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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article d'Élisabeth Campos, “La régulation des sectes en France: théorie et pratique.” Un article publié dans l'ouvrage sous la direction de Singaravelou, Laïcité: enjeux et pratiques, pp. 35-52. Premier colloque Montaigne à l'Université de Bordeaux 3, octobre 2005. Les Presses universitaires de Bordeaux, 2007, 386 pp.

Élisabeth Campos

PhD. Droit

Chercheure, Institut Philippe Pinel, Montréal,
Centre international de criminologie comparée (CICC), Université de Montréal

La régulation des sectes en France:
théorie et pratique
”.

Un article publié dans l'ouvrage sous la direction de Singaravelou, Laïcité : enjeux et pratiques, pp. 35-52. Premier colloque Montaigne à l'Université de Bordeaux 3, octobre 2005. Les Presses universitaires de Bordeaux, 2007, 386 pp.

Introduction
Contexte et problématique
La régulation du religieux en France
Le dispositif actuel

Synthèse de l'action des pouvoirs publics
Effectivité et efficacité du droit
Manipulation mentale ou sujétion psychologique ?

Références bibliographiques

[35]

Introduction

Les États modernes occidentaux sont confrontés a la régulation de la diversité religieuse qui peut prendre des formes inédites ou peu familières. Ces nouvelles demandes plurielles émanent souvent de groupes et de traditions religieuses différentes, venus modifier les équilibres existants. Par ailleurs, la multiplication des voies religieuses, parfois anarchiques ou confuses, est susceptible d'entraîner une augmentation des situations à risque ou des abus. Un État ne peut ainsi se désintéresser de la diversité religieuse. Le sujet est sensible et exige un dosage habile entre deux nécessités : d'une part, garantir la liberté de croyance et, d'autre part, assurer la protection de la société et des individus. En outre, les autorités étatiques sont amenées à se prononcer sur des requêtes, souvent contradictoires, qui leur sont adressées par les corps policiers, les communautés religieuses, les associations de victimes ou qui tout simplement émanent des craintes exprimées par les citoyens.

Parmi les nouveaux courants qui ont émergé depuis quelques décennies sur la scène religieuse occidentale, les agissements de certains groupes dénommés sectes ont provoqué de vifs débats publics aussi bien au niveau qu'international que national. Si la liberté religieuse est un principe reconnu par toutes les nations modernes occidentales, chaque pays réagit différemment en fonction de ses traditions politiques et philosophiques. Nous examinerons ici plus particulièrement la façon dont s'opère la régulation des sectes en France et les réponses apportées par les pouvoirs publics. La position française se caractérise par une application spécifique de la notion de laïcité, héritée de son passé et qui a souvent fait l'objet de critiques, et par une attitude plus volontariste des pouvoirs publics dans le champ religieux, qui s'est traduit notamment par la mise en place progressive de politiques de prévention et de lutte contre les sectes. Cela ne signifie pas [36] pour autant que l'application concrète des mesures prises corresponde à leur lettre. Il peut exister, en effet, des différences entre les intentions affirmées et les mesures prises (écart entre les discours, les volontés et les principes constitutionnels), mais aussi dans J'application concrète de ces dispositions dans le domaine juridique, qui répond à des règles strictes et protectrices du citoyen. Compte tenu de la densité du sujet, nous ne retiendrons ici que quelques éléments de réflexion de façon à montrer comment se pose à l'heure actuelle cette problématique, tout en ayant conscience que de nombreux autres points auraient nécessité un traitement plus détaillé.


Contexte et problématique

Avant d'aborder la régulation des sectes en France, il est nécessaire de replacer le débat français dans une perspective plus large. En effet, l'analyse ne saurait se faire sans tenir compte du cadre historique et sociopolitique des sociétés dans lesquels ces mouvements évoluent. Cette mise en contexte éclaire les questionnements théoriques ainsi que les objectifs des politiques françaises mises en place. Elle nous permettra également de démontrer que, d'une part, les inquiétudes suscitées par les sectes ne concernent pas uniquement la France mais affectent aussi d'autres pays et qu'elles ont donné lieu à l'adoption par le Conseil de l'Europe de plusieurs rapports sur le sujet. D'autre part, c'est dans ce sentiment d'inquiétude généralisée que se situe l'action des pouvoirs publics français. La France ne fut cependant pas le premier pays à être en pointe dans la lutte contre les sectes. Selon Luca (2004), le point de départ de la vigilance apportée aux sectes en Europe fut le rapport américain Fraser, ce qui contredit l'opinion courante selon laquelle les États-Unis sont plus tolérants envers les nouveaux mouvements religieux que les pays européens. Mais le rapport va lentement s'inverser. La problématique relative aux sectes s'est développée par étapes successives et s'est étoffée progressivement à la suite d'événements tragiques ou violents, qui ont forgé dans l'opinion publique et les médias la perception d'un lien entre la violence commise et les structures de ce type de groupes. Nous les rappellerons ici brièvement [1].

[37] Depuis la fin des années soixante, les sectes sont apparues sur la scène sociale des pays occidentaux modifiant le paysage socio-religieux. Les changements de croyances et de mode de vie de leurs membres, parfois très rapides, suscitèrent des inquiétudes. Des ouvrages commencèrent également à circuler exposant les conditionnements psychiques auxquelles ils auraient été exposés au sein de ces groupes et qui viciaient leur consentement (Campos, 2004). À l'époque, il était question de lavage de cerveau [2]. Ce concept évolua au fil des années mais il demeurera au coeur des débats sur les sectes comme le démontrent les discussions sur la première proposition de loi française créant le délit de manipulations mentales. Les États occidentaux se montrèrent préoccupés par ces faits mais les appréhensions révélées au cours de la décennie écoulée trouvèrent un écho encore plus fort avec le suicide collectif du Temple du Peuple, au Guyana, en 1978. Ce drame marque un tournant dans la prise de conscience, au niveau international, des dangers que présenteraient certaines sectes.

Les critiques exprimées par les associations luttant contre les sectes (en France, l'UNADFI et le Centre Roger-Ikor), les témoignages d'anciens adeptes, l'émergence d'un contentieux judiciaire qui montrait une percée significative de ces mouvements sur la scène sociale (Morand et Séguy, 1985) ainsi que les craintes de l'opinion publique envers un phénomène qui lui paraissait inquiétant ne pouvaient laisser les autorités étatiques sans réaction Le problème va donc, en quelque sorte, s'institutionnaliser avec « l'entrée de l'État » (Mayer, 2001 a) et par la mise en place, dans les années quatre-vingt, de programmes d'information destinés au public. Les premiers rapports officiels et recommandations du Conseil de l'Europe datent de cette période (Résolution sur l'Église de l'Unification [19821, rapport Cottrell [1984] ; rapport Hunt [19851). Les rapports européens sont centrés sur le problème des risques que ces groupes peuvent faire courir aux individus et aux États et sur l'éventuelle adaptation de la législation au contentieux particulier des sectes, questions qui demeureront au centre de cette problématique. C'est dans cette ligne que se situe un des premiers rapports français, le rapport Vivien (1985) [3]. Ces questionnements se poseront avec plus d'acuité lors de la décennie suivante. En effet, à partir des années 1990, la multiplication [38] d'actes violents ou auto-destructeurs (la confrontation entre les Davidiens et le FBI à Waco, la tragédie de l'Ordre du Temple Solaire, le suicide collectif des membres du groupe Heaven's Gate ou encore l'attentat commis par Aum) allait donner une autre dimension au « problème » et le faire basculer dans le champ de la sécurité publique (Mayer, 2001a) avec notamment la prise en charge du problème par les agences gouvernementales de sécurité. Ce sont les drames de l'Ordre du Temple Solaire (OTS) qui seront à l'origine de la publication du rapport Gest-Guyard (1996).

Le phénomène des sectes a évolué et a pris actuellement une tournure différente de la dimension qu'il occupait dans les années soixante-dix. Le débat s'est déplacé en glissant dans le champ de la sécurité intérieure des États sans que pour autant les premières préoccupations aient été abandonnées. Il y eut ainsi un élargissement du spectre des inquiétudes concernant ces groupes. Après avoir porté sur la santé physique et mentale de ces individus et sur leur libre-arbitre, les questions ont touché la sécurité publique et les risques de dérive collective de ces mouvements (Campos 2000 et 2004 ; Bromley & Melton, 2002), voire le terrorisme (Mayer, 2001b). L'attentat commis par Aum constitua un tournant dans cette nouvelle perception, dans la mesure où c'était la première fois qu'un groupe religieux socialement marginal employait sur une si grande échelle un agent chimique et visait autant de personnes. Au niveau européen, on peut encore relever la Recommandation de 1999 sur les dangers présentés par les sectes. Mais, audelà du contexte d'origine et des apports doctrinaux successifs, la régulation du religieux emprunte dans chaque pays des voies qui lui sont propres.


La régulation du religieux en France

Depuis le début du XXe siècle, un mouvement de sécularisation a entraîné une perte progressive d'emprise des Églises sur l'État et la société. Parallèlement, on a pu assister à un foisonnement des courants religieux ou spirituels et au développement d'une certaine forme de syncrétisme. Le pluralisme est devenu un trait marquant de la religion dans la modernité (Berger & Luckmann, 1967). Les autorités gouvernementales sont ainsi confrontées à des demandes diverses et émanant de groupes nouveaux, y compris des groupes radicaux dont les modes de fonctionnement ou les structures peuvent apparaître comme peu libéraux, voire même autoritaires. Les réponses apportées par les pouvoirs publics français s'effectuent au travers du prisme de la notion de laïcité. Or, pour les observateurs étrangers, la [39] laïcité française est souvent vue comme une laïcité de combat et de méfiance envers la religion (Millot, 2002). Pour comprendre ce concept, il faut remonter à sa source.

Le système mis en place avec la loi de 1905 sur la séparation de l'État et de l'Église fut, au départ, conçu pour contenir l'influence de l'Église catholique dans les limites de la sphère privée mais aussi pour prévenir toute emprise excessive de sa part sur les individus et surtout sur la jeunesse. Cependant le dispositif institutionnel élaboré fit aussi, tacitement, du mode d'organisation du catholicisme le modèle confessionnel de référence de la forme acceptable du religieux dont l'État veut assurer l'expression tout en contrôlant les possibles débordements (Hervieu-Léger, 2001). Il instaure en quelque sorte un « régime implicite des cultes » (Willaime, 1996) sur lequel les différentes mouvances religieuses vont se calquer [4]. C'est au regard de ce modèle patiemment construit et de la protection accordée à la liberté de pensée qu'il faut replacer le débat français sur les sectes. Certaines des craintes que celles-ci cristallisent sont au cœur des préoccupations sur les frontières entre la sphère privée et publique et sur l'autonomie de la personne. Ainsi, les sectes semblent remettre en cause « l'assignation par la laïcisation de la religion dans l'espace public » (Hourmant, 1999). La plupart d'entre elles seraient « intégralistes » et refuseraient de séparer les différents domaines d'activité (Cohen & Champion, 1999) - santé, éducation, sphère publique, sphère privée - ou elles peuvent chercher à « défendre leur identité collective en la marquant de symboles religieux évidents et en l'inscrivant dans des espaces publics »(Pace, 1999). En outre, le modèle religieux dominant est devenu moins contraignant et s'est davantage tourné vers une primauté de l'expérience religieuse personnelle, ce qui rend aussi le décalage avec les groupes radicaux plus visible [5]. On a retrouvé de semblables interrogations et enjeux lors de la discussion sur le port du voile et des signes religieux en France [6].

[40] Une personne peut librement adhérer à un groupe religieux « sectaire », ou radical, et accepter que certaines de ses libertés soient réduites. Elle peut aussi estimer que l'unité du groupe auquel elle appartient soit pour elle d'un intérêt supérieur à celle représentée par la société. L'État peut-il, en conséquence, établir des hiérarchies entre le droit de conscience et la liberté de religion ? La frontière est difficile à tracer. La réponse à cette question dépend, en fait, de la philosophie plus ou moins libérale, étendue ou réduite, des États. Elle peut aussi varier, au sein d'un même pays, selon les époques et les événements, dans un sens de l'assouplissement ou du durcissement (Campos & Vaillancourt, 2006). Selon Milot (2002), si la jurisprudence canadienne, mais aussi celle des États-Unis, ne paraît pas établir de hiérarchie entre ces deux types de liberté, liberté de conscience et liberté de religion, l'État français semble marquer une position plus volontariste en interprétant son rôle de protection comme un devoir de surveillance en regard de la liberté de pensée de ses membres. Affirmation qui rejoint les propos de Hervieu-Léger (2001, p. 22), pour qui la perspective laïque française a été, durant toute son histoire, partagée entre l'objectif démocratique de garantir la liberté de croyances, à condition que celle-ci reste contenue dans la sphère privée, et un désir, plus ou moins avoué, de détacher les consciences de l'influence de représentations pernicieuses contraires à la raison et à l'autonomie. Les menaces que feraient peser les sectes sur la liberté de pensée des adeptes sont notamment perceptibles dans la controverse sur le concept de manipulations mentales. Les discussions sur les sectes et sur le port de signes religieux dévoilent ainsi le coeur du mécanisme de régulation du religieux mis en place en France. Elles révèlent également ce qui constitue le ferment de l'identité française à travers la construction de la notion de la laïcité. Pour Luca (2004, p. 70) d'ailleurs, si la lutte contre les sectes prend une telle ampleur en France, c'est que les inquiétudes soulevées par ce type de groupes (non-respect de la liberté de pensée, peur de l'infiltration, le fait qu'on puisse payer, souvent très cher, des prestations spirituelles), seraient vues comme menaçant fortement l'identité française et la base de ce qui constitue la laïcité [7].

[41]


Le dispositif actuel

C'est dans ce cadre historique, politique et philosophique que se situent les politiques françaises de lutte contre les sectes. Cependant les actions entreprises ne peuvent se faire que dans le respect des principes constitutionnels, qui en limite et conditionne l'élaboration et l'application. Elles sont aussi façonnées par la spécificité du contentieux avec les sectes qui explique les mesures prises dans le sens d'une meilleure application du droit. Ces différents éléments concourent pour donner sa particularité à la position française. Avant d'en examiner le détail, nous nous pencherons sur la synthèse de l'action des pouvoirs publics.

Synthèse de l'action des pouvoirs publics

On peut synthétiser l'action des pouvoirs publics en France autour de trois points principaux. D'une part, c'est une action qui est principalement d'origine parlementaire. D'autre part, il s'agit d'une action relativement récente. En effet, comme nous l'avons vu, les premiers rapports sur le sujet voient le jour au début des années quatre-vingt, mais c'est à partir du milieu des années quatre-vingt-dix que se mettent en place la plus grande partie des politiques relatives aux sectes. En effet, jusqu'en 1995, les actions menées en France n'étaient pas conçues pour servir de base à une lutte plus large contre les groupes sectaires. Ce sont, en fait, les deux drames de POTS, en 1994 et 1995, qui seront à l'origine de l'ouverture d'une commission d'enquête sur les sectes. Ces affaires avaient créé une vive émotion dans l'opinion publique et le rapport Gest-Guyard (1996) entendait y répondre d'une façon concrète. Alors que le rapport Vivien (1985), en dépit d'une médiatisation certaine, n'avait pas été pas suivi d'effet légal, la publication du rapport Gest-Guyard (1996) entraînera la création d'Observatoires ministériels de surveillance et la mise en place progressive d'une politique des sectes. Le rapport innove sur certains points par rapport à son prédécesseur, notamment par l'élaboration d'un ensemble de critères de dangerosité [8] à [42] partir desquels il dresse une liste de 172 groupes sectaires potentiellement dangereux, qui partageraient plusieurs de ces critères. Très commentée et critiquée (Introvigne & Gordon Melton, 1996 [9]), cette liste se présentait comme un instrument d'alerte destiné à informer et avertir le public (MIVILUDES, 2003), et marquait ainsi un premier geste dans la gestion d'une meilleure prévention des risques « sectaires ». Le rapport recommandait, par ailleurs, un effort de communication envers les magistrats. Cependant, en dépit de ces avancées, le rapport demeure encore en deçà de ce que réclamaient certaines associations de lutte contre les sectes. Comme le rapport Vivien avant lui, il rejetait toute idée d'une législation spécifique sur les sectes et se positionnait contre l'éventualité de l'adoption d'une loi sur les manipulations mentales.

Enfin, dernier point sur l'action des pouvoirs publics, on peut relever que c'est une question qui fait l'objet, en France, d'un grand consensus politique et échappe au clivage droite-gauche. Elle rencontre aussi l'assentiment de la majorité de la population. Il y a peu de contestation concernant les objectifs et le suivi des politiques élaborées même si on peut noter parfois des replis ou des précisions (par exemple, l'intitulé de la MIVILUDES par rapport à celui de la MILS). La commission d'enquête parlementaire ayant abouti au dépôt du rapport Les sectes en France était dirigée par M.M. Alain Gest (Démocratie Libérale) et Jacques Guyard (Parti Socialiste). M. Brard (Parti Communiste) fut le rapporteur du rapport L'argent des sectes (1999). De la même façon, la loi du 12 juin 2001 fut, au départ, une proposition de loi présentée par le sénateur UDF M. Nicolas About et par la député socialiste, Mme Catherine Picard [10].

Entre prévention et gestion de la diversité religieuse
l'action des pouvoirs publics

La mise en place progressive d'une politique sur les sectes fut souvent conditionnée par des événements extérieurs, on l'a vu (le Temple du Peuple, l'OTS), qui entraînèrent des réflexions sur la notion de « dérive sectaire ». [43] Mais elle est également façonnée par les principes constitutionnels qui régissent le droit français. C'est dans le cadre de ces limites constitutionnelles que certaines dispositions législatives ont été prises à l'égard des sectes.

La liberté religieuse est un droit fondamental dans toutes les sociétés occidentales et les mouvements religieux ne sauraient être poursuivis en raison de leurs croyances. Les particuliers ne peuvent non plus être poursuivis pour leur appartenance à des groupes religieux, même socialement contestes. Ce fait est bien établi et résulte tant des dispositions législatives nationales que de certaines conventions internationales comme la Convention Européenne des Droits de l'Homme. Cette liberté a cependant des limites qui sont constituées, entre autres, par les atteintes commises contre autrui, le respect de l'ordre public et de la sécurité des États. Par ailleurs, la religion est un domaine ou l'État laïque moderne est considéré comme incompétent, ce qui induit une conséquence capitale pour notre sujet. En effet, l'incompétence de l'État le conduit à ne pas distinguer les « bonnes » des « mauvaises » religions et les religions des « sectes ». Cette incompétence est délibérément voulue ; ce principe étant considéré traditionnellement comme la meilleure garantie donnée par l'État laïque de son impartialité. Les autorités ne s'en remettent pas pour autant à la qualification que se donnent les croyants ; celle-ci ne pouvant s'imposer juridiquement ni à elles ni à la société [11]. En outre, il est établi depuis longtemps par la loi et la jurisprudence qu'un commandement de Dieu ne saurait valoir autorisation d'agir ou excuse légale [12].

Le corollaire important qui découle de cet ensemble de principes est que l'État, par l'intermédiaire du droit, ne peut poursuivre que des agissements et des comportements contraires aux lois établies, sanctionnés par le droit et le juge ; ce dernier ne pouvant former sa décision que sur des faits précis constitutifs de crimes et délits. En effet, dès lors que l'État, laïque, proclame sa neutralité à l'égard des convictions religieuses, il ne peut plus se prononcer sur le motif des convictions mais uniquement en fonction des agissements ou des actes des individus et des groupes quel que soit leur qualification [44] (Rolland, 2003). L'État da donc pas a se demander si les sectes sont religieuses ou non, ni à analyser le contenu de leurs convictions pour les qualifier. Il ne peut les considérer objectivement que comme des convictions et il da à les connaître que sous cet aspect.

De fait, il n'y a pas, au niveau juridique, de définition unanimement admise ni de la secte ni de la religion. Dans le Code pénal français, on ne trouve pas non plus de définition de ces termes et les différentes missions dont pas choisi de les définir plus clairement. La MIVILUDES (2003) en est bien consciente lorsqu'elle relève : « À défaut de définition juridique de ce qu'est une secte, la loi réprime tous les agissements qui sont attentatoires aux droits de l'Homme, aux libertés fondamentales, ou qui constituent une menace à l'ordre publique. » Ainsi, autant par conviction et respect envers les grands principes du droit que par impuissance, les pouvoirs publics français se sont donc résolus à traiter le problème des sectes par l'application du droit commun, sans définir la notion de secte ou de « dérive sectaire ».

Effectivité et efficacité du droit

Les questions sur l'effectivité du droit, et plus particulièrement du droit pénal, ainsi que sur son efficacité, ont rythmé les débats sur les sectes depuis des années, et ce aussi bien au niveau des instances européennes que françaises (Campos, 2001). Le droit est-il, d'une part, suffisant pour couvrir l'ensemble des faits reprochés aux sectes, et d'autre part, parfaitement adapte, pour prévenir et réprimer les agissements illégaux de certains de ces groupes, ou faut-il recourir à de nouvelles incriminations ? C'est notamment parce que les poursuites contre les sectes semblaient montrer une relative impuissance (faible taux de plaintes et du nombre de poursuites ayant abouti à une décision judiciaire) que l'idée d'une nouvelle loi a continué à faire son chemin. Pourtant, l'arsenal répressif paraît en lui-même suffisant puisqu'il vise tant les atteintes à la vie et à l'intégrité physique, qu'aux libertés, à l'honneur ou aux biens. Différentes raisons peuvent expliquer que des actes délictueux commis par des sectes apparaissent comme peu sanctionnés par les tribunaux. Certaines difficultés sont relatives à la détermination et à la qualification juridique d'un fait et aux difficultés à en administrer la preuve [13]. D'autres [45] difficultés sont d'ordre général et tiennent tout à la fois à l'attitude des victimes, qui souvent n'osent pas porter plainte, ou du coût de la justice. Enfin, les dernières, parmi les plus délicates, tiennent, comme nous l'avons évoqué, au problème du consentement de l'adepte.

En conséquence, l'action des pouvoirs publics va tenter de répondre à chacune de ces critiques, en oeuvrant en amont et en aval du processus judiciaire. Un triple mouvement anime les politiques élaborées en France sur les sectes qui visent, d'une part, a renforcer les dispositions existantes, d'autre part, à garantir une meilleure application du droit, et, enfin, à assurer une plus grande efficacité du réseau administratif La mise en oeuvre de ce dispositif révèle cependant incertitudes et hésitations, comme l'illustre le débat sur l'adoption de la loi du 12 juin 2001. En effet, si celle-ci semble être une loi spécifique contre les sectes, introduisant de nouvelles incriminations, elle est en fait conçue comme un renforcement du droit commun sur certains points sensibles (Rolland, 2003).

Un travail d'information et de sensibilisation à destination des magistrats et des ministères concernés a été introduit pour permettre notamment une meilleure application du droit. C'est en ce sens qu'il faut interpréter les deux circulaires des Ministres de la justice français de 1996 et de 1998 adressées aux magistrats du siège et du Parquet afin d'améliorer leur compréhension du phénomène sectaire et leur demander d'être plus vigilants [14]. D'autre part, une meilleure adéquation du droit au contentieux particulier des sectes s'est traduite par l'adoption de plusieurs textes dont la loi du 18 décembre 1998 et le décret du 9 mars 1999, qui prévoient un contrôle renforce sur les enfants instruits dans des établissements ou des familles soupçonnés d'être liés à des sectes.

Dans le même ordre d'idée, une meilleure efficacité est attendue du réseau administratif national, ce qui entraîna la création, par décret du 9 mai 1996, de l'Observatoire Interministériel sur les Sectes. Il laissa place, en 1998, à la Mission Interministérielle de Lutte contre les Sectes WILS). Si l'Observatoire était surtout destiné à « observer » le phénomène sectaire et à [46] mieux le comprendre, la MILS, du fait même de sa dénomination, montrait qu'elle entendait jouer un rôle plus actif dans la lutte contre les sectes, et rendre plus opérationnelle sur le terrain l'action des pouvoirs publics. La création de la MILS fut reçue assez fraîchement par un grand nombre d'observateurs dans la mesure ou elle prônait une lutte contre une catégorie particulière de mouvements, nommément désignés à défaut d'être clairement définis. Elle fut cependant a son tour récemment remplacée par la MIVILUDES (Mission Interministérielle de Vigilance et de Lutte contre les Dérives Sectaires), créée par un décret du 22 novembre 2002. L'intitulé de la nouvelle mission montre une évolution dans les termes choisis et sans doute une volonté d'apaisement envers les opposants aux politiques françaises. Il n'y est plus question de « sectes » mais de dérives sectaires. La mission a pour fonction principale de signaler aux procureurs de la République et aux services centraux des ministères tous les agissements qui lui paraissent appeler une initiative de leur part [15]. Les actions de la Mission prennent deux directions. £une s'oriente vers la prévention par l'information du public mais aussi l'échange d'informations et la coordination de différents services chargés de ces phénomènes. L'autre se concentre sur le terrain avec l'identification de situations et/ou des individus à risque fondée sur des critères de dangerosité [16].

Enfin, l'aide aux victimes est aussi prise en compte. On peut noter un effort consenti à leur endroit pour les pousser à porter plainte plus fréquemment. Ainsi, le nouveau président de la MIVILUDES, M. J.-M. Roulet, a-t-il annoncé, lors de sa prise de fonction, son intention d'aider les victimes de sectes à dénoncer ce qu'elles ont subi. « Nous avons beaucoup de victimes, encore faut-il qu'elles veuillent bien dénoncer les actes subis », a-t-il notamment déclaré [17]. La loi du 12 juin 2001 a également prévu d'ouvrir aux associations de lutte contre les mouvements sectaires le droit de se porter partie civile.

Manipulation mentale ou sujétion psychologique ?

Les raisons évoquées ci-dessus concernant le faible taux de décisions judiciaires et de plaintes ont également poussé le législateur à cibler d'une [47] manière plus spécifique les infractions commises par des mouvements sectaires. Pour y parvenir, la solution s'était portée, dans un premier temps, sur la création d'une nouvelle infraction. Cette initiative pouvait néanmoins sembler surabondante compte tenu du large éventail proposé par l'arsenal répressif En outre, l'idée d'adopter une toi spécifique à l'encontre des sectes avait été repoussée aussi bien par les Rapports Vivien et Gest-Guyard que par l'Observatoire interministériel. Mais comme le montrent les débats sur le vote de la loi du 12 juin 2001 contre les mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme, le problème du consentement donné apparemment librement par l'adepte continuait d'apparaître comme un frein à la mise en oeuvre des dispositions existantes [18]. Selon une vue assez générale chez les parlementaires, la volonté et la raison de l'adepte sont réduites par les conditionnements psychologiques auxquels il est soumis.

Aussi, le 31 mai 2000, l'Assemblée nationale adopta une loi créant le délit de manipulation mentale, revendication ancienne des associations dites « anti-sectes ». L'origine du texte se trouve dans une proposition de toi du sénateur M. About, qui souhaitait que la loi de 1936, sur les milices privées et les groupes de combat, puisse s'appliquer aux sectes. Mais l'Assemblée nationale adopta, le 22 juin 2000, un amendement déposé par Mine Picard, député, introduisant le délit de manipulation mentale. Innovation retentissante et médiatisée, cette nouvelle infraction attira rapidement critiques et réserves, la notion de manipulation mentale étant difficile a cerner, aussi bien sur le terrain juridique que psychologique, et a fortiori à mettre en application. La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), notamment, rendit un avis le 21 septembre 2000 dans lequel elle jugeait que la création d'un délit de manipulation mentale n'était « pas opportune » et recommandait un élargissement des délits existants. La proposition de loi About-Picard s'engagea dans cette voie avec la nouvelle mouture de la loi qui fut adoptée le 12 juin 2001. Les termes de « manipulation mentale » furent supprimés et la loi élargit le délit d'abus frauduleux de faiblesse à la situation de personnes « en état de sujétion psychologique ou physique résultant de pressions graves et réitérées ou de techniques propres à altérer le jugement », sans que le reste du texte ne change fondamentalement. L'idée principale, celle dune perte de contrôle et d'autonomie, [48] demeure [19]. La loi du 12 juin 2001 relève donc du droit commun, dont elle aménage et renforce les dispositions existantes, la création d'un nouveau délit, celui de manipulation mentale, ayant été abandonné.

Le principe traditionnel est que les personnes majeures sont laissées à leur propre responsabilité en vertu du principe de la liberté individuelle. Mais la loi porte son attention sur des catégories de personnes susceptibles d'être protégées : les personnes en état de vulnérabilité particulière, les mineurs et les personnes en état de sujétion psychologique. Le législateur a renoncé à la notion de manipulation mentale trop difficile à définir et incertaine au regard du respect de la liberté individuelle et de croyances. Mais la notion de sujétion psychologique n'a pas non plus toute l'objectivité et la précision qui sont particulièrement nécessaires lorsqu'on touche à la liberté de conscience. La protection préventive ne peut jouer que de façon exceptionnelle et pour des catégories précises d'individus se trouvant dans une situation de faiblesse telle que l'État puisse en pratique suspendre l'autonomie de leur volonté. Or, si la faiblesse physique est assez facile à cerner, la faiblesse morale se révèle plus délicate à saisir. Une première décision fut rendue en application de cette loi, celle du tribunal correctionnel de Nantes qui, en date du 25 novembre 2004, a condamne à 3 ans de prison avec sursis le dirigeant du groupe Néo-Phare. Mais il faudra attendre des décisions ultérieures pour saisir le sens exact donné a la notion de sujétion psychologique et d'état de faiblesse par les magistrats. L'embarras du législateur est cependant visible dans son souci de poursuivre des mouvements spécifiques qui sont, dans le même temps, difficiles à définir et qui n'apparaissent jamais directement dans le corps du texte même si la loi est expressément dirigée contre eux, du moins ceux qui portent atteinte aux droits de l'homme. Les sectes sont ainsi et, d'une façon paradoxale, à la fois présentes et absentes de la loi du 12 juin 2001, qui demeure d'application générale.

Les politiques mises en place depuis une dizaine d'années environ, en France, ont tente de répondre aux diverses critiques qui avaient été soulevées [49] sur la mauvaise application de la loi, la faiblesse des poursuites engagées et sur les dangers que les sectes font courir a la liberté de pensée des adeptes. Mais si la volonté répressive des pouvoirs publics est manifeste, elle est cependant fortement encadrée par le droit des libertés, qui en limite l'exercice. Enfin, l'embarras des pouvoirs publics français se révèle dans une appréhension globale mais floue du phénomène sectaire, saisi surtout au travers de la crainte diffuse que les manipulations mentales font peser sur la liberté de conscience. Ces questionnements, passés et présents, montrent également la distance qui peut exister entre la théorie et la pratique, mais également entre la perception qu'une infraction a été commise et sa traduction concrète sur le terrain juridique, régi par les règles strictes de la procédure pénale. En outre, le droit pénal n'est qu'un moyen parmi d'autres de régulation sociale et il ne peut régler seul tous les problèmes qui se posent, surtout lorsqu'ils correspondent à une réalité sociale complexe (Campos, 2001). En conséquence, il n'est pas certain que ce dispositif ambitieux, qui traite le problème en aval et en amont du processus judiciaire, apporte dans l'immédiat des résultats spectaculaires ou fournis. Si la constitution d'une jurisprudence relative à la loi de 2001 est attendue, elle peut cependant demeurer en deçà des espérances placées par certains dans son application [20]. Les moyens mis en oeuvre sont très récents et il faudra également patienter quelques années avant de pouvoir évaluer leur efficacité et leur pertinence.

D'une façon plus large, il existe plusieurs types d'organisation possibles des rapports de l'État avec les religions ou les convictions organisées. Les valeurs du modèle français, et notamment la laïcité, sont questionnées et remises en cause depuis quelques années (Wievorka, 1996 ; Baubérot et Milot, 2002). La Commission Stasi a elle-même indique que la laïcité n'a jamais été une construction dogmatique et, que dans les moments importants, elle était capable de souplesse et de pragmatisme [21]. Des auteurs ont ainsi posé la question de son renouvellement à travers l'introduction de principes issus d'autres traditions politiques ou philosophiques (type de régulation britannique, américaine ou canadienne notamment) qui permettraient, entre autres, d'éviter aux groupes minoritaires la tyrannie du conformisme social [50] et du « religieusement correct ». Cependant, si une certaine adaptation et davantage de souplesse semblent nécessaires au vu de l'éclatement du champ religieux actuel et des nouvelles formes prises par la pratique religieuse ou spirituelle, on peut s'interroger sur les raisons qui sous-tendent cette volonté de « renouveler » la spécificité française. Cette voie minimise souvent le poids des traditions propres à la France et réduit le rôle de la construction historique dans l'émergence et la consolidation d'un concept au sein d'un pays. La relation à l'État, la place de la loi sont assez caractéristiques du modèle français, et ce rapport et cette relation prennent des sens sensiblement différents selon les pays. Or, l'imposition &un autre modèle, puisant dans des racines distinctes, n'est pas forcément le gage d'une meilleure adaptation du système français à la mondialisation en cours. Il est donc peu probable qu'elle puisse un jour s'imposer totalement en France tant les traditions philosophiques et politiques y sont divergentes. On peut aussi émettre des réserves au moment où certains exemples étrangers, parfois les plus cités, présentent également des signes de tension.

Élisabeth CAMPOS

Chercheure à l'Institut Philippe-Pinel de Montréal
Université de Montréal


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[1]    Pour les mêmes raisons, nous n'aborderons pas la controverse sur le terme de « secte ». Nous nous y référons comme « un fait social à analyser » (Cohen & Champion, 1999, p. 17) en assumant la connotation péjorative qui peut être attachée à ce mot.

[2]    Sur le sujet, voir Bromley, & Richardson (1983) ; Singer (1990) ; Morin (1993).

[3]    Il y avait eu auparavant le Rapport Ravail, demeuré inédit.

[4]    Voir notamment la création de la Fédération protestante de France, la création du Consistoire juif, en 1808, puis l'organisation du Conseil français culte musulman en 2003. Pour Willaime (1996), la France est ainsi « un pays laïc de culture catholique ».

[5]    Ce changement de perspective se reflète aussi dans la jurisprudence. Voir Campos (2001, p. 180-181).

[6]    Celle-ci aboutit à la loi ne 2004-228 du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics.

[7]    Baubérot, dans un esprit critique, avait lui aussi constaté dès 1999 (p. 314) : « Avec ce que l'on appelle "l'intégrisme" et l'intégration de l'islam en France, le problème des "sectes" constitue sans doute la plus rude épreuve qu'affronte aujourd'hui la laïcité française. »

[8]    Les dix critères de dangerosité retenus sont les suivants : la déstabilisation mentale le caractère exorbitant des exigences financières ; la rupture induite avec l'environnement d'origine ; l'atteinte à l'intégrité physique ; l'embrigadement des enfants ; le discours plus ou moins anti-social ; les troubles à l'ordre public ; l'importance des démêlés judiciaires ; le détournement des circuits économiques traditionnels ; les tentatives d'infiltration des pouvoirs publics.

[9]    Pour une réponse critique, cf. Schlegel (1997).

[10] De la même façon, c'est le Premier Ministre, M. Alain Juppé (RPR) qui a installé l'Observatoire interministériel sur les sectes et c'est le Premier Ministre suivant, M. Lionel Jospin (Parti Socialiste) qui mit en place la mils (Mission d'Information et de Lutte contre les Sectes).

[11]   Voir en ce sens les conclusions Arighi de Casanova sur l'avis du Conseil d'État du 24 octobre 1997, Association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de Rion, RFDA, janvier-février 1998, p. 68.

[12] Cf. l'arrêt classique de la Cour d'appel de Nîmes, 10 juin 1967, Dalloz 1969, p. 369, commentaire du Doyen jean Carbonnier.

[13] Par exemple, en matière de paiement des cotisations sociales des adeptes se pose le problème de leur bénévolat. Compte tenu des critiques qui ont été faites au sujet des détournements financiers que commettraient certains groupes sectaires, une Commission d'enquête parlementaire fut constituée et rendit un rapport sur le sujet, L'argent et les sectes (1999).

[14] Les circulaires ministérielles n'ont : pas de valeur juridique mais indicative. Elles précisent aussi l'orientation d'un ministère ou du gouvernement.

[15] La MIVLUDES relève dans son rapport de 2003 (p. 7) : « En amont d'une réponse juridictionnelle respectueuse de la loi, les pouvoirs publics - et c'est peut-être là la spécificité française - ont une conception préventive de la dérive sectaire. »

[16] Pour permettre le développement de son action et l'identification des situations à risque, la MIVILUDES s'appuie notamment sur les « cellules de vigilance », créées en 1999.

[17] Paris, 29 sept 2005, AFP.

[18] Pour une analyse du débat législatif de la loi du 12 juin 2001, cf. Rolland (2003).

[19] Selon M. About : « C'est l'abus frauduleux d'état de faiblesse qui est réprimé, ce n'est pas l'état de sujétion. Celui-ci West pas un délit. Il n'est qu'une des conditions favorisant l'abus frauduleux. »

[20] M. Rouler, président de la MIVILUDES, en est conscient puisqu'il espère avant tout « avancer ne serait-ce que de cinq jugements » durant sa présidence ; op. cit.

[21] Rapport de la Commission de réflexion sur l'application du principe de laïcité dans le cadre de la République.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le jeudi 4 novembre 2010 7:30
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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