annuaire démographique des Nations Unies (1955, tableau 7) et selon le critère de la « commune de 2.000 habitants ». Ce critère, remarquons-le, est très imparfait ; certains pays considèrent comme centre urbain celui qui a une population de 300 habitants (Islande), de 2.500 habitants (États‑Unis), de 5.000 habitants (Belgique) ou même de 30.000 habitants (Japon). D'autres pays n'ont pas de critères numériques fixes.

[6] Selon l'Annuaire statistique de la Russie, cité dans la presse occidentale. On ignore quel critère a été retenu pour établir ce taux d'urbanisation.

[7] Le terme localité s'entend ici dans le sens large d'agglomération urbaine. La plupart des statistiques internationales que nous présentons dans cet article sont élaborées à partir de la documentation détaillée publiée en 1961 dans l'Annuaire démographique des Nations Unies (1960) ; voir surtout les tables 7 et 8, pp. 258-348 et 349-371. Nous nous contenterons par la suite de citer cette référence en abrégé : Ann. démogr. des NU 1960.

[8] Voir IUR, The world's metropolitan areas, Los Angeles, Univ. of California, 1959, pp. 25‑27.

[9] Voir K. Davis, « The origin and growth of urbanism in the world », American Journal of Sociology, 60, 1955, pp. 429-437.

[10] Ann. dimogr. des NU 1960, table 8, p. 360.

[11] W.S. Thompson, The growth of metropolitan districts in the United States, 1900‑1940, Washington, Government Printing Office, 1948.

[12] INSEE, Délimitation de l'agglomération parisienne, Paris, 1959, p. 3.

[13] Les Américains consacrent 9% de leurs revenus aux transports automobiles ; ce chiffre représente une augmentation de 50% par rapport à 1930. En 1951, on estimait que 66,5% des familles américaines possédaient une voiture ; cf. Habitation, Construction et Planification (Nations Unies), no 12-13, 1959, p. 196.

[14] Voir l'étude de jean Hallaire, « Migrations alternantes des travailleurs dans l'agglomération parisienne », Revue de l'Action populaire, 155, 1962, pp. 199-212.

[15] Nous employons le terme conurbation au sens générique de fusion des villes ; certains recensements nationaux (v.g. l'Angleterre) donnent un sens technique plus restreint que nous n'envisageons pas ici ; cf. Gibbs, op. cit., pp. 47-52.

[16] Pour avoir une idée de la complexité des problèmes que présente la planification du « Grand Londres », voir W.A. Robson, « The megalopolis of London », New Society, I, 29 novembre 1962, pp. 12-14.

[17] Ann. démogr. des NU 1960.

[18] Jean Gottman, Megalopolis, New York, Twentieth Century Fund, 1961.

[19] Études soviétiques, 167, février 1962, pp. 24-27.

[20] La meilleure source de renseignement sur cette expérience est la revue Town and Country Planning (28 King Street, Convent Garden, WC2, London) ; le numéro de janvier de chaque année présente les derniers renseignements sur les new towns.

[21] B. Svetlichnyi, « Some problems of the long‑range development of cities » (Voprosy Economiki, 1962, no 3), in Soviet Sociology, I, Summer 1962, pp. 58-66.

[22] Ces nouveaux types de développements urbains sont étudiés dans le Technical Bulletin de l'Urban Land Institute (Washington, DC) ; voir le no 40 de janvier 1961.

[23] Voir P. Rossillion, Les Plans d'urbanisme communaux et intercommunaux, Paris, Berger-Levrault, 1960 ; également L. de Quirielle, Les Nouveaux Ensembles immobiliers, Paris, Berger-Levrault, 1960.

[24] Remarquons toutefois les déséquilibres économiques qui seront provoqués par une fuite massive des agriculteurs vers la ville ; selon une étude de l'INSEE, le tiers des jeunes agriculteurs français qui avaient 25 à 34 ans en 1954 ont aujourd'hui quitté la terre.

[25] Ce livre-scandale a suscité de vives réactions et polémiques. Il est écrit par une Noire brésilienne célibataire et mère de plusieurs enfants ; elle vivait dans une favelle, lieu de débarras ou dépotoir de la ville. Voir Carolina Maria de Jésus, Le Dépotoir (traduction française de Violante do Canto), Paris, Stock, 1960.

[26] Nous tirons la plupart de ces chiffres sur l'Amérique latine de l'étude publiée par J. Dorselaer et A. Gregory, La urbanizacion en America Latina, Fribourg, FERES, et Bruxelles, CRSR, 1962, 2 vol. ; cf. Ph. Hauser (ed), Urbanization in Latin America, New York, Columbia University Press, 1962.

[27] Sur les problèmes particuliers que pose l'expansion urbaine dans les pays neufs, voir P. George, « Matériaux et réflexions pour une politique urbaine rationnelle dans les pays en cours de développement », Tiers Monde, 3, juillet-septembre 1962, pp. 337‑359.

[28] Peter F. Drucker, Que sera demain? Prévisions, Paris, Éditions de l'Organisation, 1961, p. 212.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 25 avril 2010 11:11
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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